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Vasculaire

Publié le 01 nov 2017Lecture 7 min

Que demande-t-on au scanner dans le bilan de TAVI ?

Jean-Nicolas DACHER et coll.*, Radiologie (imagerie cardiaque) et cardiologie, CHU de Rouen

La réalisation d’un scanner cardiaque, de l’aorte et de ses branches est indispensable avant la réalisation d’une implantation transcathéter de prothèse valvulaire aortique (TAVI) dans un contexte de rétrécissement aortique calcifié (RAC). Des recommandations techniques ont été publiées(1) dont la présente mise au point est largement inspirée. La technique varie selon la machine employée, mais les objectifs restent les mêmes.

Notre expérience avec une machine de 256 détecteurs couvrant un champ de vue de 16 cm dans l’axe du corps en un seul battement cardiaque est très positive, montrant dans cette application particulière une nette supériorité des équipements de dernière génération par rapport à la technologie plus conventionnelle à 64 détecteurs. Le patient est confortablement installé en décubitus dorsal, les bras au-dessus de la tête lorsque cela est possible. Il/elle est entraîné(e) à l’apnée ; celle-ci sera très courte avec les nouveaux équipements (< 4 secondes). Les bêtabloquants sont proscrits. Une voie d’abord veineuse permettant une injection à 3-4 ml/seconde est mise en place. Une acquisition synchronisée sans injection limitée au massif cardiaque est d’abord réalisée pour mesurer le score calcique valvulaire(2) selon le principe du score d’Agatston. Puis, une acquisition injectée et synchronisée à l’ECG est faite sur l’ensemble du thorax (2 battements cardiaques avec un 256 détecteurs). L’ECG est désactivé quand le diaphragme est atteint. L’acquisition se poursuit avec le même bolus d’iode par une spirale sur l’abdomen et le pelvis jusqu’aux petits trochanters. Au total, 50 à 60 ml de produit de contraste sont injectés, flushés par 30 ml de sérum physiologique à 3-4 ml/s. En 256 détecteurs, une seule injection est utile. En 64 détecteurs, il est habituellement utile de faire 2 injections successives de produit de contraste, ce qui aboutit à une charge iodée supérieure de 30 à 50 %. Dans notre département pionnier en matière de TAVI, les radiologues cardiaques se sont toujours impliqués dans le bilan scanographique préthérapeutique et fournissent un compte-rendu structuré à l’équipe de cardiologie interventionnelle avec l’ensemble des images et une sélection d’images clés. Cette attitude nous paraît positive pour la prise en charge du patient dans la mesure où deux approches indépendantes sont réalisées, aboutissant à une discussion toujours fructueuse en cas de discordance. La lecture radiologique du scanner permet aussi de détecter des comorbidités souvent pertinentes dans la décision de prise en charge du patient. Les 2 objectifs principaux du scanner sont : – la mesure systolique de l’anneau aortique qui permet de proposer une taille de prothèse ; – l’analyse de l’abord vasculaire, sachant que l’abord fémoral est privilégié. Les objectifs secondaires nombreux seront énoncés ci-après. Chaque structure anatomique, chaque groupe de mesures doit faire l’objet d’une image clé enregistrée sur le support numérique et/ou le PACS.   Mesure systolique de l’anneau aortique   L’anneau aortique est une structure anatomique virtuelle reliant le nadir de chacune des 3 cusps (figure 1). Le scanner a bien démontré la nature ovoïde de l’anneau (figure 2). De plus, de nombreux travaux ont montré qu’il est indispensable de le mesurer au temps systolique(3) ; une mesure au temps diastolique sous-estime en effet la taille de l’anneau, risquant d’aboutir au choix d’une prothèse sous-dimensionnée et à une régurgitation paravalvulaire. Cet impératif technique impose donc une acquisition scanographique couvrant la systole ainsi qu’une reconstruction adéquate (reconstructions des images cardiaques tous les 5 % entre 20 et 40 % de l’espace R-R). Pour nous adapter aux demandes des industriels des prothèses, nous avons pris l’habitude de fournir les valeurs suivantes : – petit et grand diamètre ; – surface de l’anneau et diamètre issu de la surface ; – périmètre de l’anneau. Figure 1. Scanner de l’aorte avant TAVI. Rendu de volume de l’aorte thoracique en haut à gauche. Repérage bidimensionnel de l’anneau (lignes oranges sur les 2 vues du bas). Vue de l’anneau en petit axe en haut à droite. Figure 2. Mesures typiques de l’anneau aortique en systole. Du fait de sa nature virtuelle, déposer le plan de l’anneau requiert de l’expérience et une bonne connaissance de l’anatomie régionale et de la procédure interventionnelle. Notons toutefois que les industriels ont aujourd’hui développé des outils logiciels de qualité pour définir l’anneau. Ces outils fonctionnent d’autant mieux que la qualité des images est bonne mais nécessitent souvent des corrections. Les mêmes outils fournissent aussi une imagerie volumique de l’aorte incluant le plan de l’anneau, qui peut être utilisée en salle de cathétérisme pour préorienter le