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Cardiologie générale

Publié le 20 nov 2007Lecture 11 min

19e congrès du CNCF

M. JOBBÉ DUVAL, Neuilly-sur-Seine

Le 19e congrès du Collège national des cardiologues français (CNCF) a réuni au Pharo de très nombreux cardiologues libéraux, six semaines après l’ESC et deux mois avant les Journées européennes de la SFC. Ceci est bien la preuve que nos collègues sont particulièrement attachés à cette manifestation dont le côté éminemment pratique est particulièrement adapté à l’exercice libéral. Le CNCF, comme votre hebdomadaire Cardiologie Pratique, œuvrent dans le même sens : apporter aux cardiologues français une FMC en parfaite adéquation avec les besoins de la spécialité.

    L’exercice physique recommandé chez les seniors Une session a été consacrée à l’activité physique après 65 ans où il apparaît évident que les modifications cardio-respiratoires de ces patients âgés nécessitent une prise en charge plus suivie. On observe en effet une augmentation de la PAS à l’effort avec une tendance à l’hypertrophie ventriculaire gauche lors d’efforts réguliers et une diminution de la fréquence cardiaque maximale, ainsi que de la VO2max. Or il est maintenant prouvé qu’un entraînement régulier permet de limiter les effets du vieillissement avec une amélioration de la compliance artérielle et du ventricule gauche. Les orateurs (S. Doutreleau, Strasbourg ; A. Ducardonnet, Paris et V. Lafay, Marseille) recommandent donc activement la pratique régulière d’un sport, en tenant compte du risque accru de mort subite lors des pratiques de compétition chez les seniors et de suivre les patients en fonction du type de sport choisi, en privilégiant les sports isotoniques.   L’insuffisance cardiaque : encore et toujours ! L’insuffisance cardiaque du sujet âgé demeure toujours, après l’European Society of Cardiology (ESC), l’un des sujets les plus actuels dans notre pratique quotidienne. Il est vrai que les essais menés chez les patients > 75 ans restent limités, le plus souvent à des sous-groupes d’études de plus grande envergure. Malgré cela, les recommandations sont extrêmement explicites dans la conduite à tenir. Il n’en demeure pas moins, comme l’a souligné P. Jourdain (Pontoise) lors d’un symposium organisé par les laboratoires Ménarini, que les enquêtes observationnelles ou les registres internationaux montrent : – une sous-évaluation de la gravité de l’IC : moins d’échos, – des traitements moins adaptés dans cette tranche d’âge : moins de recours à l’échographie donc, moins d’IEC ou d’AAII, moins de bêtabloquants ou d’antialdostérone. Or, un patient > 75 ans a actuellement une espérance de vie nettement supérieure à celle d’un même patient dans les années 50. Il nous faut donc : – renforcer les traitements, avec un suivi plus rigoureux encore, comparativement au sujet plus jeune, – recourir aux techniques d’évaluation de l’IC plus fréquemment. A. Cohen Solal (Paris) a repris les bases thérapeutiques de l’IC. L’association IEC-bêtabloquant (ou AAII en cas d’intolérance aux IEC) reste le traitement de base. Les posologies sont à adapter en fonction de la PA (avec recherche d’hypotension orthostatique), de la fonction rénale mais aussi de la masse maigre du patient. Les diurétiques seront prescrits en fonction de la rétention hydrosodée et de la gravité du tableau clinique. En ce qui concerne les bêtabloquants, le nébivolol a démontré son efficacité chez les patients > 70 ans (étude SENIORS) avec une réduction significative de la morbi-mortalité. Le plus important est d’assurer une bonne qualité de vie et l’un des principaux objectifs est de réduire le nombre d’hospitalisations. Les doses seront donc plus progressives que chez les patients plus jeunes en insuffisance cardiaque en sachant, par ailleurs, que cette molécule a montré une tolérance identique à celle du placebo lorsque l’augmentation de posologie est bien conduite.   