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Mise au point

Publié le 28 fév 2014Lecture 6 min

Particularités de la stimulation et défibrillation implantable chez l’enfant

A. MALTRET, Centre de référence de malformation cardiaque complexe congénitale, Hôpital Necker, Paris ; Hôpital privé Jacques Cartier, Massy, J. HORVILLEUR, Unité de rythmologie, Hôpital privé Jacques Cartier, Massy

Les enfants implantés d’un stimulateur ou d’un défibrillateur sont très minoritaires par rapport aux adultes. En effet, on estime que seulement 5 % des porteurs de stimulateur et 1 % des porteurs de défibrillateur sont des enfants. De ce fait, il n’existe pas de prothèses ou de sondes dédiées à cette classe d’âge. Les techniques d’implantation ou de programmation chez l’enfant ne sont que des adaptations de celles développées au préalable chez l’adulte.

De nombreux travaux ont montré que les complications de la stimulation comme de la défibrillation étaient plus fréquentes chez l’enfant que chez l’adulte. Plus de complications chez l’enfant En effet, et par définition, l’enfant grandit et est actif, soumettant les sondes (qu’elles soient épicardiques ou endocavitaires) à des contraintes plus importantes. Les déplacements et fractures touchent près d’un quart des sondes chez l’enfant(1). Plus le patient est implanté jeune, plus il sera réopéré, avec un risque accru d’infection (1 à 8 % selon les séries). Le taux de choc inapproprié est de 24 % chez l’enfant contre 14 % chez l’adulte(2). Ces différentes complications mises bout à bout font qu’un tiers des patients implantés d’un défibrillateur à l’âge pédiatrique expérimenteront une complication avant l’âge de 30 ans(3). Indications spécifiques en pédiatrie Les indications de stimulation cardiaque permanente sont bien codifiées en pédiatrie(4). Il s’agit principalement d’implantations pour bloc auriculo-ventriculaire complet, les dysfonctions sinusales ou les indications de resynchronisation étant exceptionnelles. Quelle que soit son étiologie, tout BAV symptomatique doit être implanté. Les signes de mauvaise tolérance de la bradycardie sont parfois frustes chez le nouveau- né (mauvaise prise pondérale, hypotonie, perte de contact) mais aussi chez le plus grand, qui aménage son activité selon ses capacités. Des indications « prophylactiques » sont également retenues sur des critères de fréquence. Lorsque la fréquence d’échappement ventriculaire s’abaisse en deçà d’un certain seuil, l’histoire naturelle des BAV de l’enfant a montré que le risque de syncope et de mort subite s’élevait(5,6). Les indications de stimulation en cas de BAV complet sont résumées dans le tableau 1.     Les indications de défibrillations en pédiatrie n’ont pas fait l’objet d’études randomisées. Elles sont calquées sur celles de l’adulte (tableau 2). Avant les années 2000, les implantations étaient principalement des indications de prévention secondaire. Avec la miniaturisation des boîtiers et le développement de nouvelles techniques d’implantation, les indications se sont élargies. Actuellement, les implantations en prévention primaire sont devenues majoritaires dans l’expérience nord-américaine(7). Parallèlement, la prévention secondaire n’est pas systématique à l’âge pédiatrique : le diagnostic de syndrome du QT long de type 1 et de tachycardie ventriculaire catécholergique fait au décours d’une mort subite récupérée n’est pas une indication formelle d’implantation de DAI. En effet, ces enfants sont efficacement protégés par les bêtabloquants(8).   Y a-t-il encore une place pour l’implantation endocavitaire en pédiatrie ? Avant le développement des sondes épicardiques à diffusion de stéroïdes, le taux important de bloc de sortie sur la stimulation épicardique incitait à stimuler en endocavitaire les enfants le plus tôt possible, à savoir dès 10 kg. Cette attitude n’est plus de mise à l’heure actuelle, d’abord parce que les performances des sondes épicardiques actuelles sont comparables à celles des sondes endocavitaires(9), ensuite parce que l’on mesure mieux aujourd’hui les complications à l’âge adulte de la stimulation endocavitaire pédiatrique. Malgré la diminution du calibre des sondes de stimulation endocavitaire, le taux de sténose ou thrombose de veine est estimé à 25 % chez l’enfant. Les sténoses ou thromboses sont le plus souvent asymptomatiques mais compromettent à moyen et long terme l’accès veineux au cœur.   