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Valvulopathies

Publié le 30 nov 2010Lecture 6 min

Dilatation idiopathique du tronc de l’artère pulmonaire

S. BOUZIDI BELMAJDOUB, M. LAZRAK, Y. BOUBKRAOUI, L. HADDOUR, M. AGHERBI, hôpital Riad, Maroc

La dilatation idiopathique du tronc de l’artère pulmonaire est une entité pathologique rare. Elle constitue un diagnostic d’élimination des autres causes de dilatation du tronc de l’artère pulmonaire. Nous rapportons le cas d’un petit enfant de 4 ans présentant une dilatation idiopathique du tronc de l’artère pulmonaire.

Dilatation idiopathique du tronc de l’artère pulmonaire La dilatation du tronc de l’artère pulmonaire (DIAP) est dite idiopathique lorsqu’elle s’associe à un gradient valvulaire pulmonaire < 10 mmHg et après élimination des autres causes de dilatation du tronc de l’artère pulmonaire : shunt gauchedroit, hypertension artérielle primitive ou secondaire, dilatations anévrismales liées à l’agénésie des valves pulmonaires ou à diverses hérédodysplasies, au premier rang desquelles on trouve la maladie de Marfan, malpositions en rapport avec une agénésie du péricarde gauche. Observation Il s’agit de l’enfant B. H., âgé de 4 ans, admis dans le service de cardiologie pour dyspnée d’effort avec bronchites à répétition. L’examen général trouve un patient en assez bon état général, eupnéïque au repos, pesant 17 kg pour une taille de 106 cm. L’examen cardiovasculaire est normal. L’électrocardiogramme inscrit un rythme sinusal régulier avec une fréquence à 100 bpm, un axe en D2, un espace PR à 0,12 s sans hypertrophie pariétale ni trouble de la repolarisation (figure 1). La radiographie objective un coeur de taille normale avec un arc moyen gauche rectiligne et une vascularisation pulmonaire normale (figure 2). Figure 1. ECG. Figure 2. Radiographie pulmonaire de face.   L’échocardiographie transthoracique objective une artère pulmonaire dilatée à 24 mm, sans shunt gauche-droit à l’étage atrial, ventriculaire ou artériel (figure 3, 4 et 5). Figure 3. Échocardiographie thoracique : incidence parasternale petit axe transaortique montrant un tronc de l’artère pulmonaire dilaté à 24mm. Figure 4. Flux antérograde pulmonaire. Figure 5. Flux pulmonaire normal au Doppler continu. Discussion En 1949, Green et coll. avaient soupçonné 8 cas de DIAP confirmés à l’autopsie. Le diagnostic avait été retenu devant les critères suivants : • simple dilatation du tronc de l’artère pulmonaire avec ou sans anomalie de la vascularisation périphérique, • absence de shunt anormal intracardiaque ou extracardiaque, • absence de coeur pulmonaire chronique cliniquement et à l’autopsie, • absence de maladie vasculaire telle que la syphilis et l’athérosclérose. La DIAP est une affection classiquement bénigne. Les patients sont le plus souvent asymptomatiques sur le plan fonctionnel. Elle peut toutefois se manifester cliniquement par ordre croissant par : - un click d’éjection pulmonaire, - un souffle systolique éjectionnel au foyer pulmonaire, - un éclat de B2P, - le dédoublement du second bruit est habituel, généralement variable avec la respiration mais particulièrement large. Selon une étude réalisée à propos de 21 cas, la DIAP constitue une affection qui prête à confusion avec une sténose pulmonaire dans 42,86 %, une communication interauriculaire dans 38,1 % des cas et une hypertension artérielle pulmonaire dans 28,57 %. Le diagnostic est redressé par les explorations non invasives notamment l’électrocardiogramme, la radiographie pulmonaire et l’échographie transthoracique, puis confirmé par l’absence d’anomalie au niveau du ventricule droit lors d’un cathétérisme cardiaque droit. L’électrocardiogramme est normal. On peut tout au plus observer un bloc focal droit. Le diagnostic de la dilatation idiopathique du tronc de l’artère pulmonaire reste de découverte fortuite, le plus souvent lors d’une radiographie pulmonaire systématique qui constituait avant l’avènement de l’échocardiographie l’examen fondamental. Elle demeure toutefois très utile lorsqu’elle montre une forte saillie de l’arc moyen régulièrement convexe, non expansive, associée à une silhouette cardiaque et une vascularisation pulmonaire normale. Cependant, certaines DIAP affirmées à l’échocardiographie ne sont pas bien mises en évidence sur les clichés radiologiques standards. L’échocardiographie constitue actuellement l’examen de référence. Elle permet, d’une part, d’écarter une cardiopathie congénitale à l’origine