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Cardiologie interventionnelle

Publié le 04 sep 2014Lecture 4 min

Le TAVI progresse en pays nantais

M. DEKER, d'après un entretien avec le Dr Thibaut MANIGOLD

L’expérience d’un centre universitaire régional offre un éclairage plus concret sur la pratique du TAVI en vie réelle. À Nantes, les premières implantations de valve aortique par voie percutanée ont débuté en 2009 et, depuis lors, le nombre d’implantations n’a cessé d’augmenter alors que celui des remplacements chirurgicaux de valve aortique est resté relativement stable. Cette constante progression est sans doute liée à l’organisation mise en place à l’Institut du Thorax de Nantes, comme l’estime le Dr Thibaut Manigold qui nous a accordé cet entretien.

Conformément aux recommandations européennes, chaque décision de prise en charge par TAVI est prise sur la base d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP), qui implique outre les cardiologues hémodynamiciens, les autres spécialistes impliqués dans la décision : chirurgiens cardiaques, cardiologues cliniciens, anesthésistes, radiologues et gériatres. Cette étroite collaboration de l’ensemble des spécialistes facilite l’accès à la procédure et la disponibilité des praticiens. Les cardiologues libéraux, informés des modalités d’accès à la procédure et du fonctionnement du centre, sans limite en termes de volume d’actes potentiels, sont invités à adresser leurs patients ayant un rétrécissement aortique serré, même s’il s’agit de personnes très âgées et souffrant de nombreuses comorbidités. Après réception du courrier, une feuille d’hospitalisation est remplie et transmise au responsable de la programmation des examens. Les patients seront reçus en hôpital de semaine une fois l’ensemble des examens programmé. Le bilan est réalisé durant une hospitalisation de 48 à 72 heures et comprend échographie cardiaque, exploration des troncs supra-aortiques et des axes fémoraux, exploration de la fonction pulmonaire, hématologie et bilan gériatrique. Le bilan extra-cardiovasculaire permet parfois de détecter des anomalies qui pourraient faire récuser un patient, par exemple un cancer colique révélé par une anémie, ou une myélodysplasie. Le bilan gériatrique est systématique chez les sujets âgés de plus de 75 ans. L’ensemble de ces explorations permet de bien stratifier les patients sur le plan cardiovasculaire et d’évaluer leur degré de fragilité, afin de s’assurer que le stress de la procédure ne risque pas de précipiter leur déclin et les empêche de bénéficier de l’intervention.   Les dossiers d’examens de chaque patient sont discutés en réunion de concertation pluridisciplinaire, afin de l’orienter vers la chirurgie valvulaire, le TAVI ou le traitement médical. La RCP fournit un compte rendu rédigé, mentionnant les motifs de récusation de la chirurgie cardiaque, précisant l’état clinique du patient atteint (symptômes, antécédents), les résultats du bilan d’imagerie, les conclusions du staff, le type de valve proposé. Ce compte rendu est adressé à tous les correspondants. Quel bilan ?   Depuis 2009, date des premières procédures de TAVI réalisées au CHU de Nantes, leur nombre a régulièrement augmenté chaque année : 13, la 1re année, 40 en 2010, 71 en 2011, 80 en 2012, 114 en 2013, 71 durant les 5 premiers mois de l’année 2014. Les statistiques chirurgicales sont assez stables : 500 en 2009, 528 en 2013. En 2013, sur 168 dossiers de patients à haut risque, donc candidats au TAVI, la RCP a retenu 112 patients, 48 patients n’ont pas été retenus, 8 étaient en discussion, 2 patients sont décédés avant la procédure. Les patients non retenus ont principalement été écartés sur la base de l’évaluation gériatrique (patients trop fragiles, polypathologiques, à espérance de vie limitée, ayant de lourdes comorbidités associées, présentant des troubles cognitifs sévères, notamment). La majorité des procédures de TAVI sont réalisées par la voie fémorale, en salle de cathétérisme (en 2013, 72,2 %) par deux hémodynamiciens en présence d’un chirurgien ; les procédures faisant appel aux autres voies d’abord, transaortique (8,7 %), transapicale (17,5 %), sous-clavière et carotide (1 cas chacune), nécessitant un abord chirurgical, sont réalisées par une équipe de deux chirurgiens en présence d’un cardiologue hémodynamicien. Les procédures sont encore le plus souvent réalisées sous anesthésie générale (80 % des cas en 2014) mais l’anesthésie locale avec sédation progresse à mesure de l’expertise des anesthésistes. À moins de complications périopératoires, les patients restent hospitalisés 5 jours après l’intervention et pour les trois quarts d’entre eux ont pu retourner directement à leur domicile. En 2013, l’équipe nantaise a implanté une valve Edwards dans près de 90 % des cas. Voici les principaux résultats pour cette année 2013 : - mortalité hospitalière 3,4 % ; - complications vasculaires 8,6 % (6,7 % dans France TAVI) ; - accidents vasculaires cérébraux 1,7 % ; - pose de pacemaker 14 % (12,8 % dans France TAVI) ; - absence de fuite paravalvulaire ou fuite grade 1 : 91,4 % (86,4 % dans France TAVI).   Et demain ?   Considérant l’importance du bassin de population nantais (plus d’un million d’habitants), l’activité de l’Institut du Thorax en matière de valvulopathie a peu de chances de fléchir. Aujourd’hui, la chirurgie reste proposée en première intention, le TAVI étant réservé aux patients à haut risque récusés pour la chirurgie. D’ailleurs la progression des procédures de TAVI ne s’est pas faite aux dépens de la chirurgie. Malgré les progrès réalisés, le TAVI demeure une technique en cours d’évaluation, d’autant plus que chaque innovation nécessite un nouvel apprentissage.

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