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HTA

Publié le 15 fév 2011Lecture 8 min

Seuils tensionnels à atteindre au cours du diabète

M. AZIZI, HEGP, Paris (d’après une communication de X. Girerd, Paris)

Les Journées de l’hypertension artérielle

La principale cause de décès chez les patients diabétiques est d’origine cardiovasculaire, en particulier par cardiopathie ischémique. Le diabète est aussi la première cause d’insuffisance rénale terminale en dialyse associée à l’hypertension artérielle, loin devant la glomérulopathie et les polykystoses rénales. Il existe une relation linéaire entre l’incidence de l’infarctus du myocarde et des complications microvasculaires du diabète avec le niveau des PAS, sans effet de seuil.

Les recommandations HAS Selon les recommandations de la HAS, les patients diabétiques font partie du groupe de patients ayant un haut risque cardiovasculaire, comme les patients ayant trois facteurs de risque, un syndrome métabolique ou une atteinte des organes cibles. Ce surcroît de risque apparaît dès les valeurs normales hautes de pression artérielle (130-139/85-89 mmHg). Les recommandations actuelles de traitement chez les patients diabétiques sont les suivantes : – intensification des mesures non pharmacologiques (perte de poids, réduction des apports sodés) ; – objectif tensionnel : < 130/80 mmHg qui a un effet protecteur sur l’apparition et la progression d’une atteinte rénale. S’il existe une protéinurie > 1 g/24 h, les recommandations de la HAS incitent à renforcer le traitement afin d’obtenir une réduction de la protéinurie à < 1 g/24 h ; – tous les traitements antihypertenseurs peuvent être utilisés et sont efficaces et bien tolérés chez les patients diabétiques ; – une combinaison de ≥ 2 antihypertenseurs est fréquemment nécessaire ; – un bloqueur du système rénine angiotensine (IEC ou ARA II) doit faire partie de toute combinaison thérapeutique et doit être le traitement préféré quand une monothérapie est suffisante ; – ces patients doivent avoir une pression artérielle monitorée à domicile par automesure tensionnelle. Les recommandations de la HAS et de la Société Européenne d’Hypertension artérielle sont similaires pour l’ensemble de ces points.   Les essais thérapeutiques récents Depuis la publication de ces recommandations, respectivement 2005 et 2007, quelles sont les nouvelles données apportées par les essais thérapeutiques ? L’essai ONTARGET qui a inclus 25 620 patients à haut risque cardiovasculaire ayant une pression artérielle moyenne de 141/82 mmHg, dont 37 % de patients diabétiques, 69 % d’hypertendus et 74 % de patients coronariens, a évalué l’efficacité d’un IEC (ramipril 10 mg/j), d’un ARAII (telmisartan 80 mg/j) et de leur combinaison pendant un suivi moyen de 56 mois sur la survenue d’un critère composite de morbi-mortalité cardiovasculaire. Sur le plan tensionnel, le ramipril et le telmisartan donnés isolément ne se différenciaient pas alors que leur combinaison abaissait la pression artérielle de 2,4/1,4 mmHg de plus que le ramipril 10 mg/j. Malgré cette baisse supplémentaire de pression artérielle, il n’y a pas d’efficacité supplémentaire de la combinaison par rapport aux monothérapies, et le telmisartan était non inférieur au ramipril. L’analyse en sous-groupe a montré que les patients diabétiques avaient le même type de résultat. La combinaison non seulement n’apporte rien en prévention des accidents cardiovasculaires, mais est associée à une augmentation du risque d’effets secondaires (hypotension, syncopes et surtout insuffisance rénale aiguë). Bien qu’il ne s’agisse pas d’un essai spécifiquement dédié à la prévention de l’insuffisance rénale, le nombre de patients inclus dans l’essai a permis d’analyser les effets de chacune des classes médicamenteuses et de leur combinaison sur un critère composite rénal associant le décès, le doublement de la créatininémie, et le passage en insuffisance rénale terminale avec hémodialyse. Le telmisartan ne se