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Études

Publié le 07 nov 2006Lecture 7 min

INNOVATION : diminuer le risque rénal chez l'hypertendu diabétique

P. SABOURET, GHPS, Paris

L’avènement des nouvelles classes d’antihypertenseurs a permis de préciser leurs bénéfices sur la protection cardiovasculaire et d’intégrer les antagonistes des récepteurs de type 1 de l’angiotensine II (ARAII) parmi les traitements de première intention des patients hypertendus, avec des indications préférentielles chez les patients à haut risque (diabétiques de type II aux différents stades de néphropathie, hypertendus avec une HVG électrique). Cependant, les études ont inclus peu de patients asiatiques et n’ont pas apporté de réponse sur la dose optimale d’ARAII à utiliser. Dans ce contexte, il devenait licite d’évaluer un nouvel ARAII de longue durée d’action, le telmisartan possédant des propriétés métaboliques spécifiques (agoniste partiel des PPAR-g), et notamment des effets favorables sur le métabolisme glucidique, chez des patients diabétiques hypertendus asiatiques.

Les patients diabétiques hypertendus cumulent souvent les facteurs de risque, ce qui les fait appartenir à la catégorie des patients à risque cardiovasculaire élevé. Les études d’intervention chez ces patients ont démontré l’intérêt d’une baisse drastique de la pression artérielle, avec un objectif tensionnel < 130/80 mmHg. Par ailleurs, l’existence d’une microalbuminurie constitue un marqueur de risque cardiovasculaire, témoin d’une dysfonction endothéliale, chez les patients diabétiques, comme chez les non-diabétiques. Les études d’observation ont souligné que la moindre évolution de la microalbuminurie est associée à un meilleur pronostic cardiovasculaire. Dans le cadre de la convergence des facteurs de risque et de leur prise en charge globale, les dernières recommandations de l’AFSSAPS chez les patients dyslipidémiques considèrent que tout patient diabétique est à haut risque cardiovasculaire dès qu’il présente une microalbuminurie associée à un seul autre facteur de risque. L’étude IRMA-2 a montré que l’utilisation d’un sartan permet de ralentir la progression de la microalbuminurie vers une protéinurie. Ces bénéfices cardiovasculaires ne semblent pas liés uniquement à la baisse tensionnelle mais mettent en jeu des mécanismes non presseurs impliquant les récepteurs AT1 de l’angiotensine II. L’atteinte rénale proprement dite, qui se traduit par une diminution de la clairance de la créatininémie (< 60 ml/min) et/ou une protéinurie, est un marqueur de risque non seulement d’insuffisance rénale terminale, mais surtout cardiovasculaire, ainsi que l’ont souligné les dernières recommandations des sociétés savantes.   Méthodologie de l’étude L’étude INNOVATION a inclus 526 des patients âgés de 30 à 74 ans, diabétiques de type 2, normo- ou hypertendus, ayant un rapport albuminurie/créatininurie (A/C) par bandelette semi-quantitative (déterminant le rapport albuminurie/créatininurie) entre 100 et 300 mg/g de créatinine sur au moins 2 des 3 bandelettes effectuées, sans valeur > 300 mg d’albuminurie/g de créatininurie, avec une créatininémie < 1,5 mg/dl chez les hommes et < 1,2 mg/dl chez les femmes. Étaient exclus les patients ayant débuté un diabète de type 2 avant l’âge de 30 ans, ou diabétiques de type 1, ou ayant eu un événement ischémique majeur lors des 6 derniers mois (cardiopathie ischémique, accident vasculaire cérébral), ou insuffisants cardiaques en classe III et IV de la NYHA, ou chez lesquels un traitement par IEC et/ou ARAII était indiqué. Le critère primaire d’efficacité est représenté par le délai entre la randomisation et la survenue d’une néphropathie diabétique, définie par un rapport A/C > 300 mg/g et supérieur de 30 % à la valeur initiale sur 2 échantillons consécutifs réalisés à 4 semaines d’intervalle lors des visites post-randomisation. La date de la deuxième visite où l’on retrouve une microalbuminurie permet de calculer le délai d’apparition de la néphropathie. Même si le rapport A/C régresse ultérieurement, le patient est considéré comme ayant développé une néphropathie diabétique. Les critères secondaires d’efficacité comprennent : - les variations du rapport A/C, - le pourcentage de progression de la microalbuminurie vers la protéinurie, - le retour à la normoalbuminurie, - l’évolution de la créatininémie, - les variations de la clairance de la créatinine, - les modifications de l’excrétion urinaire du collagène de type IV, - le délai de doublement de la créatininémie et de la survenue d’une insuffisance rénale terminale ou d’un décès, - la morbi-mortalité cardiovasculaire, - le critère combiné associant les variations du rapport A/C, le pourcentage de progression de la microalbuminurie vers la protéinurie, le retour à la normoalbuminurie, l’évolution de la créatininémie, les variations de la clairance de la créatinine, les modifications de l’excrétion urinaire du collagène de type IV.   