Diabéto-Cardio
Publié le 05 sep 2023Lecture 3 min
Effets cardio- et néphroprotecteurs des iSGLT2 et des AR GLP-1 : une étude de « vraie vie » dans le diabète de type 1
Patrice DARMON, CHU Conception, Marseille
La place des thérapies adjuvantes à l’insuline afin d’optimiser l’équilibre glycémique chez les patients vivant avec un diabète de type 1 (DT1) est une question récurrente. La metformine est souvent utilisée en pratique clinique chez les patients en situation d’obésité afin de réduire les doses d’insuline et de limiter la prise de poids — même si le niveau de preuves est très faible. Les inhibiteurs de SGLT2 (iSGLT2) et les agonistes des récepteurs du GLP-1 (AR GLP-1) sont également parfois prescrits dans le DT1 bien que le rapport bénéfice/risque soit plus incertain (en particulier pour les iSGLT2 en raison du risque de cétoacidose) et que ces molécules n’aient pas ou plus (dapagliflozine) d’AMM dans cette indication. Pour autant, le caractère cardio- et/ou néphroprotecteur démontré par certains représentants de ces deux classes thérapeutiques interroge sur leur utilisation chez certains patients DT1 à haut ou très haut risque — alors même que ces patients ont été exclus des essais de sécurité cardiovasculaire conduites avec les iSGLT2 et les AR GLP-1 dans le diabète de type 2 et des études menées plus spécifiquement avec les iSGLT2 dans l’insuffisance cardiaque et la maladie rénale chronique.
Dans ce contexte, les résultats des études d’observation apportent des enseignements intéressants. C’est l’objectif de l’étude de cohorte rétrospective menée par Anson et coll. à partir d’une vaste base de données internationale (TriNetX) regroupant près de 125 millions de personnes en Amérique du Nord et en Europe de l’Ouest. Parmi les 196 691 patients DT1, 26 311 (13 %) — très majoritairement aux États-Unis — ont reçu un ou plusieurs traitements adjuvants non insuliniques, au premier rang desquels la metformine (43 % des cas) suivis par les AR GLP-1 (12,5 %) et les iSGLT2 (6,4 %). Les auteurs ont ensuite identifié les patients ayant initié un traitement par AR GLP-1 ou iSGLT2 et ayant poursuivi ce traitement pendant au moins 6 mois ; après avoir exclu les patients ayant reçu l’association iSGLT2 + AR GLP-1, les deux cohortes se composaient initialement de 1 822 (AR GLP-1) et 992 (iSGLT2) individus puis ont été réduites à 933 patients chacune après application d’un score de propension dans le but de pouvoir les comparer entre elles. L’analyse porte sur la période allant du 3e mois à la fin de la 5e année suivant l’initiation du traitement.
À 5 ans, la réduction du taux d’HbA1c par rapport à la valeur initiale était plus marquée dans le groupe AR GLP-1 (-0,5 % contre -0,2 % dans le groupe iSGLT2) alors que l’évolution du poids était plus favorable dans le groupe iSGLT2 (-2,4 kg contre +1,5 kg dans le groupe AR GLP-1 après un rebond à 3 ans) tout comme celle du DFG (+3,5 mL/min/1,73 m² vs -7,2 mL/min/1,73 m² dans le groupe AR GLP-1). Il existe une diminution significative du risque de développer une insuffisance cardiaque (RR 0,44 [IC95% 0,23-0,83], p = 0,0092), de présenter une maladie rénale chronique (RR 0,49 [IC95% 0,28-0,86], p = 0,0118) et, plus globalement, d’être hospitalisé (RR 0,59 [IC95% 0,46-0,76], p ≤ 0,0001) dans le groupe iSGLT2 vs AR GLP-1. Sous iSGLT2, on observe une majoration du risque de cétoacidose (28 cas vs 11 sous AR GLP-1 ; RR 2,08 [IC95% 1,05-4,12], p = 0,0309) et d’infection urinaire/pyélonéphrite (RR 2,27 [IC95% 1,12-4,55], p = 0,019) alors qu’aucune différence n’est mise en évidence entre les deux groupes pour le risque de mycose génitale, de troubles digestifs, de pancréatite aiguë ou d’hypoglycémie sévère.
Il s’agit de la plus grande étude de « vraie vie » portant sur le ratio bénéfice-risque des iSGLT2 et des AR GLP-1 dans le DT1 à ce jour. En dépit de ses nombreuses limites méthodologiques et du fait qu’elle ne fait que comparer deux traitements adjuvants entre eux, elle suggère un intérêt potentiel des AR GLP-1 sur le plan métabolique et des iSGLT2 sur le plan de la protection cardio-rénale dans le DT1 avec un sur-risque d’infection urinaire et de cétoacidose qu’il faut évidemment soigneusement garder à l’esprit avant une éventuelle prescription hors AMM. Quoi qu’il en soit, ces résultats plaident pour la mise en œuvre d’études randomisées contrôlées dans le DT1, notamment chez les patients à haut ou très haut risque cardio-rénal.
Publié par Diabétologie Pratique
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