Publié le 24 jan 2006Lecture 8 min
Rythmologie : les autres points forts
L. FAUCHIER, Centre hospitalier universitaire Trousseau, Tours
AHA
Si les techniques interventionnelles ont dominé ce congrès et si le traitement AVK reste la pierre angulaire du traitement de la fibrillation auriculaire (programme ACTIVE), d’autres éléments utiles pour la pratique et certaines données sur le défibrillateur automatique implantable (DAI) ont été traités lors de ce congrès et sont rapportés dans cet article.
Mort subite : apprentissage court des manœuvres de réanimation
Un des objectifs majeurs des sociétés savantes de cardiologie est d’augmenter la formation de la population générale aux manœuvres de ressuscitation et à l’utilisation des défibrillateurs automatiques externes pour les arrêts cardiaques extrahospitaliers (330 000 cas par an aux États-Unis). Néanmoins, la durée de formation sur une ou plusieurs séances de quelques heures est un obstacle à la diffusion large des informations utiles.
Les études présentées par l’équipe de Roppolo et coll. sont une réponse à ceux qui prendraient argument du manque de temps pour ne pas se former à la ressuscitation cardio-pulmonaire. Le but du travail était de comparer deux types de formation de durées différentes : une méthode courte de 20 min par cassette vidéo pour la formation à la ressuscitation et séparément de 5 min pour l’utilisation du défibrillateur automatique externe (limitée à une démonstration externe avec les consignes vocales du défibrillateur, sans toucher à l’appareil) et une formation « standard » de 4 h incluant la formation à l’utilisation du défibrillateur automatique externe.
Deux cent soixante employés de la compagnie aérienne American Airlines ont été randomisés pour recevoir l’une ou l’autre formation. Il y a ensuite eu évaluation de l’efficacité ventilatoire des manœuvres de réanimation sur un mannequin informatisé équipé de capteurs, enregistrées en vidéo ; trois évaluateurs ont ensuite noté les manœuvres de réanimation (5 items) comme adéquates ou inadéquates ainsi que les manœuvres de défibrillation (2 items concernant le positionnement des palettes et la délivrance du choc) comme adéquates ou inadéquates.
Le volume de ventilation et le pourcentage de ventilation efficace (en utilisant une valeur cible) a été plus élevé dans le groupe « formation courte ». L’appel téléphonique des secours, une ventilation efficace et une utilisation correcte du défibrillateur ont été plus souvent obtenus dans le groupe « formation courte ». Les deux groupes étaient prévus pour inclure 150 sujets mais le groupe « formation longue » n’a finalement inclus que 118 sujets, car plusieurs sujets ont renoncé à consacrer 4 h à cette formation.
Une méthode de formation courte en 20 min est donc au moins aussi efficace pour l’apprentissage des manœuvres initiales de réanimation qu’une formation plus longue habituelle de 4 h, et plus efficace pour les manœuvres de défibrillation.
Le « kit du réanimateur », nommé CPR anytime, incluant un mannequin et un cours en DVD est commercialisé par la société Laerdal Medical pour 25 euros depuis octobre 2005 aux États-Unis.
Syndrome de Brugada
Le syndrome de Brugada peut avoir une transmission autosomique dominante cependant sa prévalence familiale est mal connue.
- Six a étudié sur 4 ans 26 familles de patients porteurs du syndrome de Brugada, soit 302 individus qui ont tous eu un test pharmacologique provocatif. Les résultats indiquent que 14 familles sur 26 avaient plus d'un porteur du syndrome de Brugada (54 %), 15 % des membres apparentés étaient porteurs du syndrome et le test pharmacologique était positif chez 7 % des membres de la famille dont l’ECG de base était normal.
Mondal, dans une population de 28 255 anciens combattants de plus de 45 ans, a retrouvé 11 aspects ECG de Brugada (0,04 %). Un seul avait des antécédents de syncope inexpliquée sans maladie cardiaque structurale. Le syndrome paraît donc rare après 45 ans et à faible risque d'événements cardiaques.
