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Études

Publié le 27 mai 2008Lecture 15 min

Grands essais dans l'HTA : que conclure en pratique ?

J.-M. HALIMI, hôpital Bretonneau, Tours

Les essais thérapeutiques constituent le niveau de preuve le plus élevé dans le domaine médical, en particulier lorsqu’il s’agit d’essais thérapeutiques de grande taille (« méga-essais ») ayant une bonne valeur méthodologique.
Dans le domaine de l’hypertension artérielle, les essais thérapeutiques sont nombreux depuis plus de 20 ans, ils façonnent nos recommandations nationales et la manière dont nous prenons en charge nos patients. Les plus récents apportent des réponses nouvelles, parfois inattendues, sur des aspects de la thérapeutique qui concernent des millions de patients. Ils concernent la prise en charge des patients à haut risque cardiovasculaire (pas toujours hypertendus), des patients insuffisants rénaux ou diabétiques, des patients âgés (voire très âgés) ou en post-AVC et la place de la bithérapie dans la prise en charge de nos patients.

Patients à (haut) risque cardiovasculaire   HOPE Dans cet essai qui a inclus 9 297 sujets à haut risque cardiovasculaire, dont 80 % avaient une coronaropathie sans altération de la fonction ventriculaire gauche, il a été démontré qu’après 5 ans de traitement par un IEC (le ramipril à la dose de 10 mg/j), une diminution significative de 22 % des événements de morbimortalité cardiovasculaire (infarctus du myocarde [IDM], accident vasculaire cérébral [AVC], mortalité cardiovasculaire) était observée par comparaison au placebo(1). Les hypertendus constituaient 47 % des patients et la PA moyenne était de 139/79 mmHg ; il existait une différence de PA 3/1 mmHg entre le groupe ramipril et le groupe placebo. La protection cardio- et cérébrovasculaire apportée par le ramipril a été confirmée chez les patients ayant accepté de continuer d’être suivis pendant 2,6 ans de plus (étude HOPE-TOO)(2).   LIFE Dans l’étude LIFE(3), 9 193 patients hypertendus (PAS de 160 à 200 mmHg ; PAD de 95 à 115 mmHg) âgés de 55 à 80 ans ayant une hypertrophie ventriculaire gauche (ECG) ont reçu un ARA II, le losartan (éventuellement associé à un diurétique thiazidique) ou un bêtabloquant, l’aténolol (éventuellement associé à un diurétique thiazidique). Le suivi moyen a été de 5 ans environ. La PA systolique initiale était un peu plus basse dans le groupe losartan (- 1,3 mmHg) pendant l’étude. La stratégie à base de losartan a été plus efficace sur le critère composite (mortalité cardiovasculaire, AVC, et IDM) (-13%, p = 0,02) que celle basée sur l’atenolol. La différence en faveur du losartan était surtout importante pour l’incidence des AVC, réduite de -25 %. La mortalité totale était réduite de manière marquée dans le groupe losartan chez les patients diabétiques.   ONTARGET Dans l’étude ONTARGET(4) parue ces dernières semaines, 25 620 patients à haut risque cardiovasculaire ont été randomisés pour recevoir un traitement par ramipril (10 mg/j), telmisartan (80 mg/j) ou l’association des deux (ramipril, 10 mg/j + telmisartan, 80 mg/j). Les patients devaient avoir 55 ans ou plus et un facteur de risque au moins parmi les suivants (angor ou IDM, artériopathie des membres inférieurs, AVC ou AIT, diabète de type 2 associé à un autre facteur de risque : hypertension, hypercholestérolémie, HDL-cholestérol bas, tabagisme ou microalbuminurie). Les caractéristiques initiales des patients étaient les suivantes : âge moyen : 66 ans ; 73 % d’hommes ; 85 % aux antécédents cardiovasculaires, 74 % de coronariens, 69 % d’hypertendus (PA moyenne : 142/82 mmHg), 38 % de patients diabétiques ; 64 % de sujets tabagiques (actifs ou anciens). Les traitements associés étaient les suivants : statines : 62 %, anti-agrégants plaquettaires 80,9 %, bêtabloquants 56,9 %, inhibiteurs calciques 33 %, diurétiques 28 %. La créatininémie moyenne était de 94 µmol/l (clairance