HTA : une évolution dans la prise en charge Les nouvelles perspectives de la prise en charge de la pression artérielle ont été décrites au regard des dernières recommandations sur l’HTA de l’ESH/ESC, lors d’un symposium organisé avec la participation des laboratoires Novartis. R. Asmar (Paris) a fait le point sur les appareils tensionnels électroniques « professionnels » rappelant leur intérêt dans la mesure où ils apparaissent fiables et agréés par des experts hypertensiologues. Il est de plus en plus nécessaire de souligner l’importance d’une prise de la PA dans les différentes positions, avec, si possible, la prise simultanée aux deux bras. Il insiste aussi sur l’importance grandissante que prend la mesure de la pression centrale au regard des études comme REASON (pREterax in regression of Arterial Stiffness in a contrOlled double bliNd study) et CAFE (Conduit Artery Function Evaluation) qui démontrent que tous les traitements antihypertenseurs ne baissent pas la pression artérielle centrale de manière équivalente, alors même que les chiffres tensionnels pris au bras semblent identiques. Ceci a été démontré essentiellement en comparant les bêtabloquants avec les IEC ou les inhibiteurs calciques, ces derniers étant plus efficaces sur la pression artérielle centrale. L’intérêt des associations fixes ne cesse d’ailleurs de croître, comme l’a montré F. Silhol (Marseille). C’est bien le sens des recommandations de l’ESC/ESH qui privilégient d’emblée l’utilisation d’associations d’antihypertenseurs, avec une augmentation rapide des doses en cas de non contrôle de la PA, plus particulièrement chez les patients diabétiques ou à haut risque cardiovasculaire. Les critères d’efficacité ne suffisent pas cependant au long cours et la compliance, ainsi que la tolérance, entrent en ligne de compte dans ces traitements. C’est le cas de l’association fixe amlodipine-valsartan (Exforge®) qui permet, outre un contrôle élargi des hypertendus en deuxième intention, de diminuer les effets secondaires (et plus particulièrement, dans ce cas, des OMI causés par l’amlodipine en agissant sur les effets de vasodilatation post-capillaire du valsartan), tout en augmentant la compliance.   L’octogénaire : un manque cruel d’études ! Une autre session s’est tenue sur la cardiologie chez le sujet âgé établissant le douloureux constat d’un manque cruel d’études menées chez les plus de 80 ans, alors que la population vieillit et que cette tranche d’âge devient le lot quotidien en cabinet de ville. G. Jullien (Marseille) a abordé le problème du traitement préventif chez ce type de patients qui présente en effet le même risque à court et moyen termes que les sujets plus jeunes. Or cela s’accompagne d’une plus grande iatrogénie avec une frontière étroite entre zones thérapeutique et toxique pour les drogues utilisées. Le problème se pose aussi dans les indications des revascularisations coronaires. À la question faut-il dilater toutes les personnes âgées ? F. Philippe a une réponse prudente dans laquelle intervient bien sûr le degré du risque encouru par le patient sur le plan vital, mais aussi le double risque de complications : – celui de la revascularisation elle-même, – celui des traitements antiagrégants que le stent nécessite ; l’indication de revascularisation, au cas par cas, tient beaucoup plus compte de l’état du patient que de l’image de sténose coronaire observée. Pour J.-N. Fabiani le geste-même de chirurgie cardiaque après 80 ans, a un risque identique que chez les moins de 80 ans tant les techniques se sont améliorées, et bientôt miniaturisées. Il faut, là aussi, tenir compte du risque vital, et c’est essentiellement le cas dans les pathologies valvulaires où l’on favorisera les prothèses biologiques, mais aussi et surtout des facteurs de co-morbidité qui grèvent considérablement le pronostic à moyen et long termes de ces patients. La règle est donc la suivante : « primum non nocere » et sûrement faire preuve de plus de discernement en s’appuyant plus sur notre expérience, en attendant les consensus probables sur les études encore à venir chez ce type de patients.   