HTP-TEC
Publié le 18 juin 2020Lecture 4 min
Suivi post-embolie pulmonaire : quand évoquer une HTP-TEC ?
Olivier CHABOT, Paris
En France, environ 30 000 embolies pulmonaires (EP) aiguës surviennent chaque année(1-3), embolies pulmonaires qui peuvent être responsables de séquelles graves. Un suivi régulier des patients doit être mis en place pour dépister le plus tôt possible leur survenue.
Parmi les séquelles des EP, la persistance d’une obstruction des artères pulmonaires par des thrombi fibrotiques, associée à des anomalies des petits vaisseaux pulmonaires peut être responsable d’une hypertension pulmonaire thromboembolique chronique (HTP-TEC).
Non diagnostiquée et non traitée, l’HTP-TEC conduit à une insuffisance cardiaque et à une mort prématurée(4,5). Elle est considérée comme la plus grave complication à long terme de l’EP aiguë, pouvant affecter 2 à 4 % des patients(6-8).
Un retard diagnostique fréquent
Comme le rapportent Klok et coll.(9) dans une mise au point récente et selon les données issues de différents registres, il y a actuellement un retard important au diagnostic de l’HTP-TEC. Ce retard est variable de 14 à 24 mois et correspond à une véritable perte de chance pour les patients avec un risque accru de décès(10-12).
Jusqu’à très récemment, l’absence de recommandations claires concernant la surveillance optimale des patients après une EP, ainsi qu’une méconnaissance de la maladie par les professionnels de santé, étaient deux des principaux facteurs pouvant expliquer ce retard diagnostique de l’HTP-TEC.
Ce qui est corroboré par une étude de Ende-Verhaar et coll.(13) montrant que les patients chez qui une HTP-TEC avait été diagnostiquée avaient consulté en moyenne 4 médecins différents avec une moyenne de 13 consultations avant que le bon diagnostic soit fait. Cette étude montre également que les résultats échocardiographiques suggérant une HTP-TEC n’étaient pas toujours suivis d’un bilan adéquat pour confirmer le diagnostic et mettre en place une prise en charge optimale.
Enfin des recommandations claires évoquant l’HTP-TEC
La publication récente de recommandations sur l’embolie pulmonaire, avec en particulier la surveillance à moyen terme, devrait permettre d’améliorer cette situation.
C’est dans ce contexte que sous l’égide de la Société de pneumologie de langue française (SPLF), plusieurs sociétés savantes* et le réseau labellisé F-CRIN INNOVTE se sont associés pour élaborer de nouvelles recommandations de bonnes pratiques afin d’assurer une prise en charge efficace de la MTEV à l’ensemble des patients(14), avec une synthèse spécifique sur le diagnostic de l’HTP-TEC(15) en donnant des lignes directrices aux praticiens français.
En cas de suspicion d’HTP-TEC, il est recommandé de réaliser en première intention une échocardiographie afin de rechercher une hypertension pulmonaire (HTP) et une scintigraphie pulmonaire de ventilation/perfusion afin d’identifier des anomalies de la perfusion pulmonaire. La probabilité échocardiographique d’HTP (haute, intermédiaire, faible) peut être évaluée sur la base de la mesure de la vitesse du flux de régurgitation tricuspide (VIT) et sur la présence de variables échocardiographiques additionnelles évocatrices d’HTP (tableaux 1 et 2).
Les principales recommandations françaises pour la recherche de l’HTP-TEC après une embolie pulmonaire ont présentées dans l’encadré ci-dessous.
Ces recommandations sont en ligne avec les dernières recommandations de l’European Society of Cardiology (ESC) en collaboration avec l’European Respiratory Society (ERS) publiées en 2019 qui préconisent une stratégie de suivi des patients après une EP(16).
Les recommandations de l’ESC/ERS insistent sur la nécessité d’une surveillance des patients non symptomatiques et avec des examens complémentaires normaux en évaluant les facteurs de risque et les conditions prédisposantes à la survenue d’une HTP-TEC (tableau 3). Si ces éléments sont présents, une échographie cardiaque doit être réalisée. En cas de probabilité échocardiographique d’HTP, ces patients doivent être alors pris en charge comme des patients symptomatiques.
Les patients symptomatiques ayant un défaut de perfusion à la scintigraphie ventilation/perfusion au-delà de 3 mois post-EP doivent être adressés à un centre expert de l’HTP/HTP-TEC afin de poursuivre le bilan de diagnostic (une liste des centres français est disponible à l’adresse suivante : http://reseau-htap.fr/ reseaufrancais-htap/carte-de-france.asp).
Un algorithme décisionnel synthétise ces recommandations (figure 1).
Conclusion
Une sensibilisation accentuée, par les recommandations françaises et européennes, à l’incidence de l’HTP-TEC après EP et une mise en œuvre d’une démarche de diagnostic lors du suivi des patients atteints d’une EP contribueront probablement à réduire le retard diagnostique de cette maladie avec une orientation plus précoce vers des centres d’experts et ainsi améliorer son pronostic.
*La Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR), la Société française de cardiologie (SFC), la Société française d’hématologie (SFH) et le Groupe d’étude sur l’hémostase de la thrombose (GEHT), la Société française de médecine nucléaire et imagerie moléculaire (SNFMI), la Société nationale de médecine interne (SFMN), la Société française de médecine d’urgence (SFMU), la Société française de médecine vasculaire (SFMV), la Société française de pharmacologie et de thérapeutique (SFPT) et la Société française de radiologie (SFR).
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