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Insuffisance cardiaque

Publié le 01 nov 2006Lecture 6 min

Fonction diastolique chez l'hypertendu : une amélioration sous traitement ?

P. GOSSE, hôpital Saint-André, CHU de Bordeaux

L’implication de la diastole dans les anomalies fonctionnelles de la cardiopathie hypertensive est connue de longue date et joue un rôle important dans les complications cardiovasculaires de l’hypertension artérielle (HTA). À baisse de PA égale, la nature du traitement semble avoir une influence.

Rappelons brièvement que la diastole ventriculaire au sens clinique du terme comporte la relaxation, phénomène actif, inclus dans la systole pour les physiologistes et la compliance ventriculaire, capacité du ventricule à se laisser remplir et qui dépend de la morphologie de la cavité et de la structure de la paroi. Dans l’HTA, trois paramètres peuvent être perturbés à divers degrés : • la relaxation est ralentie en raison de l’augmentation de la postcharge. Cette simple prolongation de la relaxation est longtemps bien supportée car compensée par le rôle accru de la systole auriculaire. À un stade plus évolué, l’ischémie des couches myocardiques profondes va aggraver ces anomalies, qu’elle soit purement fonctionnelle en cas d’HVG importante (avec troubles de repolarisation sur l’ECG) ou qu’elle soit secondaire à une lésion coronaire. Bien évidemment la perte de systole auriculaire par passage en fibrillation sera souvent mal tolérée par ces patients. • L’HVG, surtout dans sa forme concentrique, va réduire la compliance de la chambre ventriculaire (figure 1) ; • Les modifications structurelles du myocarde, en particulier la fibrose, réduisent la compliance pariétale. Figure 1. Patient hypertendu avec importante HVG concentrique et bonne fonction systolique (vue apicale 4 cavités en diastole). Des conséquences multiples Ces anomalies ont les conséquences suivantes : • dilatation et hypertrophie de l’oreillette gauche avec son corollaire de risque accru d’arythmie et d’AVC ischémique, • diminution des performances à l’effort, • insuffisance cardiaque de repos à fonction systolique préservée dont l’incidence va croissante avec le vieillissement de la population. L’âge est en effet un élément important qui tend à aggraver toutes ces anomalies et les manifestations d’insuffisance cardiaque à fonction systolique dite normale représentent une part importante des insuffisances cardiaques du sujet âgé, estimée entre 30 et 50 %. Ces dernières années ont vu la démonstration par les études épidémiologiques du danger des altérations de la fonction diastolique : le diamètre de l’oreillette gauche prédit indépendamment des autres facteurs de risque, y compris la masse ventriculaire gauche, la survenue de complications cardiovasculaires. En Doppler pulsé mitral, la diminution du rapport E/A ajusté à la fréquence cardiaque (figure 2) et en Doppler tissulaire, le ralentissement du déplacement longitudinal de l’anneau mitral en protodiastole (Ea) (figure 3) apparaissent aussi comme facteurs de mauvais pronostic. Figure 2. Profil de remplissage traduisant l’anomalie de la relaxation : petite onde E, grande onde A. Figure 3. Doppler tissulaire au niveau de l’anneau mitral montrant un faible déplacement en protodiastole (Ea). Diastole : les enjeux du traitement antihypertenseur Plutôt qu’une analyse de l’évolution de tel ou tel paramètre de fonction diastolique chez l’hypertendu, l’enjeu aujourd’hui en matière de diastole est la réduction de l’incidence de la fibrillation auriculaire et de l’insuffisance cardiaque à fonction systolique normale. Le traitement antihypertenseur vise à prévenir l’ensemble des complications cardiovasculaires et il est clair qu’au travers de la diminution de la postcharge, la régression de l’HVG et sans doute aussi de la fibrose, il doit améliorer la fonction diastolique et diminuer les complications qui en dépendent. Pourtant dans le passé, les tentatives de montrer le bénéfice du traitement antihypertenseur sur les paramètres de la fonction diastolique se sont soldées par des résultats divergents et confus. Il faut dire que les outils employés n’étaient pas toujours adaptés, en particulier la simple étude des vitesses du flux mitral en Doppler ou même le pic de remplissage rapide en scintigraphie appliqués à des échantillons de population trop petits compte-tenu des limites de reproductibilité de ces méthodes. Par ailleurs, comme pour tous les bénéfices du traitement antihypertenseur, la question récurrente est de savoir si l’abaissement de la PA est l’élément déterminant ou si, à réduction de PA égale, la nature même du traitement exerce une influence.   