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Polémique

Publié le 30 nov 2011Lecture 4 min

Multiplier les points de stimulation ventriculaires : complications ou bénéfices ?

P. RITTER, Hôpital Haut Lévêque, CHU de Bordeaux

Une sonde pour le ventricule droit et une autre pour le ventricule gauche : on appelle ça la resynchronisation ventriculaire ! Comment peut-on imaginer resynchroniser correctement les deux ventricules avec seulement deux points de stimulation étant donné la taille que peuvent atteindre les ventricules de certains patients ? Ajoutons à cela les 30 % de non-répondeurs en moyenne, et l’on comprend qu’il faille faire mieux. Multiplier les points de stimulation ventriculaires, cela est logique, mais est-ce faisable, est-ce utile, ou est-ce encore une complication pour nous, praticiens, mais surtout pour nos malades ?

L’élément limitant non surmonté : la connexion des sondes au boîtier de resynchronisation Attention, avant d’aller plus loin, quand on parle de multiplier les points de stimulation ventriculaire, il ne s’agit pas que d’ajouter une sonde ventriculaire pour faire de la stimulation biventriculaire un trépied de stimulation. En effet, pour connecter plus de sondes, il est nécessaire d’utiliser un connecteur en Y. Ce connecteur doit être double bipolaire, assurant la stimulation cathodique par les électrodes distales des deux sondes connectées ensemble au port ventriculaire gauche du boîtier.  Ce montage a les conséquences suivantes : Les configurations uni- et bipolaires sont disponibles sur les deux sondes à la fois.  L’amplitude à programmer dépend de la sonde au seuil le plus élevé, et l’impédance de stimulation est très basse ; ce sont des facteurs de consommation énergétique parfois très importante.  Les seuils de chacune des deux sondes étant le plus souvent différents, exclure une sonde en diminuant l’énergie de stimulation programmée revient à supprimer celle qui offre le seuil le plus élevé, sans pouvoir choisir la sonde que l’on souhaite éteindre.  La stimulation est simultanée sur les deux sondes connectées ensemble. Enfin, les deux sondes connectées ensemble ne doivent pas être branchées au port ventriculaire droit d’un défibrillateur. Le double comptage des QRS est alors inévitable ainsi que ses conséquences ! Le second élément limitant : l’encombrement du réseau veineux En effet, nous parlons bien de quatre sondes (et le plus souvent l’une d’entre elles est une sonde de défibrillation). Les reprises chirurgicales et l’éventuel échange ultérieur de sondes deviennent des problèmes très complexes qui exigent une excellente expertise, et encore ! Alors : deux à droite et une à gauche, ou une à droite et deux à gauche ? Deux à droite et une à gauche La méthode est simple car la 2e sonde peut être déplacée relativement facilement dans le ventricule droit (VD), et les seuils sont bons (figure 1). L’engouement n’a pas été spectaculaire malgré les démonstrations de Serge Cazeau –  faites il est vrai à partir de données écho qui sont sur la sellette depuis PROSPECT.   Figure 1. Vue antéropostérieure : une sonde atriale (en haut à gauche), une sonde VD infundibulaire (en haut à droite), une sonde VG dans une veine coronaire latéro-postérieure gauche (au milieu), et une sonde VD apicale (en bas à droite). Deux à gauche et une à droite Certains affirment que la resynchronisation du ventricule gauche (figure 2) serait plus importante que la resynchronisation droite-gauche, mais où sont les preuves ? C’est un exercice beaucoup plus difficile. Il y a 15 % d’échecs d’implantation en début d’expérience et pour tous ceux qui l’ont tenté, et un taux de déplacement à l’avenant. Et pourtant, par rapport à la stimulation classique biventriculaire, les résultats sont là :  – une fraction d’éjection plus élevée ; – des volumes ventriculaires plus faibles ; – une meilleure resynchronisation par l’étude du strain segmentaire, etc.   Figure 2.  Vue oblique antérieure gauche : une sonde atriale (à gauche), une sonde VD de défibrillation, double coil, apicale (en bas), une sonde VG dans la grande veine coronaire antérieure (au milieu), une sonde VG dans une veine coronaire latérale gauche (à droite). Y a-t-il d’autres méthodes ? Cependant, si les bénéfices sont au rendez-vous, alors ne faut-il pas trouver d’autres méthodes que la mise en place de deux sondes séparées par la voie du sinus coronaire ? La stimulation ventriculaire par deux dipôles le long de la même sonde (sonde Quartet™ de St. Jude Medical) (figure 3). Dans l’esprit des concepteurs de cette sonde, le but est avant tout de s’affranchir de la stimulation phrénique et de réduire les énergies de stimulation. Le bénéfice hémodynamique potentiel est en voie d’investigation.  On peut faire appel aux chirurgiens pour s’affranchir de l’anatomie des veines coronaires et placer les sondes là où on le souhaite, n’importe où à la surface du ventricule gauche et ainsi optimiser la position des sondes. Il s’agit d’une méthode très utile lors de la remise en place d’un système complexe après infection du système précédent. La mise en place devient difficile s’il existe des symphyses pleurales ou péricardiques et les seuils ne sont pas toujours bons. Les suites opératoires sont aujourd’hui simplifiées si l’implantation des sondes gauches est effectuée à l’aide d’un système robotique du fait de la petite taille des voies d’abord (figure 4).  Figure 3.  Sonde VG pour veine coronaire, munie de 4 électrodes, permettant la stimulation gauche par deux dipôles en même temps. Figure 4.  Mise en place de sondes de stimulation VG sur le péricarde grâce à deux outils passés par deux orifices transthoraciques (plus la caméra), et manipulés par robot. Conclusion La stimulation multisites ventriculaire est elle mature ? Sûrement pas ! Elle doit rester du domaine de la recherche clinique. Il faut fiabiliser, trouver la bonne voie d’abord et surtout prouver son efficacité. Nous sommes sur la bonne voie !

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