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Tips & Tricks

Publié le 29 juin 2024Lecture 8 min

TAVI : coronaropathie et accès coronaire

Clément SERVOZ, service cardiologie, CHU de Toulouse

Le remplacement valvulaire aortique percutané (TAVI) a révolutionné le traitement du rétrécissement aortique. Dans la littérature, la prévalence d’une coronaropathie est importante, de 40 à 75 % chez les patients traités par TAVI. Il est intéressant de noter que ces chiffres sont retrouvés, que les patients soient à haut risque, à risque intermédiaire ou à bas risque bas risque chirurgical. En revanche, les données sur l’intérêt d’une revascularisation préalable au TAVI sont parfois contradictoires. Il en ressort qu’une revascularisation complète systématique n’est actuellement pas indiquée. Dans les études et les registres, la définition de la coronaropathie est variable : antécédent d’angioplastie ou de pontage, présence d’une ou plusieurs sténoses supérieures à 50 %, lésion coronaire à plus de 50 % ou un antécédant d’angioplastie, etc., ce qui participe à la disparité des résultats retrouvés dans la littérature.

Actuellement, l’indication d’une revascularisation en pré-TAVI doit être discutée en heart team pour proposer une prise en charge individualisée et adaptée à chaque patient. Il faut considérer l’atteinte d’un tronc proximal ou non, le degré de sténose mais également le patient dans sa globalité avec l’augmentation du risque hémorragique représenté par la mise sous double antiagrégation plaquettaire. En revanche, la stratégie conservative qui est actuellement de plus en plus appliquée, pose la question de l’accès coronaire futur après TAVI.   ACCÈS CORONAIRE ET TAVI   Tout angioplasticien connaît et a déjà été confronté à la difficulté que peut représenter l’accès coronaire après TAVI. Dans l’année qui suit le TAVI, les registres internationaux montrent qu’une angioplastie coronaire est réalisée chez environ 2 % des patients ; 16 % des patients bénéficient d’une coronarographie dans les 5 ans. La majorité des examens (2/3) sont effectués dans le cadre d’un syndrome coronarien aigu ST+ ou NST+. L’autre tiers correspond aux syndromes coronariens chroniques. La présence de la bioprothèse est associée à une augmentation du temps de procédure et à une utilisation plus importante d’iode. On retrouve également un taux plus important d’échecs d’angiographies et de revascularisations. À cela, il faut ajouter deux raisons qui feront augmenter dans les années à venir les indications de coronarographies et d’angioplasties. Premièrement, l’extension des indications de TAVI vers une population de patients plus jeunes qui ont une espérance de vie plus importante. Deuxièmement, le choix d’une stratégie conservatrice pour les lésions coronaires asymptomatiques découvertes dans le bilan pré-TAVI laissera un potentiel d’évolutivité pour des événements aigus ou chroniques. On comprend donc toute l’importance d’une bonne appréhension des techniques de cathétérisation après TAVI.   ANTICIPER LE RE-ACCÈS LORS DU TAVI   Faciliter le ré-accès coronaire apparaît alors comme un élément majeur dans la réflexion et dans la planification des procédures TAVI. L’alignement entre la commissure prothétique et la commissure valvulaire native est l’élément principal à respecter. En effet, un bon alignement permet d’éviter un effet obstructif de la prothèse elle-même sur la coronaire. Cette notion est encore plus vraie pour les valves supra-annulaires (Evolut™ de Medtronic et Navitor™ d’Abbott) dont le risque d’effet obstructif est encore plus important. De plus, certaines particularités anatomiques du patient visualisées sur le scanner pré-TAVI comme une hauteur coronaire basse par rapport au plan de l’anneau, une petite taille des sinus par rapport à la taille de la valve, la taille et la hauteur de la jonction sinotubulaire peuvent rendre l’accès coronaire ultérieur plus difficile. C’est en considérant tous ces éléments qu’il faut déterminer le choix de la valve, sa taille ainsi que la hauteur d’implantation tout en veillant à respecter l’alignement commissural lors du déploiement. Une analyse fine du scanner et une stratégie adaptée sont primordiales pour faciliter le re-accès des années à venir.   POST-TAVI : CORONAROGRAPHIE ET ANGIOPLASTIE   Il devient particulièrement important pour le cardiologue interventionnel de connaître les « tips & tricks » de réalisation d’une coronarographie et d’une angioplastie après TAVI. En effet, une grande partie de ces examens sont réalisés dans un contexte d’urgence. Une connaissance préalable de certains points permet de s’assurer d’un succès de procédure. Premièrement, si ces examens sont disponibles, l’analyse de la coronarographie, du scanner pré-TAVI ainsi que l’aortographie finale postimplantation sont les premiers éléments à étudier avant de débuter l’examen. Ils permettent de localiser les ostias et d’évaluer les rapports anatomiques entre la prothèse et les coronaires. À l’aide de ce repérage, il devient alors plus facile de cibler la zone à canuler. À défaut, si ces examens ne sont pas disponibles car réalisés dans un autre centre, il est possible de débuter par une aortographie. Dans ce cas, la sonde pigtail doit être positionnée au niveau du tiers supérieur de la prothèse. Si une coronaire est particulièrement difficile d’accès, il faudra rechercher une incidence orthogonale par rapport à l’ostium pour en dégager la naissance. Sur l’aortographie on étudie alors : la hauteur des coronaires, l’angle d’insertion des coronaires, la hauteur d’implantation de la valve et enfin la présence d’une potentielle obstruction entre la valve et l’ostium. Il convient également d’identifier la cellule de la valve adjacente à l’ostium qu’il faudra tenter de canuler.   