Un tour d’horizon de l’actualité Les laboratoires Servier ont organisé un symposium sur les nouvelles données en cardiologie en 2007 et plus particulièrement lors de l’ESC. L’équipe de J. Beaune (Lyon) a repris les avancées en imagerie coronaire et plus particulièrement l’IRM et le coroscanner qui permettent d’avoir une imagerie dynamique mais aussi de la perfusion myocardique et une anatomie des cavités La polémique sur les stents actifs a encore été évoquée à travers le registre OPTIMIST portant sur 12 280 poses de stents dont 59,6 % de stents actifs sans différence significative en termes de thromboses tardives entre les deux groupes. Le registre SCAAR, portant sur plus de 35 200 patients suivis pendant quatre ans, montre une absence de différence en termes de mortalité totale entre les deux groupes, et un pourcentage de resténose tardives significativement plus important dans le bras stent nu. Enfin, le registre GRACE, portant sur 6 447 pa-tients suivis pendant deux ans, montre une surmortalité des stents actifs. Le débat continue donc. L’étude ADVANCE est probablement l’un des points forts du congrès de l’ESC puisqu’elle démontre que l’adjonction de l’association perindopril-indapamide (Prétérax® et Biprétérax®), en plus d’un traitement antihypertenseur habituel chez les diabétiques permettait de diminuer significativement la mortalité totale (-14%) et les événements rénaux avec une baisse de 18 % de la mortalité cardiovasculaire. Une excellente présentation a été réalisée par F. Schiele sur l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), soutenue depuis longtemps par les laboratoires Servier, et qui essaye de démontrer l’intérêt d’un suivi dans les hôpitaux et centres de soins des recommandations de l’HAS avec, à la clé, une prise de conscience des capacités réelles de chaque centre et les moyens d’améliorer la qualité des soins, non plus seulement à court terme, mais aussi à long terme.   Dyslipidémies : des questions en suspens Les laboratoires Pfizer ont participé à un symposium sur les dyslipidémies où Y. Cottin (Dijon), M. Krempf (Nantes) et F. Diévart (Dunkerque) ont tenté de répondre aux questions restant encore en suspens. Ils s’appuient sur les données des dernières études observationnelles qui montrent l’utilisation grandissante en prévention secondaire des statines, ce qui a permis, à égalité de traitements par ailleurs, de diminuer la mortalité hospitalière de 35% entre 2000 et 2005. La France est en bonne place en Europe dans les traitements administrés en phase aiguë mais reste un peu à la traîne dans les traitements au long cours où la cible de LDL-C est moins souvent atteinte en prévention secondaire. M. Krempf a fait état d’études sur les LDL très bas, qui démontrent que le bénéfice des statines reste très important. Or, nous assistons, dans notre pratique quotidienne, à un paradoxe, où les patients les plus à risque bénéficient moins d’un traitement intensif par statine que les patients à plus faible risque. Les femmes sont aussi moins bien prises en charge que les hommes, à égalité de cholestérol et de lésions coronaires, ainsi que les personnes âgées et les diabétiques. Il est donc important de savoir utiliser les statines avec plus de rigueur et surtout plus de confiance dans leur tolérance, comme le montre l’étude TNT où la tolérance de l’atorvastatine à 80 mg pendant 5 ans est sensiblement identique à l’atorvastatine 10 mg avec un gain bien sûr majeur dans l’obtention de la valeur-cible du LDL-cholestérol souhaitée. F. Diévart a rappelé en effet que nous disposons d’un certain nombre de traitements hypolipémiants avec des dosages multiples, en monothérapie ou en association et que notre rôle est bien d’utiliser le bon produit pour la valeur-cible souhaitée, en tenant compte aussi du coût de traitement journalier, à égalité d’efficacité et de tolérance.   Le traitement antiagrégant Les antiagrégants plaquettaires ont aussi vu leur statut modifié cette année comme le soulignent les dernières recommandations, aussi bien de l’ESC que de l’AHA/ACC qui stipulent que tous les patients ayant fait un infarctus doivent bénéficier au moins pendant un an de l’association clopidogrel-aspirine (Plavix®). Y. Cottin, dans un symposium réalisé avec la participation des laboratoires sanofi-aventis et BMS, reprend les données des études randomisées et surtout le sous-groupe de patients suivis dans l’étude CHARISMA qui avaient une atteinte coronaire, artérielle périphérique ou vasculaire cérébrale avérée. Ces patients, qui ont le même profil que ceux de l’étude princeps CAPRIE, bénéficient encore à trois ans de cette association avec une baisse significative du risque relatif de 18 % (contre environ 8 % dans CAPRIE). Malgré ces recommandations, les registres, qu’ils soient européens ou américains montrent une nette sous-utilisation du clopidogrel, et surtout chez les coronariens sans stent. Le registre PREMIER, par exemple montre une surmortalité significative chez les patients coronariens qui bénéficieraient d’une indication de l’association clopidogrel-aspirine mais qui en sont dépourvus.   