différencie pas du ramipril sur ce critère rénal, mais leur combinaison a un effet négatif, avec une augmentation de risque du critère composite rénal de l’ordre de 10 %. Celle-ci est essentiellement liée à l’augmentation du risque de survenue d’insuffisance rénale aiguë, mais le nombre d’événements est très faible. L’essai ACCOMPLISH a comparé les effets d’une combinaison IEC-ICa (bénazépril-amlodipine) à fortes doses contre la combinaison bénazépril-hydrochlorothiazide chez 11 454 patients hypertendus ayant un antécédent cardiovasculaire ou d’AVC ou de diabète (60 % de patients diabétiques). L’essai a été interrompu après 36 mois de suivi du fait d’une réduction hautement significative de 20 % de survenue du critère primaire en faveur de l’association IEC-ICa. Dans le sous-groupe des patients diabétiques, et à très haut risque associant diabète et autres facteurs de risque cardiovasculaire, le bénéfice de 20 % est retrouvé. Il est à noter que le contrôle tensionnel est beaucoup plus complexe dans ce groupe, en particulier si le seuil est fixé < 130/80 mmHg. Il n’est atteint que chez 45,9 % des patients dans le groupe IEC-ICa et chez 43,7 % des patients dans le groupe IEC-diurétique. Les traitements antihypertenseurs qu’elle que soit la combinaison sont bien tolérés. Comme attendu, il existe une augmentation de l’incidence de survenue des œdèmes des membres inférieurs sous traitement combinant un ICa (31 % versus 13 %). L’incidence des dyskaliémies est similaire dans les deux groupes, de même que celle de l’hypotension artérielle. L’essai ADVANCE avait pour objectif d’examiner si l’utilisation en routine d’une combinaison perindopril-indapamide chez des patients diabétiques à haut risque, indépendamment du niveau tensionnel, réduit les complications micro- et macrovasculaires du diabète, versus placebo. La durée du suivi moyen était de 4,3 ans. Comme attendu, l’administration de la combinaison perindopril-indapamide a réduit de 5,6/2,2 mmHg la pression artérielle par rapport au groupe placebo. À l’état basal, la pression artérielle n’était pas loin de l’objectif tensionnel puisqu’elle était à 145/81 mmHg, avec 75 % des patients prenant un traitement antihypertenseur. La combinaison perindopril-indapamide a réduit de 9 % (IC 95 %, 0-17) le risque de survenue du critère combiné de complications macro- et microvasculaires (NNT : 66 ; IC 95 %, 34-1 068). La combinaison perindopril-indapamide a réduit de 14 % (IC 95, 2-25 %) les décès et de 18 % les décès d’origine cardiovasculaire. En revanche, de façon étonnante il n’y a pas d’impact significatif sur les accidents cérébrovasculaire, malgré la variation de pression artérielle observée. Enfin, les événements rénaux sont réduits de 21 % (IC 95 %, 15-27), ce qui correspond à un NNT de 20 (IC 95 %, 15-30). De façon intéressante, après ajustement sur l’âge, le sexe, la durée du diabète, de l’hémoglobine glyquée, le traitement de l’hypertension, il existe une relation linéaire entre la survenue des événements rénaux au cours de l’essai et le niveau de pression artérielle atteint au cours de l’essai sans effet seuil. L’étude ACCORD a évalué le bénéfice d’une stratégie thérapeutique ciblant une PAS < 120 mmHg comparativement à une stratégie ciblant une PAS < 140 mmHg chez les patients diabétiques de type 2 à haut risque d’événements cardiovasculaires ? L’essai ACCORD est un essai ouvert, qui, pour le bras pression artérielle, a inclus 4 733 patients. Il s’agissait de patients ayant un diabète de type 2 stable depuis plus de trois mois, avec une HbA1C comprise entre 7,5 et 11 %, et un haut risque cardiovasculaire clinique ou infraclinique (albuminurie, hypertrophie ventriculaire gauche, athérosclérose infraclinique) ou > 2 facteurs de risque cardiovasculaire. En fonction du nombre de classes médicamenteuses antihypertensives, le niveau de PAS pour être inclus allait de 130 mmHg à 180 mmHg. L’excrétion urinaire des protéines devait être < 1 g/24 h et la créatinine devait être < 1,5 