publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Cardiomyopathies

Publié le 31 aoû 2015Lecture 5 min

Facteurs déclenchants de la cardiomyopathie de Takotsubo

N. MANSENCAL, Hôpital Ambroise Paré, AP-HP ; Centre de référence pour les maladies cardiaques héréditaires, université de Versailles-Saint-Quentin (UVSQ) ; Pôle V Thorax Vasculaire Digestif Métabolisme, Boulogne

La cardiomyopathie de stress de Takotsubo se présente habituellement sous la forme d’un syndrome coronarien aigu. Elle correspond à une sidération myocardique réversible, survenant le plus souvent après un stress(1-3). La décharge catécholergique est la principale hypothèse physiopathologique(4).
Il est important d’utiliser en 2015 le terme de cardiomyopathie de Takotsubo, et non les différents noms qui ont été précédemment proposés (syndrome du cœur brisé, apical ballooning, cardiomyopathie de stress)(3). Ce nom vient d’un vase de pêche traditionnelle japonaise (Takotsubo), et en systole, dans sa forme typique, le ventricule gauche ressemble à ce vase.

Diagnostic   Il convient de distinguer deux types de patients : ceux pris en charge précocement et ceux ayant une prise en charge retardée. Dans la majorité des cas, une prise en charge rapide permet de poser un diagnostic de certitude facilement ; à l’inverse, une prise en charge tardive peut engendrer des difficultés majeures pour poser ce diagnostic. Il est essentiel que le médecin utilise les critères de la Mayo Clinic pour poser le diagnostic de Takotsubo(1) : - il existe une dysfonction ventriculaire gauche transitoire touchant les portions moyennes (± les portions apicales) du ventricule gauche. Cette dernière n’est pas systématisée et ne correspond donc pas à un territoire coronarien. Un facteur déclenchant (stress) est classiquement retrouvé mais n’est pas systématiquement présent ; - il n’existe aucune lésion coronaire significative ni de rupture de plaque coronaire. Cependant, comme la cardiomyopathie de Takotsubo touche préférentiellement des sujets âgés, des lésions coronaires peuvent parfois être présentes, mais la localisation des troubles de cinétique segmentaire ne correspond pas au territoire des lésions coronaires retrouvées ; - des modifications ECG (troubles de la repolarisation) et/ou une élévation modérée de la troponine cardiaque sont classiquement retrouvées ; - il n’existe pas de phéochromocytome ni de myocardite. Il s’agit d’un diagnostic d’élimination et il faut d’abord éliminer les diagnostics différentiels : syndrome coronarien aigu, myocardite, spasme coronaire, infarctus à coronaires saines. Les examens complémentaires habituellement réalisés sont l’ECG, le dosage biologique des marqueurs cardiaques (CPK, troponine), l’échocardiographie transthoracique, la coronarographie (avec ventriculographie) et l’IRM cardiaque. La coronarographie associée à la ventriculographie permet d’éliminer une lésion coronaire et de visualiser la dysfonction ventriculaire gauche. Trois formes de cardiomyopathie de Takotsubo existent : la forme typique (70 à 80 % des cas, figure 1), la forme médiane (20 à 30 % des cas, figure 1) et la forme inversée (< 1 %). Quel est le portrait robot du patient ayant une cardiomyopathie de Takotsubo ? Il s’agit d’une femme ménopausée (près de 90 % des cas)(2), ayant un âge moyen de 70 ans. L’incidence de la cardiomyopathie de Takotsubo est estimée à environ 30 nouveaux cas par millions d’habitants et par an(5). Sa présentation clinique mime un syndrome coronarien aigu et un stress est souvent retrouvé, mais n’est pas systématique. Figure 1. Aspect ventriculographique de Takotsubo. Forme typique de cardiomyopathie de Takotsubo (à gauche) et Tako médian (à droite). VG = ventricule gauche. Facteurs déclenchants   Dans les formes caricaturales, un stress est généralement retrouvé et fait partie des arguments en faveur d’un Takotsubo. Cependant, un stress peut parfois être absent et il ne faut donc pas éliminer ce diagnostic uniquement sur cet argument. Les données dans la littérature retrouvent des résultats disparates concernant la prévalence d’un stress dans la cardiomyopathie de Takotsubo, mais il semble que 15 à 30 % des patients n’ont pas de facteurs déclenchants évidents(3,6). Un interrogatoire très méticuleux permet parfois de retrouver une accumulation de minimes stress, et finalement, un stress anodin va précipiter la patiente dans la maladie. De manière imagée, cela correspond à la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Un stress professionnel peut ainsi être le facteur déclenchant, correspondant à des stress répétés. Il existe différents types de stress (figure 2) : - le stress physique ; - le stress émotionnel ; - une pathologie médicale aiguë ; - la réalisation d’un examen complémentaire ; - la prise de certains médicaments. Figure 2. Représentation schématique des interactions entre les facteurs déclenchants et la susceptibilité individuelle à la cardiomyopathie de Takotsubo (réf. 8 modifiée).  