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Mise au point

Publié le 25 juin 2020Lecture 5 min

CTO : intérêt des différents scores

Nicolas LHOEST, Clinique de l’Orangerie, Strasbourg

Dans ces temps difficiles où les troubles sanitaires sont graves et où notre activité est largement amputée par la crise, je souhaitais revenir à des discussions « plus légères » et faire une mise au point sur les différents scores d’évaluation des occlusions coronaires chroniques (CTO).

Les scores Japan CTO score Le plus ancien, le Japan CTO (J-CTO) Score (figure 1), a été proposé en 2011 par l’équipe de J. Morino(1). Il s’appuie sur une étude de 400 cas et identifie 5 critères comme étant associés à une diminution du taux de succès de franchissement d’une CTO en moins de 30 minutes : l’absence de cap effilé, les calcifications, les tortuosités, la longueur de l’occlusion, et l’existence d’une première tentative. Figure 1. Prévision d’un franchissement réussi d’une lésion CTO dans les 30 minutes (d’après(1)). CL-score Il a été publié en 2015 par G. Alessandrino et al.(2). Les auteurs retrouvaient comme facteur favorisant l’échec, deux variables cliniques que sont l’antécédent de pontage(s) et d’infarctus du myocarde, et quatre variables angiographiques, à savoir la cap proximale non effilée, les calcifications, l’occlusion d’une autre artère que l’IVA, et une longueur d’occlusion supérieure à 20 mm. Progress CTO score Développé par G. Christopoulos et al.(3), ce score retrouve 4 critères associés à un risque d’échec, avec deux « classiques » : une cap proximale ambiguë et les tortuosités ainsi que deux « nouveaux » critères : une CTO de l’artère circonflexe et l’absence de collatérale rétrograde (figures 2 et 3). Figure 2. Progress CTO Score (d’après(3)). Figure 3. www.progresscto.org ORA score C’est le plus parcimonieux (3 critères), et il a comme particularité innovante d’intégrer un critère clinique : l’âge supérieur à 75 ans, en plus de la localisation ostiale de la CTO et de l’absence de collatérales interventionnelles. Ces 4 scores ont beaucoup de similarités mais aussi certaines différences (tableau 1) : • Le nombre de critères (de 3 pour ORA à 6 pour le CL) • Certains scores attribuent à des variables des pondérations différentes (CL et ORA score), versus le même poids pour le J-CTO et le Progress CTO). • Ils ont toujours des variables angiographiques, mais pas toujours de variables cliniques (Progress CTO). Sur le plan angiographique, la cap proximale est systématiquement prise en compte quel que soit le score. Trois scores apprécient la morphologie, et 2 seulement évaluent les collatérales interventionnelles (pourtant très importantes pour l’approche rétrograde) ; enfin, 2 scores apprécient la localisation IVA et CX. RECHARGE Registry score Plus récemment, J. Maeremans et al.(4) ont publié le RECHARGE Registry score. Six facteurs ont été identifiés : cap proximale non effilée, tortuosité, longueur > 20 mm, zone d’atterrissage postocclusion de mauvaise qualité et une CTO sur un vaisseau ponté. Les procédures étaient réalisées par des opérateurs expérimentés utilisant largement le CROSSBOSS™ et STINGRAY ™ (Boston Scientific). Euro CTO Castle score En 2019, après analyse des données de près de 20 000 procédures du registre de l’Euro CTO Club, un nouveau score a été proposé par Z. Szligyarto(5) et son équipe : l’Euro CTO Castle score. Ce score prend en compte 6 variables : les antécédents de pontage, un âge > 70 ans, une cap proximale non effilée, des tortuosités, une longueur supérieure à 20 mm et, enfin, des calcifications. Si le score se situe entre 0 et 1, le risque d’échec s’élève à 8 % et s’il est ≥ 4, il peut aller jusqu’à 35 %. Selon les auteurs, l’intérêt de ce score est de retenir 4 variables déjà bien validées du J-CTO score, mais aussi de rajouter deux variables cliniques importantes (âge et antécédents de pontage(s)). Ces différents scores ont des variables communes (figure 4) mais peuvent être discriminants comme le montre une étude récente de A.S. Kalogeropoulos et al. (tableaux 2 et 3)(6), comparant le Castle score et le J-CTO score, qui conclut à une évaluation comparable des événements (succès, complications) entre les deux scores avec une capacité discriminante supérieure pour le Castle score dans les cas les plus complexes. Figure 4. Scores des interventions percutanées coronaires des CTO : le présent et le futur (d’après Vemmou E et al. EuroInterv 2020 ; DOI: 10.4244/EIJV15I18A286). Indispensables scores Les scores obligent à analyser la lésion avant la procédure, de mieux comprendre la lésion cible, de bien choisir la stratégie et d’augmenter ainsi les chances de succès. Ils permettent d’identifier les procédures les plus longues et les plus complexes et facilitent l’information du patient et de sa famille, notamment sur le risque d’échec. Ils sont une aide à la planification de la stratégie (voie d’abord, taille d’introducteur, etc.) et au choix du matériel nécessaire. Ils permettent d’appréhender la difficulté des cas, et ainsi de réserver les plus difficiles aux opérateurs expérimentés, et aident les opérateurs les moins expérimentés à sélectionner les cas les plus simples où ils pourront espérer un taux de succès élevé (figure 5). Figure 5. Sélection de cas guidée par le J-CTO score. Bien connaître les scores Les scores n’ont pas tous les mêmes objectifs. Certains permettent un taux de succès ou du franchissement du guide en moins de 30 minutes (J-CTO), et certains ont été conçus par des opérateurs experts en Europe (Castle), ou aux États-Unis. Certains sont anciens : le J-CTO existe depuis 2006 a été mis au point sur la base de 400 patients, le Castle est le résultat d’un travail sur 20 000 patients entre 2008 et 2014. De plus, il y a probablement eu une amélioration conjointe du matériel et de l’expérience des opérateurs, parallèlement à toutes ces études. En résumé, ils ont beaucoup de variables communes et sont donc probablement complémentaires. Alors que le J-CTO score est bien connu et largement utilisé, il a réellement transformé notre approche de l’angioplastie de ces lésions. Évidemment, notre expérience nous a depuis convaincu que l’âge du patient, un antécédent de pontage, l’absence de collatérales interventionnelles et l’occlusion chronique de la CX sont des critères de difficulté. La somme des variables de ces différents scores prend en compte toutes ces données. Dans ma pratique Aujourd’hui, je prends en compte toutes ces variables afin d’évaluer la difficulté prévisible d’une procédure, c’est pourquoi je calcule systématiquement le J-CTO Score et le Castle Score, puis je choisis ma stratégie. Attention aux patients pontés et aux CX « faciles ». Je vous invite donc à vous intéresser à ces scores, à les connaître et à les utiliser au quotidien, vous y gagnerez en pertinence et en succès. Adapter vos indications à votre expérience ou faites venir un ami…

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