calculée non donnée dans la publication, mais probablement comprise entre 70 et 80 ml/min). Les critères de non-inclusion principaux étaient : insuffisance cardiaque congestive, sténose de l’artère rénale connue, clairance de la créatinine < 36 ml/min ou créatininémie > 265 µmol/l, kaliémie > 5,5 mmol/l, sténose valvulaire aortique ou mitrale significative ou une PA > 160/100 mmHg. ONTARGET était en fait constitué de deux études différentes : La première étude avait pour but d’évaluer si le telmisartan était non inférieur au traitement de référence (le ramipril) : elle a montré la non-infériorité du telmisartan vs ramipril sur les critères de jugement habituels (décès cardiovasculaire, IDM, AVC ou hospitalisation pour insuffisance cardiaque), même après ajustement sur la PA (la PA était inférieure de 0,9/0,6 mmHg dans le groupe telmisartan) ; les patients sous telmisartan ont significativement moins souvent arrêté le traitement au cours du temps que ceux sous ramipril (23 % vs 24,5 %). La deuxième étude avait pour but d’évaluer si l’association des deux était supérieure au traitement par ramipril seul : elle a montré que l’association du ramipril et de telmisartan n’était pas supérieure au traitement par ramipril et qu’au contraire, cette association était mal tolérée sur le plan rénal (doublement de la créatinine : 180 vs 159, altération de la fonction rénale : 13,5 % vs 10,2 %, recours à la dialyse : 94 vs 60), malgré une réduction de la PA de 2,4/1,4 mmHg. L’incidence des nouveaux cas de diabète était similaire dans les trois groupes.   Patient insuffisant rénal ou diabétique L’incidence de l’insuffisance rénale ne cesse de croître en France comme dans tous les pays du monde. Les patients atteints sont dans leur grande majorité hypertendus et de plus en plus souvent diabétiques et âgés. Les recommandations nationales et internationales concordent pour proposer en première intention un traitement antihypertenseur qui bloque le système rénine angiotensine (IEC ou ARA II). Ces recommandations sont basées sur des essais majeurs que l’on doit rappeler.   AASK L’étude AASK concernait des patients hypertendus insuffisants rénaux (débit de filtration glomérulaire (DFG) compris entre 20 à 65 ml/min/1,73 m2) afro-américains non diabétiques(5). Dans cette étude multicentrique prospective randomisée en double aveugle, les effets du ramipril, du métoprolol et de l’amlodipine ont été comparés sur la progression de l’insuffisance rénale. Le débit de filtration glomérulaire (DFG) était évalué par la clairance du iothalamate marqué. Il s’agissait de patients âgés de 54 ans en moyenne (60 % d’hommes) ; leur PA initiale était de 151/96 mmHg et leur DFG de 46,1 ml/min/1,73 m2 (la protéinurie était très faible : 0,11 g/j). À partir du 6e mois, le déclin de la fonction rénale a été significativement plus faible dans le groupe ramipril que dans le groupe amlodipine (de -2,07 vs -3,22 ml/min/1,73 m2/an) ; ces résultats étaient plus marqués lorsque le DFG était compris entre 20 et 40 ml/min/1,73 m2.   COOPERATE L’étude COOPERATE concernait aussi des patients insuffisants rénaux le plus souvent hypertendus non diabétiques, randomisés pour recevoir un IEC (trandolapril), un sartan (losartan) ou les deux(6). Ces patients jeunes (44 ans en moyenne) avaient une créatininémie moyenne de 267 µmol/l (clairance 38 ml/min), une protéinurie moyenne de 2,5 g/24 h et une PA moyenne de 130/75 mmHg. Deux tiers d’entre eux avaient une maladie glomérulaire (surtout une néphropathie à IgA). Le critère principal de l’étude était le temps pour parvenir à un doublement de créatinine ou une insuffisance rénale terminale. Le suivi médian a été de 2,9 ans. L’étude a été interrompue car une analyse intermédiaire a montré qu’il existait une différence significative entre le groupe association et les deux autres groupes. Finalement, 11 % dans le groupe association IEC-ARA II vs 23 % dans les deux autres groupes ont développé une insuffisance rénale terminale ou un doublement de la créatinine.   