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Valvulopathies

Publié le 03 juin 2008Lecture 5 min

Les critères d'une insuffisance valvulaire physiologique

C. ROIRON et J.-L. MONIN, CHU Henri Mondor, Créteil

L’échocardiographie permet de détecter les régurgitations valvulaires minimes, physiologiques dans la majorité des cas. Dans la cohorte de Framingham, une insuffisance mitrale, aortique ou tricuspide était présente chez respectivement 90 %, 10 % et 85 % des patients. Il est donc important pour le clinicien de différencier une régurgitation physiologique d’une véritable pathologie valvulaire devant bénéficier d’une prise en charge diagnostique et thérapeutique appropriée. Pour affirmer le caractère physiologique d’une régurgitation, il est indispensable de préciser l’anatomie valvulaire et de vérifier la concordance des différents indices de quantification.

Insuffisance mitrale  Dans la Framingham heart study(1) une insuffisance mitrale (IM) était décelable chez 87,7 % des hommes et 91,5 % des femmes. L’incidence des fuites de grade ≥ 2/4 était respectivement de 19 et 19,1 % ; cette incidence était croissante avec l’âge. De même, la sévérité des fuites était corrélée à l’âge et à l’HTA ainsi qu’aux faibles index de masse corporelle.   Reconnaître les mécanismes L’anatomie fonctionnelle mitrale est très importante pour évaluer la sévérité d’une IM. En effet, une fuite physiologique survient sur un appareil valvulaire et sous-valvulaire (comprenant le support ventriculaire) normal. Il s’agit d’un jet central, le jeu valvulaire est respecté. Chez les sujets âgés, une fuite physiologique minime à modérée peut être causée par des calcifications annulaires. Il faut rappeler que seule la voie parasternale grand axe ou la coupe 3 cavités permet de porter le diagnostic de prolapsus afin de ne pas conclure abusivement à une fuite organique (figure 1). En effet, du fait de la forme en selle de cheval de l’anneau, une vue 4 cavités donne fréquemment un faux aspect de prolapsus. Le prolapsus vrai est souvent associé à un épaississement valvulaire (épaisseur TM du feuillet antérieur mesurée en mésodiastole > 5 mm en TM voie parasternale grand axe). Les éléments de quantification pour affirmer une fuite minime à modérée sont rappelés tableau 1(2). Figure 1. En vue apicale 4 cavités, aspect physiologique de l’anneau mitral en selle à cheval, à ne pas confondre avec un prolapsus dont le diagnostic doit être posé exclusivement sur une vue parasternale grand axe ou apicale 3 cavités. Le contexte de cardiopathie Par ailleurs, en cas de cardiopathie sous-jacente, le seuil de sévérité d’une IM, en termes de surface d’orifice régurgitant (SOR), est abaissé. Il est actuellement reconnu que l’insuffisance mitrale sur cardiopathie, ischémique ou dilatée, est restrictive (type III de Carpentier) : elle est due à l’écartement des piliers latéralement et vers l’avant, du fait de la dilatation avec remodelage sphérique du ventricule gauche. Une fuite minime à première vue ne doit pas être négligée puisqu’il faut tenir compte de la composante dynamique de l’IM, dont la sévérité peut varier rapidement en fonction du rythme cardiaque (fibrillation auriculaire), du niveau de pression artérielle, à l’effort ou plus rarement en cas d’ischémie myocardique. De ce fait, dans le contexte d’une altération de la fonction systolique VG (fraction d’éjection < 45 %), une IM est considérée comme significative en cas de SOR > 20 mm(2,3). L’échographie d’effort peut alors être proposée pour apprécier la composante dynamique avec une bonne valeur pronostique(4).   