Nous discutons de plus en plus fréquemment chez l’enfant l’extraction « prophylactique » de sondes endocavitaires dysfonctionnant, plutôt que de réimplanter en ipsilatéral (voire pire en controlatéral) une nouvelle sonde. L’âge de la sonde étant le seul facteur de risque d’extraction compliquée(10), il semble raisonnable de ne pas attendre de multiples réimplantations ou changements de stimulateur avant de songer à l’extraction. Avant la puberté, il est difficile d’implanter un défibrillateur par voie endocavitaire chez l’enfant. Le volume actuel du défibrillateur sous-cutané rend son implantation difficile avant 40 kg(11). De nombreuses techniques d’implantation « alternatives » de défibrillateur ont donc été proposées chez l’enfant. L’une d’elles consiste en l’implantation épicardique d’une sonde de détectionstimulation et la tunnélisation d’un coil de veine cave supérieure dans l’espace interpleural. Le boîtier est placé horizontalement entre le coeur et le diaphragme(12), comme le montre la figure.   Figure. Radio de thorax de stimulation épicardique double chambre (A) et de défibrillation avec coil dans l’espace interpleural et boîtier entre le cœur et la coupole diaphragmatique (B). Quelle programmation ? Il semble que chez le petit enfant en BAV complet sans cardiopathie associée, le bénéfice de la stimulation double chambre soit faible voire nul. Ainsi, un nouveau-né de petit poids sera volontiers stimulé en simple chambre par voie épicardique. Avant 20 kg, le chirurgien atteint facilement la pointe du ventricule gauche par une petite sternotomie médiane. Stimuler à la pointe du VG est, en termes de fonction ventriculaire, aussi efficace qu’une stimulation biventriculaire(13). Le stimulateur est réglé en VVI à 120/min jusqu’à l’acquisition de la marche, puis en VVIR quand l’enfant est plus mobile et que l’asservissement peut être activé. En cas de stimulation double chambre, la fréquence maximale de suivi doit être la plus haute permise par le système. La programmation des thérapies du DAI dépend bien sûr de l’indication d’implantation et du patient. Il n’y a pas de programmation « standard » ou spécifiquement pédiatrique, mais des ajustements au cas par cas. S’il ne s’agit pas d’une cardiopathie opérée à risque de faire une tachycardie ventriculaire, la programmation ne comporte qu’une seule zone thérapeutique, de fibrillation ventriculaire, pour des fréquences supérieures à la fréquence maximale théorique pour l’âge. Le temps de détection doit être long : l’enfant tolère longtemps un trouble du rythme ventriculaire et syncope tard. Quelle surveillance ? La surveillance d’un enfant porteur d’un stimulateur ou d’un défibrillateur diffère peu de celle de l’adulte. Elle consiste en un contrôle semestriel de la prothèse et, en l’absence de cardiopathie associée, d’une échographie cardiaque annuelle. La tension des sondes et coil sera contrôlée par des radiographies de thorax régulières, notamment lors des poussées de croissance ou avant un changement de boîtier. La surveillance en télécardiologie peut être utile en cas de changement de boîtier sans changement d’une sonde un peu tendue sur la radio, afin de surveiller des variations d’impédance qui permettent théoriquement d’anticiper la fracture de sonde. Enfin, il faut noter qu’en toute logique, les professionnels intervenant auprès des enfants, qu’ils soient médecins, enseignants ou éducateurs sportifs, ont généralement une très mauvaise connaissance de la stimulation et encore plus de la défibrillation. L’éducation thérapeutique est donc un élément important de la prise en charge. Elle permet au patient et à sa famille de faire le lien avec ces différents intervenants. Conclusion En l’absence de grandes séries, la pratique de la stimulation et défibrillation en pédiatrie est essentiellement basée sur un consensus d’experts, avec des variations possibles entre les centres.  Un patient stimulé ou implanté d’un défibrillateur à un âge pédiatrique le sera vraisemblablement pour le restant de ses jours.  Dans l’optique de préserver son capital veineux, les perspectives de stimulateurs implantables intracardiaques et des défibrillateurs sans sonde endovasculaire semblent prometteuses pour l’enfant. 

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