ROAD Pour obtenir une néphroprotection efficace, l’autre option est l’augmentation des doses d’IEC ou d’ARA II plutôt que de les associer. Cette question vient d’être posée dans le cadre d’un essai thérapeutique randomisé chinois, l’étude ROAD, effectuée chez des patients insuffisants rénaux protéinuriques non diabétiques(7). Deux groupes de patients ont été traités par des doses conventionnelles de losartan ou de bénazépril et deux autres groupes ont reçu des doses titrées de ces médicaments en fonction de leur effet sur la protéinurie : à chaque consultation, les doses de losartan et de bénazépril étaient augmentées tant que la protéinurie diminuait ; la dose n’était plus modifiée quand la protéinurie restait stable (on considérait alors avoir atteint la dose optimale anti-protéinurique). La dose médiane de losartan de 50 mg/j dans le groupe « dose conventionnelle » et de 100 mg/j (extrêmes : 50 à 200 mg/j) dans le groupe « dose titrée » ; pour le bénazépril, les doses étaient respectivement 10 mg/j vs 20 mg/j (extrêmes : 10-40 mg/j). Finalement, à l’issue du suivi de 39 mois, le risque de doublement de la créatininémie et d’insuffisance rénale chronique terminale a été réduit de 51 à 53 % chez les patients recevant les doses titrées d’IEC ou d’ARA II. Chez les patients diabétiques insuffisants rénaux ou à risque rénal, parmi les nombreuses études publiées souvent importantes, certaines ont fait avancer notre compréhension et notre prise en charge et méritent d’être rappelées : RENAAL, IDNT, UKPDS, ADVANCE.   RENAAL Dans l’étude RENAAL(8), 1 513 pa-tients ont été randomisés pour recevoir du losartan (50-100 mg/j) ou un placebo (en plus de traitements antihypertenseurs). Le suivi a été de 3,4 ans. Le critère principal de jugement a été le même que celui de IDNT. La réduction du critère principal (insuffisance rénale terminale, doublement de la créatininémie ou décès) a été de 16 % en faveur du groupe losartan, 25 % pour le risque de doublement de la créatinine, 28 % pour le risque d’insuffisance rénale terminale et 32 % d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. On notait une tendance à la baisse du risque d’infarctus du myocarde (- 28 %, p = 0,08).   IDNT L’étude IDNT, prospective multicentrique internationale en double aveugle, a inclus 1 715 diabétiques de type 2(9). Après randomisation, les patients étaient traités par irbésartan (75 à 300 mg/j), amlodipine (2,5 à 10 mg/j) ou placebo. Le risque d’atteindre le critère principal a été diminué de 20 % (p = 0,02) chez les patients sous irbésartan par rapport à ceux du groupe placebo et de 23 % (p = 0,006) par rapport à ceux du groupe amlodipine. Le risque de voir doubler la créatininémie pendant le suivi a été réduit dans 33 % dans le groupe irbésartan par rapport au groupe placebo (p = 0,003) et 37 % par rapport au groupe amlodipine. Le risque d’insuffisance rénale chronique terminale était réduit de 23 % dans le groupe irbésartan par rapport au groupe placebo et au groupe amlodipine. Le risque d’insuffisance cardiaque était 23 % plus faible dans le groupe irbésartan par rapport au groupe placebo. Le risque d’infarctus du myocarde non fatal était plus faible de 41 % dans le groupe amlodipine par rapport au groupe placebo.   UKPDS 38 Dans l’étude UKPDS 38(10), la réduction de la PA (154/87 vs 144/82 mmHg) chez 1 148 patients diabétiques de type 2 suivis 8,4 ans a réduit les décès liés au diabète de 32 %, les AVC de 44 % et les complications microvasculaires (surtout le recours au laser) de 37 %. Par contre, il n’y a pas eu de différence entre la stratégie antihypertensive basée sur l’aténolol et celle utilisant en première intention le captopril (UKPDS 39) en termes de décès, d’IDM, d’AVC(11) ; la tendance était plutôt en faveur de l’aténolol, malgré une pression artérielle similaire. Cependant, l’effectif était probablement trop faible pour observer des différences significatives.   