Publié le 15 juin 2021Lecture 3 min
Le point sur les canalopathies
Soraya ANYS, Éloi MARIJON, Hôpital européen Georges Pompidou, Paris
Congrès EHRA
Les canalopathies sont un ensemble hétérogène de pathologies héréditaires à transmission le plus souvent autosomique dominante, conférant un risque d’événements rythmiques ventriculaires graves malgré un cœur morphologiquement sain. Si les indications d’implantation de défibrillateur en prévention secondaire sont relativement consensuelles (à de rares exceptions près), la question de la stratification du risque en prévention primaire reste épineuse.
• Stratification du risque dans le syndrome du QT long congénital (LQTS)
Le diagnostic de LQTS est porté devant un allongement de l’intervalle QT corrigé ≥ 480 ms sur des ECG répétés, par l’identification d’un variant pathogène, ou avec l’aide du score de Shwartz(1). Les sous-types 1, 2 et 3 sont les plus fréquents (90 % des formes génétiquement documentées). Le traitement repose sur des règles de vie (éviction des médicaments qui allongent le QT et des situations à risque, correction des troubles ioniques) et le traitement bêtabloquant. La stratification du risque rythmique est basée principalement sur la symptomatologie, le génotype et la durée du QT corrigée(2,3). En effet, a été démontré un risque supérieur de mort subite chez les patients porteurs d’un LQTS de type 2 ou de type 3 (risque de plus peu sensible au traitement bêtabloquant) et chez les patients avec un QT corrigé très allongé, au-delà de 500 ms notamment. Les patients ayant déjà eu des événements sont également à haut risque de récidive. Le défibrillateur est donc indiqué en prévention secondaire, et peut être proposé en prévention primaire dans les cas jugés à haut risque décrits ci-dessus(1). À noter que certaines périodes sont à risque particulier, notamment le post-partum (jusqu’à 9 mois après l’accouchement).
• Stratification du risque dans le syndrome de Brugada (BrS)
Le diagnostic de BrS est posé devant la présence sur l’ECG d’un aspect dit de type 1 soit spontané soit induit par un inhibiteur des canaux sodiques.
Le taux d’événement passe de 0,38 % à 10,9% par an en fonction de la présence d’aucun, d’un ou de ces deux facteurs combinés(4). D’autres marqueurs de risque ont été décrits, principalement électrocardiographiques (QRS fragmentés, Brugada dans les dérivations périphériques, repolarisation précoce...). La place de la stimulation ventriculaire programmée (SVP) est discutée et ne fait actuellement pas consensus (possible intérêt mais semble peu reproductible). A contrario, les femmes semblent moins sujettes aux événements rythmiques et le risque semble diminuer après 60 ans(5,6) (figure 1).
Des scores de risque combinant ces différents facteurs ont été proposés. S’ils permettent d’identifier correctement les patients à très haut risque et à très bas risque, ils peinent à stratifier le risque des patients « intermédiaires », ceux pour lesquels la prise en charge est, et reste donc encore, la plus difficile(7). Leur suivi est primordial et permet de dépister l’apparition de symptômes à risque et une évolution du substrat.
• Stratification du risque dans la tachycardie ventriculaire polymorphe catécholergique (CPVT)
Le diagnostic est posé devant des tachycardies ventriculaires polymorphes survenant à l’effort (typiquement tachycardie ventriculaire bidirectionnelle) ou au stress, ou par la mise en évidence d’un variant génétique pathogène. Le traitement repose principalement sur l’introduction d’un bêtabloquant(1). Dans cette pathologie, les indications d’implantation de défibrillateur sont rares (presque uniquement en cas de prévention secondaire avec survenue de l’événement rythmique sous traitement) car les thérapies délivrées par le défibrillateur sont peu efficaces sur les arythmies ventriculaires survenant sur ce terrain et que le risque est important qu’elles conduisent à un orage rythmique. Le risque rythmique est majoré lorsque le diagnostic est fait à un âge jeune, en l’absence de traitement bêtabloquant et après un premier événement rythmique grave(8).
• Stratification du risque dans le syndrome du QT court (SQTS)
Le SQTS est une pathologie très rare, dont on connaît de ce fait assez peu de choses. Le diagnostic est posé à l’ECG devant un QTc ≤ 340 ms, ou ≤ 360 ms avec un variant pathogène ou une histoire familiale de SQTS ou de mort subite précoce. Le pronostic est très péjoratif (estimé à plus de 40 % de mort subite à l’âge de 40 ans)(9). Peu de facteurs pronostiques sont connus. Aucun traitement médicamenteux n’a réellement démontré son efficacité, et la place du défibrillateur est assez large, bien que peu de données soient disponibles en prévention primaire.
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