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Explorations-Imagerie

Publié le 14 nov 2016Lecture 5 min

L’imagerie multimodalités dans l’endocardite infectieuse

L. OLIVER, J.-F. DEUX, A.-S. COTTEREAU, P. LIM, J. TERNACLE CHU Henri-Mondor, Créteil

L’endocardite infectieuse est une pathologie relativement rare ; avec une incidence estimée entre 30 et 90 par million d’habitants et par an, on estime qu’elle touche chaque année entre 2 000 et 6 000 personnes en France.
Malgré les récents progrès de la médecine et de la chirurgie, son pronostic reste pourtant sombre avec une mortalité à 3 mois de l’ordre de 10 à 30 %, bien supérieure à celle de l’infarctus du myocarde (< 5 %). L’amélioration du pronostic de cette maladie nécessite en outre une amélioration des méthodes diagnostiques. Dans cette perspective, les recommandations de l’ESC(1) (encadré) ont, pour la première fois, intégré l’imagerie multi-modalité dans la prise en charge de l’endocardite.

Place de l’échographie cardiaque L’échographie transthoracique cardiaque reste l’examen de première intention en cas de suspicion d’endocardite infectieuse. Sa forte spécificité (90-98 %) permet de confirmer la présence d’une endocardite et son manque de sensibilité (40 et 60 %) est pallié par l’échographie transœsophagienne (ETO). Ainsi, en cas de suspicion d’endocardite, les recommandations européennes préconisent une ETO en complément de l’ETT : - en cas de suspicion forte ; - si l’échogénicité est insuffisante ; - en présence de matériel ou prothèse intracardiaque(1). Il convient d’être particulièrement vigilant en cas de septicémies à S. aureus, dont la prévalence de l’endocardite est de 10 à 20 %. Les recommandations américaines de 2014 suggèrent une ETO systématique en cas de bactériémie à S. aureus sans porte d’entrée retrouvée ou de bactériémie nosocomiale. L’ETO est un excellent examen pour la recherche de végétation ou de lésions valvulaires sur valves natives, mais souffre de limite sur les valves prothétiques et les lésions péri-annulaires. Ainsi, l’ETO initiale est négative ou douteuse chez un tiers des patients présentant une endocardite sur valve prothétique, et les atteintes péri-annulaires relativement fréquentes (20-30 % dans les NVE [Native valve endocarditis] et 50-60 % dans les PVE [Prosthetic valve endocarditis]) ne sont identifiées que dans 44 à 80 % des cas. Ce manque de sensibilité est responsable d’un retard diagnostique et thérapeutique impactant directement le pronostic des patients. L’apport du PETscanner Depuis l’actualisation des dernières recommandations ESC en 2015, le PET-scanner au 18FFDG fait désormais partie intégrante de la réflexion diagnostique. En effet, un PET-scanner considéré comme positif est désormais un critère majeur au même titre que l’échographie cardiaque pour les prothèses valvulaires de plus de 3 mois. Dans l’étude de Saby et coll., il permettait d’augmenter la sensibilité des critères de DUKE de 70 à 97 % sans diminution majeure de la spécificité (50 à 40 %) dans les endocardites sur prothèses. Une évaluation semi-quantitative récente par Pizzi et coll. définit un seuil de fixation (SUV) maximal à 3,7 pour une sensibilité = 91 % et une spécificité = 79 %). La spécificité est de 100 % lorsque la valeur du SUV maximale est > à 6,9. Le PET-scanner peut également compléter le bilan lésionnel en identifiant des foyers extracardiaques, ainsi qu’une potentielle porte d’entrée (cancer digestif ou urinaire par exemple). Il est désormais accessible dans beaucoup de centres et, du fait d’une fixation cardiaque physiologique, nécessite un régime spécifique hypoglucidique, hyperlipidique et hyperprotidique avant l’examen. Alors que l’on dispose désormais de moyens diagnostiques sensibles pour les infections sur valves prothétiques ou les infections de loges, le PET-scanner semble pour l’instant moins pertinent sur les valves natives et les infections sur sondes de matériel intracardiaque. Le scanner cardiaque et corps entier Le scanner cardiaque et corps entier est désormais recommandé en 1re intention dans cette indication. Il doit être protocolisé afin de permettre : - l’analyse des structures cardiaques valvulaires et extravalvulaires ; - la recherche d’embolies à distance ; - la recherche de foyers infectieux secondaires et de la porte d’entrée ; - l’étude du réseau coronaire avant la chirurgie cardiaque. Plusieurs études s’accordent sur le fait que le scanner cardiaque est un excellent examen pour le diagnostic des lésions périannulaires (sensibilité et spécificité de 100 %) et des végétations valvulaires (> 10 mm). Il fait encore défaut dans les perforations valvulaires et les végétations de petite taille. L’IRM cérébrale Duval et coll. ont réalisé en 2011 une IRM cérébrale à 130 patients suspects d’endocardite infectieuse. La quasi-totalité des patients (82 %) présentaient au moins une anomalie radiologique (52 % de lésions ischémiques et 58 % de microhémorragies). Cet examen permettait une modification diagnostique dans 32 % des cas (via les critères de DUKE) et une thérapeutique dans 18 % des cas. La scintigraphie aux leucocytes marqués Encore peu disponible en France, coûteuse et relativement complexe à réaliser, la scintigraphie aux leucocytes marqués a fait son apparition dans l’actualisation des recommandations européennes en 2015. Examen peu sensible mais extrêmement spécifique, il est à réserver aux suspicions d’endocardites sur matériel, notamment en cas d’infection précoce (< 2 mois) ou en cas de PET-scanner non contributif. Rouzet et coll. ont décrit en 2014 une sensibilité de 64 % et une spécificité de 100 % dans les endocardites sur prothèses. Aucun faux positif n’a été retrouvé, y compris en postopératoire ou chez les patients avec un PET-scanner considéré finalement comme faux positif. Cas particuliers des endocardites sur matériel Les endocardites sur sondes de pacemaker ou défibrillateur sont de plus en plus fréquentes, compte tenu du vieillissement de la population. Le diagnostic est parfois très difficile et le pronostic aussi sombre que celui des endocardites valvulaires. L’échographie cardiaque transthoracique et transœsophagienne peuvent être prises en défaut. Ici encore, l’imagerie nucléaire semble pouvoir jouer un rôle prédominant. Une récente étude italienne décrit une sensibilité de 94 % et une spécificité de 100 % pour la scintigraphie aux leucocytes marqués, réalisée chez 63 patients suspects d’endocardite sur sondes contre 81 % et 90 % pour l’échographie, 81 % et 77 % pour les critères de Duke. D’autres études ont également montré l’apport diagnostique du PET dans certains cas difficiles. Amraoui et coll. ont par ailleurs démontré que la réalisation systématique d’un PET-scanner chez 35 sujets présentant une endocardite sur sondes avait permis de découvrir une embolie septique chez 10 d’entre eux, dont 7 spondylodiscites et 1 infection de prothèse valvulaire. En pratique L’endocardite infectieuse reste un diagnostic difficile et l’échographie cardiaque présente certaines limites pouvant avoir de graves conséquences pronostiques. Les nouvelles techniques d’imagerie permettent une meilleure évaluation des structures cardiaques et extracardiaques et améliore la prise en charge diagnostique et thérapeutique. Les nouvelles recommandations préconisent une prise en charge multidisciplinaire dans des centres experts ayant accès à ces différentes techniques. Si de nouvelles études seront nécessaires à l’avenir afin de préciser les indications des chaque méthode, le futur de l’imagerie de l’endocardite infectieuse sera très certainement multimodal. 

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