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Thérapeutique

Publié le 24 jan 2006Lecture 7 min

Évaluation des effets cliniques du fénofibrate chez les diabétiques de type 2 - Résultats de l’étude FIELD

F. DIEVART, Clinique Villette, Dunkerque

AHA

Les résultats de l’étude FIELD (Fenofibrate Intervention and Event Lowering in Diabetes) ont été présentés le 14 novembre lors du congrès l’American Heart Association avant d’être publiés dans la revue Lancet le 26 novembre. L’objectif principal de cette étude était d’évaluer chez des patients ayant un diabète de type 2 et une cholestérolémie totale < 2,51 g/l les effets d’un traitement au long cours par le fénofibrate sur la morbidité et la moralité coronaires.

Méthodes de l'étude FIELD Cet essai thérapeutique randomisé, effectué en double aveugle contre placebo, a permis d’inclure des patients diabétiques de type 2, âgés de 50 à 75 ans, et ne recevant pas de statine, en prévention primaire ou secondaire mais ne devant pas avoir eu d’événement cardiovasculaire aigu dans les 3 mois précédant l’inclusion.   Stratégie thérapeutique évaluée Après une période d’évaluation préalable de 16 semaines (diététique hypolipidémiante, puis placebo, puis fénofibrate en simple aveugle), les patients randomisés pour recevoir soit du fénofibrate micronisé à 200 mg/j soit un placebo, devaient présenter : • une cholestérolémie totale entre 1,16 et 2,15 g/l, • et un rapport cholestérol total/HDL-C Ž 4 ou une triglycéridémie comprise entre 0,89 et 4,45 g/l.   Critères évalués Le critère primaire évalué était la survenue du premier infarctus du myocarde, mortel ou non. Les critères secondaires évalués étaient : - les événements cardiovasculaires majeurs (événements coronariens, tous AVC, et autres décès cardiovasculaires), - les événements cardiovasculaires totaux (événements cardiovasculaires majeurs et revascularisations coronaires et carotidiennes), - les décès coronariens, - les décès cardiovasculaires totaux, - les AVC hémorragiques ou non, - les procédures de revascularisation coronaire et périphérique, - la mortalité non cardiovasculaire, - la mortalité totale. Des critères tertiaires étaient également évalués dont le recours au traitement laser, la progression de la maladie rénale et l’incidence des amputations. Une analyse en plusieurs sous-groupes préspécifiés du critère associant plusieurs événements cardiovasculaires (décès cardiovasculaires, infarctus du myocarde, AVC et revascularisation coronaire et carotidienne) a été prévue.   Modalités statistiques L’analyse des résultats a été conduite en intention de traiter. Le protocole a été ajusté pour qu’une diminution de 22 % des événements coronariens en intention de traiter, correspondant à une réduction de 27 % de ces événements chez les patients prenant effectivement le fénofibrate, soit significative.   Résultats de l’étude FIELD Entre février 1998 et novembre 2000, un total de 9 795 patients a été inclus dans cette étude dont le suivi moyen était de 5 ans, soit : • 2 131 patients ayant une pathologie cardiovasculaire préalable (donc 22 % en prévention secondaire, dont 5 % ayant un antécédent d’infarctus du myocarde), et 7 664 n’ayant pas de pathologie cardiovasculaire préalable (donc 78 % en prévention primaire) ; • 4 895 patients dans le groupe devant recevoir le fénofibrate, et 4 900 patients dans le groupe devant recevoir le placebo (figure 1). Figure 1. Risque cumulé de survenue du premier événement chez les patients avec (A) ou sans (B) antécédent cardiovasculaire préalable. Caractéristiques des patients inclus Il n’y a pas eu de différence significative dans les caractéristiques principales à l’inclusion entre les deux groupes comparés. La cholestérolémie totale était en moyenne à 1,98 g/l, la cholestérolémie LDL à 1,18 g/l, la cholestérolémie HDL à 0,42 g/l et la triglycéridémie à 1,51 g/l.   Évolution des thérapeutiques hypolipidémiantes Pendant le déroulement de l’étude, il a été observé que : • un nombre identique de patients dans chaque groupe de l’étude FIELD a interrompu le traitement qui lui avait été assigné ; • les taux moyens de prescriptions d’autres traitements hypolipidémiants (statines dans plus de 93 % des cas), ont été différents entre les groupes : en moyenne 17 % dans le groupe placebo et 8 % de statines dans le groupe fénofibrate (p < 0,0001).   Évolution des paramètres lipidiques La diminution du LDL-C à 4 mois a été de 12 % et de 5,8 % à la fin de l’étude et la variation entre ces deux périodes a été rapportée par les auteurs pour partie à l’augmentation progressive de la prescription de statines dans le groupe placebo. • L’augmentation du HDL-C a été de 4,5 % à 4 mois et de 1,2 % à la fin de l’étude et la variation entre ces deux périodes n’a pas paru pour les auteurs en rapport avec la prescription d’une statine dans le groupe placebo. • La diminution des triglycérides a été de 28,6 % à 4 mois et de 21,9 % à la fin de l’étude.   