VOIE D’ABORD   L’artère radiale droite est la voie d’abord préférentielle de nos examens. En post-TAVI, le choix d’une voie alternative en radial gauche ou en fémoral gauche peut faciliter la canulation grâce à l’angulation qu’elles procurent. Un changement de voie doit être rapidement envisagé en l’absence d’une canulation rapide malgré l’utilisation des différentes sondes recommandées.   VALVE EDWARDS SAPIENS   La taille et le design de la valve Sapiens (Edwards) font que les ostias coronaires sont très souvent au-dessus de la prothèse ce qui facilite grandement l’accès coronaire. Dans le cas où les coronaires sont en regard de la valve, il faut savoir que la première rangée de cellules est de taille plus importante ce qui facilite la canulation. L’intubation se fait alors au travers des cellules et les techniques de coronarographie et d’angioplastie sont peu ou pas modifiées. En première intention, pour cathétériser l’artère coronaire droite, l’utilisation d’une sonde JR 4 est préconisée ; pour le tronc commun, l’utilisation d’une sonde JL 3,5 ou 4 est recommandée. Si la canulation sélective est difficile et que l’analyse angiographique est insuffisante, il est possible de tenter de canuler une cellule adjacente. Si cela n’est pas suffisant, l’utilisation d’un cathéter porteur de type EBU 3,5 avec un guide coronaire est possible afin d’optimiser la canulation. Dans le cas d’une angioplastie coronaire, il peut être ajouté une extension de cathéter tractée par un ballon afin d’améliorer les injections et l’acheminement du matériel.   VALVES SUPRAANNULAIRES AUTOEXPANDABLES : EVOLUT™, NAVITOR™   À la différence des valves sur ballon expandables, le stent des valves supra-annulaires s’étend au-delà des ostias coronaires. Par conséquent, l’accès aux coronaires est réalisé quasi systématiquement au travers des cellules. Dans ce cas, il est préférable de réaliser la canulation de manière co-axiale au travers de la cellule. L’objectif est d’obtenir un franchissement le plus perpendiculaire possible. Grâce au guide d’échange en « J », il est possible d’identifier la cellule à cathétériser. Le guide « J » est passé au travers de la cellule et sert alors de support pour la sonde qui sera avancée au plus près de l’ostium (figure 1). Figure 1. Passage du guide J au travers de la cellule à cathétériser.   Le stent de la prothèse apporte un support significatif au cathéter, il faut donc privilégier les sondes les moins agressives. Pour la coronaire droite, la JR 4,0 est la sonde de première intention à utiliser. En deuxième intention, si le sinus de vasalva est étroit, il est possible d’utiliser une 3DRC, une IM ou une AR 1. Si le sinus est large, il est préférable d’utiliser une JR 4,5, une JR 5 ou bien une AR 2. Pour la canulation gauche, les cathéters de petite taille sont à préférer tels que JL 3,5 ou 4,0 voire même 3 en cas de sinus de petite taille. L’utilisation d’un porteur de type EBU peut être intéressante, mais dans ce cas il devient très difficile d’être co-axial et il y a un réel risque de plicature et de blocage du cathéter guide (figure 2). Figure 2. A : Canulation de la coronaire droite avec une sonde JR 4 au travers d’une valve Evolut™ (Medtronic). B : Canulation du TCG avec une sonde JL 3,5 au travers d’une valve Navitor™ (Abbott). Visualisation du support apporté par la valve.   Une fois engagé coaxialement, on réalise l’angiographie coronaire ou angioplastie. L’objectif dans un premier temps est un compromis entre analyse suffisante de l’image et risque de l’examen. Si la canulation non sélective n’est pas suffisante et afin d’obtenir une image de qualité, un guide coronaire de première intention ainsi qu’une extension cathéter peut être utilisée (figure 3). Figure 3. Cathétérisation du TCG avec EBU + extension de cathéter.   RETRAIT EN SÉCURITÉ   Il est important d’être très vigilent à la phase du désengagement du cathéter. Si la canulation n’est pas co-axiale ou bien s’il a été nécessaire d’utiliser un cathéter de type EBU, il existe un risque de plicature de la sonde. La sonde peut alors se piéger voire se casser. Afin d’éviter ces complications, le retrait du cathéter guide doit être réalisé sur le guide 0,014’’. Pour les sondes diagnostiques, le retrait doit se faire sur le guide d’échange en « J ». Si une résistance est rencontrée au retrait, l’utilisation du ballon du stent ou de postdilatation peut aider à se désengager le guide. L’autre possibilité est d’insérer le guide « J » en parallèle du guide d’angioplastie afin d’apporter du support supplémentaire et permettre le retrait.   LE SCANNER EN DERNIER RECOURS   Enfin, s’il ne s’agit pas d’un contexte d’urgence et si la canulation coronaire n’est pas possible, la réalisation d’un scanner cardiaque peut être utile afin de déterminer les rappor ts anatomiques entre la valve, les ostias et les commissures tout en sachant que des artéfacts en rapport avec le mouvement des feuillets peuvent altérer l’interprétation des images.   POINTS CLÉS   • La planification minutieuse des procédures TAVI permet de faciliter un ré-accès coronaire. • L’analyse du scanner pré-TAVI, de la coronarographie et de l’aortographie post-TAVI permettent de cibler la zone de canulation. • Il est important de connaître les « tips & tricks » pour réaliser une coronarographie et d’une angioplastie en post-TAVI. Pour en savoir plus • Barbanti M et al. JACC Cardiovasc Interv 2020 ;13(21) : 2542-55. doi: 10.1016/j.jcin.2020.07.006. • Nai Fovino L et al. J Am Heart Assoc 2020 ; 9(13) : e016446. doi: 10.1161/ JAHA.120.016446. • Valvo R et al. EuroIntervention 2021 ; 17(10) : 835-47. doi: 10.4244/EIJ-D-21- 00158.

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