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Focus

Publié le 25 oct 2024Lecture 6 min

Fermeture percutanée de la CIA ostium secondum - Retour d’expérience sur 2 253 procédures

Grégoire ALBENQUE, Estibaliz VALDEOLMILLOS, Claire FORAY, Régine ROUSSIN, Clément BATTEUX, Jérôme PETIT, Sébastien HASCOËT, Hôpital Marie Lannelongue, Centre de référence des malformations cardiaques congénitales complexes (M3C), Le Plessis Robinson

La communication interatriale ostium secondum (CIAos) est l’une des malformations cardiaques congénitales les plus courantes. De nombreux patients restent souvent asymptomatiques, ce qui conduit à des diagnostics tardifs à l’âge adulte. Au fil du temps, les patients peuvent développer des complications progressives qui affectent significativement la morbi-mortalité telles que l’arythmie supraventriculaire, l’insuffisance cardiaque droite et l’hypertension artérielle pulmonaire(1).
Depuis les années 2000, la fermeture percutanée des CIAos est devenue le traitement de première ligne pour la grande majorité des enfants et des adultes, offrant une alternative à la chirurgie. Malgré l’adoption précoce de cette technique, des complications rares mais graves ont rapidement été décrites telles que l’érosion aortique et l’embolisation de la prothèse. Le cardiologue et le pneumologue peuvent être aussi confrontés à l’indication de la fermeture percutanée en présence d’une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP).

