Publié le 31 oct 2016Lecture 5 min
Actualités sur la maladie coronaire
J.-G. DILLINGER, P. HENRY, Unité de prise en charge de la maladie coronaire, département de cardiologie, hôpital Lariboisière, Paris
Le congrès ESC 2016 qui s’est déroulé à Rome a permis quelques avancées sur la prise en charge de la maladie coronaire, résultats parfois inattendus remettant en question quelques dogmes, mais sans apporter d’informations révolutionnaires.
L’étude AMERICA
Il s’agit d’une étude multicentrique française coordonnée par le groupe Action. Elle a comparé deux stratégies de prise en charge de l’athérosclérose extracardiaque périphérique et neuro-vasculaire au décours d’un syndrome coronarien aigu chez des patients soit âgés de 75 ans ou plus, soit ayant une atteinte coronaire tritronculaire. La première stratégie était une stratégie dite « agressive » avec détection et traitement éventuel des sténoses ou anévrysmes extracardiaques. L’autre stratégie consistait en une stratégie conservatrice avec un traitement médical optimal.
Au total, 521 patients ont donc été inclus dans cette étude et randomisés entre les deux bras. La moyenne d’âge était de 77 ans avec environ 25 % de patients diabétiques et une présence d’AOMI d’environ 10 % des cas. Les résultats sur le critère principal ischémique à 2 ans, ne montrent pas de supériorité de la stratégie interventionnelle dans cette étude. Lorsqu’on regarde les principaux composants du critère principal, on ne retrouve pas de bénéfice non plus sur la survenue des infarctus, des AVC, des ischémies critiques des membres inférieurs.
En conclusion, cette étude montre l’absence de bénéfice d’une stratégie agressive par rapport à un traitement médical optimal sur un suivi moyen de 2 ans.
L’étude PRAGUE-18
Une autre étude dans le syndrome coronarien aigu, l’étude de PRAGUE-18 présentée par P. Widimsky compare le prasugrel au ticagrelor chez les patients avec un infarctus du myocarde (STEMI) traités par angioplastie. Il s’agit d’une étude académique prévue pour inclure initialement 2 500 patients. Les patients étaient randomisés immédiatement après l’arrivée entre un traitement par prasugrel (réduction de dose à 5 mg chez les patients de plus de 75 ans et moins de 60 kg) ou ticagrelor en association avec le traitement habituel par aspirine. Les patients exclus étaient des patients avec un antécédent d’AVC, un antécédent de saignement sévère dans les 6 derniers mois ou une contre-indication à l’une des deux molécules. L’âge moyen était de 62 ans avec environ 20 % de patients diabétiques. Le critère principal était un critère composite associant décès, infarctus, revascularisation urgente, AVC et saignement majeur à 7 jours. Aucune différence significative entre les deux groupes (4 % avec le prasugrel versus 4,1 % avec le ticagrelor, p = 0,94) n’a été retrouvée lors de l’analyse intermédiaire. L’étude a donc été arrêtée pour futilité en l’absence de bénéfice. Même si certains ont soulevé le manque de puissance potentielle de l’étude, il n’en reste pas moins qu’il s’agit de la première étude prospective comparant les deux molécules et qui ne montre aucune tendance concernant la supériorité de l’une ou de l’autre molécule.
L’étude ANTARTIC
Concernant l’adaptation du traitement antiagrégant plaquettaire lors du stenting coronaire, l’étude ANTARTIC a une nouvelle fois remis en question cette stratégie. Cette étude portait sur des patients âgés de plus de 75 ans, qui on le sait, sont des patients à haut risque ischémique et à haut risque hémorragique. Ce protocole avait pour but d’évaluer une stratégie conventionnelle associant une bithérapie antiagrégante plaquettaire avec un inhibiteur P2Y12 de nouvelle génération (prasugrel 5 mg) comparativement à une stratégie avec monitoring de l’agrégation plaquettaire sous prasugrel 5 mg par VerifyNow®. Selon les résultats des tests d’agrégation plaquettaire, les investigateurs procédaient à une majoration du prasugrel à 10 mg en cas d’inhibition insuffisante (réalisée chez 3,7 % des patients) ou à une diminution du traitement au clopidogrel 75 mg en cas d’inhibition trop importante (réalisée chez 39,3 % des patients). Le critère principal composite net associant décès, infarctus, revascularisation en urgence et saignements à un an, ne montre aucune différence significative entre les deux groupes. Il n’y a pas de différence aussi bien sur les événements ischémiques que sur les saignements.