Le tabac : un facteur de risque qui évolue peu Le tabac est l’un des facteurs de risque qui a le moins évolué depuis 15 ans, du moins dans les populations à risque comme celle des coronariens. Ainsi, entre EUROASPIRE I, II et III, il n’y a pas de différence dans la prise en charge du sevrage tabagique et donc la baisse de la consommation. Or, la mortalité liée au tabac est la plus importante des mortalités dites évitables, tant en termes de pathologies pulmonaires que cardiovasculaires. Après l’intervention de D. Thomas (Paris), qui a rappelé les dégâts causés par le tabagisme, A. Borgne (Bondy) a repris les stratégies thérapeutiques du sevrage, avec un focus sur la dernière stratégie mise à la disposition du corps médical, le Champix® (varénicline) des laboratoires Pfizer. Il semblerait que le succès de cette stratégie se confirme d’après l’expérience des médecins et cela avec un taux d’effets secondaires peu importants. Mais le fond du problème est bien, comme l’a souligné C. Aviérinos (Marseille), de médicaliser ce sevrage, au même titre que les autres facteurs de risque contrôlables comme le cholestérol ou le diabète. En prévention secondaire, le rôle du cardiologue est majeur.   Que faut-il penser des bêtaboquants chez l’hypertendu à risque métabolique ? Ce sujet a été traité par C. Thuillez et A. Krivitsky au cours d’un débat organisé avec la collaboration des laboratoires Negma. La survenue plus fréquente de nouveaux cas de diabète, le développement d’une insulinorésistance et les perturbations sur le métabolisme lipidique n’incitent pas à conseiller l’utilisation des bêtabloquants chez le sujet hypertendu à risque métabolique. Cependant, ces recommandations ne s’appliquent pas au carvédilol ni au nébivolol, bêtabloquants vasodilatateurs dotés d’un effet métabolique plus neutre. Le nébivolol est le dernier « arrivé » des bêtabloquants avec un profil pharmacologique original et une activité bêta-1 bloquante adrénergique hautement cardiosélective ainsi qu’une activité vasodilatatrice médiée par le NO. Cette dernière propriété explique l’effet favorable de nébivolol sur la dysfonction endothéliale, très fréquente chez l’hypertendu. Son profil métabolique est aussi particulier car le nébivolol n’affecte pas la glycémie chez les patients diabétiques, une surveillance doit cependant être effectuée car certains symptômes d’hypoglycémie peuvent être masqués. Chez l’animal, dans un modèle de rat insulino-résistant, le nébivolol induit une diminution de la glycémie, des triglycérides, une augmentation du taux de HDL-cholestérol et une stabilité de la surface sous la courbe du glucose. La comparaison des effets métaboliques du nébivolol par rapport à l’aténolol chez des patients hypertendus montre pour l’aténolol contrairement au nébivolol une diminution de la sensibilité à l’insuline et de la clairance métabolique ainsi qu’une augmentation de l’aire sous la courbe du glucose. Au-delà de son efficacité sur la pression artérielle, le choix d’un bêtabloquant chez le sujet hypertendu à risque métabolique pourra donc se faire en fonction de son retentissement sur l’équilibre métabolique et de son activité sur la fonction endothéliale avec une distinction entre bêtabloquants vasodilatateurs et bêtabloquants non vasodilatateurs. Le succès de ce congrès repose sur les réponses qu’il apporte aux questions que nous nous posons en pratique quotidienne. Les ateliers ont aussi eu, en effet, beaucoup de succès, qu’il s’agisse des ateliers informatiques ou sur les réseaux de Santé de plus en plus nombreux ou bien les ateliers plus classiques (échographie, rythmologie ou ateliers cliniques). Gageons que l’on observera un succès encore grandissant pour le vingtième anniversaire du congrès du CNCF en 2008.

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