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Congrès et symposiums

Publié le 14 mar 2014Lecture 5 min

FA et syndrome coronaire aigu : quel « cocktail » antithrombotique choisir en postangioplastie ?

M. KERNÉIS, J. SILVAIN ACTION Study Group (www.action-coeur.org), Institut de cardiologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), Université Paris 6


JESFC
Fibrillation atriale et syndrome coronaire aigu coexistent fréquemment et le cardiologue est confronté au choix complexe du traitement antithrombotique. 

La nécessité d’une double antiagrégation plaquettaire pendant les 12 mois suivant un syndrome coronaire aigu (SCA) est désormais clairement établie par de larges essais randomisés et recommandée par les sociétés savantes européenne (ESC) et américaines (ACC/AHA). Le bénéfice de cette double antiagrégation plaquettaire est lié essentiellement à la diminution des événements ischémiques et est contre-balancé par une augmentation du risque hémorragique. De la même façon, les recommandations internationales sur la prise en charge de la fibrillation atriale (FA), elles-mêmes basées sur de larges études randomisées, mettent au premier plan la nécessité d’une anticoagulation efficace, dès que le score de CHADS-VASC s’élève à plus de 1, permettant ainsi de diminuer la survenue des accidents cardio-emboliques, notamment cérébraux (REF)(1). Lorsque les deux événements coïncident, que ce soit par l’existence d’une FA préexistante avant le SCA (présente dans environ 5 à 8 % des SCA)(2) ou par l’apparition d’une FA méconnue dans les suites du SCA (environ 6 à 8 % d’apparition de FA dans les SCA), le cardiologue se trouve dans une situation complexe vis-à-vis du choix traitement antithrombotique. Ainsi, plus de 1 patient sur 10 admis pour un SCA sera confronté à cette situation complexe où le choix du « cocktail » le plus approprié à utiliser reste incertain.   Double versus triple thérapie antithrombotique ?   Malheureusement peu de données objectives sont disponibles concernant la gestion du traitement antithrombotique dans cette situation puisque la FA était un critère d’exclusion de tous les grands essais portant sur les SCA, de CURE à TRITON et PLATO ; tandis que la double antiagrégation plaquettaire suivant un SCA était un critère d’exclusion des essais sur la FA. Les données de l’étude APEXAMI(2) et du registre CRUSADE(3) nous apprennent que seul 50 à 60 % des patients ayant une indication formelle à une triple thérapie antithrombotique sortent de l’hôpital avec l’association aspirine, clopidogrel et antivitamine K (AVK). L’impact de cette combinaison sur le pronostic des patients est peu étudié, et le peu d’études disponibles suggèrent un effet sur la diminution des récidives d’accidents ischémiques contre - balancés par une augmentation du risque hémorragique(4). Résultats rappelant les études WARIS comparant l’efficacité de la bithérapie AVK + aspirine contre l’aspirine seule en postinfarctus(5). Cette peur du risque hémorragique sous la triple thérapie poussent ainsi les médecins à traiter 40 à 50 % des patients par une bithérapie associant : soit 2 antiagrégants plaquettaires (aspirine + clopidogrel), en s’appuyant sur l’efficacité de cette bithérapie dans l’étude ACTIVE, soit en associant un anticoagulant et un antiagrégant (aspirine ou clopidogrel)(3). La sélection des patients nécessitant une triple thérapie semble intuitivement liée à l’importance de leur risque embolique. Pourtant, dans APEX AMI, l’existence d’un score de CHADS2 à 2 ou + était associé à un maintien plus fréquent sous bithérapie que sous trithérapie antithrombotique, reflétant ainsi la crainte, du risque hémorragique, alors même que le risque cardio-embolique est élevé. Crainte justifiée puisque chez les patients de l’étude contemporaine HORIZONS, associant FA et SCA, la triple thérapie était associée à un risque d’hémorragies majeurs doublés passant à 15,1 % à 30 jours sous triple thérapie contre 7,1 % sous bithérapie (HR = 2,17 ; IC95 % : 1,4-3,5 ; p < 0,001)(6), sans bénéfice d’un point de vue ischémique. Ainsi, bien que le bénéfice en termes de prévention du risque ischémique ne semble pas établi, une chose est certaine, cette triple thérapie antiagrégante est associée à un sur-risque hémorragique par rapport aux autres combinaisons, comme le montrent les données du registre danois portant sur plus de 80 000 patients (figure 1).   Figure 1. Risque hémorragique en fonction du cocktail antithrombotique utilisé chez les patients en FA. D’après Hansen et al. Arch Intern Med 2010 ; 170 : 1 433-41. Enfin quelques données : l’étude WOEST   Bien que n’incluant que 25 % de patients avec un SCA, l’étude WOEST a enrôlé 537 patients bénéficiant d’une angioplastie programmée ou non traités au long cours par AVK. Elle apporte des données sur la comparaison d’une triple thérapie (aspirine + clopidogrel + AVK) contre une bithérapie (clopidogrel + AVK) durant la même période. Tous les patients recevaient de l’aspirine durant la période initiale. La durée de la bithérapie ou de la trithérapie était d’un mois après la pose d’un stent nu et de 12 mois en cas de stents actifs. Les résultats de cette étude (figure 2), taillée uniquement pour comparer le risque hémorragique, confortent l’idée qu’une triple thérapie prolongée de 12 mois augmente le risque hémorragique sans signal sur la baisse des événements ischémiques. Elle permet donc d’apporter des données en faveur soit d’une bithérapie, soit d’une triple thérapie plus courte, sans répondre à ces deux questions de façon précise.   Figure 2. Résultats de l’étude WOEST sur la comparaison des hémorragies (majeures et mineures) entre une bithérapie et une trithérapie. D’après Dewilde et al. Lancet 2013. Que disent les recommandations ?   Sur la base des données suscitées, l’ESC a pris récemment position sur la gestion des patients en FA, nécessitant une anticoagulation efficace, et ayant été traités par stent (figure 3).   Figure 3. Recommandations du Working Group on Thrombosis de l’ESC. D’après Verheugt F et al. Thromb Haemost 2013. Et les nouveaux antithrombotiques ?   Pour compliquer un peu plus la situation, l’arrivée de nouveaux antiagrégants plaquettaires puissants comme le ticagrélor (Brilique®) et le prasugrel (Efient®), indiqué désormais en première intention dans le traitement du SCA, et de nouveaux anticoagulants oraux (NACO) viennent multiplier les combinaisons possibles et rendre cette situation encore plus complexe. Pour le moment, aucune étude n’a évalué ces nouvelles combinaisons, néanmoins les données de la littérature nous permettent de savoir : - que le prasugrel et le ticagrélor ne semblent pas indiqués en association avec un anticoagulant, compte tenu de l’augmentation du risque hémorragique liée à l’utilisation de ces deux molécules en comparaison au clopidogrel ; - que les NACO semblent plus indiquée que les AVK dans l’utilisation associée aux antiagrégants afin de réduire le risque hémorragique de ces cocktails, compte tenu de leur supériorité en termes de diminution du risque hémorragique par rapport à l’utilisation des AVK (à l’exception du dabigatran dont l’utilisation est associée à une augmentation du risque d’infarctus). Les études évaluant différents cocktails antiagrégants-anticoagulants sont en cours, comme l’étude PIONNER dans l’angioplastie, et devraient apporter prochainement des éléments de réponses dans ce domaine.        Références sur demande à la rédaction : biblio@axis-sante.com

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