Résultats sur le critère primaire Les taux d’infarctus du myocarde fatals ou non (critère principal évalué) ont été de 5,9 % (n = 288) dans le groupe placebo et de 5,2 % dans le groupe fénofibrate (n = 256), sans différence significative entre les groupes (risque relatif : 0,89 ; IC95 % : 0,75 à 1,05 ; p = 0,16) (figure 2). Figure 2. Résultats concernant le critère primaire, à savoir les événements coronariens (IDM fatals ou non). Résultat sur les critères secondaires Concernant les critères secondaires, tels qu’ils avaient été établis dans le protocole de l’étude, les résultats sont les suivants (tableau ci-dessous) : • diminution significative de 11 % des événements cardiovasculaires totaux (événements cardiovasculaires majeurs et revascularisations coronaires et carotidiennes) (figure 3) ; • augmentation non significative de 19 % des décès coronariens ; • augmentation non significative de 11 % des décès cardiovasculaires totaux ; • diminution non significative de 10 % des AVC, hémorragiques ou non ; • diminution significative de 20 % des procédures de revascularisation • augmentation non significative de 11 % de la mortalité totale. Figure 3. Résultats concernant l’ensemble des événements cardiovasculaires. Résultat sur les critères tertiaires Concernant les critères tertiaires évalués, il a été mis en évidence : • une diminution significative de 30 % (p = 0,0003) de la nécessité d’un traitement par laser pour une rétinopathie (figure 4), • une diminution significative de la progression de la microalbuminurie (p = 0,002) Figure 4. Risque cumulé de rétinopathie nécessitant un traitement par laser. Résultat des analyses en sous-groupe prédéfinis L’effet sur l’association de plusieurs événements cardiovasculaires (décès cardiovasculaires, infarctus du myocarde, AVC et revascularisation coronaire et carotidienne) a été évalué dans 24 sous-groupes différents. Cette analyse a indiqué la possibilité d’un effet favorable du traitement actif : • en prévention primaire, • chez les patients de moins de 65 ans, • chez ceux ayant un HDL cholestérol bas (< 0,39 g/l chez les hommes et < 0,49 g/l chez les femmes), • chez ceux ayant une cholestérolémie totale basse (< 1,74 g/l), • chez ceux ayant une cholestérolémie LDL basse (< 1,16 g/l).   Synthèse L’étude FIELD a plusieurs intérêts et quelques limites.   Intérêts de l’étude FIELD - L’étude FIELD est un essai important et puissant, conduit sur une large population suivie en moyenne pendant 5 ans et ayant totalisé plus de 500 événements du critère primaire. - Le critère primaire de cette étude (infarctus du myocarde fatal ou non), est un des éléments majeurs du pronostic des diabétiques et, un enjeu fondamental de la prise en charge des dyslipidémies. - L’essai a intégré la possibilité d’une prescription de statines dans le groupe placebo et d’un arrêt de traitement par fénofibrate dans le groupe évalué. - Elle a pris en compte exclusivement des diabétiques de type 2 pour lesquels un traitement par fibrate est théoriquement le mieux adapté au type de dyslipidémie (HDL-C bas et triglycéridémie élevée, sans élévation majeure du LDL-C).   Limites de l’étude FIELD - L’étude FIELD a donc inclus des patients dont le LDL-C était bas (1,18 g/l en moyenne à l’inclusion), la cholestérolémie totale basse (1,98 g/l à l’inclusion) mais, paradoxalement, dont la cholestérolémie HDL-C n’était pas ou peu abaissée (0,42 g/l à l’inclusion en moyenne) et dont la triglycéridémie n’était pas élevée (en moyenne 1,51 g/l à l’inclusion) et ne constituant donc potentiellement pas la population cible des fibrates, hormis le fait de l’existence du diabète. - Par ailleurs, mais pouvait-il en être autrement, le taux de prescriptions de statines a été progressivement croissant dans le groupe placebo au fur et à mesure de l’étude et ce, de façon plus importante que dans le groupe devant recevoir le fénofibrate avec un taux moyen de prescriptions d’hypolipidémiant de 17 % dans le groupe placebo (36 % à l’arrêt de l’étude) et de 8 % dans le groupe fénofibrate (19 % à l’arrêt de l’étude). Dès lors la différence de LDL cholestérolémie a diminué progressivement entre les groupes ce qui a potentiellement conduit à minorer l’ampleur des résultats, ce d’autant que la différence de LDL-C était déjà relativement faible à 4 mois (- 12 %). Les auteurs rapportent qu’après ajustement d’une statine, les résultats deviennent significatifs sur le critère principal (RRR de 19 %, p = 0,01).   Points forts   Si le fénofibrate ne réduit pas le risque de survenue d’infarctus du myocarde mortel ou non chez des diabétiques de type 2 ayant une cholestérolémie totale < à 2,51 g/l, l’étude FIELD indique cependant que ce traitement pourrait avoir un effet favorable, qui demande à être confirmé dans des études spécifiques : - sur le risque d’infarctus non mortel, qui dans cette étude est significativement diminué de 24 %, - sur l’atteinte microvasculaire avec une réduction de 30 % du du traitement par laser pour rétinopathie et une amélioration de la progression de la maladie rénale suggérant un effet particulier des agonistes PPAR chez les diabétiques et/ou une implications des paramètres lipidiques dans la survenue des complications microvasculaires, - sur la prévention primaire, puisque l’analyse post-hoc dans le sous-groupe sans antécédent cardiovasculaire qui représentait 78 % de la population (n = 7 664) a montré une réduction significative de 25 % (p = 0,014) sur les événements coronaires et de 19 % (p = 0,004) sur les événements cardiovasculaires totaux, - chez les patients diabétiques âgés < 65 ans et ayant une cholestérolémie HDL basse (< 0,39 g/l chez les hommes et < 0,49 g/l chez les femmes), une cholestérolémie totale basse (< 1,74 g/l) de même qu’une cholestérolémie LDL basse (< 1,16 g/l). L’étude FIELD laisse ouverte la possibilité d’un effet bénéfique de l’association du fénofibrate à une statine, la tolérance de cette association ayant paru correcte dans cette étude. L’effet d’une telle association chez des diabétiques de type 2 est actuellement testée dans l’étude ACCORD (Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes), dont les résultats devraient être disponibles dans 4 ans.

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