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Explorations-Imagerie

Publié le 16 oct 2007Lecture 7 min

Qu'apportent les marqueurs biologiques dans les valvulopathies ?

D. DÉTAINT, hôpital Bichat, Paris

Dans les pathologies valvulaires, le développement d’altérations auriculaires et ventriculaires gauches est souvent insidieux et associé à un mauvais pronostic. Ainsi, l’existence d’un marqueur biologique capable de déceler précocement ces altérations serait d’un intérêt considérable. Dans l’insuffisance mitrale organique et le rétrécissement aortique, les peptides natriurétiques sont principalement corrélés aux symptômes et à l’importance du remodelage cardiaque, reflétant ainsi les conséquences de la maladie.

Les peptides natriurétiques sont des marqueurs pronostiques. En effet, la présence de taux élevés de BNP et NT-proBNP est associée à la survenue de décès et d’événements cardiovasculaires indésirables, indépendamment des autres indices de mauvais pronostic. Ces peptides pourraient ainsi participer à l’identification des patients à haut risque et à la sélection des éventuels candidats à la chirurgie. Le BNP est un outil prometteur dans l’évaluation des valvulopathies, mais des études à plus grande échelle, incluant principalement des patients asymptomatiques, sont nécessaires pour envisager son utilisation en routine et son intégration dans un arbre décisionnel. Les peptides natriurétiques ont-ils une place dans l’évaluation des valvulopathies ? Les stratégies de prise en charge des valvulopathies reposent principalement sur la présence de symptômes et sur l’estimation échographique de la sévérité de l’atteinte valvulaire et ventriculaire gauche (VG). L’évaluation de la gêne fonctionnelle est essentielle, mais la distinction entre patients asymptomatiques et pauci-symptomatiques est parfois difficile, particulièrement chez les patients âgés qui réduisent leur activité. De même, l’analyse échographique du retentissement VG n’est pas toujours évidente. Ainsi, l’existence d’un marqueur biologique capable de déceler précocement les altérations VG dans les valvulopathies mitrales et aortiques serait d’un intérêt considérable. Dans l’insuffisance cardiaque et les cardiopathies ischémiques, les peptides natriurétiques reflètent le degré de remodelage VG et sont d’importants marqueurs pronostiques. La tentation d’établir un parallèle dans les valvulopathies est grande. Cependant, avant d’envisager le dosage en routine du BNP dans les pathologies valvulaires chroniques, plusieurs questions doivent être soulevées : • les taux de BNP sont-ils plus élevés chez les patients avec une valvulopathie que dans une population témoin ? • l’activation du BNP est-elle le reflet des symptômes, de la sévérité de la maladie ou du retentissement de la valvulopathie ? • le BNP peut-il être utilisé pour la stratification du risque ? Activation du BNP dans les valvulopathies La comparaison des taux de peptides natriurétiques dans une population témoin et chez des patients avec insuffisance mitrale (IM) organique ou rétrécissement aortique permet de conclure que le BNP est bien activé dans les pathologies valvulaires.   L’insuffisance mitrale organique   Peptides et symptômes Les principales études publiées mettent en évidence une relation entre BNP et classe NYHA. Chez la plupart des patients, l’apparition de symptômes peut être facilement retrouvée par l’interrogatoire ; en revanche, elle peut être plus difficile à déceler chez d’autres, en particulier chez les sujets âgés qui limitent leur activité ou minimisent leur gêne fonctionnelle. Peptides et sévérité de l’IM Le BNP a tendance à augmenter avec le degré de l’IM, mais comme le montre la figure 1, il existe une grande variabilité des concentrations de BNP pour un grade donné et un important chevauchement des valeurs entre deux grades consécutifs. Ainsi, le BNP ne peut pas servir de substitut à l’évaluation échographique de l’IM. Figure 1. Valeur de BNP, selon de grade de l’insuffisance mitrale (minime, modéré ou sévère) définie par la fraction de régurgitation. Peptides et conséquence de l’IM Dans l’IM organique, le BNP reflète principalement les conséquences auriculaires, ventriculaires et hémodynamiques de l’IM. Il augmente, en effet, avec le volume de l’oreillette gauche, la fibrillation auriculaire, le volume télésystolique ventriculaire gauche indexé et les pressions pulmonaires. Dans l’insuffisance mitrale organique, le BNP reflète essentiellement les conséquences hémodynamiques, auriculaires et ventriculaires de l’IM, indépendamment de la sévérité de la maladie. Intérêt pronostique du BNP dans l’insuffisance mitrale organique Le BNP peut être utilisé comme marqueur pronostique : sa mesure au moment du diagnostic prédit la survenue de décès ou d’événements cardiovasculaires indésirables (décès ou épisodes d’insuffisance cardiaque), indépendamment des marqueurs de mauvais pronostic habituellement reconnus dans l’IM (symptômes, fraction d’éjection et sévérité de la régurgitation). Les figures 2 et 3 montrent la relation entre les événements et des taux de BNP (la valeur seuil correspondant à la valeur médiane du BNP dans l’étude). Figure 2. Courbe de Kaplan-Meier de survie sous traitement médical des patients ayant une insuffisance mitrale organique, selon que leur taux de BNP est supérieur (ligne verte) ou inférieur (ligne rouge) à la valeur médiane de 31pg/ml. Figure 3. Courbe de Kaplan-Meier de survenue de décès ou d’épisodes d’insuffisance cardiaque sous traitement médical des patients ayant une insuffisance mitrale organique, selon que leur taux de BNP est supérieur (ligne verte) ou inférieur (ligne rouge) à la valeur médiane de 31pg/ml. Dans l’IM, le BNP est un marqueur de mauvais pronostic clinique, ce qui suggère qu’il puisse être utilisé dans la stratification du risque.   