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Risque

Publié le 20 nov 2007Lecture 4 min

La dépendance tabagique : mythes et réalités

J. CHAPSAL, Paris

Selon une enquête IFOP, les campagnes de sensibilisation au danger du tabac ont porté leurs fruits, mais la grande majorité des fumeurs, s’ils sont largement conscients de leur dépendance au tabac et désirent s’arrêter, manquent encore d’information sur les effets du tabac et sur les méthodes efficaces à utiliser pour mettre toutes les chances de leur côté pour réussir à arrêter de fumer. Les fumeurs ont tendance à sous-estimer la force de cette dépendance et les difficultés à la surmonter. De nombreuses idées fausses sur la cigarette et les méthodes pour arrêter de fumer circulent encore.
I. Berlin, président de la Société française de tabacologie a expliqué comment, au fil des siècles, les hommes ont sélectionné les substances de leur dépendance avec au 19e siècle l’exploitation du tabac, substance de dépendance particulièrement addictive : en effet, le risque d’addiction au tabac est bien plus élevé que le risque d’addiction à l’alcool, au cannabis, à la cocaïne, aux psychostimulants, aux benzodiazepines, aux analgésiques, et son pouvoir addictogène serait similaire à celui de l’héroïne...

          Les objectifs de la lutte contre la dépendance tabagique passent par la compréhension de la trajectoire du fumeur de façon à pouvoir intervenir le plus tôt possible. De nos jours, les tentations qui poussent à fumer la première cigarette ne manquent pas et une fois que l’initiation au tabac a eu lieu, la dépendance ne tarde pas à s’installer… en 5 à 6 mois, l’addiction peut être acquise. On estime qu’il y aurait chaque année en France 100 000 nouveaux fumeurs quotidiens. Les professionnels de santé ont un rôle à jouer pour barrer la route au tabagisme avant que l’addiction ne soit trop encrée.   Combattre les idées reçues C. Lemettre, tabacologue au CHU de Caen a expliqué que trop souvent encore, nicotine et dangerosité du tabac sont confondus. Le véritable danger du tabac se cache dans les multiples composants de la fumée : celle-ci contient plus de 4 000 composés chimiques, du monoxyde de carbone et beaucoup d’autres produits dangereux, mais la nicotine n’est ni cancérigène, ni dangereuse. Contenue en forte concentration dans le tabac, elle devient lors de la combustion le principal élément addictif de la fumée de tabac. Les substituts nicotiniques sont des médicaments qui ont fait la preuve de leur efficacité depuis près de 30 ans et beaucoup d’idées reçues concernent les contre-indications potentielles de ces substituts nicotiniques. La seule contre-indication pour les maladies cardiovasculaires, les maladies respiratoires, la grossesse… c’est la cigarette elle-même !   La nicotine inhalée : des effets immédiats sur l’organisme Il faut à peine 10 secondes à la nicotine pour parvenir au cerveau et déclencher une sensation de plaisir puis de dépendance. Par son action sur les récepteurs cholinergiques nicotiniques, la nicotine provoque la libération de nombreux neurotransmetteurs et la dépendance au tabac est en partie due aux effets de la nicotine sur le cerveau. Au fur et à mesure que la nicotinémie augmente, les récepteurs sont désensibilisés et l’organisme compense par une augmentation du nombre des récepteurs. La stimulation des récepteurs désensibilisés entraîne une faible augmentation de la dopamine intracérébrale. Lors de la baisse de la nicotinémie, les récepteurs se resensibilisent et une nouvelle stimulation entraînera une libération de dopamine, puis une nouvelle désensibilisation des récepteurs : c’est la tolérance qui s’installe. La nicotine de la cigarette est addictive en raison de sa vitesse d’absorption pulmonaire : la nicotine atteint des pics de concentration cérébrale beaucoup plus élevés que celle mesurée dans le sang veineux. À l’inverse, les substituts nicotiniques se caractérisent par la lenteur avec laquelle la nicotine pénètre dans l’organisme. Le potentiel addictif n’est donc pas fonction de la nicotine elle-même mais bien de son mode d’administration.   Les substituts nicotiniques risquent-ils d’entraîner une dépendance ? L’arrivée très rapide de la nicotine au cerveau crée toutes les conditions pour induire et entretenir une dépendance. Les « shoots » successifs procurent tour à tour des sensations de plaisir et de bien-être et favorisent l’installation d’un véritable conditionnement. Quand le fumeur est privé de cigarette, une sensation de manque apparaît, immédiatement comblé lors de la prise d’une nouvelle cigarette : la dépendance s’est bel et bien installée. Avec les substituts nicotiniques, la nicotine diffuse lentement sans aucun « shoot », donc sans entretien de la dépendance et en contrôlant les symptômes de manque.   Les substituts nicotiniques : à quelles doses ? Les substituts doivent être utilisés à doses suffisantes et en nombre suffisant pour compenser efficacement l’apport de nicotine que le fumeur retirait de ses cigarettes, le problème n’est pas dans le surdosage mais dans le sous-dosage. De la même façon que le fumeur adapte son rythme et sa façon de fumer à ses besoins, la bonne dose de substitut est celle qui va permettre un sevrage confortable avec un minimum de symptômes de manque. Le tabac est une drogue tenace et le sevrage doit s’effectuer sur plusieurs mois (3 à 6 mois), voire davantage.   Les fausses croyances ont la vie dure Beaucoup pensent encore que les substituts nicotiniques sont contre-indiqués en cas de grossesse ou de maladie cardiovasculaire et incompatibles avec moult traitements… Rien n’est plus faux : les substituts nicotiniques sont recommandés tant chez les femmes enceintes fortement dépendantes, sur avis médical, que chez les coronariens. Continuer de fumer tout en prenant des substituts nicotiniques est possible et s’accompagne alors d’une moindre quantité de fumée inhalée. Cette combinaison a prouvé son efficacité et a été validée par les autorités de santé.   En conclusion Si les fumeurs sont largement conscients de leur dépendance au tabac, il est nécessaire de leur apporter une information notamment sur les méthodes efficaces permettant de réussir à arrêter de fumer. Cet atelier a permis de se poser les bonnes questions sur les idées reçues concernant la nicotine et l’utilisation des substituts nicotiniques. Il n’existe aucune contre-indication à l’utilisation de ces substituts, et la seule contre-indication dans les maladies cardiovasculaires, les maladies respiratoires, la grossesse…c’est la cigarette elle-même.

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