Éligibilité, randomisation et plan de l’étude Les patients remplissant les critères d’inclusion ont été randomisés en trois groupes : • telmisartan en titration forcée pour atteindre la dose cible de 40 mg/jour, • telmisartan en titration forcée pour atteindre la dose cible de 80 mg/jour , • placebo. Le suivi clinique variait de 52 à 124 semaines. Les patients étaient examinés à la 2e et la 4e semaine de randomisation, puis toutes les 4 semaines jusqu’à la fin de l’étude. L’excrétion urinaire de l’albumine (EUA) a été mesurée avant la randomisation et à la 8e semaine de randomisation, puis toutes les 4 semaines jusqu’à la fin de l’étude. L’excrétion urinaire du collagène de type IV a été mesurée aux 24e et 52e semaines, puis toutes les 24 semaines jusqu’au terme du suivi. Les mesures biologiques ont été effectuées aux 12e, 24e, 52e, puis toutes les 24 semaines jusqu’à la fin du suivi. Si un traitement antihypertenseur était nécessaire, il fallait éviter de prescrire un IEC ou un ARAII. L’objectif tensionnel était inférieur à 130/85 mmHg à 8 semaines de randomisation. En cas d’HTA non contrôlée, les patients étaient sortis de l’étude. Tous les patients poursuivaient leur(s) traitement(s) antidiabétique(s) habituel(s).   Calcul de l’effectif Le critère primaire étant la survenue d’une néphropathie diabétique, le calcul de l’effectif s’est effectué sur une hypothèse de non-progression vers la néphropathie diabétique de 96 % dans les groupes telmisartan et de 88 % dans le groupe placebo, sur la base des résultats de l’étude IRMA-2. Un total de 375 patients (125 par groupe) était nécessaire pour détecter une différence entre les groupes, avec une puissance statistique > 80 %, pour une période de recrutement de 1,3 ans et un suivi moyen de 2,3 ans. L’estimation de sorties d’étude étant de 15 % par groupe, la taille de l’effectif total a donc été calculée à 450 patients (soit 150 patients par groupe). Au total, 1 855 patients ont été recrutés, dans 160 centres entre janvier 2003 et juillet 2004 ; 527 patients (soit 28,4 %) ont été randomisés ; 1 328 patients (71,6%) ont été exclus, principalement (69,3 %) en raison d’un rapport microalbuminurie/créatininurie en dehors des valeurs d’inclusion.   Caractéristiques cliniques des patients L’âge moyen des patients était de 61,7 ans, avec une prédominance masculine (73,2 %) ; 67,9 % de ces patients diabétiques étaient hypertendus, 56,7 % dyslipidémiques et 34% fumeurs. L’indice de masse corporelle moyen était plus bas que celui observé en Europe et aux États-Unis (25,4 ± 4 kg/m2) pour une ancienneté du diabète de 8,9 ± 7,3 ans. La moitié des patients présentaient une rétinopathie. La PA systolique demeurait trop élevée, alors que la composante diastolique était contrôlée. L’hémoglobine glyquée moyenne était à l’objectif (7 % en moyenne), avec un LDL-C moyen à 1,17 g/l et un HDL-C normal à 0,52 g/l (tableau). Discussion Le problème de santé publique que constitue le diabète de type 2 a sensibilisé le monde cardiologique sur l’optimisation de sa prise en charge en prévention secondaire. La prévention primaire doit être également l’objet d’attentions particulières, puisqu’elle constitue la partie immergée de l’iceberg. L’incidence du diabète de type 2, sous l’influence du développement de l’obésité abdominale et des modifications des habitus, continue à croître avec 171 millions de patients diabétiques dans le monde en 2000, et une perspective de 366 millions en 2030. L’incidence la plus élevée est prévue en Asie. Le risque des patients diabétiques est double : cardiovasculaire puisque 75 % des diabétiques décèderont d’un événement athérothrombotique ; rénal, puisqu’un tiers de patients développent une microalbuminurie après 10-15 ans d’évolution, qui elle-même évolue vers la protéinurie dans 30 % des cas, avec la progression vers l’insuffisance rénale terminale dans 20 % des cas après 20 ans d’évolution. Les études randomisées récentes ont démontré les bénéfices d’une stratégie thérapeutique basée sur un ARAII (IDNT, RENAAL, IRMA-2, MARVAL, DETAIL) aux différents stades d’évolution de la néphropathie diabétique. Cependant, les patients asiatiques étaient sous-représentés, ce qui ne permettait pas de conclusions formelles pour ces patients. L’étude INNOVATION permettra de démontrer les bénéfices du telmisartan chez les patients diabétiques, hypertendus ou non, et de déterminer sa dose optimale pour un blocage efficace du système rénine-angiotensine, afin de diminuer le risque rénal et cardiovasculaire des hypertendus diabétiques. Ces patients asiatiques ont des caractéristiques cliniques proches de ceux d’IRMA 2, à l’exception notable qu’INNOVATION inclut un tiers de sujets normotendus (comme dans MARVAL), et que la valeur moyenne du rapport albuminurie/créatininurie est le double de celle observée dans IRMA-2 et MARVAL, ce qui était nécessaire pour mettre en évidence une différence statistique avec le groupe placebo, puisque la durée moyenne de suivi est plus courte que dans les précédentes études. Cette étude est un support précieux pour confirmer sur une grande échelle les bénéfices cardiovasculaires et rénaux du telmisartan, dont les bénéfices tensionnels et métaboliques ont déjà été démontrés comparativement aux traitements conventionnels, en raison de sa forte affinité pour les récepteurs AT1, de sa longue demi-vie, et de son action spécifique d’agoniste partiel des récepteurs PPAR-g.

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