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Congrès et symposiums

Publié le 19 oct 2010Lecture 4 min

SHIFT : des résultats spectaculaires

E. MILLARA

ESC

L’événement majeur du congrès 2010 de l’ESC a sans conteste été la présentation des résultats d’un nouvel essai thérapeutique de morbi-mortalité dans l’insuffisance cardiaque. L’étude SHIFT (Systolic Heart Failure Treatment with the If Inhibitor Ivabradine Trial) est le plus vaste essai randomisé jamais réalisé dans l’insuffisance cardiaque. Ses résultats confirment qu’une fréquence cardiaque élevée est un facteur de risque chez l’insuffisant cardiaque, et marquent une nouvelle étape dans le prise en charge de cette pathologie en mettant en évidence une réduction de la morbi-mortalité par l’ivabradine.

Des critères « durs » chez des patients déjà bien traités SHIFT est un essai international randomisé, ayant évalué la survenue d’événements cible chez 6 505 patients insuffisants cardiaques symptomatiques (classes NYHA II, III ou IV), stables, en rythme sinusal et présentant une FC ≥ 70 bpm ainsi qu’une FEVG ≤ 35 %. L’ivabradine, inhibiteur sélectif des canaux If, est la première molécule disponible exerçant une réduction exclusive de la fréquence cardiaque, sans aucune autre action cardiovasculaire. Elle était dans cette étude ajoutée à un traitement de l’insuffisance cardiaque optimisé selon les recommandations en vigueur. La moitié des patients sous bêtabloquant conservent une FC de repos ≥ 70 bpm Les traitements de l’insuffisance cardiaque étaient globalement très satisfaisants. Seuls 10 % des patients ne recevaient pas de bêtabloquant, en raison de contre-indications. Parmi les patients traités par bêtabloquant, 26 % seulement atteignaient la dose cible, et 55,2 % au moins la moitié de la dose cible. Les motifs de non-titration des bêtabloquants étaient principalement l’hypotension (44,7 %) et la fatigue (31,9 %). Malgré la large prescription des bêtabloquants, la FC de repos moyenne à l’inclusion était d’environ 80 bpm. Ce constat rejoint des observations antérieures issues d’essais randomisés et de registres : la FC reste supérieure à 70 bpm chez la moitié des insuffisants cardiaques, bien que des bêtabloquants soient prescrits à plus des deux tiers d’entre eux. Une augmentation du risque directement lié à la fréquence cardiaque L’incidence du critère primaire combiné dans le bras placebo de l’étude est fortement corrélée au niveau de FC à l’inclusion. Les patients appartenant à la tranche de FC la plus élevée présentent un risque d’événement plus de deux fois supérieur à celui des patients de la tranche la plus basse. Globalement, il apparaît qu’une élévation de FC de 5 bpm majore le risque de 16 %. Mortalité et hospitalisations liées à l’insuffisance cardiaque réduites de façon importante par l’ivabradine La baisse de FC nette, corrigée de la légère réduction observée dans le groupe placebo, a été de 9 bpm à 1 an et de 8 bpm en fin d’étude dans le groupe ivabradine. L’impact de l’ivabradine sur le critère primaire d’évaluation est hautement significatif avec une réduction de 18 % du risque relatif de décès de cause cardiovasculaire ou d’hospitalisation pour aggravation de l’insuffisance cardiaque (p = 0,0001). L’effet protecteur de l’ivabradine est observé précocement, dès le 3e mois, et s’accentue par la suite. Ce résultat positif repose essentiellement sur la réduction des hospitalisations pour aggravation de l’insuffisance cardiaque (-26 %, p < 0,0001) et des décès liés à l’insuffisance cardiaque (-26 %, p = 0,014). Une analyse complémentaire indique que l’incidence du critère primaire combiné dans le groupe ivabradine est d’autant plus faible que la FC atteinte à J28 sous traitement est basse : les patients dont la FC est inférieure à 60 bpm à J28 présentent un taux d’événements de 17,4 %, contre 32,4 % pour les patients conservant une FC supérieure à 75 bpm. Un impact favorable dans toutes les sous-populations Les analyses par sous-populations prévues au protocole indiquent une quantité d’effet de l’ivabradine comparable quelle que soit la segmentation, par âge, sexe, étiologie de l’insuffisance cardiaque, classe NYHA, existence ou non d’un diabète ou d’une HTA, prescription ou non d’un bêtabloquant. L’action du médicament s’est montrée d’autant plus puissante que la FC de repos était plus élevée au départ. Insuffisance cardiaque : un pronostic amélioré Cette étude confirme que la FC constitue un facteur de risque majeur dans l’insuffisance cardiaque et que la dose cible de bêtabloquant est rarement atteinte en raison d’intolérances. Elle met en évidence un impact pronostique favorable de l’ivabradine ajoutée à un traitement optimisé, comprenant notamment les bêtabloquants. L’ampleur du bénéfice obtenu est corrélée au niveau de fréquence cardiaque atteint sous traitement, idéalement inférieur à 60 bpm au repos. Ainsi, après les IEC et les bêtabloquants, l’ivabradine représente une nouvelle étape dans l’amélioration du pronostic de l’insuffisance cardiaque, chez des malades en rythme sinusal et dont la FC de repos est d’au moins 70 bpm. Figure. Étude SHIFT. Résultats sur le critère principal et ses composants. (A) Critère composite : décès cardiovasculaires + hospitalisations pour aggravation d’insuffisance cardiaque. (B) Hospitalisations pour aggravation d’insuffisance cardiaque. (C) Décès cardiovasculaires. (D) Mortalité pour insuffisance cardiaque.   D’après les communications de M. Komajda (France), L. Tavazzi (Italie), K. Swedberg (Suède), M. Böhm (Allemagne) et J.S. Borer (Etats-Unis)

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