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Actualités

Publié le 30 mar 2017Lecture 25 min

Le congrès du GRCI France 2016

Charles-Edouard LUYT et coll.*, Hôpital Pitié Salpêtrière, Paris

Le congrès du GRCI France 2016 a réuni 1 000 participants en décembre 2016 à Paris. Le Groupe de Réflexion sur la Cardiologie Interventionnelle (GRCI) est constitué de professionnels de santé intéressés par le partage d’expériences et la transmission d’informations sur la cardiologie interventionnelle. Le congrès du GRCI France 2016 a présenté des informations aux participants leur permettant d’améliorer leurs connaissances et de situer leurs pratiques avec une quarantaine de sessions médicales et paramédicales. Le GRCI remercie la revue Cath’Lab de permettre à ses lecteurs de découvrir (ou redécouvrir) certaines thématiques présentées et discutées lors du GRCI France 2016.

Gestion du choc cardiogénique : quelle assistance ? C.-E. LUYT Le pronostic du choc cardiogénique à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde (IDM) reste sombre, avec une mortalité comprise entre 50 et 80 % selon les séries(1). Le choc cardiogénique réfractaire (choc cardiogénique ne répondant pas ou s’aggravant sous traitement médical optimal) en est la forme ultime. Il peut être défini cliniquement par un tableau associant un débit cardiaque effondré (index cardiaque < 2,2 l/min/m2 ou fraction d’éjection ventriculaire gauche [FEVG] < 20 % et intégrale temps-vitesse sous-aortique mesurée par échocardiographie < 8 cm) responsable d’une hypoper fusion tissulaire persistante (acidose lactique, défaillance rénale, neurologique et/ou hépatique persistante) malgré l’administration de fortes doses de catécholamines (adrénaline > 0,2 μg/kg/min ou dobutamine > 20 μg/kg/min associée à la noradrénaline > 0,2 μg/kg/min) et l’optimisation de la volémie. Dans ce tableau clinique de choc réfractaire, le recours à l’assistance circulatoire peut être nécessaire chez certains patients. Ballon de contre-pulsion intra-aortique Bien que les premiers registres rétrospectifs soient en faveur du ballon de contre-pulsion intraaortique (BCPIAo) dans le choc cardiogénique à la phase aiguë de l’IDM(2), l’essai IABP-Shock II (étude randomisée avec BCPIAo versus traitement médical dans le choc cardiogénique à la phase aiguë de l’IDM) a permis de montrer l’absence de bénéfice clinique de ce dispositif(3). À l’heure actuelle, il n’est donc plus recommandé et son utilisation doit être réservée aux complications mécaniques (communication interventriculaire, insuffisance mitrale aiguë) en attendant la chirurgie(1). Système Impella® Le système Impella® (Abiomed) est une assistance monoventriculaire gauche implantée par voie percutanée ou chirurgicale (figure 1). Il en existe 3 types de calibre avec des performances différentes (tableau 1). L’Impella® 2.5 et l’Impella® CP sont implantables par voie percutanée, en salle de coronarographie, sous amplificateur de brillance, alors que l’Impella® 5.0 nécessite un abord chirurgical. Même si l’Impella® 5.0 a une durée de vie plus longue que les autres, le principal problème de ces machines est leur fragilité (dysfonctionnement rapide). Le risque d’hémolyse est plus important avec le système 2.5 que le système 5.0 et on a une absence d’efficacité en cas de dysfonction biventriculaire. Bien qu’il existe des données rétrospectives montrant l’intérêt d’un tel dispositif dans la prise en charge du choc cardiogénique(4), un essai randomisé récent a montré l’absence d’intérêt de l’Impella® CP dans la prise en charge du choc cardiogénique par rapport à une prise en charge standard incluant l’utilisation du ballon de contre-pulsion intraaortique(5). À l’heure actuelle, du fait de l’absence de données fiables, on ne peut donc pas recommander l’Impella® comme mode d’assistance. D’autres études sont nécessaires afin de préciser son éventuel intérêt. * Durée de vie approximative reposant sur notre expérience. Figure 1. Système Impella(R) (Abiomed). Système ECMO/ECLS L’ECMO (ExtraCorporeal Membrane Oxygenation ou oxygénation extracorporelle à membrane) ou ECLS (ExtraCorporeal Life Support) est une technique d’assistance cardiopulmonaire. Le sang est prélevé dans l’oreillette droite via une canule implantée par voie fémorale, et le sang une fois oxygéné est réinjecté en rétrograde via une canule implantée dans l’artère iliaque (figure 2). Bien que cette assistance soit imparfaite, elle reste à ce jour la plus utilisée dans le choc cardiogénique réfractaire. Outre l’amélioration de l’hématose (en raison de la présence d’un oxygénateur à membrane), l’ECMO a l’avantage d’une durée de vie plus longue que l’Impella®, des durées d’assistance par ECMO