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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 13 fév 2024Lecture 6 min

Best of de l’AHA 2023 en rythmologie

Nicolas LELLOUCHE, service de cardiologie, hôpital Henri-Mondor, Créteil, APHP

Le congrès de l’AHA, qui a eu lieu à Philadelphie du 10 au 13 novembre 2023, a tenu toutes ses promesses en matière de présentation de nouvelles études cliniques importantes. Concernant la rythmologie, ce sont essentiellement les anticoagulants au cours de la fibrillation atriale (FA) qui étaient à l’honneur. Tout d’abord, une étude de phase 2 avec une nouvelle classe d’anti-XI (l’abélacimab), de type d’anticorps monoclonal humain utilisé avec une injection sous-cutanée mensuelle, a été présentée. De plus, deux études attendues concernant l’intérêt du traitement anticoagulant chez les patients ayant une arythmie atriale rapide (≥ 170/min) d’au moins 6 minutes, enregistrée sur une prothèse cardiaque (PM ou DAI), ont été présentées. Enfin, une étude sur la cardioversion (sujet qui n’est pas souvent à l’honneur) a été présentée chez les patients obèses.

Étude AZALEA-TIMI 71   Il s’agit d’une étude de phase 2 concernant la sûreté d’un anticoagulant anti-XI injectable l’abélacimab de type anticorps monoclonal purement humain, avec une injection mensuelle par voie sous-cutanée. Au total, 1 287 patients présentant une fibrillation atriale (FA) non valvulaire ont été randomisés en 3 groupes : 1 groupe traité par abélacimab 150 mg/mois, 1 groupe avec abélacimab 90 mg/mois et 1 groupe contrôle traité par rivaroxaban (AOD) 20 mg/j. Ces patients étaient âgés d’au moins 55 ans avec un score de CHA2DS2VASc ≥ 4 ou ≥ 3 avec 1 facteur de risque hémorragique suivant: prise concomitante d’un antiagrégant ou insuffisance rénale avec clairance de la créatinine ≤ 50 mL/min. Le critère primaire de jugement était la survenue d’une hémorragie majeure ou non majeure relevante cliniquement (figure 1). Figure 1. Étude AZALEA-TIMI 71.   Cette étude de phase 2 retrouve que l’abélacimab inhibe plus de 95 % du facteur XI sanguin avec une réduction significative (67 % pour la dose de 150 mg et 77 % pour la dose de 90 mg) du critère primaire clinique hémorragique par rapport au rivaroxaban. Une étude de phase 3 est en cours (LILAC-TIMI 76) comparant l’abélacimab par rapport au placebo chez des patients avec FA non candidats au traitement anticoagulant par AOD.   Étude NOAH-AFNET 6   Résultats chez les patients présentant une arythmie atriale continue de plus de 24 heures L’étude NOAH-AFNET 6 a été publiée dans le New England Journal of Medicine en septembre 2023. Cette étude, très attendue, a évalué l’intérêt du traitement par anticoagulant (edoxaban) versus placebo chez des patients présentant des arythmies atriales rapides (activité atriale ≥ 170/min) d’au moins 6 minutes, enregistrées sur des prothèses cardiaques de type pacemakers ou défibrillateurs automatiques implantables. Il s’agit d’une étude randomisée prospective en double aveugle avec des patients âgés d’au moins 65 ans avec un score de CHA2DS2VASc ≥ 2 pour les hommes ou ≥ 3 pour les femmes. Le critère primaire de jugement d’efficacité était un critère composite avec AVC, mortalité cardiovasculaire ou embolie artérielle systémique. Le critère primaire de jugement de sûreté était un critère composite avec hémorragies majeures ou décès de toute cause. 2 536 patients ont été inclus et cette étude a montré que, dans cette population, le traitement par edoxaban était associé à une augmentation significative des hémorragies majeures ou décès de toutes causes de 31 % (p = 0,03) avec un critère primaire d’efficacité similaire entre les 2 groupes (p = 0,15) (figure 2A). À noter que le taux d’AVC dans cette population est plus faible que celui attendu théoriquement (0,9 %/an dans le groupe edoxaban et 1,1 %/an dans le groupe placebo), compte tenu d’un score de CHA2DS2VASc moyen de 4 (taux attendu d’AVC de 4,8 %/an) dans l’étude. Figure 2. Étude NOAH-AFNET 6.   