Il convient de différencier plusieurs types de stress. Les plus fréquemment retrouvés sont les stress physiques et les stress émotionnels : - une agression physique, un vol violent, une chute, un accident de la voie publique, un incendie ; - une annonce tragique (le décès du conjoint), une dispute. Les stress physiques semblent être plus fréquemment retrouvés parmi les hommes qui font une cardiomyopathie de Takotsubo(7). Une autre cause classique de Takotsubo est une pathologie médicale aiguë : une crise d’épilepsie, une crise d’asthme ou tout événement brutal. Cette pathologie va entraîner un stress aigu qui va se traduire chez des patients ayant une susceptibilité particulière par le déclenchement de la symptomatologie de la cardiomyopathie de Takotsubo(8). Tout examen médical ou toute intervention chirurgicale peut également provoquer cette cardiomyopathie. La littérature est très riche en cas cliniques rapportant des exemples de Takotsubo survenant après des examens qui nous semblent « anodins » : un test d’effort, une échocardiographie d’effort, une échocardiographie de stress sous dobutamine, une fibroscopie, une biopsie cutanée, etc. Finalement, tout examen peut précipiter le patient dans cette pathologie. Près de 25 % des patients présentant une cardiomyopathie de Takotsubo ont comme facteur déclenchant une pathologie médicale aiguë, un examen médical ou la prise d’un traitement médical. En effet, exceptionnellement, un traitement peut être le facteur déclenchant d’une cardiomyopathie de Takotsubo. Le principal médicament est l’épinéphrine (adrénaline). Les autres médicaments ayant été impliqués dans la survenue de Takotsubo sont la dobutamine, l’ergométrine et ses dérivés et le dipyridamole(9). Ce facteur déclenchant dépend de la dose injectée, ainsi, en cas de surdosage, le risque de survenue augmente. Cependant, quel que soit le facteur déclenchant retrouvé, tous les patients ne développent pas une cardiomyopathie de Takotsubo. Il doit donc exister un facteur de susceptibilité à cette cardiomyopathie, qui peut être multiple : - une prédisposition individuelle (l’âge, le sexe féminin, le statut hormonal, l’environnement) ; - la personnalité (anxiété, dépression) ; - une prédisposition génétique ? L’âge est important dans le développement de cette cardiomyopathie qui affecte essentiellement des femmes ménopausées. De plus, l’âge conditionne le type du Takotsubo : - dans sa forme typique, l’âge moyen est de 70 ans ; - dans le Tako médian, l’âge moyen est de 60 ans ; - dans la forme inversée, l’âge moyen est de 30 ans. Un autre point important à prendre en compte est la personnalité de ces patient(e)s. Plusieurs études ont démontré qu’un nombre relativement important de patient(e)s présentait soit une anxiété, soit une dépression. Ainsi, une personnalité « particulière » peut être un élément à prendre en compte dans la survenue de la maladie. Enfin, autre point non éclairci est l’origine génétique à cette maladie. Nous venons de terminer une étude prospective nationale sur la recherche de facteur de susceptibilité génétique de la voie catécholergique dans la cardiomyopathie de Takotsubo (étude TAKO-GENE). L’analyse génétique est en cours et nous saurons ainsi s’il existe ou non une origine génétique à la survenue de cette nouvelle cardiomyopathie.    En pratique    La cardiomyopathie de Takotsubo se définit par une dysfonction ventriculaire gauche caractéristique réversible. Un stress aigu est retrouvé dans 70 à 85 % des cas. Pour développer une cardiomyopathie de Takotsubo, il faut un facteur déclenchant (qui peut être minime) et une susceptibilité personnelle qui peut être multifactorielle. Les connaissances ne sont pas encore complètement certaines et nécessitent encore de nombreuses études afin de les améliorer. 

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 8 sur 12