Insuffisance aortique Dans la cohorte de Framingham, une insuffisance aortique (IAo) était observée chez 13 % des hommes et 8,5 % des femmes. Les déterminants de régurgitation étaient l’âge et le sexe masculin. Dans la Strong Heart Study(5), 10 % d’IAo étaient rapportés, dont 7 % grade 1. Les fuites aortiques physiologiques sont rares avant 50 ans. Après 60 ans, elles sont plus fréquentes et dues à une légère dilatation de l’anneau avec épaississement valvulaire (figure 2). Elles sont centrales et localisées à la zone sous-valvulaire. Figure 2. Fuite aortique physiologique, jet central strictement sous valvulaire en incidence parasternale grand axe, critères de quantification en faveur d’une fuite mitrale (ici PHT > 500). Les étiologies prédominantes de fuite pathologique sont actuellement les anomalies de la crosse aortique et les bicuspidies. L’examen devra donc mesurer les diamètres aortiques à 4 niveaux : anneau valvulaire, sinus de Valsalva, jonction sino-tubulaire et portion ascendante (figure 3). L’indexation de la mesure à la surface corporelle est recommandée en particulier chez les patients de petite surface corporelle et les femmes ; cependant, il n’existe pas encore de norme internationale concernant d’éventuelles valeurs seuil indexées pour proposer une chirurgie prophylactique de l’aorte. Figure 3. Analyse de l’aorte ascendante voie parasternale grand axe en faveur d’une fuite organique avec dilatation des sinus de Valsalva, confirmée par la mise en évidence d’une bicuspidie en coupe petit axe. Les principaux critères de quantification d’une IAo sont rappelés dans le tableau 2. Insuffisance tricuspide Dans la Framingham heart study, une fuite tricuspide était décelable chez 82 % des hommes et 85,7 % des femmes. Les fuites supérieures ou égales au grade 2 étaient rencontrées dans respectivement 14,8 et 18,4 % des cas. Une minime IT est fréquemment retrouvée chez les sujets normaux. Les fuites pathologiques sont le plus souvent fonctionnelles par dilatation de l’anneau. En cas d’insuffisance tricuspide, il faut également préciser l’anatomie valvulaire et l’intégrité des cavités droites. Pour mémoire, le tableau 3 résume les paramètres de quantification de l’insuffisance tricuspide. Prophylaxie de l’endocardite infectieuse  Les recommandations françaises 2002 pour la prophylaxie de l’endocardite infectieuse définissent deux groupes à risque : - le groupe A comporte les cardiopathies à haut risque (prothèses valvulaires, cardiopathies congénitales, antécédent d’endocardite) ; - le groupe B, les cardiopathies à risque moins élevé dont l’insuffisance aortique, l’insuffisance mitrale et les bicuspidies aortiques ; - en dehors de ces deux groupes, sont rappelées les situations où il n’y a pas d’augmentation d’incidence d’endocardite par rapport à la population générale, dont les régurgitations valvulaires minimes uniquement détectées en échographie Doppler, le prolapsus mitral sans régurgitation ni épaississement valvulaire anormal et les souffles valvulaires fonctionnels. Par ailleurs, sont détaillés les facteurs orientant le choix dans les situations où l’antibioprophylaxie de l’endocardite est optionnelle (soins dentaires dans le groupe B par exemple) : âge > 65 ans, insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique, diabète, immunodépression, hygiène bucco-dentaire défectueuse, geste techniquement difficile ou saignement important. Ainsi, dans l’insuffisance mitrale physiologique la prophylaxie n’est pas recommandée, considérant que le risque d’endocardite est faible. Par contre, pour l’insuffisance aortique, vu l’incidence variable d’endocardite selon les séries, la prophylaxie sera discutée au cas par cas.   Prise en charge à long terme Concernant le suivi du patient à long terme, les recommandations de la filiale d’échocardiographie de la Société française de cardiologie stipulent qu’en cas d’IAo ou d’IM minime sans retentissement ventriculaire gauche et avec des paramètres cliniques stables, un suivi échographique annuel n’est pas justifié(8) ; il semble raisonnable dans ce cas de contrôler l’échographie tous les 2 à 3 ans.

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