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Cardiologie générale

Publié le 26 avr 2011Lecture 4 min

Syncope : quand faut-il hospitaliser ?

P. DEFAYE, Clinique Universitaire de Cardiologie, CHU Grenoble

La syncope est une perte de connaissance transitoire liée à une hypoperfusion cérébrale caractérisée par son début rapide, sa durée courte et son retour à l’état initial spontané et complet.
Les dernières recommandations européennes pour le diagnostic et la conduite à tenir face à une syncope ont été publiées en 2009. Ce thème est parfaitement traité dans ces guidelines (disponible sur www.esccardio.org/guidelines). Nous rappellerons les critères devant conduire, face à une syncope, à l’hospitalisation en nous inspirant de ces recommandations.

Les 3 "questions clés" Devant un patient ayant présenté une syncope, la réponse à 3 questions clés doit être obtenue. Ces questions vont notamment permettre de justifier ou non l’hospitalisation. Est ce vraiment une syncope ? (figure 1) Il faut absolument éliminer tout ce qui n’est pas une syncope : simple chute sans perte de connaissance, coma, perte de connaissance liée au traumatisme. Même si les caractères sont en faveur d’une syncope, il faut également savoir reconnaître une crise d’épilepsie ou des pertes de connaissance d’ordre fonctionnel (hystérie). Figure 1. Algorithme diagnostique d’une syncope. Peut-on faire d’emblée le diagnostic de la cause de la syncope ? Souvent, il est assez facile de reconnaître l’étiologie sans nécessité d’examens complémentaires. Il en est ainsi de la syncope vaso-vagale ou syncope neuro-cardiogénique. Il n’y a généralement pas de pathologie cardiaque sous-jacente. Ces patients ont souvent une longue histoire de syncope. Celles-ci surviennent souvent dans des conditions particulières : provoquées par des sons, odeurs ou douleurs particulières, station debout prolongée, foule, atmosphères chaudes, en post-prandial, après l’exercice, à la rotation de la tête ou après compression sino-carotidienne. Quand ce diagnostic est posé, il n’y a bien sûr aucune indication à une hospitalisation. Le bilan peut être réalisé en ambulatoire et le traitement prescrit ou programmé. Existe-t-il une cardiopathie ? Devant une syncope d’origine cardiovasculaire, l’hospitalisation est nécessaire. Souvent, la syncope survient dans le cadre d’une cardiopathie sévère connue. On la suspecte quand elle se déroule à l’effort ou en position allongée. La syncope est parfois accompagnée de palpitations. On suspecte une TV en cas de TV non soutenue enregistrée ainsi que d’insuffisance cardiaque. L’ECG est souvent parlant avec enregistrement d’un bloc de branche, d’un bloc auriculo-ventriculaire du 1er degré de type Mobitz 1 ou d’une bradycardie sinusale < 50/min. On suspecte une cause cardiaque également en cas de diagnostic de syndrome de Wolf-Parkinson-White, de syndrome du QT long, de syndrome de Brugada ou de repolarisation précoce sur l’ECG. L’absence de cardiopathie exclut une étiologie cardiaque dans 97 % des cas pour Alboni (J Am Coll Cardiol 2001). Au contraire, la présence d’une cardiopathie est un facteur prédictif indépendant de syncope d’origine cardiaque (sensibilité : 95 %, spécificité : 45 %). Stratification du risque : Les critères de haut risque, s’ils sont retrouvés, nécessitent une hospitalisation immédiate pour diagnostic et traitement (encadré ci-dessous). Dans l’étude EGSYS (Heart 2008) a été défini un score de risque  (palpitations avant syncope : 4 points ; cardiopathie ou ECG anormal : 3 points ; syncope d’effort : 3 points ; syncope en position allongée : 2 points ; facteurs prédisposants ou précipitants : - 1 point ; prodromes dysautonomiques : -1 point). Si ce score est > 3, le pronostic est plus sévère et cela nécessite l’hospitalisation immédiate. Si le score est < 3, le bilan est réalisé en ambulatoire. Un autre score a été validé, le score OESIL (European Heart Journal 2003), il inclut avec 1 point à chaque risque : l’âge si > 65 ans, l’existence d’une cardiopathie, une syncope sans prodromes ainsi qu’un ECG anormal. Si ce score est 0 ou 1, le pronostic est excellent et le bilan peut être réalisé en ambulatoire. L’existence d’une cardiopathie justifie de façon très large l’hospitalisation. Au contraire, un patient jeune, sans cardiopathie et dont l’ECG est normal peut être géré en ambulatoire. Les diagnostics les plus probables dans ce cadre sont  la syncope vaso-vagale ou la syncope par hypotension orthostatique. Dans 10/20 % des cas, le bilan est négatif et on parle de syncope inexpliquée, de bon pronostic. L'approche multidisciplinaire : "syncope unit" Le développement d’une unité de syncope, c’est-à-dire d’un  réseau de soins intrahospitalier entre les services d’urgences et de cardiologie, est un élément essentiel dans la stratification du risque et la discussion d’hospitalisation des patients ayant présenté une syncope. Le but de ces unités est de permettre une prise en charge standardisée et optimisée des patients selon les recommandations de l’ESC 2009, dans le but d’éviter dans la plupart des cas une hospitalisation injustifiée. Plusieurs modèles « d’unité de syncope » existent dans différents systèmes de soins hors de France. Le plus facilement transposable au système hospitalier français est celui d’une unité localisée en service de cardiologie, placée sous la responsabilité d’un membre de l’équipe de rythmologie, en relation étroite avec les autres services, principalement le service d’accueil des urgences (SAU). Les « unités de syncopes » permettent d’atteindre principalement deux objectifs : – une meilleure rentabilité diagnostique (réduction de 75 % des syncopes inexpliquées) qui se traduit, par une amélioration de la qualité de vie des patients ; – une diminution du nombre d’hospitalisations (de 15 à 20 %) et des examens complémentaires (réduction de près de 25 %). Ces unités sont donc la clé de voute de la stratégie de prise en charge des syncopes à partir du SAU et notamment pour décider l’hospitalisation (figure 2). Figure 2. Stratégie de prise en charge des syncopes.

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