d’une dilatation du tronc de l’artère pulmonaire (persistance d’un canal artériel, communication interauriculaire, communication interventriculaire, hypertension artérielle pulmonaire, agénésie des valves pulmonaires, sténose pulmonaire valvulaire modérée) et, d’autre part, de préciser l’importance de la dilatation du tronc de l’artère pulmonaire. Elle permet également d’étudier la valve pulmonaire qui est souvent anormale, épaissie ou redondante. Figure 6. Incidence sous-costale montrant un septum interauriculaire intact. Sur le plan hémodynamique, la DIAP se traduit par la présence d’un gradient de pression qui reste < 10 mmHg au niveau de la valve pulmonaire avec présence de turbulences systoliques et par une discrète élévation de l’index cardiaque probablement liée à une augmentation congénitale de l’élasticité de la paroi du tronc de l’artère pulmonaire. Ces paramètres ne sont valables pour retenir le diagnostic de DIAP qu’après élimination des autres causes de dilatation du tronc de l’artère pulmonaire (shunt gauche droit, HTAP, sténose de l’artère pulmonaire, etc.). Des critères échocardiographiques qui permettent d’affirmer le diagnostic ont été récemment proposés : • le rapport du diamètre de l’artère pulmonaire au niveau de sa bifurcation sur le diamètre de l’anneau aortique ou à 2 cm au-delà de la valve aortique doit être ≥ 1,4, • le rapport du diamètre de l’anneau pulmonaire sur le diamètre de l’anneau aortique doit être ≥ 1,5. Depuis l’avènement de l’échocardiographie et du Doppler, le cathétérisme et l’angiocardiographie sont devenus obsolètes. Lorsqu’ils étaient pratiqués, ils montraient une image de dilatation anévrismale de l’artère pulmonaire, affirmaient l’absence de shunt, l’absence de gradient valvulaire > 10 mmHg et une cinétique normale des valves pulmonaires en cinéangiographie. L’ETT présente cependant des limites particulières quant à l’estimation du diamètre de l’artère pulmonaire. Elle reste moins performante que l’IRM et l’angiographie conventionnelle pour déterminer la mesure du diamètre du tronc de l’artère pulmonaire et des branches pulmonaires droites et gauches. L’imagerie par résonance magnétique est un examen clé, de spécificité et de sensibilité supérieures au scanner dans le diagnostic et le suivi de la pathologie de l’artère pulmonaire. Cet examen non invasif est de grande faisabilité grâce à son produit de contraste non néphrotoxique. Elle permet une mesure précise et reproductible du tronc de l’artère pulmonaire et de ses branches, ainsi qu’une évaluation précise de l’extension de la dilatation vers l’arbre artériel pulmonaire. L’IRM confirme l’absence d’anomalies cardiaques ou pulmonaires (shunt intracardiaque, SP centrale ou périphérique, masse hilaire ou ADP) et recherche des anomalies associées (hypoplasie, dilatation de l’aorte ascendante, insuffisance pulmonaire, compression locale). Par ailleurs, elle détecte de possibles complications à type de dissection ou de rupture. L’évolution de la DIAP est marquée par la stagnation du diamètre du tronc de l’artère pulmonaire lors d’un suivi à long terme ainsi que l’absence de retentissement sur les cavités droites, ce qui constitue un critère supplémentaire en faveur de la DIAP. Néanmoins, l’évolution peut être émaillée par l’installation d’une dissection aiguë de l’artère pulmonaire de pronostic souvent fatal. L’abstention thérapeutique lors d’une DIAP est de mise. Cependant, devant une augmentation progressive et constante du diamètre du tronc de l’artère pulmonaire ou une dissection, la réparation chirurgicale s’impose. Cette réparation consiste en une réduction du diamètre de l’artère pulmonaire d’au moins 2 à 3 cm, faisant appel à l’interposition d’un patch de Dacron, à la mise en place d’une prothèse mécanique ou d’une homogreffe, à la reconstruction de la voie pulmonaire à l’aide d’un patch péricardique, anévrismorrhaphie ou artérioplastie. En pratique La DIAP est connue depuis longtemps mais reste encore peu comprise. Sa découverte est le plus souvent fortuite à l’occasion d’une radiographie pulmonaire systématique. Les complications sont parfois fatales justifiant l’intérêt d’un suivi régulier. L’échocardiographie et l’IRM sont fondamentales pour l’exploration morphologique de l’arbre artériel pulmonaire et d’autres structures cardiothoraciques imposant la chirurgie devant une dilatation progressive et constante du diamètre du tronc de l’artère pulmonaire.

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