Schimpf a retrouvé que la positivité du test à l’ajmaline est significativement augmentée par l'utilisation de précordiales hautes chez des patients ayant fait une syncope ou une mort subite récupérée, ou ayant une histoire familiale de mort subite.
Seitz a analysé les enregistrements Holter de 24 h de 20 patients ayant un aspect ECG de syndrome de Brugada et 10 sujets témoins. Une diminution significative du sus-décalage diurne du segment ST en V1 et V2 a été observée pour des fréquences cardiaques élevées. Cette relation entre fréquence cardiaque et aspect ECG n’était pas présente de façon significative la nuit. L'élévation du segment ST, plus importante au repos chez les porteurs de Brugada, est moins marquée pour les hautes fréquences cardiaques que pour les basses fréquences, contrairement aux témoins. Ces résultats rejoignent certaines données expérimentales et pourraient avoir des implications importantes pour la démarche diagnostique.
DAI : indications diverses
Insuffisance rénale et pronostic
L'insuffisance rénale chronique, fréquemment associée aux maladies cardiaques, est un facteur de comorbidité fréquent chez les patients qui reçoivent un DAI.
Fish montre que la mortalité accrue chez les patients insuffisants rénaux ne serait pas liée à un taux plus élevé d'événements cardiaques, mais à la condition rénale elle-même. Les patients dialysés sont à haut risque de mort subite mais sont habituellement exclus des essais sur le DAI et leur devenir est donc mal connu.
Reddy a étudié rétrospectivement la survie de 18 dialysés au sein d'une cohorte de 492 pa-tients porteurs de DAI. L'âge moyen était de 62 ans, 79 % des patients étaient des hommes, la FEVG moyenne était de 33 %, la cardiomyopathie était ischémique pour 60 % et l'indication préventive dans 46 % des cas. Ces caractéristiques n’étaient pas différentes chez les dialysés, dont la survie a cependant été plus courte (3,1 vs 8,6 ans). Il reste à déterminer si le DAI améliore significativement la survie intrinsèque de ces patients.
Laminopathies
Les laminopathies sont des affections génétiques associant souvent une atteinte musculaire à des troubles cardiaques (fibrillation auriculaire, bloc auriculo-ventriculaire, insuffisance cardiaque, mort subite), l'une des plus fréquentes étant la maladie de Emery Dreyfus. La pose d'un stimulateur cardiaque paraît insuffisante pour prévenir complètement la mort subite chez ces patients.
L’étude rapportée par Meune a proposé un DAI à 21 patients ayant une mutation documentée des gènes codant pour les lamines, adressés pour mise en place d'un stimulateur. Après un suivi de 32 mois, 12 patients ont eu des arythmies ventriculaires, dont 6 fibrillations ventriculaires et 8 ont reçu des chocs électriques. Cinq de ces patients étaient préalablement asymptomatiques et 9 avaient une FEVG normale, ce qui fait que les arythmies étaient difficilement prévisibles. Les auteurs concluent donc à la pertinence d’une implantation prophylactique de DAI chez ces patients.
CMH
Maron a rapporté les résultats d'une étude multicentrique internationale concernant 506 patients porteurs de cardiomyopathie hypertrophique à haut risque appareillés par DAI.
L'âge moyen était de 41 ans à l’implantation et 48 % des patients avaient moins de 40 ans. Au cours d’un suivi de 3,7 ans, 101 patients (20 %) ont reçu une thérapie, dont 92 % de chocs, soit 5,4 % de chocs appropriés/an survenant à un âge moyen de 44 ans ; 42 % des patients ayant une indication de prévention secondaire ont reçu un choc (11 % par an), et 13 % avec une indication de prévention primaire (4 % par an). L'intervalle séparant l'implantation du premier choc (26 ± 29 mois) a pu atteindre 4 à 9 ans chez 23 % des patients. Les facteurs de risque prédictifs de chocs sont : une syncope (20 %), une TV non soutenue (19 %), une hypertrophie massive (14 %) et des antécédents familiaux de mort subite ; cependant, 18 % des chocs sont survenus chez des patients ayant un seul facteur de risque. Il y a eu 38 décès, dont 31 sans rapport avec la cardiopathie. Cela plaide donc pour l’implantation prophylactique, même en présence d'un seul facteur de risque.
Cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit
Piccini a étudié prospectivement 55 patients présentant cette pathologie, âgés de 36 ± 14 ans, porteurs d'un DAI implanté suivant les critères des recommandations internationales. Avec un suivi moyen de 4,4 ans, 82 % des patients ont reçu une thérapie appropriée pour TV ou FV, dans un délai moyen après l'intervention de 24 mois. Le DAI est intervenu dans 89 % des cas en prévention secondaire et dans 45 % des cas en prévention primaire. L’exploration électrophysiologique n'était pas prédictive de thérapeutique appropriée. Dans 24 % des cas, les arythmies étaient potentiellement létales (FV, TV > 240/min). Les auteurs recommandent donc de suivre précisément les recommandations internationales actuelles pour la mise en place d'un DAI chez ces patients.
OPTIC
L'amiodarone est souvent utilisée pour réduire le nombre de chocs chez les porteurs de DAI. Diverses études ont évoqué l’élévation du seuil de défibrillation sous amiodarone, mais l'étude OPTIC (Optimal Pharmacological Therapy in Implantable Cardioverter defibrillator patients) est la première à avoir étudié ce point de façon randomisée (Hohnloser). Les seuils de défibrillation ont été mesurés à l'état basal et 2 mois après l’institution d'un traitement par bêtabloqueur chez 28 patients, amiodarone plus bêtabloquant chez 33 patients et sotalol chez 27 patients. Il existe, certes, une augmentation significative du seuil dans le deuxième groupe, mais pour l'auteur, cela ne justifie pas de recontrôler systématiquement le seuil de défibrillation chez les patients sous amiodarone.
Les statines peuvent-elles également prévenir la fibrillation auriculaire ?
Gillis a étudié, chez 187 patients consécutifs porteurs de fibrillation auriculaire paroxystique, le temps d'apparition de la première récidive et la charge en FA après implantation d'un pacemaker double chambre. Le délai d'apparition de la première récidive a été significativement plus long chez les patients prenant des statines et la charge en FA a été moins forte sous statine (0,11 h/j vs 0,66 h/j). Le traitement par statines était apparemment un prédicteur indépendant de la suppression de la FA.
Ces données incitent donc à réaliser un essai contrôlé étudiant l'efficacité des statines en prévention de la FA.
DAI sous-cutané
Un DAI totalement sous-cutané, sans électrode endocavitaire, pourrait simplifier la procédure d’implantation, éviter l’irradiation fluoroscopique, réduire les coûts et éviter les complications des électrodes transveineuses. Liebermann a utilisé un dispositif avec un boîtier prépectoral et une électrode sous-cutanée dorsale chez 23 patients devant recevoir un DAI pour des indications conventionnelles. Trois patients sur 23 avaient un seuil de défibrillation > 35 J, mais le dispositif s'est montré efficace chez les autres. Il n’y avait pas de relation entre le poids du patient et l’efficacité du matériel. Après mesure du seuil de défibrillation, un dispositif conventionnel a été implanté. D'autres études sont nécessaires pour évaluer les capacités diagnostiques d'un tel dispositif et la marge de sécurité pour la défibrillation, mais ces résultats, après ceux de S-ICD à l’ESC 2005, sont encourageants.
IRM, pacemakers et DAI : quelles possibilités ?
Nazarian a rapporté une étude prospective réalisée chez 50 pa-tients porteurs de pacemakers (PM) ou de défibrillateurs implantables (DAI). Les patients devaient ne pas avoir d’autres alternatives que cette méthode d’imagerie pour obtenir le diagnostic, qui a d’ailleurs changé l’attitude thérapeutique dans 67 % des cas. Les patients avec stimulation permanente dépendants étaient programmés en mode asynchrone. Il n’y a pas eu de modification significative des caractéristiques de stimulation après IRM. Cette étude montre donc la possibilité, dans certaines conditions, de réaliser des IRM chez les patients porteurs de PM ou de DAI. Néanmoins, la prudence reste de mise et l’examen doit si possible être évité selon les recommandations actuelles.
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