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HTA

Publié le 28 nov 2006Lecture 8 min

HTA et insuffisance coronaire

J.-M. HALIMI, hôpital Bretonneau (Tours) et O. Hanon, hôpital Broca (Paris)

Depuis la publication en 1990 des résultats d'une méta-analyse par Collins, il est bien démontré q’une réduction de la PAD de 5 à 6 mmHg grâce au traitement antihypertenseur diminue la probabilité de survenue d'une maladie cardiaque coronaire de 14 %. Ce bénéfice apparaît cependant moins important que celui observé sur la prévention des AVC (réduction de 40 %). Une seconde métaanalyse (Psaty et al) ayant inclus 42 essais thérapeutiques récents, soit près de 192 000 patients, indique une réduction du risque similaire de coronaropathie (14 %) sous traitement antihypertenseur comparativement au placebo.

Les bêtabloquants représentent le traitement de choix chez l’hypertendu coronarien en raison de leur efficacité en prévention secondaire des complications de la maladie coronaire. Administrés après un premier infarctus du myocarde, les bêtabloquants augmentent l’espérance de vie et diminuent la fréquence des infarctus non mortels. Dans ce cadre, leur prescription apparaît incontournable en cas de maladie coronaire (recommandations HAS 2005). Ces dernières années, des études ont démontré l’intérêt d’autres classes thérapeutiques antihypertensives, en particulier les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les antagonistes calciques, chez l’hypertendu coronarien, le plus souvent en association aux bêtabloquants.   Bénéfices des IEC en prévention secondaire de la maladie coronaire   Étude HOPE Dans cet essai, Heart Outcomes Prevention Evaluation, qui a inclus 9 297 sujets à haut risque CV, dont 80 % avaient une coronaropathie sans altération de la fonction ventriculaire gauche, il a été démontré qu’après 5 ans de traitement par un IEC (le ramipril à la dose de 10 mg/j), une diminution significative de 22 % des événements CV (infarctus du myocarde, AVC, mortalité CV) était observée comparativement au placebo (p < 0,001). Dans cette population comprenant 47 % d’hypertendus (niveau tensionnel initial moyen de 139/79 mmHg), le bénéfice observé sous ramipril ne semblait pas en rapport avec la baisse tensionnelle (- 3 mmHg vs placebo pour la PAS et - 1 mmHg pour la PAD) et était observé à la fois chez les hypertendus et les non hypertendus.   Étude EUROPA Cet essai, EUropean trial on Reduction Of cardiac events with Perindopril in stable coronary Artery disease, a été mené chez 12 218 coronariens avérés (64 % d’infarctus du myocarde, 55 % de patients ayant eu une revascularisation) randomisés pour recevoir soit du perindopril 8 mg/j soit un placebo. La majorité des patients était normotendus (73 %) et le niveau tensionnel initial de 137/82 mmHg. Les résultats montrent une réduction significative à 4,2 ans du critère principal (mortalité CV, infarctus du myocarde, arrêt cardiaque) de 20 % (IC : 9 – 29 % ; p = 0,0003). La réduction de la PAS a été de - 5 mmHg à 4,2 ans et, là encore, le bénéfice est observé chez les hypertendus et les non-hypertendus.   Étude PEACE Cette étude, Prevention of Events with Angiotensin Converting Enzyme Inhibitor Therapy a évalué l’effet du trandolapril 4 mg/j chez 8 290 patients, âgé d’au moins 50 ans, majoritairement nord-américains, avec une maladie coronaire documentée et une fraction d’éjection ventriculaire gauche > 40 %. Après un suivi moyen de 4,8 ans, la diminution de la PAS/PAD a été de 4 vs 1 mmHg dans le groupe placebo. Aucune différence significative de morbi-mortalité CV n’est observée entre le groupe traité et le groupe placebo (OR : 0,96 ; IC : 0,88-1,06 ; NS). Les auteurs soulignent que le nombre d’événements prévu a été moindre que celui qui était attendu en raison de la bonne prise en charge des facteurs de risque CV au cours de l’essai. En outre, la dose maximale de trandolapril prévue (4 mg/j), qui n’a été atteinte que chez deux tiers des patients, s’est sans doute avérée insuffisante, en comparaison aux plus fortes doses utilisées dans les études HOPE (ramipril 10 mg/j) et EUROPA (perindopril 8 mg/j).   