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Au coeur du vasculaire

Publié le 10 juin 2024Lecture 4 min

La QFR en périphérique

Maxime RAUX, chirurgie vasculaire et endovasculaire, hôpital Paris Saint-Joseph, hôpital Marie Lannelongue, Paris

Comme souvent en chirurgie vasculaire, les innovations technologiques en cardiologie interventionnelle présagent, quelques années plus tard, d’évolutions des pratiques endovasculaires. C’est probablement le cas de la QFR (quantitative flow ratio). L’ancêtre de cette technique est la sonde de FFR (fractional flow reserve), qui avait fait la preuve de son efficacité pour évaluer le retentissement des lésions intermédiaires stables, afin de choisir entre un traitement médical ou une angioplastie (études FAME I et II)(1,2). Néanmoins, depuis mars 2023, ces guides de pression intracoronaire ne sont plus remboursés, générant des craintes de surcoûts économiques pour les établissements et, pour le praticien, la perte d’un outil pertinent d’aide au diagnostic.

Du coronarographiste sans outil au coronarographiste « augmenté » par l’intelligence artificielle   L’essor de la QFR a permis de faire disparaître ces inquiétudes. Cette technique, basée sur l’intelligence artificielle (IA) et un modèle de deep-learning, permet un traitement des images de coronarographie (peropératoire ou a posteriori) et l’évaluation physiologique non invasive du retentissement de la lésion, son degré de sténose et la QFR résiduelle postdilatation, et ce, sans injection d’un agent hyperémiant (adénosine) ni de guide intracoronaire. L’étude FAVOR II(3) a permis de prouver une concordance entre FFR et QFR. Puis, l’étude FAVOR III China(4) a mis en évidence la supériorité, en termes de résultat clinique, de l’angioplastie guidée par QFR versus l’angioplastie basée sur l’analyse visuelle de l’angiographie seule. Tout ceci avec moins de rayons, sans guide intracoronaire avec le risque de dissection inhérent, et surtout avec un gain de temps non négligeable par rapport à la sonde de FFR. Deux images de coronarographie avec 25° d’écart minimum permettent l’analyse du vaisseau, avec une reconstruction 3D et une évaluation du flux intravasculaire. Le logiciel donne surtout, sans rayon ou contraste supplémentaires, des données anatomiques comme le degré de sténose, la longueur et le diamètre de la lésion, ainsi que la QFR résiduelle, soit la QFR du vaisseau après dilatation (figure 1). Figure 1. Un barème de couleurs permet une évaluation rapide sur la reconstruction 3D, montrant facilement les zones sténosées (orange et rouge), ainsi que les données anatomiques chiffrées et la QFR résiduelle.   Les applications de la QFR en chirurgie vasculaire   Pour le moment, le spectre de cette technologie se limite à la cardiologie mais on voit aisément son champ d’application en chirurgie vasculaire, et les avantages qu’elle offrirait. Pour le moment, une seule étude s’est intéressée à son application, notamment la corrélation avec les données de l’échoDoppler sur les carotides(5). Cette étude de faisabilité portant sur 14 patients porteurs de sténoses carotidiennes asympto matiques. Les données Doppler, anatomiques (pourcentage de sténose NASCET), ainsi que le pic de vitesse systolique (PVS), étaient comparés aux données artériographiques post-traitées en QFR. Il en résultait une excellente corrélation entre les deux techniques pour le PVS, le pourcentage de sténose et le diamètre minimal de la lumière (figure 2). Figure 2. Corrélation significative entre les données Doppler et artériographiques sur la bifurcation carotidienne.   Dans le champ de la prise en charge endovasculaire de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI), cette technique nous est apparue être un formidable outil permettant d’optimiser la prise en charge de nos patients. Dans la majeure partie des cas, l’évaluation angiographique est faite visuellement par l’opérateur, sans critère véritablement objectif et reproductible d’un technicien à l’autre. Éventuellement, l’opérateur s’aide d’une artériographie sous une deuxième incidence, mais rares sont les centres disposant en routine de dispositifs d’évaluation intravasculaires, comme l’échographie intravasculaire (IVUS) ou la tomographie à cohérence optique (OCT). Ces dispositifs ont les mêmes inconvénients que la sonde de FFR, à savoir leur absence de remboursement et le caractère invasif. Nous avons donc travaillé avec la société Medis sur l’applicabilité de ce dispositif à la pathologie artérielle occlusive des membres inférieurs et démarré une étude afin d’évaluer sa plus-value dans la prise charge de nos patients. De fait, cette technologie pourrait à terme : – aider le praticien à évaluer la significativité d’une lésion vasculaire en amont ou en aval de sa lésion cible, et savoir s’il doit la dilater ou non ; – évaluer le résultat de sa préparation artérielle (prédilatation), afin de savoir si la mise en place d’un stent est nécessaire ou si la lésion peut faire l’objet d’un traitement par ballon actif seul, par exemple ; – contrôler le résultat final et s’assurer que l’ensemble des lésions hémodynamiquement significatives ont été traitées. On pense, ici, particulièrement à certaines dissections qui parfois peuvent passer inaperçues et compromettre la perméabilité primaire du geste à court terme ; les zones de réentrée des revascularisations sous-intimales ou encore l’ostium de l’artère fémorale superficielle.   En conclusion   Au même titre qu’en cardiologie interventionnelle, cette technique nous apparaît donc être une aide prometteuse et un outil non invasif pour l’évaluation peropératoire pour nos patients bénéficiant d’un geste endovasculaire. Nous ne manquerons pas de communiquer les résultats de notre étude une fois celle-ci terminée !

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