mg/dl. Dans le bras de stratégie de traitement intensive, les patients venaient en consultation de façon mensuelle pendant 4 mois puis tous les deux mois pendant toute la durée de l’essai. Une bithérapie comportant un IEC et un thiazide, ou un ARA II ou un bêtabloquant associé à un thiazide, était initiée. Les médicaments étaient ajoutés ou titrés à chaque visite de façon à atteindre la cible inférieure à 120 mmHg. Dans le groupe intervention standard, les consultations avaient lieu à un mois, 4 mois et tous les 4 mois ensuite. L’ajustement tensionnel se faisait en fonction de la cible thérapeutique. Comme attendu, la baisse de pression artérielle a été majeure dans le groupe intensif : PAS 119 mmHg comparativement à 133 mmHg. Cette différence de pression artérielle est obtenue grâce à l’utilisation d’un plus grand nombre de médicaments antihypertenseurs (3,4 vs 2,3). À l’état basal, la pression artérielle n’était que de 139/76 mmHg et 87 % des patients étaient déjà sous traitement antihypertenseur. Plus de 71 % des patients du groupe traité de façon intensive ont nécessité plus de 3 antihypertenseurs contre 39 % des patients dans le groupe traitement standard. Après un suivi moyen de 4,5 ans, la stratégie de traitement intensif n’a pas amélioré le pronostic cardiovasculaire de ces patients. Le pourcentage d’événements annuels reste faible et en deçà de ce qui avait été attendu au cours de l’essai. Dans le groupe de traitement intensif, le critère primaire composite associant IDM non mortel, AVC non mortels et mortalité cardiovasculaire, est de 1,87 %/an versus 2,09 %/an (p = 0,20). Il n’y a pas de différence significative entre les différents composants du critère primaire, excepté pour les AVC mortels ou non mortels. Il existe une réduction d’environ 40 % du risque de survenue AVC qui est significative, mais le nombre d’événements reste faible (AVC non mortel 34 dans le groupe intensif contre 55 dans le groupe standard). Le nombre de sujets nécessaires pour prévenir un AVC sur 5 ans est de 89. Alors que le bénéfice d’abaissement tensionnel en dessous de 120 mmHg pour la pression systolique est faible, voire non démontré, cette stratégie est associée à une augmentation importante de l’incidence des effets secondaires liés au traitement. Les événements indésirables graves sont observés chez 3,3 % des patients randomisés à la stratégie intensive contre 1,3 % des patients randomisés dans la stratégie standard. Le pourcentage d’hypotension orthostatique, de bradycardie, d’hyperkaliémie, d’insuffisance rénale est significativement plus élevé dans le groupe stratégie intensive que dans le groupe stratégie standard. Le nombre de sujets nécessaires pour induire un événement indésirable sur 5 ans est de 50 patients.   Nouvelles recommandations de l’ESH Compte tenu de ces essais, l’ESH a remis à jour, en partie, ses recommandations sous forme de suggestions. De nouvelles recommandations françaises et européennes sont encore en attente. Dans l’immédiat, les recommandations européennes confirment que le traitement antihypertenseur doit être initié lorsque la pression artérielle clinique est ≥ 140 et/ou 90 mmHg. Elles ne recommandent pas de traiter les patients ayant une pression normale haute, sauf en présence d’une atteinte des organes cibles tels qu’une microalbuminurie. Le seuil < 130/80 mmHg n’est pas complètement validé, et reste difficile à obtenir. Toutes les classes d’antihypertenseurs peuvent être utilisées pour réduire la pression artérielle et doivent être considérées pour le traitement des patients diabétiques ; une combinaison de traitements est le plus souvent nécessaire et un traitement par bloqueur du système rénine-angiotensine doit faire partie du traitement. Les combinaisons possibles entre les différentes classes d’antihypertenseurs provenant des résultats de ces 3 essais, sont l’utilisation des diurétiques thiazidiques, des IEC et/ou des ARA II et des ICa.

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