supérieures à 3 semaines ayant été rapportées dans la littérature(6). Figure 2. Système ECMO (ExtraCorporeal Membrane Oxygenation) : Cardiohelp® (Maquet). Il n’existe que des données rétrospectives sur l’intérêt de l’ECMO dans cette indication : une étude avant/après l’arrivée de l’ECMO a montré une mortalité avant de 76 %, passant à 36 % après l’arrivée de l’ECMO(7). Une autre étude de cohorte plus récente a montré que parmi 138 patients ayant bénéficié d’une ECMO pour choc cardiogénique réfractaire à la phase aiguë d’un IDM, la survie en réanimation était de 47 % et la survie à 6 mois de 41 %(6). Cependant, il n’existe actuellement aucune étude randomisée ayant évalué l’intérêt de l’ECMO dans cette indication. Dans notre expérience, cela reste cependant le moyen le plus fiable en cas de choc cardiogénique réfractaire, et le système d’assistance de première ligne permettant une sélection ultérieure (figure 3). Le principal problème reste celui du moment de l’implantation. Figure 3. Stratégie d’assistance circulatoire au cours du choc cardiogénique réfractaire. Les autres assistances plus lourdes (assistances mono ou biventriculaires type Heartmate II, Heart Ware, Cardiowest) sont utilisées en deuxième ligne, dans une stratégie de pont vers la récupération en cas de cardiopathie réversible, vers la transplantation ou la destination therapy en cas de cardiopathie irréversible (figure 3). Conclusion Du fait de sa rapidité d’insertion dans les centres experts, l’ECMO est devenu le traitement de première ligne des patients présentant un choc cardiogénique réfractaire à la phase aiguë d’un infarctus du myocarde. Il n’existe cependant à ce jour aucune étude randomisée démontrant son efficacité. Une étude randomisée multicentrique française (essai ANCHOR) doit démarrer et permettra peut-être de répondre à la question. La place d’autres types d’assistance (Impella®) demande à être précisée dans cette indication, en gardant à l’esprit que ce type d’assistance doit être réservé à un support de courte durée. Drainage péricardique percutané au cath-lab R. BOURKAÏB, Centre Cardiologique, Evecquemont Lorsque qu’un épanchement péricardique est volumineux ou lorsqu’il se constitue rapidement, une compression des cavités cardiaques dans un péricarde peu distensible peut compromettre l’hémodynamique cardiocirculatoire. Cette compression intéresse surtout le coeur droit aux pressions int racavi tai res plus basses que celles du cœur gauche. Le tableau hémodynamique résultant de cet épanchement compressif est désigné sous le terme de tamponnade. Le diagnostic clinique Il est relativement facile si le choc est associé à des signes droits dans un contexte particulier comme un cathétérisme diagnostique et/ou interventionnel, l’épanchement étant de constitution rapide. Ce tableau de tamponnade est une urgence car il engage le pronostic vital. Le bilan en salle de cathétérisme réduit au minimum se limite souvent à un écho-Doppler cardiaque réalisé dans les meilleurs délais. Celui-ci visualise l’épanchement péricardique, souvent volumineux, qui se caractérise par un espace vide d’échos entre le myocarde ventriculaire droit ou gauche et le péricarde pariétal. Un épanchement est vu : • en incidence sous-costale : en avant de la paroi postérieure du ventricule droit. Cette incidence permet de mesurer la distance à la peau, facilitant la ponction sous xiphoïdienne en urgence ; • en incidence parasternale grand axe : en arrière de la paroi postérieure du ventricule gauche. La quantification de l’épanchement Elle doit être mesurée en diastole et au même endroit en mode TM : épanchement modéré (< 10 mm), épanchement moyen (10-20 mm) et épanchement abondant (> 20 mm). C’est plus la vitesse de constitution de l’épanchement, que son volume qui va déterminer le retentissement hémodynamique. Il faut rechercher un collapsus télédiastolique de l’oreillette droite en incidence sous-costale : c’est un signe précoce et sensible de « prétamponnade ». La paroi libre de l’oreillette droite s’invagine vers le septum interatrial à chaque diastole. Quand l’épanchement est circonférentiel et majeur, le cœur flotte dans l’épanchement (aspect de swinging heart). Il faut évacuer l’épanchement en toute urgence. Il faut savoir qu’un décollement péricardique visible uniquement pendant la systole est physiologique. En effet, le péricarde contient quelques millilitres de liquide, prenant parfois l’aspect d’un épanchement en systole. Il disparaît en diastole. C’est pour ça qu’il faut toujours rechercher et mesurer un épanchement péricardique en diastole. Attention aussi à ne pas confondre les franges graisseuses avec un épanchement péricardique. L’échocardiographie Elle