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Focus

Publié le 15 déc 2017Lecture 5 min

L’ECG revisité à la sauce « French Tech »

Arnaud ROSIER, Institut de rythmologie et de télémédecine Paris Sud, Hôpital J. Cartier, Massy

Parmi les innovations en cardiologie, peu d’examens ont traversé le temps avec si peu de changement dans notre pratique quotidienne que l’électrocardiographie. Bien entendu, depuis le premier ECG enregistré par Waller en 1887, la technique s’est améliorée, multipliant les voies et la qualité des tracés jusqu’aux 12 dérivations désormais canoniques depuis 1942. Néanmoins et à l’exclusion de l’électrocardiographie endocavitaire qui connaît
ses heures de noblesse, force est de reconnaître que la lecture de l’ECG et son analyse sur une bonne vieille impression papier restent la pratique la plus répandue.

Sans doute l’usage actuel est-il déjà très riche d’informations, mais la vague d’innovations médicales depuis quelques décennies n’apporte-t-elle aucune promesse pour les cardiologues que nous sommes ou pour nos patients ? J’espère que les quelques exemples suivants vous convaincront du contraire ! Plus particulièrement, cet article prend le parti assumé de présenter les innovations issues de startups françaises, qui à l’évidence savent se comparer à l’excellence de notre cardiologie nationale… L’ECG revisité sous toutes ses coutures : Bioserenity Spécialiste des vêtements connectés médicaux créée par Pierre-Yves Frouin, Bioserenity a débuté dans l’analyse prédictive des crises comitiales, par le biais d’un t-shirt et d’une calotte crânienne bourrés de capteurs. À l’initiative d’un partenariat avec les laboratoires Servier, cette jeune pousse parisienne s’est, depuis, attaquée au développement du Cardioskin, un t-shirt connecté lavable permettant de mesurer l’activité cardiaque (figure 1). L’intérêt est notamment de disposer d’un vrai ECG 12 dérivations, continu, ce qui est presque impraticable à l’heure actuelle. Le marquage CE est en cours, et la commercialisation devrait être réalisée par Servier. Figure 1. Le t-shirt connecté de la société Bioserenity permettant de mesurer l’activité cardiaque. L’ECG « express » pour tout médecin : Bitmakers D’abord l’apanage des cardiologues, la pratique de l’ECG s’est répandue dans la communauté médicale, et on estime désormais que 70 % des omnipraticiens sont désormais équipés. Le dispositif Heartbit est pensé pour sa simplicité de pose et d’utilisation, afin de réduire le temps de l’examen à 5 minutes, et vise à révolutionner le marché de l’ECG de repos avec un coût inférieur à 1 000 euros. L’appareil se connecte sans fil à l’ordinateur ou au smartphone du praticien, ce qui lui permet de récupérer la donnée ECG directement sur ses outils de travail, et le cas échéant de la transmettre au cardiologue (par le biais de la plate-forme Cardiologs (citée en fin d’article), pour les cas où une analyse plus experte serait nécessaire. Ce dispositif conçu par Jean-Christophe Billard sera disponible très prochainement sur le marché français, et existe sous plusieurs variantes (cf. la variante américaine, figure 2). Figure 2. Dispositif Heartbit. L’ECG connecté accessible aux patients : Visiomed À l’heure du smartphone roi, le cran supplémentaire dans la démocratisation de l’analyse électrocardiographique a été franchi avec l’arrivée de dispositifs portables, connectés et permettant d’enregistrer et de transmettre un tracé D1, dans le but de diagnostiquer le rythme sur un mode événementiel. Bien entendu, les rythmologues ont l’habitude des abonnements et systèmes variés mis à disposition de nos patients dans le but de faire le diagnostic d’arythmies paroxystiques difficiles à identifier. Un cap a été franchi avec l’arrivée de nouveaux dispositifs de type coques d’iPhone, AliveCor en 2012, très grand public, même si la qualité de l’analyse incorporée (détection automatique de fibrillation atriale) est parfois très gênée par le bruit du tracé. De façon moins « gadget », le nouveau dispositif MyECG de Visiomed (figure 3) a reçu un Innovation Award au CES de Las Vegas, et vient rejoindre la gamme BewellConnect d’objets connectés à disposition du patient. Cet appareil permet l’enregistrement d’un tracé D1, et bien sûr la transmission sous la forme d’un PDF au médecin destinataire pour analyse. Ce type de dispositif présente notamment l’intérêt d’un coût réduit, permettant d’envisager de l’utiliser plus couramment pour le télédiagnostic ou la télésurveillance d’arythmies (post-ablation, par exemple). Figure 3. Objet connecté à disposition du médecin. L’ECG et le Holter pour les professionnels : Cardiologs Cardiologs met l’intelligence artificielle au service de la cardiologie (figure 4). À partir d’une base de données de plus 400 000 cas et d’un savoir-faire unique exploitant la puissance du deep-learning (cette technologie d’apprentissage automatique par la machine a déjà fait parler d’elle en permettant à la machine de vaincre les meilleurs joueurs de jeu de Go, par exemple), cette startup, créée en 2015 par de jeunes polytechniciens, a développé une solution innovante permettant d’accélérer l’analyse d’ECG, de Holter et d’enregistreurs d’événements. Figure 4. Base de données Cardiologs. « Nous voulons rendre l’analyse de Holter plus rapide, plus simple et plus efficace, en assurant un niveau de performances optimal. En réduisant drastiquement le temps d’analyse, nous souhaitons également permettre des durées d’enregistrements plus longues, notamment dans le cas de patients post-AVC cryptogéniques », précise Yann Fleureau, co-fondateur de Cardiologs. En effet, les nouveaux objets connectés et ECG à disposition des médecins généralistes et des patients n’ont que peu d’intérêt si les tracés ne peuvent être analysés de manière fiable, voire automatiquement. La méthode de référence était jusque-là l’analyse manuelle, qui connaît la limite de notre performance et de notre temps disponible, surtout lorsqu’on parle de tracés transmis sans rendez-vous. La technologie utilisée par Cardiologs a déjà démontré sa capacité à diviser par 14 les faux positifs (0,8 % vs 11,2 %) pour détecter la fibrillation atriale sur Holter, sans dégrader la sensibilité, par rapport aux algorithmes automatiques classiques des machines que nous utilisons au quotidien. La particularité de ces algorithmes inspirés de ceux de reconnaissance faciale sur des images est notamment qu’elle prend en compte la détection de l’onde P (y compris « cachée »). Elle diffère donc des algorithmes classiques qui ne s’intéressent qu’à l’intervalle R-R et sont limités par leur conception. Bien entendu, cette technologie suppose d’avoir un signal numérique à disposition, et nous ne disposons pas toujours d’un tracé 12D de ce type ; en revanche, les tracés Holter sont toujours digitaux, et surtout leur temps d’analyse rend la plateforme Cardiologs diabolique car elle préannote et identifie les événements de façon notablement plus fiable par comparaison aux produits dont nous avons l’habitude. Compatible avec la plupart des Holter existants (les plus fréquemment utilisés en France sont les Holters Sorin Group), ce produit sera disponible en France fin 2017 (marquage CE obtenu en 2016). À titre indicatif, Cardiologs souhaite faire bénéficier des cardiologues français d’un accès en avant-première à l’été 2017 (contact@cardiologs.com). Conflits d’intérêt : A. Rosier est membre du comité médical et investisseur au sein de la société Cardiologs.

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