Métaanalyse « IEC et insuffisance coronaire » Toutes les études ayant évalué l’effet des IEC en prévention secondaire chez les patients coronariens en l’absence de dysfonction ventriculaire gauche ont été colligées dans une métaanalyse impliquant 33 960 patients, en regroupant les études HOPE, EUROPA, PEACE, CAMELOT, QUIET, PART2, SCAT. Les résultats indiquent un effet protecteur des IEC chez les coronariens, caractérisé par une réduction significative de 14% de la mortalité globale, de 19 % de la mortalité CV, de 18 % du risque d’infarctus du myocarde et de 23 % du risque d’AVC (tableau 1). Bénéfices des antagonistes calciques sur la prévention coronaire Dans les années 1990, la polémique concernant une possible action défavorable des antagonistes calciques sur la prévention des coronaropathies associée à un risque augmenté d’hémorragies digestives et de cancers, a conduit à mettre en œuvre de vastes études prospectives visant à évaluer l’efficacité des antagonistes calciques avec comme objectif la prévention coronaire. Quelques années plus tard, les données de ces études (ALLHAT, INVEST, ASCOT, VALUE…) ont mis fin à la controverse, démontrant, au contraire, une efficacité de ces molécules au moins similaire aux autres thérapeutiques antihypertensives pour la prévention des événements coronaires, en prévention primaire ou secondaire (angor stable) (tableau 2). Étude ALLHAT L’étude ALLHAT (Antihypertensive and Lipid-Lowering treatment. to prevent Heart Attack Trial) représente la plus large étude jamais réalisée dans le domaine de l’HTA en termes de nombre de patients inclus. En effet, dans ce travail réalisé en Amérique du Nord, 42 418 hypertendus à risque ont été randomisés en quatre groupes : diurétique (chlorthalidone [12,5-25 mg]), antagoniste calcique (amlodipine [2,5-10 mg]), IEC (lisinopril [10-40 mg]) ou alpha-bloquant (doxasozine [2-8 mg]). L’objectif principal était la survenue des événements coronariens (IDM, mortalité coronaire). L’étude a été arrêtée de façon prématurée pour les patients inclus dans le groupe doxasozine en raison d’un excès d’événements CV comparativement aux diurétiques (RR = 1,25 ; IC : 1,17-1,63, p < 0,0001). Après 4,9 ans de suivi, les résultats montrent l’absence de différence, entre les trois groupes restants, sur le critère principal. On notait cependant que l’incidence de l’insuffisance cardiaque était significativement plus élevée dans le groupe amlodipine (vs groupe chlorthalidone : + 38 %). L’incidence des événements cardiovasculaires (+ 10 %), des AVC (+ 15 %) et de l’insuffisance cardiaque (+ 19 %) était aussi plus élevée dans le groupe lisinopril comparativement au groupe chlorthalidone.   En résumé Ces données ne confirment pas l’hypothèse d’une moindre protection coronarienne des antagonistes calciques et indiquent au contraire une efficacité équivalente de l’amlodipine sur la prévention des événements coronariens des hypertendus. Par ailleurs, les diurétiques ne sont pas sortis inférieurs de la comparaison avec les nouveaux antihypertenseurs testés.   Étude INVEST Il s’agit d’un essai randomisé, comparant une stratégie de traitement de l’hypertension basée sur un antagoniste calcique (vérapamil) ± un IEC (trandolapril) à une stratégie de référence (aténolol ± hydrochlorothiazide), chez 22 576 hypertendus porteurs d’une maladie coronarienne documentée (âge moyen = 66 ans). Après 2,7 ans de suivi, la stratégie reposant sur l’antagoniste calcique s’est révélée aussi efficace que celle basée sur le bêtabloquant (risque de décès ou d’infarctus du myocarde ou d’AVC = 0,98 ; 0,90–1,06), risque d’infarctus du myocarde (0,99 ; 0,79-1,24)). Cela reste vrai dans les analyses en sous-groupes (diabète ou non, âge > ou < 70 ans, homme et femme, HVG ou non, etc.), ce qui souligne l’intérêt des antagonistes calciques en termes de prévention cardiovasculaire chez les coronariens hypertendus.   