Le rétrécissement aortique   Peptides et symptômes Dans l’histoire naturelle du rétrécissement aortique (RA), l’apparition de symptômes constitue un tournant évolutif radical et impose le remplacement valvulaire aortique lorsqu’il n’y a pas de contre-indication à la chirurgie. Parfois l’évaluation des symptômes est difficile, en particulier chez les sujets âgés ou chez les patients ayant une présentation atypique (comme une fatigabilité). Plusieurs équipes se sont donc intéressées au rôle des peptides natriurétiques dans l’évaluation du statut fonctionnel, et ont démontré que les taux de peptides natriurétiques sont plus élevés chez les patients symptomatiques que chez les sujets asymptomatiques, indépendamment de l’âge, du sexe, de la créatinine, de la fraction d’éjection et de la surface valvulaire. Un des intérêts majeurs du BNP serait de pouvoir discriminer les patients en classe NYHA I des patients en classe II, mais les données sur ce sujet sont divergentes. Peptides et sévérité de la maladie Les peptides natriurétiques dans le RA ne seraient pas seulement un simple reflet du statut fonctionnel, mais également des marqueurs de sévérité de la maladie. En effet, les taux de BNP et NT-proBNP sont corrélés avec le gradient moyen transaortique et inversement corrélés avec la surface valvulaire. La réponse à cette surcharge chronique de pression imposée au VG est une hypertrophie concentrique avec préservation de la fraction d’éjection, qui ne sera altérée qu’à un stade très tardif de l’évolution. Les peptides natriurétiques sont activés à chaque stade de la maladie. Il semble, en effet, que le BNP soit « up-régulé » dès la présence d’une surcharge de pression, bien avant le développement de l’hypertrophie concentrique ; plus tardivement sa synthèse serait corrélée au degré d’hypertrophie et à la dysfonction VG. Rôle pronostique Une mesure élevée du BNP et du NT-proBNP au moment de l’inclusion chez les patients asymptomatiques est associée à la survenue de symptômes au cours de l’évolution. Dans une étude autrichienne sur 43 patients asymptomatiques à l’inclusion, 14 ont développé des symptômes au cours du suivi ; les taux de NT-proBNP et de BNP étaient significativement plus élevés chez les patients ayant développé des symptômes que chez ceux restés asymptomatiques. Ces résultats ont été confirmés en analyse multivariée où seuls le NT-proBNP et la fraction d’éjection étaient indépendamment associés à la survenue de symptômes. Le BNP et le NT-proBNP mesurés à l’inclusion semblent être également d’excellents marqueurs du pronostic postopératoire mesuré par la survie, la présence de symptômes postopératoires et la fraction d’éjection postopératoire, indépendamment des marqueurs pronostiques habituels. En cas de RA, les peptides natriurétiques sont des outils prometteurs pour la stratification du risque ; leurs concentrations plasmatiques augmentent avec la sévérité et le stade de la maladie.   Limites  La possibilité d’utiliser les peptides natriurétiques comme marqueurs pronostiques dans les valvulopathies est séduisante, en particulier chez les patients asymptomatiques. Toutefois, le rôle pronostique du BNP n’a pas été spécifiquement étudié dans cette population de patients asymptomatiques porteurs d’une valvulopathie sévère. Chez les patients avec RA asymptomatiques, l’évaluation hémodynamique à l’effort permet d’identifier les patients à risque de développer des symptômes et d’avoir recours à la chirurgie. Il pourrait être intéressant d’intégrer le dosage du BNP dans l’évaluation des valvulopathies à l’effort, mais aucune donnée n’est actuellement disponible.   Applications cliniques et conclusions   Les peptides natriurétiques sont activés dans les pathologies valvulaires et principalement associés à l’importance du remodelage ventriculaire gauche et au degré d’atteinte valvulaire. Ainsi, dans l’IM organique et le RA, l’élévation du BNP et du NT-proBNP doivent attirer l’attention des cliniciens sur la présence d’altérations hémodynamiques, ventriculaires et auriculaires gauches qui ne sont pas toujours évidentes à mesurer échographiquement. Les peptides natriurétiques peuvent aider à identifier la survenue de symptômes lorsque l’évaluation fonctionnelle est difficile. Enfin, dans les pathologies valvulaires les peptides natriurétiques sont associés à la survenue d’événements cardiovasculaires défavorables. Ainsi, les patients ayant une IM ou un RA sévère et des taux élevés de BNP ou NT-proBNP doivent être considérés à haut risque et être suivis de manière rapprochée et régulière. Dans les pathologies valvulaires, le BNP et le NT-proBNP semblent être des outils prometteurs dans l’évaluation des symptômes, du remodelage VG et du pronostic. Mais pour mieux préciser leur utilisation en routine et leur intégration dans un arbre décisionnel, des études à plus grande échelle doivent être réalisées pour confirmer ces résultats préliminaires prometteurs.

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