ADVANCE Au cours de l’étude ADVANCE, 11 140 patients diabétiques de type 2 ont été randomisés pour recevoir (après une période de run-in de 6 semaines) une association fixe de perindopril et d’indapamide ou un placebo (en plus de leur traitement antihypertenseur)(12). Après un suivi moyen de 4,3 ans, 73 % et 74 % étaient toujours sous traitement actif dans ces deux groupes. Le traitement par diurétique thiazidique était interdit dans les deux groupes (en dehors du traitement à l’étude), mais le traitement par IEC (perindopril ou non), était autorisé même dans le groupe placebo. À la fin de l’étude dans le groupe placebo, 55 % recevaient aussi du perindopril, 5 % un autre IEC, 13 % un ARAII, 5 % recevaient un diurétique thiazidique et 13 % un diurétique de l’anse. Pendant l’étude, la réduction de la PA a été de 5,6/2,2 mmHg dans le groupe perindopril-indapamide vs placebo. Les patients étaient particulièrement bien traités (exemple : HbA1c : 6,9 %) et en conséquence l’incidence des événements microvasculaires et macrovasculaires constatée a été inférieure d’un tiers par rapport aux hypothèses initiales. C’est la raison pour laquelle le critère de jugement initial (qui était initialement double : incidence des événements macrovasculaires analysée séparément de l’incidence des événements microvasculaires) a été modifié au cours de l’étude (incidence des événements macrovasculaires et incidence des événements microvasculaires analysées ensemble). Heureusement, la réduction du risque d’événements microvasculaires et macrovasculaires était qualitativement similaire, ce qui valide a posteriori cette décision : le traitement par perindopril-indapamide a réduit le risque d’événements microvasculaire ou macrovasculaire de 9 % (p = 0,04) (microvasculaire : - 9 % ; macrovasculaire : - 8 %). Le risque de décès d’origine cardiovasculaire a été réduit de 18 %, p = 0,03) et de décès toutes causes confondues de 14 %, p = 0,03. En revanche, la réduction du risque d’AVC (-6 %) et du risque de rétinopathie ou de détérioration visuelle (évalué par fond d’œil) (-5 %) n’a pas été significative, malgré la baisse de PA de 5,6/2,2 mmHg.   Patients âgés voire très âgés ou en post-AVC   MOSES L’étude MOSES(13) est de type PROBE (étude prospective randomisée ouverte mais sans double aveugle). Les critères d’inclusion des 1 352 patients inclus étaient les suivants : hypertension nécessitant un traitement antihypertenseur et un antécédent d’AVC. Les patients recevaient nitrendipine (10 mg/j) ou éprosartan (600 mg/j). La cible tensionnelle était d’obtenir une PA <140/90 mmHg. L’âge moyen était de 68 ans, 54 % des patients étaient de sexe masculin, 37 % étaient diabétiques, 26 % étaient coronariens, plus de la moitié avaient un antécédent de dyslipidémie. L’AVC datait d’environ 350 jours en moyenne. Le suivi a été de 2 à 4 ans (moyenne : 2,5 ans). La PA initiale de consultation était de 152/19 mmHg dans le groupe éprosartan et 151/18 mmHg dans le groupe nitrendipine. La PA sur 24 h était de 140/82 mmHg dans les deux groupes (holter tensionnel). À l’issue du suivi, la PA était de 132/80 mmHg dans les deux groupes. La plupart des patients recevaient une polythérapie antihypertensive. L’incidence du premier événement cérébrovasculaire a été comparable dans les deux groupes, mais le nombre de patients ayant un événement cardiovasculaire majeur a été supérieure dans le groupe nitrendipine (84 vs 60, p = 0,031). Le nombre total d’événements cérébrovasculaires (incluant les récurrences) a été plus élevé dans le groupe nitrendipine (134 vs 102, p = 0,026).   