a une place centrale pour le diagnostic, l’évaluation de la gravité et guider le geste thérapeutique. Un drainage à l’aveugle dans l’urgence par voie sous-xiphoïdienne peut se concevoir, mais il faut savoir préférer la voie écho-guidée. Le drainage péricardique percutané est une option simple de traitement des épanchements survenant brutalement au cath-lab. On peut la considérer comme la technique de première intention. Le drainage s’effectue le plus sûrement sous contrôle échographique (pour éviter tout risque de blessure ventriculaire) et sous remplissage vasculaire. Nous avons à disposition des systèmes dédiés, les plus utilisés sont le kit COOK et le kit MERIT (figure). En situation d’extrême urgence mettant en jeu le pronostic vital, il faut savoir utiliser un trocart (quel qu’il soit) pour évacuer le liquide sous tension pour améliorer l’hémodynamique avant le drainage. Le kit MERIT a pour avantages la mise à disposition d’un bistouri escamotable et d’un fil de raccord ECG dont la pince crocodile est fixée sur l’aiguille 18 G et l’autre extrémité sur la dérivation en V de l’ECG. Cette sécurité est utilisée par certains pour éviter les ponctions non péricardiques. Un trocart de 15 cm gradué permet de se sentir plus à l’aise lors de la ponction-évacuation du liquide péricardique sous pression. L’importance de l’échographie avant drainage est de donner la distance peau-péricarde. Figure. Kit de drainage péricardique avec trocard gradué. La procédure de ponction-drainage • Repérer l’abord le moins dangereux et le plus court possible à l ’épanchement, le plus souvent la voie sousxiphoïdienne gauche, par la fente de Larey. C’est la voie d’abord la plus utilisée au cath-lab par le cardiologue interventionnel. • Après badigeonnage et en situation d’asepsie rigoureuse, faire avancer doucement en maintenant le vide et en injectant de la xylocaïne, une aiguille 18-20 G en partant de la région sous-costale xiphoïdienne et en visant l’épaule gauche. • Dès le retour dans la seringue de liquide séro-hémorragique, mettre un guide J de type 0,035 ou 0,038 dans la cavité péricardique sans avoir aucune résistance ni trouble du rythme. • Contrôler par scopie et/ou échographie le bon positionnement. • Faire une prédilatation (tissu sous-cutané, diaphragme et péricarde) par un dilatateur de 7-8 F en fonction du kit utilisé puis insérer (recommandé par notre équipe) un introducteur 9 F. • Mettre en place la sonde de type pig tail de drainage avec un robinet 3 voies. • Aspirer à l’aide de seringues de 50 cm3 puis à l’aide de la tubulure fournie évacuer lentement 300 à 500 cm3 de liquide dans la poche de drainage en position déclive. • L’ablation doit se faire idéalement sur guide et lorsque le drainage est < 50 ml/24 h ou < 100 ml/48 h. Le caillotage intrapéricardique est une indication de drainage chirurgical.    N’en fait-on pas trop dire à la FFR ? P. BARNAY, Centre Hospitalier, Avignon La FFR s’impose désormais comme l’outil indispensable d’évaluation des lésions coronaires, en l’absence de test ischémique réalisé avant la coronarographie ou en complément de celui-ci. Son avantage par rapport à un test fonctionnel non invasif est sa meilleure résolution spatiale, permettant l’évaluation de l’ischémie vaisseau par vaisseau, lésion par lésion et non par territoires. L’obtention du remboursement de l’acte a permis son utilisation en routine dans la plupart des centres d’angioplastie. La FFR est positionnée avec un haut niveau de recommandation dans l’évaluation des lésions du patient coronarien stable symptomatique en complément ou en l’absence de test non invasif. Elle est proposée avec un niveau de recommandation et de preuve plus faible dans une stratégie de revascularisation par angioplastie chez le pluritronculaire(8). Ces recommandations européennes se réfèrent aux grandes études qui ont validé la FFR dans la pratique courante : DEFER(9), FAME(10) et FAME 2(11). Mais l’utilisation actuelle – large – de la FFR, dépasse parfois ce qui a été étudié dans les grands essais randomisés auxquels se réfèrent les recommandations. Dès lors, deux questions se posent : La FFR apporte-t-elle en toutes circonstances, quel que soit le contexte clinique ou la sévérité des lésions, une réponse binaire chez tous les patients sur la nécessité de revascularisation ? Peut-on guider la stratégie thérapeutique uniquement sur la FFR entre chirurgie et angioplastie ou encore optimisation du traitement médical ? Etude FUTURE Ces interrogations surviennent alors qu’ont été présentés par Gilles Rioufol à l’AHA 2016 les résultats de l’étude FUTURE (figure 1). L’étude n’est pas encore publiée. Cet essai a cherché à démontrer qu’une stratégie de traitement (chirurgie, angioplastie ou optimisation du traitement médical) guidée par la FFR était supérieure à une stratégie classique guidée par l’angiographie et les scores habituels. Figure 1. Schéma de l’étude FUTURE (TMO : traitement médical optimal). Le critère combiné principal associait à 1 an : mortalité toutes causes, infarctus du myocarde (IDM), revascularisation et accident vasculaire cérébral (AVC). Le critère d’inclusion principal retenait une atteinte au moins bitronculaire (dont l’IVA) avec des lésions angiographiquement > 50 % ou une atteinte du tronc commun. Dans le groupe FFR toutes les lésions avec FFR < 0,80 étaient intégrées dans la stratégie de revascularisation. Dans le groupe angiographie seules les lésions > 50 % étaient incluses dans la stratégie avec la possibilité de s’aider de tests non invasifs habituels. Le choix final de la stratégie de traitement était laissé à la discrétion de l’opérateur. L’étude a été interrompue prématurément pour un excès significatif de mortalité toutes causes dans le groupe FFR sur une analyse intermédiaire portant sur les 836 premiers patients. À ce jour, l’analyse à 1 an portant sur 797 patients ne montre plus d’excès significatifs de mortalité toutes causes. Mais l’étude avec les réserves liées à son arrêt prématuré, à un recrutement plus faible que prévu et à l’analyse encore partielle des résultats disponibles, ne montre pas une supériorité de stratégie guidée par la FFR dans le choix thérapeutique chez le patient pluritronculaire (figure 2). Ce résultat amène à se poser des questions sur les limites de la FFR particulièrement chez le pluritronculaire. Le concept qui a conduit à FUTURE repose sur la capacité attribuée à la FFR depuis l’étude FAME de reclasser les lésions coronaires jugées angiographiquement significatives permettant éventuellement de réintégrer le pluritronculaire à un niveau de sévérité plus faible. Le registre français R3F(12) avait montré que la FFR pouvait modifier la stratégie thérapeutique initialement prévue avec l’angiographie dans près de 4 cas sur 10 et cela quelle que soit la stratégie initialement prévue entre chirurgie, angioplastie ou optimisation du traitement médical. Figure 2. Résultats à 1 an de FUTURE : la stratégie guidée par FFR n’est pas supérieure à la stratégie classique. Comparaison avec FAME(10) FAME est une étude qui comparait chez le pluritronculaire une stratégie de revascularisation par angioplastie guidée par l’angiographie ou par la FFR. C’est la revascularisation guidée par FFR qui a montré sa supériorité. Mais FAME n’est pas une étude de stratégie thérapeutique car l’angioplastie était le traitement décidé a priori. • Qu’est-ce qu’un pluritronculaire dans FAME ? C’est tout d’abord un patient sans lésion significative du tronc commun, une lésion difficile à évaluer en angiographie (superposition des branches filles, absence de segment de référence, lésions ostiales). C’est aussi une lésion pour laquelle une erreur d’interprétation peut avoir les conséquences cliniques graves compte tenu de la masse myocardique concernée. De plus, la présence de lésions d’aval constitue le principal problème de l’évaluation par FFR d’une lésion du tronc commun (isolée dans moins de 10 % des cas). Le risque d’erreur de mesure de FFR, en cas de lésion du tronc associée à des lésions d’aval ou à un athérome diffus d’évaluation angiographique difficile, reste donc important. C’est un patient avec peu d’occlusions chroniques ou de lésions sub-occlusives. Or, l’existence d’une collatéralité peut modifier le résultat de la FFR mesurée sur le vaisseau assurant cette collatéralité avec une masse myocardique sous sa dépendance plus importante. La revascularisation du vaisseau receveur peut « normaliser » la FFR du vaisseau donneur et rendre sa revascularisation inutile(13). C’est un patient avec un score Syntax moyen peu élevé (seulement un tiers de la cohorte FAME a un score Syntax score > 21). On pourrait aussi ajouter la difficulté d’évaluation des lésions diffuses, en chapelet, des lésions de bifurcation… On comprend mieux que, chez le patient pluritronculaire complexe, associant tout ou partie des ces écueils, la pertinence de la mesure de FFR puisse être totalement diluée, l’évaluation du caractère significatif de chaque lésion devenant alors un exercice périlleux. À la question : la FFR peut-elle être l’unique outil pour guider la stratégie thérapeutique chez le pluritronculaire complexe ? La réponse est à ce jour : non. À la question : la reclassification des lésions pluritronculaires a-t-elle une pertinence clinique dans l e cadre d’une stratégie de revascularisation : prudence extrême en raison de nombreuses possibilités de biais. Dans