Cependant, dans cette étude, il n’y avait pas de borne supérieure pour la durée des arythmies atriales lors de l’inclusion des patients. Il est donc intéressant de voir si les patients présentant une arythmie atriale ≥ 24 heures, donc potentiellement à plus haut risque thrombo-embolique, pouvaient bénéficier du traitement par edoxaban. Cette sous-étude de NOAH-AFNET 6 a donc été présentée à l’AHA 2023. Comme montré ci-dessous, les résultats sont identiques chez les patients présentant une arythmie atriale continue de plus ou moins de 24 heures (figure 2B). La population avec une arythmie plus longue ne tire donc pas plus de bénéfice du traitement anticoagulant. Ces résultats pourraient être expliqués par le taux d’AVC particulièrement faible dans cette population. Par ailleurs, il est possible que la charge en arythmie atriale (somme totale des épisodes de FA) soit un critère plus pertinent que la durée maximale des épisodes de FA (figures 3 et 4). Figure 2. Étude NOAH-AFNET 6. Figure 3. Étude NOAH-AFNET 6. Critères d’efficacité. Figure 4. Étude NOAH-AFNET 6. Critères de sûreté.   Étude ARTESIA   Il s’agit d’une étude prospective randomisée en double aveugle ayant étudié l’effet de l’apixaban versus aspirine chez des patients présentant des arythmies atriales rapides (activité atriale ≥ 170/min) d’au moins 6 minutes, mais de moins de 24 heures, enregistrées sur des prothèses cardiaques de type pacemakers ou défibrillateurs automatiques implantables. Les critères d’inclusion étaient des patients avec un score de CHA2DS2VASc ≥ 3. Le critère primaire de jugement d’efficacité était la survenue d’un AVC ou d’une embolie artérielle systémique. Le critère primaire de jugement de sûreté était la survenue d’une hémorragie majeure. 4 012 patients ont été inclus et cette étude a montré que, dans cette population, le traitement par apixaban était associé à une diminution significative de 37 % du taux d’AVC ou d’embolie systémique par rapport à l’aspirine (0,78 %/an vs 1,24 %/an, p = 0,007). Par ailleurs, avec un suivi moyen de 3,5 ans, il existait une augmentation significative des hémorragies majeures de 80 % (1,71 %/an avec l’apixaban vs 0,94 %/an avec l’aspirine, p = 0,001) (figure 5). Figure 5. Étude ARTESIA. Critère composite avec AVC toutes causes, embolie artérielle périphérique, infarctus du myocarde, embolie pulmonaire ou mortalité cardiovasculaire.   Une méta-analyse des études ARTESIA et NOAH-AFNET 6 a aussi été présentée à ce congrès, qui retrouve que l’utilisation d’un traitement anticoagulant dans ces populations est associée à une réduction du risque d’AVC de 32 %, mais avec une augmentation du risque d’hémorragie majeure de 62 %. Il semble donc difficile de donner des recommandations générales concernant le traitement antithrombotique des patients présentant une arythmie atriale de plus de 6 minutes diagnostiquée sur une prothèse cardiaque. Une attitude au cas par cas, en fonction du risque thrombotique et hémorragique du patient, semble donc pour l’instant la plus adaptée. Par ailleurs, compte tenu du faible taux d’AVC observé, par rapport à celui attendu avec le score élevé de CHA2DS2VASc dans cette population spécifique, la définition de cette FA semble différente de celle indiquant classiquement un traitement anticoagulant (FA diagnostiquée sur un ECG ou un Holter ECG de 24 heures avec au moins 30 secondes de FA). Il est ainsi possible que la charge en FA (durée totale de la FA) soit un meilleur marqueur que la durée maximale des épisodes. Toutefois, ceci nécessite d’être confirmé dans de futures études.   Étude comparant un double choc électrique externe versus simple choc électrique externe chez le patient obèse   Le taux de succès de cardioversion pour traiter la fibrillation atriale persistante est diminué chez le patient obèse du fait de l’augmentation d’épaisseur entre la paroi thoracique de surface et le cœur. Il s’agit d’une étude randomisée prospective chez 200 patients obèses (IMC ≥ 35 kg/m2) recevant soit un CEE standard soit un double CEE simultané (figure 6A et B). Le taux de succès de retour en rythme sinusal était de 86 % dans le groupe avec CEE standard versus 98 % dans le groupe avec double CEE (p = 0,002). Aucune complication n’a été rapportée dans cette étude. Figure 6. Choc électrique externe (CEE). A. Standard. B. Double simultané.   Le taux de douleur post-cardioversion était identique entre les 2 groupes. Cette technique pourrait être une alternative chez des patients obèses en cas d’échecs itératifs de cardioversion pour FA persistante. Il faut penser malgré tout à bien prescrire un traitement antiarythmique, notamment avec de l’amiodarone avant la cardioversion, ce qui augmente aussi le taux de succès du CEE. Il est aussi possible, en pratique, d’appuyer sur les patchs de défibrillation du patient pour améliorer ce taux de succès (sans risque d’électrocution pour celui qui appuie avec des gants sur le thorax du patient).

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