HYVET Il s’agit d’un essai randomisé, en double aveugle, réalisé chez des patients très âgés (80 ans ou plus) hypertendus (PAS ≥ 160 mmHg), visant à démontrer le bénéfice du traitement antihypertenseur (indapamide 1,5 mg LP/j ± perindopril 2 à 4 mg/j)(14). L’objectif principal est l’évaluation des effets du traitement antihypertenseur sur la réduction des AVC (fatals et non fatals). Les objectifs secondaires sont la réduction de la mortalité globale, de la mortalité cardiovasculaire, de la mortalité cardiaque et de la mortalité par AVC. L’objectif tensionnel est une PAS/PAD < 150/80 mmHg. Finalement, 3 845 patients ont été randomisés. Leur âge moyen était de 84 ans, leur PA de 173/90 mmHg. Ces patients avaient peu d’antécédents cardiovasculaires (11,8 %), d’AVC (6,8 %) ou d’infarctus (3,2 %). Le suivi médian a été de 1,8 ans et l’étude a été arrêtée par le comité de surveillance. Après 2 ans de suivi, 25,8 %, 23,9 % et 49,5 % respectivement recevaient l’indapamide seul, associé à périndopril 2 mg et périndopril 4 mg dans le groupe actif. La PA a été réduite de 14,5/6,8 mmHg dans le groupe placebo et de 29,5/12,9 mmHg dans le groupe actif (différence entre les deux groupes : 15/6 mmHg). La mortalité toutes causes a été réduite de 21 % (p = 0,02), les AVC de 30 % (p = 0,06), les AVC fatals de 39 % (p = 0,02), l’insuffisance cardiaque de 64 % (p < 0,0001).   Quelle bithérapie dans l’HTA ?   ASCOT Dans l’étude ASCOT-BPLA(15), 19 257 hypertendus âgés de 40 à 79 ans ayant au moins 3 autres facteurs de risque cardiovasculaire ont été inclus. Ces patients ont été randomisés pour recevoir de l’amlodipine (5 à 10 mg/j), éventuellement associée au périndopril (4 à 8 mg/j) si le contrôle tensionnel était insuffisant ou à l’aténolol (50 à 100 mg/j), éventuellement à un diurétique thiazidique (bendrofluométhiazide 1,25 à 2,5 mg/j). L’arrêt prématuré a été décidé après 5,5 ans de suivi car les résultats entre les deux groupes étaient différents en termes de mortalité totale et cardiovasculaire. La PA pendant le suivi était plus basse dans le groupe amlodipine/perindopril (PAS/PAD : -2,7/ 1,9 mmHg, p < 0,0001). Il n’y a pas eu de différence significative concernant le critère principal de l’étude (IDM fatals et non fatals) au profit du groupe amlodipine/perindopril (-10 %, p = 0,10), mais la différence était significative pour d’autres paramètres : AVC fatals ou non (-23 %, p = 0,0003), événements cardiovasculaires totaux (-16 %, p < 0,0001) et mortalité totale (-11 %, p = 0,025). L’incidence du diabète était moindre dans le groupe amlodipine/perindopril (-30 %, p < 0,0001).   ACCOMPLISH Cette étude non encore publiée a été présentée à l’ACC (Chicago, le 31 mars 2008). Il s’agissait d’évaluer une bithérapie initiale par bénazépril + amlodipine vs bénazépril + hydrocholorthiazide) (les doses ont été titrées jusqu’à 10/40 mg dans le 1er groupe et 40/25 mg dans le 2e groupe). Les critères d’inclusion étaient les suivants : hommes ou femmes de 55 ans au moins, ayant une PA systolique ? 160 mmHg ou traités par un antihypertenseur, et au moins un (si l’âge était au moins de 60 ans) ou deux (si l’âge était compris entre 55 et 59 ans) facteurs de risque associés parmi les suivants : angor compliqué (IDM, angor instable ou revascularisation), AVC avec séquelles, artériopathie périphérique (définie par amputation, revascularisation ou pontage, index cheville/bras ≤ 0,8, endartérectomie carotidienne), diabète sucré, hypertrophie ventriculaire gauche (par ECG), insuffisance rénale (créatininémie > 133 µmol/l chez la femme ou 150 µmol/l chez l’homme), macroalbuminurie (rapport albumine/créatinine urinaire >300 mg/g ou 200 mg/g si le patient est traité par IEC ou anti-aldostérone). Les patients ont été recrutés aux États-Unis, ou en Europe du Nord (Suède, Norvège, Danemark ou Finlande). Les caractéristiques des 1 176 patients inclus étaient les suivantes: 61 % d’hommes, 68 ans en moyenne, 50 % étaient obèses, 60 % diabétiques, 97 % étaient traités par un antihypertenseur, 67 % recevaient des statines et 63 % des anti-agrégants plaquettaires. La PA était de 145/80 mmHg à l’inclusion ; la PA systolique était, semble-t-il, inférieure de 0,7 mmHg dans le groupe bénazépril-amlodipine (129,3 vs 130 mmHg). L’étude a été interrompue après 39 mois de suivi car le critère principal était réduit de 20 % (p = 0,0002) dans le groupe bénazépril + amlodipine (critère combiné : décès cardiovasculaire, IDM, hospitalisation pour insuffisance cardiaque, AVC non fatal, arrêt cardiaque, revascularisation coronarienne). On attend avec impatience la publication.   