l’étude FUTURE, cette reclassification est une des possibles explications du résultat de l’essai. FFR et ischémie silencieuse Comment aborder des lésions coronaires découvertes fortuitement à l’occasion d’un examen angiographique chez un patient asymptomatique et pour lesquelles on trouve une FFR positive ? La situation la plus classique est la revascularisation complémentaire de l’IDM. PRIMULTI(14) a comparé deux groupes de SCA ST+ : revascularisation uniquement de la lésion coupable ou revascularisation complète (lésions associées > 50 %) guidée par FFR. Les événements inclus dans le critère composite primaire étaient plus fréquents dans le groupe avec revascularisation complète (13 % vs 22 % ; p = 0,004). Le résultat sur le critère primaire est uniquement guidé par la nécessité de revascularisations ultérieures sur la base d’une ischémie objective ou subjective. C’est-à-dire sur la foi de douleurs thoraciques ultérieures avec un patient et un opérateur informés de la présence de lésions potentiellement significatives et non revascularisées. Il n’y avait pas de différence sur la mortalité ou sur la récidive non fatale d’infarctus. Autrement dit, on n’a pas la preuve que revasculariser des lésions asymptomatiques sur la base uniquement de la FFR permet de prévenir la survenue d’événements cliniques durs. Par ailleurs, l’IDM ne correspond pas exactement au contexte d’ischémie myocardique silencieuse telle que nous la concevons lorsqu’elle est dépistée par des tests non invasifs. C’est en extrapolant les résultats de FAME 2(11,15), qu’on a pris la liberté de proposer une revascularisation du patient asymptomatique avec une FFR < 0,80. En effet, dans cette étude il y avait 16 % de cas d’ischémie silencieuse. La différence significative pour le critère primaire composite en faveur du groupe FFR associée à une angioplastie était conduite par les revascularisations urgentes. Il n’y avait pas, là non plus, de bénéfice sur la mortalité. À 2 ans(15) les résultats n’ont pas changé avec essentiellement des patients revascularisés sur des critères cliniques. Comment analyser la nécessité ou non de procéder à une revascularisation face à une douleur thoracique qui survient alors que l’on sait que le patient a des lésions avec une FFR basse ? Peut-on parler alors d’ischémie silencieuse ? Finalement, chez le patient asymptomatique, si la revascularisation doit être guidée par le risque de survenue d’événements cliniques durs, FAME 2 ni aucune autre étude FFR n’apporte actuellement de réponse. Conclusion La FFR bénéficie d’un environnement scientifique de très haut niveau qui en fait un outil incontournable dans l’évaluation des sténoses coronaires. Mais pour la première fois, une étude randomisée de stratégie thérapeutique, FUTURE, est négative. Son analyse est encore en cours mais elle doit amener la communauté scientifique à se poser la question de la pertinence de l’évaluation par FFR des lésions pluritronculaires complexes en raison de biais possibles. Par ailleurs, l’évaluation de l’ischémie silencieuse n’est pas à ce jour une option étudiée, aucune donnée n’est disponible sur le bénéfice en termes d’événements durs dans cette population. La FFR n’est pas un outil qui prend la décision mais qui aide la stratégie thérapeutique. Impact des registres sur notre pratique : l’exemple du programme FAST-MI E. PUYMIRAT, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris Pour la communauté scientifique, les études observationnelles ne représentent pas le schéma épidémiologique le plus robuste (contrairement aux études expérimentales), mais elles apportent des renseignements complémentaires utiles pour la pratique car elles reflètent davantage « la vie réelle » (recrutement des patients moins restrictif que dans les études expérimentales). Il existe de multiples études observationnelles à l ’échelle internationale centrées sur la prise en charge de l’infarctus du myocarde (IDM). Le programme FAST-MI est constitué d’enquêtes successives répétées tous les 5 ans depuis 1995, axées sur la prise en charge et le suivi des patients hospitalisés pour un IDM en France. Ce programme permet à la fois de répondre à une question précise en utilisant les données d’une base de données (études transversales) et d’évaluer l’évolution des pratiques en utilisant les données communes aux différentes enquêtes (études longitudinales). Données longitudinales À travers les différentes enquêtes, nous avons observé une diminution de la mortalité précoce et à long terme de plus de 50 % en France en l’espace de 15 ans (figure 1)(16,17). Grâce aux données recueillies, nous avons proposé plusieurs explications (contrairement à des données purement