L’étude ANTARTIC refroidit donc clairement les utilisateurs du VerifyNow® pour adapter le traitement antiagrégant plaquettaire, y compris chez les personnes âgées.
L’étude NORSTENT
À l’heure où les recommandations de l’ESC préconisent une revascularisation coronaire avec l’emploi de stents actifs en première intention, l’étude NORSTENT pouvait sembler jouée d’avance. Il s’agit d’un essai multicentrique randomisé, réalisé en Norvège entre 2008 et 2011, comparant l’utilisation de stent nu (BMS) et de stent actif (DES) de deuxième génération chez 9 013 patients coronariens avec angioplastie. Il s’agissait dans un tiers des cas de patients coronariens stables et, dans deux tiers des cas, de patients avec un syndrome coronarien aigu. Les patients ont reçu soit un stent nu, soit un stent actif (83 % de stent à l’évérolimus et 12 % de stent au zotarolimus). Après 6 ans de suivi sur un critère composite ischémique (mortalité, infarctus non fatal), l’étude ne montre pas de différence entre les deux groupes, (16,9 % pour le DES versus 17,4 % pour le groupe BMS, p = 0,66). Le taux de revascularisation coronaire était significativement supérieur dans le groupe BMS (19,8 % versus 16,5 %, p < 0,001). Le taux de thromboses de stents était significativement réduit dans le groupe stent actif par rapport au stent nu prouvant la sécurité des stents actifs actuellement. Dans cette étude, certains observateurs voient le verre à moitié vide et d’autres le verre à moitié plein. Nous vous laissons vous faire votre propre opinion.
L’étude CONVERSE
L’étude CONVERSE, une étude coréenne, avait pour but d’évaluer la place du coroscanner chez des patients atteints d’une maladie coronaire stable. Actuellement, près de deux tiers des patients adressés pour coronarographie ne présentent pas de lésion coronaire justifiant une revascularisation. Le coroscanner pourrait éviter une grande partie des coronarographies. L’étude a inclus et randomisé 1 503 patients entre accès direct à la coronarographie et accès en fonction des résultats du coroscanner. Les résultats de l’étude montrent l’absence de différence significative sur les événements cardiovasculaires majeurs à un an. À noter également une réduction de plus de 40 % du nombre de revascularisations coronaires dans le groupe avec le coroscanner. Du point de vue médico-économique, l’étude a montré une réduction des coûts avec la stratégie employant le coroscanner. Comme toute étude, l’étude CONSERVE a des limites et les patients n’avaient pas de test d’ischémie préalable à la coronarographie, ce qui est pourtant recommandé par nos sociétés savantes.
En bref, les études DOCTORS, EROSION et BASKET
Enfin, plusieurs études ont été consacrées à l’imagerie endocoronaire et aux techniques d’angioplasties. L’étude DOCTORS menée par l’équipe de Besançon montre l’intérêt de l’OCT pour l’apposition et le bon déploiement des stents lors du syndrome coronarien aigu (n = 214) avec amélioration de la FFR en fin de procédure.
L’étude EROSION utilisant l’OCT montre que dans 25 % des cas, lors d’un syndrome coronarien aigu, la lésion responsable est une érosion de plaques et que cela peut permettre d’éviter le stenting. Ces résultats sont similaires à ceux de l’étude MIMI qui avait été réalisée en France. Enfin, l’étude BASKET-SAVAGE (n = 240) a démontré la supériorité des stents actifs comparativement aux stents nus pour l’angioplastie des greffons veineux sur les événements cardiovasculaires à 1 an et 3 ans.
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