Données des études récentes Cette question reste encore non résolue mais ces dernières années ont apporté quelques éléments améliorant nos connaissances des effets thérapeutiques sur la diastole de l’hypertendu.   LIFE L’étude LIFE (Losartan Intervention For Endpoints reduction in hypertension) a fourni une importante contribution, montrant sur une large population (728 patients) qu’un an de traitement antihypertenseur permettait la diminution du diamètre de l’oreillette gauche et l’amélioration du profil de remplissage chez les patients dont l’HVG avait régressé. Mieux, dans cette étude, l’incidence de nouveaux cas de fibrillation auriculaire a été moindre sous losartan que sous aténolol. Cette étude n’a pas montré de différence de PA (de consultation) entre les 2 groupes mais une plus importante régression de l’HVG, à la fois électrique et échocardiographique, dans le groupe losartan. Il est cependant possible que la différence entre les deux groupes soit liée, du moins en partie, à une moindre diminution de la pression centrale et de la postcharge sous aténolol comparativement à d’autres traitements plus vasodilatateurs et sans effets négatifs sur l’inotropisme. Cette possibilité a été illustrée récemment dans deux études, REASON et CAFE.   REASON et CAFE Dans l’étude REASON (pREterax in regression of Arterial Stiffness in a contrOlled. double bliNd study), la baisse de la pression centrale aortique, estimée à partir de l’aspect de l’onde de pression radiale par tonométrie par aplanation, est plus importante sous l’association perindopril/indapamide que sous aténolol seul et mieux corrélée à la régression de l’HVG que la baisse de pression humérale. Dans l’étude CAFE (Conduit Artery Function Evaluation), étude ancillaire de l’essai ASCOT, la pression aortique est significativement plus basse tout au long de l’étude dans le groupe amlodipine comparativement au groupe aténolol alors que la différence de PA humérale n’est pas significative. Cet effet paraît lié essentiellement à l’action inotrope négative du bêtabloquant qui, retardant la survenue du pic d’éjection systolique, augmente la probabilité d’une sommation de l’onde de pression incidente avec l’onde de pouls réfléchie majorant la pression systolique dans l’aorte. Un autre argument est tiré du suivi, dans la population d’hypertendus avec HVG de LIFE, du BNP dont on sait la relation à l’insuffisance cardiaque diastolique. Sous losartan, il baisse alors qu’il s’élève parallèlement au ralentissement de la fréquence cardiaque sous aténolol Ces études remettent sérieusement en cause l’intérêt des bêtabloquants sur la fonction diastolique dans l’HTA et plus largement comme traitement de première intention de l’hypertendu et privilégient l’intérêt des médicaments inhibant le système renine-angiotensine : IEC et sartans. Aujourd’hui, la seule étude clinique qui prouve de façon indiscutable, sur des biopsies du septum interventriculaire, la capacité d’un traitement antihypertenseur à faire régresser la fibrose myocardique de l’hypertendu a été menée avec le losartan.   Points forts   Les anomalies de la fonction diastolique du ventricule gauche ont une part importante dans les complications cardiovasculaires de l’hypertendu, surtout quand le sujet vieillit : - fibrillation auriculaire et son risque d’AVC, - insuffisance cardiaque à fonction systolique dite normale. Contrairement à ce qui était pensé et écrit il y a quelques années, le traitement bêtabloquant ne paraît pas avoir la meilleure efficacité chez l’hypertendu : IEC et sartans apparaissent préférables. Les données des grands essais récents conduisent à remettre sérieusement en question la place des bêtabloquants comme traitement de 1re intention dans l’HTA : moindre protection vis-à-vis des complications cardiovasculaires et incidence accrue du diabète. Une bibliographie sera adressée aux abonnés sur demande au journal.

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