épidémiologiques) : - amélioration de la prise en charge depuis la phase préhospitalière jusqu’à la sortie de l’hôpital ; - concentration des patients dans des centres experts ; - meilleur suivi des recommandations par les praticiens ; - changement des profils de patients ; - développement des stratégies invasives ; - utilisation de nouveaux traitements antithrombotiques ; - évolution des techniques de cardiologie interventionnelle. Figure 1. Évolution de la mortalité des infarctus du myocarde en France entre 1995 et 2010. Données transversales Parallèlement, l’exploitation de ces bases de données nous permet de répondre à des problématiques cardiologiques spécifiques et ceci de façon complémentaire aux données obtenues dans les essais randomisés, notamment sur : • la place de la thromboaspiration dans les infarctus avec sus-décalage ST. Les données assez récentes remettent en cause l’utilisation systématique de cette technique(18). À partir des données de l’enquête FAST-MI 2010, nous avons observé que la thromboaspiration n’améliorait pas le pronostic vital des patients à 1 an. • l’utilisation de la morphine en préhospitalier (prescrite chez 19 % des patients pris en charge pour un IDM) n’est pas associée à une augmentation des complications intrahospitalières, ni à une surmortalité à 1 an quels que soient les modèles d’ajustement utilisés(19) (figure 2). • l’arrêt des bêtabloquants au-delà de la première année après un IDM (chez les patients ayant une FEVG > 40 %) qui ne semble pas associé à une surmortalité quel que soit le modèle d’ajustement utilisé(20). Figure 2. Survie à 1 an selon l’utilisation ou non de la morphine en préhospitalier. Conclusion Les données des études observationnelles sont donc complémentaires de celles apportées par les essais randomisés. Elles permettent notamment : d’obtenir des informations non renseignées par les essais randomisés, d’évaluer les résultats observés dans des essais de patients « sélectionnés » et d’obtenir des informations rapidement sur des problèmes spécifiques. Ces informations peuvent donc avoir un impact direct sur nos pratiques même si le niveau de recommandation reste inférieur à celui des essais randomisés. TAVI : comment choisir une valve en 2017 ? D. TCHÉTCHÉ, Clinique Pasteur, Toulouse 2017 marquera, pour la France, un tournant dans l’implantation de valve aortique transcathéter (TAVI). Trois systèmes seront en effet disponibles : SAPIEN 3 (Edwards Lifesciences), Evolut™ R (Medtronic) et LOTUS Edge™ (Boston Scientific). Ces trois prothèses ont des caractéristiques techniques, un mode de déploiement et un profil très différents les unes des autres : • la SAPIEN 3 (S3) est sertie sur ballon, dispose d’un système antifuite périprothétique et est compatible avec un introducteur dédié 14-16 F ; • l’Evolut™ R (ER) est autoexpansive avec un fonctionnement supra-annulaire des feuillets, se conforme à l’anatomie annulaire aortique, est compatible 14 F et est repositionnable/ recapturable jusqu’à 85 % de son déploiement ; • la LOTUS Edge™ a une expansion purement mécanique, dispose d’un système antifuite périprothétique, est compatible 18-20 F et est 100 % repositionnable/ recapturable avant détachement final. Prothèse Evolute™ R (Medtronic). Prothèse SAPIEN 3 (Edwards Lifesciences). Prothèse LOTUS Edge™ (Boston Scientific). Choisir une prothèse adaptée à chacun de nos patients revêtira ainsi un niveau de complexité supplémentaire. L’objectif de cette lecture est de fournir un algorithme décisionnel pour tirer avantage de chacun de ces systèmes et amplifier ainsi la sécurité de procédure et le résultat final. Les éléments déterminants pour choisir la prothèse Le premier élément que nous prenons en considération avant de choisir une prothèse est le diamètre de l’anneau aortique, dérivé du scanner. Les prothèses S3, ER et LOTUS couvrent pour l’instant des anneaux allant de 18 à 27 mm avec une zone de chevauchement comprise entre 19 et 26 mm. Dans notre cohorte de 1 870 patients, le diamètre annulaire moyen était de 24,8 ± 2,9 mm ; 85 % des patients avait un anneau aortique entre 19 et 26 mm. Ce critère isolé ne sera donc souvent pas suffisant pour différencier les prothèses. Les deux autres éléments déterminants sont : l’anatomie de la racine aortique et de la chambre de chasse ventriculaire gauche ainsi que le diamètre et la qualité des axes iliofémoraux. Nous ne parlerons pas volontairement pas des voies alternatives, plus de 90 % des procédures TAVI étant réalisées par voie transfémorale. Plusieurs configurations anatomiques aortiques peuvent être identifiées avant un TAVI. De manière non exhaustive, nous pouvons rencont rer une aorte horizontale, des calcifications majeures, une