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Diabéto-Cardio

Publié le 03 oct 2023Lecture 3 min

Insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée : impact favorable du sémaglutide chez les patients en situation d’obésité

Patrice DARMON, CHU Conception, Marseille

L’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée (HF-pEF) représente aujourd’hui plus de 50 % des cas d’insuffisance cardiaque aux États-Unis et concerne généralement des patients en surpoids ou en situation d’obésité. De nombreux travaux suggèrent que l’excès d’adiposité serait impliqué dans la genèse et la progression de l’HF-pEF, au-delà de son impact délétère bien connu sur les perturbations hémodynamiques et les symptômes associés à la maladie (diminution des capacités fonctionnelles, altération de la qualité de vie…). La perte de poids est donc logiquement un objectif majeur chez ces patients, à la nuance près qu’il s’agit souvent de patients âgés, volontiers sarcopéniques, chez lesquels un amaigrissement pourrait donc ne pas avoir que des bénéfices.

Les résultats de l’essai international STEP-HFpEF (Subjects with Obesity-related Heart Failure with Preserved Ejection Fraction), présentés durant le congrès de la Société européenne de cardiologie en août 2023 et publiés de façon simultanée dans le New England Journal of Medicine permettent d’avoir un éclairage intéressant sur le sujet puisque cette étude randomisée contre placebo teste, en aveugle, l’effet à 52 semaines d’une injection hebdomadaire de sémaglutide à la dose de 2,4 mg après titration progressive (dose utilisée dans le traitement de l’obésité pour cet agoniste des récepteurs du GLP-1) sur les symptômes de l’HF-pEF, la qualité de vie ou la tolérance à l’effort. L’étude porte sur 529 patients non diabétiques, en situation d’obésité et présentant une HF-pEF (hommes 43,9 %, âge médian 69 ans, IMC médian 37 kg/m²). Il y avait deux critères primaires de jugement : d’une part, l’amélioration fonctionnelle évaluée à l’aide du questionnaire KCCQ-CSS (Kansas City Cardiomyopathy Questionnaire clinical summary score — scores compris entre 0 et 100, les scores les plus élevés indiquant une moindre sévérité des symptômes, une moindre altération des capacités fonctionnelles et une meilleure qualité de vie) ; d’autre part, la perte de poids. Parmi les critères secondaires, on retrouvait 1/ la distance parcourue lors d’un test de marche de 6 minutes, 2/ un critère composite hiérarchisé incluant décès, événements cliniques en lien avec l’insuffisance cardiaque, variation du KCCQ-CSS et de la distance parcourue en 6 minutes (bénéfice global évalué sous forme d’un win ratio) et 3/ l’évolution des taux de protéine C-réactive sérique. Environ 16 % des patients des deux groupes ont arrêté prématurément le traitement prescrit. Au terme du suivi, et en intention de traiter, le score KCCQ-CSS (valeur médiane à l’inclusion 58,9) a augmenté en moyenne de 16,6 points sous sémaglutide versus 8,7 points sous placebo (∆ [delta] +7,8 points [IC95% 4,8 à 10,9] ; p < 0,001) tandis que le poids a diminué en moyenne de 13,3 % sous sémaglutide versus 2,6 % sous placebo (∆ -10,7 % [IC95% -11,9 à -9,4] ; p < 0,001). La distance parcourue en 6 minutes (valeur médiane à l’inclusion 320 m) a augmenté en moyenne de 21,5 m dans le groupe sémaglutide contre seulement 1,2 m dans le groupe placebo (∆  20,3 m [IC95% 8,6 à 32,1] ; p < 0,001). Les taux sériques de protéine C-réactive ont diminué en moyenne de 43,5 % sous sémaglutide vs 7,3 % sous placebo (p < 0,001). Concernant le critère secondaire composite hiérarchisé, le sémaglutide l’emporte sur le placebo pour tous les items (win ratio 1,72 [IC95% 1,37 à 2,15] ; p < 0,001). D’autres critères de jugement exploratoires sont en faveur du sémaglutide comme une réduction plus marquée du tour de taille, de la pression artérielle systolique, du taux de NT-proBNP ou des hospitalisations/consultations urgentes pour insuffisance cardiaque (1 contre 12). La fréquence des évènements indésirables sérieux était bien plus élevée sous placebo (26,7 %, principalement d’ordre cardiaque) que sous sémaglutide (13,3 %, très majoritairement d’ordre digestif). Cet essai randomisé contrôlé mené sur une population de taille limitée et avec un suivi relativement court démontre le bénéfice du sémaglutide à la dose de 2,4 mg par semaine sur les symptômes, les capacités fonctionnelles et la qualité de vie de patients en situation d’obésité présentant une HH-pEF. Il est probable que les effets fonctionnels favorables observés avec le sémaglutide, bien supérieurs à ceux observés par exemple avec les inhibiteurs de SGLT2, le sacubitril-valsartan ou la spironolactone, découlent avant tout de la perte de poids très significative obtenue avec cet agoniste des récepteurs du GLP-1 — même si on ne peut exclure d’autres bénéfices plus directs de la molécule, que ce soit sur le plan hémodynamique ou sur le plan inflammatoire. Il conviendra de disposer d’études plus longues, avec des critères de jugement principaux plus robustes (hospitalisations ou consultations en urgence pour insuffisance cardiaque par exemple) avant de proposer un traitement au long cours par sémaglutide — dont on rappellera que l’efficacité sur le poids n’a qu’un caractère suspensif — à tous les patients en situation d’obésité présentant une HF-pEF. Publié par Diabétologie Pratique

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