En pratique   De nombreuses questions restent posées après les résultats de ces essais. Il faut essayer de réconcilier des résultats apparemment contradictoires. Par exemple, la protection cardiovasculaire apportée par le diurétique thiazidique chlortalidone semblait comparable à celle apportée par l’amlodipine dans l’étude ALLHAT(16) (certes, très critiquée mais majeure). Cependant, l’étude ACCOMPLISH nous indique à présent que l’association bénazépril + amlodipine est nettement plus protectrice que l’association bénazépril + hydrochlorothiazide. La protection cardiovasculaire par un diurétique ou un inhibiteur calcique dépend-elle du blocage du système rénine préalable ou non par un IEC ? Ou dépend-elle de la population considérée ? Ou encore du type de composé considéré au sein des classes médicamenteuses (ici chlortalidone vs hydrochlorothiazide) ? De la même manière, l’étude plus confidentielle MOSES(13), chez des patients en post-AVC, semblait indiquer une protection cardiovasculaire plus marquée dans le groupe éprosartan par rapport au groupe nitrendipine, à l’inverse de ce qui avait été constaté dans l’étude VALUE(17) chez les patients à haut risque cardiovasculaire (traitement initial : amlodipine vs valsartan). Des leçons à tirer S’il devient de plus en plus difficile d’appréhender dans leur globalité les résultats des essais thérapeutiques, certaines leçons peuvent cependant être tirées de ces essais : – Les patients à haut risque cardiovasculaire (pas nécessairement hypertendus) bénéficient d’une protection cardiovasculaire similaire sous ramipril et sous telmisartan. – Même lorsque les patients diabétiques de type 2 sont bien traités (statines, anti-agrégants plaquettaires, réduction tensionnelle), une réduction supplémentaire de la PA, même modeste (dans ADVANCE par perindopril-indapamide), apporte une protection cardiovasculaire supplémentaire. – Après avoir bloqué le système rénine angiotensine, la bithérapie de choix chez le patient hypertendu à haut risque cardiovasculaire est peut-être davantage l’inhibiteur calcique que le diurétique thiazidique, même si cela reste à confirmer ; par contre, il n’y a pas de données concernant la néphroprotection. – L’association IEC-ARA II doit être réservée aux néphrologues pour la prise en charge de certains patients protéinuriques et aux cardiologues pour la prise en charge de certains patients insuffisants cardiaques (études ONTARGET, COOPERATE et CHARM-Added(18). Cette mesure doit probablement être minoritaire, s’accompagner d’une surveillance très étroite de la fonction rénale et de la kaliémie, et n’est pas une prescription du médecin généraliste. – Les IEC et ARA II à dose suffisante (voire à forte dose) ont une place de choix dans la néphroprotection des patients protéinuriques non diabétiques (étude ROAD). Est-ce aussi vrai par exemple dans le diabète de type 2 ? Cela est probable mais non prouvé. – Il est possible (mais non prouvé de manière indiscutable) qu’à PA égale, les IEC protègent mieux des événements coronaires et les ARA II mieux des événements cérébrovasculaires ; cependant, cette distinction a peu de retombée pratique car le patient ne nous prévient pas du type d’événement qu’il risque de développer… D’autres études vont venir enrichir encore notre compréhension de l’HTA dans différents types de populations (PROFESS, TRANSCEND, DIRECT, i-PRESERVE et plus loin ROADMAP) et on s’en réjouit à l’avance.

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