hypertrophie septale, un risque élevé d’occlusion coronaire, une bicuspidie, une bioprothèse dégénérée ou une insuffisance aortique pure. Une fois les différents types de prothèses sélectionnés pour une anatomie aortique bien précise, le choix final se fera en fonction de la compatibilité des axes iliofémoraux, analysés selon leur diamètre, tortuosité et degré de calcifications. • En cas d’aorte horizontale, le principal risque est celui d’une malapposition de la prothèse avec fuite résiduelle importante. Avec l’expérience, ce type d’anatomie peut être traité par la prothèse ER, en jouant sur les tensions du guide et du cathéter pour maintenir une coaxialité suffisante pendant le déploiement. Les prothèses de première intention resteront cependant les S3 et LOTUS car elles permettent une coaxialité quasi constante pendant le déploiement. • Les calcifications importantes de la racine aortique, qu’elles se situent au niveau des feuillets valvulaires, de l’anneau ou de la chambre de chasse, exposent le patient à un risque élevé de fuite périprothétique. Seront alors privilégiées des prothèses avec un système intégré permettant de réduire ce risque : LOTUS ou S3. Cependant, lorsque les calcifications annulaires sont très localisées et font anticiper un risque accru de perforation/rupture annulaire, la prothèse ER pourra être préférée à la prothèse S3. • L’hypertrophie septale majeure exposera le patient à un risque d’embolisation aortique pendant la procédure. Les prothèses ER et LOTUS seront privilégiées pour leur mode d’expansion progressif et contrôlé ainsi que leurs propriétés de repositionnement/recapture, permettant un positionnement fin entre l’anneau aortique et le septum membraneux. La prothèse S3 utilisée par voie transapicale pourra également être une solution mais au prix d’une procédure plus invasive. • La bicuspidie est une situation assez fréquente en pratique clinique. Les principaux risques procéduraux sont la malapposition, avec risque accru de procédure de sauvetage TAV-i n-TAV, et les fuites périprothétiques majeures par distorsion prothétique. Le fonctionnement supra-annulaire des feuillets de la prothèse ER lui confère un avantage théorique en permettant de déconnecter la partie transannulaire contrainte par l’anatomie aortique et les feuillets situés 12 mm plus haut, afin d’obtenir un faible gradient transprothétique. Les prothèses S3 et LOTUS permettent cependant une configuration circulaire finale, si le sizing est adapté. La distance intercommissurale, mesurée 4 mm au-dessus de l’anneau aortique, pourrait constituer un élément important du sizing. Certains travaux sur ce sujet sont en cours, explorant par ailleurs l’intérêt des prothèses S3 et LOTUS dans la bicuspidie. Aucune recommandation finale ne peut donc être effectuée dans l’immédiat pour la bicuspidie. • En cas de dilatation de l’aorte ascendante, les prothèses ayant une interaction avec la paroi aortique seront évitées. Les prothèses les plus courtes seront sélectionnées. • En cas de risque accru d’occlusion coronaire, la LOTUS pourrait être une prothèse de choix. Elle peut en effet être verrouillée dans sa configuration finale, nous permettant ainsi d’apprécier l’état de la perfusion coronaire. Si besoin, en cas d’occlusion coronaire, la prothèse pourra être recapturée et retirée de l’organisme du patient, évitant une situation de sauvetage d’urgence. • Les bioprothèses dégénérées (technique valve-in-valve), en particulier de petit diamètre (< 21 mm), génèrent des Prothèse Evolute™ R (Medtronic). gradients résiduels importants. La fuite périprothétique est par ailleurs rarement un souci dans ce cas de figure, alors que la malapposition est fréquente. La prothèse ER reste une prothèse de choix dans cette indication du fait de son fonctionnement supra-annulaire et de son statut repositionnable/recapturable. Une fois disponible, la LOTUS 21 mm pourrait également apporter une sécurité supplémentaire à ce type de procédure. • La fuite aortique pure est classiquement traitée avec la prothèse ER, à condition de choisir une taille de prothèse ayant suffisamment d’interaction avec l’anneau aortique et la chambre de chasse du ventricule gauche (> 20 %), en plus d’un contact adapté avec l’aorte ascendante. Certains registres sont en cours, explorant l’intérêt de la prothèse S3 dans cette indication. Conclusion Choisir une prothèse TAVI en 2017, reposera d’abord sur une analyse minutieuse de l’anatomie de la racine aortique afin d’anticiper les difficultés potentielles et d’identifier les prothèses les plus adaptées. La décision sera ensuite basée sur la qualité des axes iliofémoraux. L’expérience des opérateurs avec les prothèses ER, S3 et