Grâce à une cohorte de 2 253 patients consécutifs ayant eu une fermeture percutanée de CIAos à l’hôpital Marie Lannelongue entre 1998 et 2021 nous allons présenter ici ces potentielles complications et leur prise en charge.   DESCRIPTION DE LA POPULATION   Il s’agit d’une étude de cohorte monocentrique menée sur les patients adressés à l’hôpital Marie Lannelongue. Entre mai 1998 et décembre 2021, tous les patients référés pour une fermeture percutanée de CIAos à l’aide de l’Amplatzer™ Septal Occluder (ASO, Abbott) ont été inclus prospectivement dans une base de données dédiée. Les données cliniques, paracliniques et de suivi ont été rétrospectivement collectées à partir des dossiers médicaux. Ce travail a notamment pu être réalisé grâce aux financements de la Fédération française de cardiologie et la société Abbott.   MÉTHODE PROCÉDURALE UTILISÉE   De 1998 à 2005, la procédure était réalisée sous anesthésie générale avec intubation orotrachéale et guidage par échocardiographie transœsophagienne. Depuis 2005, le guidage par échocardiographie transthoracique (E T T) était utilisé pour la quasi-totalité des patients, quel que soit leur âge ou les caractéristiques de la CIAos. Les procédures guidées par l’ETT ont été réalisées sous sédation profonde chez les enfants de moins de 18 ans et sous anesthésie locale chez les autres patients. Une calibration de la CIAos était faite de façon quasi systématique pour l’appréciation des berges et la mesure du diamètre étiré de la CIAos. Cependant, pour éviter de surdimensionner le diamètre de cette dernière, la technique du pull-through était utilisée. En effet, sous-estimer la taille de la CIAos engendre un risque d’embolisation de la prothèse et surestimer le diamètre est à risque de conflit avec les structures adjacentes. Pour le calibrage de la CIAos, une évaluation fluoroscopique du diamètre étiré du ballon était réalisée à l’aide d’un ballon Medi-Tech Equalizer™ de 27 ou 33 mm (Boston Scientific) ou Amplat zer™ de 24 mm. Avant largage, un contrôle de la prothèse à l’ETT associé à la manœuvre Minnesota sont systématiquement faits.   RÉSULTATS   Caractéristiques de la population Entre mai 1998 et décembre 2021, 2 253 patients ont eu une fermeture percutanée de CIAos par A SO. L a médiane d’âge des patients était de 27 ans (Q1 : 11 ans ; Q3 : 49 ans). La cohorte comprenait 865 enfants et 1 387 adultes, dont 38 enfants (1,7 %) pesant moins de 15 kg. La taille moyenne maximale de la CIAos était de 18 mm. Une berge rétroaortique < 5 mm a été observée chez 22,7 % des patients et 0,9 % des patients avaient une berge de la veine cave inférieure (VCI) < 5 mm. En effet, les patients avec une déficience de la berge VCI sont rarement orientés vers la fermeture percutanée car plus à risque d’embolisation. L a taille moyenne de l’ASO était de 23 mm (figure 1) soit en moyenne 5 mm de plus que la taille de la CIAos en échocardiographie. Le succès de la procédure était de 98,1 % des cas, taux de succès plus faible chez les patients avec un ratio taille en échocardiographie de la CIAos/surface corporelle (SC) ≥ 20 mm/m², ratio décrit dans la littérature comme plus à risque de complication(2). Cependant, le taux succès procédural était de 100 % chez les 38 enfants de moins de 15 kg. Il n’y avait pas de différence statistiquement significative sur le succès de la procédure concernant les trois sous-groupes d’âge (< 18 ans ; 18-40 ans ; > 40 ans). Figure 1. Nombre de prothèses ASO implantées en fonction de la taille.   Complications procédurales Le taux de complication majeure était faible, de 1,37 %. Les facteurs de risque classiquement associés aux complications qui sont une large prothèse et l’absence de berge rétroaortique(3) ne l’étaient pas dans notre étude. Deux érosions cardiaques ont été observées, elles se sont manifestées dans les 48 h postprocédure par une tamponnade. Il ne s’agissait pas de large prothèse et un des patients avait une berge rétroaortique > 5 mm. La complication grave la plus fréquente était l’embolisation de la prothèse (proche de 1 % dans notre cohorte). Cette dernière sur venait vers la voie droite ou gauche. Historiquement, le retrait se faisait chirurgicalement, mais depuis plus de 10 ans il peut se faire par voie percutanée et dans le même temps il est souvent possible d’implanter une nouvelle prothèse plus large (figure 2). Figure 2. Embolisation de la prothèse dans l’aorte abdominale avec recapture (A) puis nouvelle calibration CIA (B) et implantation d’une ASO plus large de 30 mm (C).   Toutes les embolisations sont sur venues durant les 24 h après la procédure. Dans notre cohorte un des éléments anatomiques identifié à risque d’embolisation était la déficience de berge VCI. Un cas de BAV complet perprocédure ayant nécessité le retrait chirurgical de la prothèse avec récupération progressive d’un rythme sinusal continu est survenu chez un enfant. Devant un BAV de haut degré et dans le cas de CIAos familial, la recherche NkX 2.5 peut être justifiée(4). Il n’y avait pas de différence statistiquement significative sur la présence de complication majeure dans l’analyse des sous-groupes d’âge et chez les petits poids < 15 kg. Ces résultats justifient une surveillance rapprochée des patients dans les 48 premières heures durant lesquelles peuvent survenir les complications les plus redoutables avec une prise en chirurgicale urgente. L’analyse des berges est une étape fondamentale pour la sélection des patients, notamment celle de la veine cave inférieure, essentielle pour une stabilité optimale de la prothèse.   Particularités des CIAos multiples De façon régulière le cardiologue peut être confronté à la présence d’un septum interatrial multiperforé. Cette particularité morphologique ne contre-indique pas la prise en charge percutanée. Plusieurs solutions techniques sont envisageables. Souvent une seule prothèse permet de couvrir plusieurs défects proches. Parfois une fermeture avec plusieurs prothèses (environ 1 % de notre cohorte) peut être nécessaire lorsque les orifices sont à distance (figure 3). Dans notre expérience, l’usage de la prothèse cribiforme (Amplatzer™ Cribriform Occluder) demeure rare compte tenu du faible diamètre du moyeu central et du risque de shunt résiduel. L’utilisation de plusieurs prothèses était associée à un taux de succès comparable, sans risque de complication significatif additionnel. Figure 3. Fermeture CIAos par 3 prothèses ASO.   Particularités de la CIAos dans le contexte d’HTAP Le cardiologue peut être confronté à la découverte d’une CIAos dans le cadre d’une HTAP. Dans ce cas de figure, une mesure rigoureuse des résistances vasculaires pulmonaires (RVP) par méthode de Fick doit être réalisée lors du cathétérisme. Les recommandations stipulent qu’une fermeture percutanée est possible lorsque les RVP sont < 5 UW avec un shunt significatif (Qp/Qs > 1,5)(1). Lorsque les RVP sont supérieures à 5 UW une stratégie de treat and repair doit être discutée avec un centre de référence ou de compétence en H TAP. Ce s patients peuvent en effet, après mise en place d’un traitement et une réévaluation des RVP par méthode de Fick , être implantés d’une prothèse. Cette stratégie permet une diminution significative des pressions pulmonaires et des RVP dans le suivi comme nous l’avons démontré dans un travail publié récemment dans l’European Respiratory Journal(5).   CONCLUSION   La fermeture percutanée de CIAos est une procédure sûre et efficace pour un large panel de patients. Les complications majeures sont rares (1,37 %) mais nécessitent une prise en charge urgente. Une déficience de la berge cave inférieure est associée à ces complications majeures à court terme. Cette procédure est également réalisable en cas de CIAos multiples et/ou en présence d’une HTAP après évaluation par une équipe expérimentée.

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