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Coronaires

Publié le 14 mai 2015Lecture 4 min

La revascularisation du patient pluritronculaire lors du STEMI : elle doit être complète !

P. COMMEAU, Département de cardiologie et radiologie vasculaire interventionnelle, Polyclinique Les Fleurs, Ollioules (83)

Le traitement de la lésion coronaire coupable d’un syndrome coronaire aigu avec sus-décalage du segment ST (STEMI) est primordial afin de limiter la nécrose myocardique en constitution et de fait réduire la mortalité. L’angioplastie primaire est le traitement de choix unanimement reconnu pour aboutir le plus efficacement à la restauration du flux sanguin dans la zone cible.

Le groupe des patients présentant un STEMI et porteurs d’une atteinte pluritronculaire ont une mortalité plus élevée que ceux porteurs d’une atteinte monotronculaire(1). L’atteinte pluritronculaire est le facteur prédictif de mortalité à un an le plus puissant(1) (figures 1 et 2). Figure 1. Mortalité à 1 an. D’après Sorajja P et al. Eur Heart J 2007. Figure 2. Variables prédictives à 1 an. D’après Sorajja P et al. Eur Heart J 2007. Bien que l’on puisse penser que la diffusion de l’atteinte coronaire a un rôle majeur dans le pronostic du STEMI, les recommandations tant européennes (2014) que nord-américaines (2013) supportent la seule revascularisation de la lésion coupable pendant la phase aiguë. La revascularisation des lésions non coupables en phase aiguë est considérée classe III Harm, B pour l’ACC/AHA et classe IIb, B pour l’ESC/EATCS. Néanmoins les progrès des techniques interventionnelles, de l’expérience des opérateurs et de la pharmacopée ont rendu l’angioplastie primaire sûre et efficace même dans des situations à haut risque. Les études randomisées prospectives visant à comparer les différentes modalités de revascularisation sont peu nombreuses et de petites cohortes. À l’inverse les études rétrospectives et les métaanalyses tirées de ces mêmes études concernent un nombre de patients bien plus important mais les biais sont nombreux à être liés au patient, à l’opérateur, aux protocoles locaux, au moment de la procédure dans la journée, etc. Il est admis que la revascularisation coronaire de ces patients peut se décliner de 4 façons : - revascularisation isolée de la lésion coupable (et traitement médical optimal pour les autres lésions) ; - revascularisation de l’ensemble des lésions pendant la procédure initiale ; - revascularisation de l’ensemble des lésions pendant l’hospitalisation ; - revascularisation des lésions non coupables différée de façon élective. Ces différentes modalités n’ont jamais été comparées au sein d’une même étude. La 1re étude randomisée avec un effectif acceptable a comparé 3 de ces modalités et a conclu que la revascularisation complète, soit simultanée, soit en plusieurs étapes, était supérieure en termes de morbi-mortalité à la revascularisation isolée de la lésion coupable(2) (figure 3). Figure 3. D’après Politi L et al. Heart 2010 ; 96 : 622-67. L’étude randomisée multicentrique PRAMI a enrôlé 465 patients multitronculaires avec STEMI et a comparé 2 modalités thérapeutiques, l’une dite « préventive » de la lésion cible et de toutes les lésions > 50 %, l’autre ne concernant que la lésion coupable sans geste complémentaire ultérieur(3). Le critère d’évaluation primaire était un critère composite associant décès de toutes causes, infarctus myocardique non fatal et angor réfractaire. La revascularisation complète réduisait de 65 % les événements avec une réduction du risque absolue de 14 % (HR : 0,35 ; IC95 % : 0,21 à 0,58 ; p < 0,001) (figure 4 et tableau). Cette étude a été très critiquée car présentant de nombreuses faiblesses : pas d’évaluation à distance des lésions non traitées, territoire de l’infarctus pris en charge initialement majoritairement de topographie inférieure, traitement médical optimal non contrôlé, échantillons de petite taille avec exclusion d’un nombre important de patients, arrêt prématuré de l’étude pour des raisons de sécurité… Figure 4. Étude PRAMI. Un an plus tard, lors de l’ESC 2014, une seconde étude randomisée du même type a été présentée. Il s’agit de l’étude CvLPRIT. Elle n’a pas encore été publiée. Elle compare 2 modes de prise en charge thérapeutique : un bras « revascularisation de l’artère cible » et un bras « revascularisation complète ». La différence essentielle par rapport à PRAMI est que les patients, une fois revascularisés, sont suivis de façon stricte avec réalisation de tests ischémiques réguliers permettant de compléter, si nécessaire, la revascularisation dans le groupe « revascularisation de l’artère cible » en sachant que l’analyse de l’étude est réalisée en « intention de traiter ». Les 2 groupes bénéficient d’un traitement médical optimal. À un an, on constate également une réduction significative de 55 % du critère composite associant mortalité totale, infarctus récurrent, insuffisance cardiaque et TLR (p < 0,009) (figure 5). Dans cette étude, 59 % des patients du groupe « revascularisation complète » ont bénéficié de la revascularisation en un temps, le reste des patients pendant l’hospitalisation. Malgré ces 2 études le scepticisme reste de mise. La publication de CvLPRIT est attendue, en sachant néanmoins que malgré la valeur de cette étude, elle concerne de petites cohortes. À la suite de la publication de PRAMI, plusieurs métaanalyses « poolant » études prospectives et rétrospectives sont parues et concluent de façon assez concordante, à la supériorité d’une revascularisation complète par rapport à la revascularisation isolée de l’artère coupable. Malgré tout cette supériorité se dessine plutôt pour une revascularisation complète pendant l’hospitalisation initiale et non pas lors de la procédure initiale, réservée à des cas particuliers souvent exclues des études (choc cardiogénique en particulier, ou association lésionnelle péjorative telle lésion coupable sur la coronaire droite et lésions sévères sur la coronaire gauche, IVA en particulier). Figure 5. CvLPRIT.  En pratique   Les arguments pour une revascularisation complète au moins pendant la même hospitalisation sont solides. Elle permet à ces patients d’éviter les épisodes de récurrence ischémique de tout type source d’une mortalité accrue. Le bon sens clinique couplé à l’expérience de l’opérateur doit permettre de différencier les patients pouvant tirer bénéfice d’un geste complet immédiat ou bien retardé. Cette optimisation de la prise en charge aura également des conséquences, économiques entre autres (réduction de la durée de l’hospitalisation, réduction du nombre de réhospitalisations, réduction du nombre de ponctions, assurance d’une compliance à la thérapeutique, etc.).

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