LOTUS sera également un élément important. Idéalement, une maîtrise de deux, voire trois dispositifs permettrait une adaptation plus précise à l’anatomie de chaque patient. Stabilisation de la plaque athéromateuse coronaire : quelle approche ? G. SOUTEYRAND, P. MOTREFF, Clermont-Ferrand La compréhension de l’évolution de la plaque athéromateuse a été très importante au cours de la dernière décennie. Notamment grâce à de nombreux travaux en anatomopathologie. L’idée première que la plaque progressait petit à petit pour s’occlure a été démentie par ces études anatomopathologiques. En effet, dans 70 % des cas un syndrome coronarien aigu (SCA) va être secondaire à une rupture de plaque qui peut survenir sur une lésion non sténosante. Dans 25 %, le SCA est secondaire à une érosion et dans environ 5 % des cas à un nodule calcifié. L’érosion est une notion décrite pour la première fois en 1994 : c’est la perte de la couche endothéliale superficielle qui va provoquer la formation de thrombus. Un très beau papier en 2016 de White et al. différencie en anatomopathologie(21) : • la rupture de plaque qui présente un large noyau lipidique, une fine chape fibreuse avec présence de macrophages ; • l’érosion de plaque qui a un corps lipidique bien moindre, une chape fibreuse épaisse et de nombreuses cellules musculaires lisses. Figure 1. Différences morphologiques en anatomopathologie entre une érosion de plaque et une rupture de plaque (d’après SJ White et al.(21)). Nous savons qu’actuellement le protocole thérapeutique du SCA comporte une indication de stenting systématique. Mais de nouvelles approches thérapeutiques peuvent se discuter dans certains cas particuliers et il est intéressant de savoir si des données sont disponibles sur des prises en charge alternatives. En ce qui concerne l’érosion de plaque une étude publiée par F. Prati et al. rapportait une excellente évolution chez 31 patients traités médicalement ayant présenté un SCA dû à une érosion de plaque à 2 ans(22). Cette stratégie sans mise en place systématique de stent pour traiter des patients ayant une érosion sans sténose significative a également été suivie chez 60 patients avec une excellente évolution à 1 mois(23). La charge thrombotique a notamment diminué de plus de 50 % chez la plupart des patients. G. Niccoli et al. rapporte de manière très intéressante une évolution différente des patients ayant présenté un SCA en cas d’érosion ou de rupture de plaque(24). Les deux groupes de patients étaient traités de manière équivalente (stent actif dans 70 % des cas), mais les patients avec une rupture de plaque ont présenté plus d’événements sur un suivi de 32 mois que ceux avec une érosion de plaque. Le pronostic semble donc différent en fonction du mécanisme responsable du SCA. Notre expérience à Clermont-Ferrand confirme, chez plus de 40 patients traités médicalement après SCA sans sténose significative, une excellente évolution à plus de 2 ans (figures 2 et 3). Figure 2. SCA ST+ antérieur en rapport avec érosion de plaque de l’IVA et traité médicalement. Figure 3. SCA ST+ antérieur en rapport avec une rupture de plaque de l’IVA et traité médicalement. Le « Graal » serait de pouvoir repérer les plaques à risque d’évolution vers un SCA, plaques dites « vulnérables » et de pouvoir les traiter de manière préventive. De nombreux travaux ont recherché des critères de plaques vulnérables. Certains ont été validés, comme en OCT la présence d’une chape fibreuse fine couvrant une plaque athéromateuse (< 65 μm). Néanmoins, ce critère isolé n’est pas suffisant. Dans l’étude PROSPECT l’association en échographie endocoronaire avec étude hi stologique d’une chape fibreuse fine, d’une plaque burden importante (> 70 %) et d’une surface luminale < 4 mm2 était un facteur de mauvais pronostic(25). Mais la valeur prédictive positive n’est que de 18 %. Nous sommes encore bien loin d’une approche interventionnelle préventive. L’association à l’avenir des techniques actuelles d’imagerie à de nouvelles techniques comme la spectroscopie pourra peut-être nous rapprocher de cette approche préventive. Conclusion Il semble intéressant de différencier les SCA dus à une rupture de plaque ou à une érosion de plaque. Le pronostic semble meilleur dans le second cas. Malgré de nombreuses recherches sur le sujet, nous sommes encore loin d’une stratégie de stenting préventif des plaques vulnérables. *R. BOURKAIB, centre cardiologique, Evecquemont *P. BARNAY, hôpital Henri Duffaut, Avignon *E. PUYMIRAT, HEGP, Paris *G. SOUTEYRAND, hôpital Gabriel Montpied, Clermont Ferrand *P. MOTREFF, CHU Clermont Ferrand *D. TCHÉTCHÉ, clinique Pasteur, Toulouse

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