Étude VALUE L’étude VALUE (Valsartan Antihypertensive Long-term Use Evaluation trial) a comparé, chez 15 245 hypertendus à haut risque cardiovasculaire (dont 45 % d’antécédents d’angine de poitrine), deux stratégies thérapeutiques : l’une basée sur un antagoniste calcique (amlodipine) ± hydrochlorothiazide (HCTZ), l’autre sur un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II (valsartan) ± HCTZ. Le suivi a été de 4,2 ans. La baisse de PA a été légèrement supérieure dans le groupe amlodipine (139/79 mmHg) que dans le groupe valsartan (137/77 mmHg), surtout lors du premier mois (- 4/- 2 mmHg). Il n’y a pas eu de différence concernant le critère d’évaluation principal (morbidité et mortalité cardiovasculaire : 10,4 vs 10,6 %, p = 0,49). En revanche, les patients du groupe amlodipine ± HCTZ ont présenté moins d’AVC (3,7 vs 4,2 %, p=0,08) ou d’infarctus du myocarde 9,6 vs 11,4 %, p=0,02). La majeure partie de ce bénéfice étant observée au cours des 3 premiers mois. À l’inverse, moins de patients du groupe valsartan ont présenté un diabète de novo (13,1 vs 16,4 %, p < 0,0001).   En résumé Si les deux stratégies exercent le même effet préventif global sur l’ensemble des événements cardiaques, l’association d’un antagoniste calcique et d’un diurétique thiazidique s’est avérée légèrement plus efficace pour faire baisser la PA et prévenir le risque d’infarctus du myocarde des hypertendus à haut risque CV.   Étude ASCOT L’étude ASCOT (Anglo-Scandinavian Cardiac OuTcomes) a comparé les effets d’une stratégie thérapeutique antihypertensive « standard » (bêtabloquant ± diurétique) à une stratégie « plus récente » (antagonistes calciques ± IEC) sur la survenue d’événements coronaires fatals et d’IDM non fatals, chez 19 257 patients hypertendus à haut risque CV (âge moyen de 63 ans). L’étude a été interrompue précocement en raison d’un bénéfice supérieur dans le groupe « antagoniste calcique » comparativement au groupe témoin. En effet, alors qu’aucune différence entre les deux stratégies n’apparaît sur le critère principal (IDM non fatal, décès coronaire), une diminution significative de l’ensemble des événements coronaires (de 13 %, p = 0,007), des AVC (de 23 %, p = 0,0003) et de la mortalité CV (de 24 %, p = 0,001) est observée dans le groupe amlodipine ± perindopril. Ce bénéfice est retrouvé quel que soit l’âge et semble même plus prononcé après 60 ans. La baisse tensionnelle apparaît, là aussi, un peu supérieure avec la stratégie antagoniste calcique ± IEC (différence moyenne = 2,7/1,9 mmHg) qu’avec la stratégie standard (bêtabloquant ± diurétique).   En résumé Chez des hypertendus en prévention primaire ayant au mois 3 facteurs de risque associés, la stratégie amlodipine ± perindopril confère un avantage par rapport à la stratégie aténolol ± thiazidique sur l’ensemble des événements CV majeurs, la mortalité totale et la survenue de nouveaux cas de diabète.   Étude CAMELOT L’étude CAMELOT (Comparison of AMlodipine versus Enalapril to Limit Occurrences of Thrombosis) a comparé, chez 1 991 coronariens normotendus âgés de 30 à 79 ans, trois stratégies thérapeutiques : amlodipine vs énalapril vs placebo. La majorité des patients étaient traités par bêtabloquants dans le cadre de leur coronaropathie. Après un suivi de 2 ans, on observe une supériorité de l’amlodipine sur le placebo pour le critère combinant décès d’origine CV, IDM non fatal, survie à un arrêt cardiaque, revascularisation coronarienne, hospitalisation pour insuffisance cardiaque, AVC (réduction de 31 %, p = 0,003). En revanche, aucune différence significative n’est observée sur la survenue des événements CV entre le groupe énalapril et amlodipine (OR = 0,85 ; IC : 0,67-1,07, p = 0,16).   Étude ACTION L’essai ACTION (A Coronary disease Trial Investigating Outcome with Nifedipine GITS) a comparé l’effet d’un traitement par nifédipine au placebo chez 7 500 patients avec insuffisance coronarienne stable sous un traitement médical (bêtabloquant dans 80 % des cas, aspirine dans 86 % des cas, statines dans 63 % des cas, IEC dans 20 % des cas). Les résultats ne montrent pas de bénéfice supplémentaire de la nifédipine GITS comparée au placebo sur le critère principal combiné regroupant : mortalité, infarctus du myocarde aigu, angor instable, insuffisance cardiaque, accident vasculaire cérébral et revascularisation périphérique. Seule une analyse en sous-groupe suggère une diminution significative de la mortalité associée aux événements CV majeurs et aux procédures de revascularisation dans le groupe sous nifédipine (0,89 ; 0,83-0,95, p = 0,0012).

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