tube, tant en céphalo caudal qu’en incidence oblique (figure 3). Ce repérage 3D scanographique permet d’économiser du produit de contraste iodé en angiographie sus-sigmoïdienne. Rappelons que la dysfonction rénale est un élément pronostique majeur chez les patients avec TAVI, d’où l’importance de diminuer les volumes d’iode injectés, en particulier par voie artérielle. Figure 3. Reconstruction volumique de l’aorte thoracique ; le repérage de l’anneau (en jaune) a été réalisé par l’opérateur et superposé à la vue volumique (A). Une vue perpendiculaire à l’anneau (B) permet de préorienter le tube en salle d’intervention. Dans ce cas, il s’agit d’une vue de face quasi stricte. En faisant glisser vers le haut le plan de l’anneau, on obtient le plan valvulaire où sont identifiés le degré de calcification, la cuspidité (figure 4) et la planimétrie systolique de la valve. Il peut arriver que la mesure anatomique de la planimétrie valvulaire ne soit pas en parfaite adéquation avec la mesure fonctionnelle de l’échographie, et en particulier qu’elle ne confirme pas le caractère serré du rétrécissement aortique. Une confrontation des données est nécessaire en cas de discordance. Figure 4. Rétrécissement aortique serré sur bicuspidie congénitale. Vue petit axe de la valve en phase systolique. Données anatomiques sur l’aorte   À partir des images volumiques de l’aorte et d’un repérage automatisé du centre de l’aorte, on pourra obtenir les valeurs suivantes : – hauteur du sinus de Valsalva ; – diamètres de l’aorte : • au niveau du Valsalva, • de la jonction sino-tubulaire, • à 4 cm du plan de l’anneau ; – hauteur des ostia coronaires par rapport au plan de l’anneau (figure 5). La lumière aortique doit être explorée dans son intégralité afin de détecter toute anomalie pouvant impacter la procédure, en particulier des plaques d’athérome potentiellement emboligènes. Figure 5. Mesure de la hauteur des ostiae coronaires par rapport à l’anneau aortique. Données anatomiques cardiaques   Une reconstruction diastolique dans le plan 3 cavités est systématique afin de mesurer le bourrelet septal sous-aortique (figure 6). Quand le septum est très épais et proéminent, il présente le risque de faire chasser la prothèse, la désaxant par rapport au flux ventriculo-aortique. Figure 6. Vue 3 cavités en diastole permettant la mesure du bourrelet septal sous-aortique. L’extension calcique doit être précisée (figure 7) ; si la calcification des cusps aortiques est favorable à la bonne accroche de la prothèse, l’extension calcique à la chambre de chasse (risque de rupture d’anneau), à la valve mitrale (risque théorique de dysfonction mitrale) ou au septum membraneux (risque de trouble de conduction et de pacemaker) sont plutôt défavorables et méritent mention. Les cavités cardiaques doivent être analysées dans leur ensemble à la recherche de toute anomalie pouvant impacter la prise en charge (calcification de l’anneau mitral, signes d’hypertension pulmonaire, thrombus d’auricule). Figure 7. Coulée calcique franche sur la continuité mitro-aortique. Abord vasculaire   L’abord fémoral est à privilégier mais il n’est pas le seul possible et il est raisonnable d’adapter le champ d’exploration scanographique à un éventuel abord alternatif (sous-clavier, transapical du ventricule gauche, carotidien). De façon globale, il est nécessaire de vérifier l’intégralité du trajet des prothèses (figure 8) depuis l’abord cutané jusqu’à la racine de l’aorte. Toute sténose vasculaire, toute prolifération athéromateuse doivent être décrites et faire l’objet d’une image clé (figure 9). À l’étage ilio-fémoral, le rôle du scanner est d’apprécier les sinuosités artérielles et les calcifications pariétales. Les points de ponction fémoraux (figure 10) méritent une attention particulière ; ils se situent en regard du milieu de la tête fémorale en amont de la trifurcation fémorale. Il faut préciser leur calibre (diamètres minimal et moyen), la présence et la disposition de calcifications pariétales (punctiformes, circonférentielles ou en miroir), la présence d’un éventuel pseudo-anévrysme ou d’une dissection. Figure 8. Mesures des calibres vasculaires ; rendus des résultats (diamètres minimum et moyen) sur une vue en rendu de volume. Figure 9. Analyse luminographique d’une artère iliaque gauche. Figure 10. Vue en petit axe d’un potentiel point de ponction fémoral. Références Compte-rendu type   La réalisation technique et l’interprétation d’un scanner avant TAVI sont maintenant bien codifiées. Compte tenu du caractère très technique du compte-rendu et de l’impératif d’exhaustivité des données fournies, nous avons opté pour un compte rendu type associant les données qualitatives, les mesures et les images clés. Dans la conclusion, figure toujours un avis sur la taille de la prothèse et sur la possibilité d’un abord fémoral. Toute comorbidité pouvant faire renoncer à ce traitement interventionnel risqué et coûteux est mentionnée et prise en compte par la Heart Team.

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