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Cardiologie générale

Publié le 22 jan 2008Lecture 12 min

Pour notre pratique au quotidien

E. FERRARI , CHU de Nice
Anomalies de la fonction thyroïdienne durant un traitement par amiodarone pour FA Ce travail a voulu préciser la prévalence des problèmes thyroïdiens dans une population d’hommes traités pour fibrillation auriculaire (FA). Les données proviennent de l’étude SAFE-Trial ayant inclus plus de 600 patients et dans laquelle l’amiodarone était comparée au sotalol et au placebo. Une hypothyroïdie infraclinique avec taux de TSH compris entre 4,5 et 10 mU/l était notée chez 25 % des patients traités par amiodarone versus 6,6 % des témoins. Une franche hypothyroïdie avec un taux de TSH > 10 mU/l était notée chez 5 % des patients sous amiodarone versus 0,3 % des témoins. Parmi les patients dont le taux de TSH va s’élever au-dessus de 10 mU/l, 94 % d’entre eux étaient déjà identifiés à 6 mois. En d’autres termes, peu de patients vont garder une TSH normale ou subnormale à 6 mois pour l’augmenter plus tard. On a noté que 5,3 % des patients vont développer une hyperthyroidie définie par une TSH < 0,35 mU/l dans le groupe amiodarone versus 2,4 % dans le groupe sotalol ou placebo. Au total, plus de 30 % des patients traités pour une FA chronique (âge moyen 67 ans) vont présenter une hypothyroïdie au moins biologique, alors que 5 % environ présenteront une hyperthyroïdie.   Le paradoxe de l'effet favorable de la surcharge pondérale continue L’obésité est un facteur de surrisque de morbidité cardiovasculaire établi dans les deux sexes ; ce surrisque est possiblement associé aux comorbidités qui accompagnent souvent la surcharge pondérale (HTA, diabète, dyslipidémie…). Dans une grande étude épidémiologique portant sur plus de 527 000 sujets, des auteurs avaient retrouvé un surrisque de décès associé à l’excès pondéral. Dans une étude encore plus importante, des collègues coréens avaient retrouvé la même association chez plus de 1,2 millions de sujets. Nous nous sommes ainsi tous « battus » pour faire en sorte que nos patients obèses et « cardiaques » perdent du poids… Avions-nous tort ? • Le paradoxe de l’effet favorable de l’obésité chez les coronariens et les insuffisants cardiaques commence à être étayé. Dans une métaanalyse portant sur plus de 7 200 patients ayant bénéficié d’une angioplastie coronaire, les patients « obèses » se portaient mieux que les fluets, avec une baisse de 36 et 27 % du risque de décès à 1 an chez les patients ayant une surcharge pondérale et chez les grands obèses respectivement. Chez l’insuffisant cardiaque, l’obésité a également été associée à un meilleur profil évolutif avec une réduction du risque d’événement de 12 à 19 % en fonction de l’IMC (digitalis investigation group trial n = 7 765). Voilà que le même paradoxe serait démontré chez les hypertendus insuffisants coronariens. Ainsi, 22 576 patients hypertendus coronariens d’âge moyen 66 ans ont été suivis environ 3 ans. Ces patients ont été inclus dans une étude comparant le vérapamil à l’aténolol. Ils ont été séparés en 5 quintiles en fonction de leur IMC. Le critère de jugement était la survenue d’un décès, d’un IDM ou d’un AVC. Le risque d’un des trois événements était plus faible chez les patients en surpoids par rapport à ceux de poids normal : RR 0,77 (0,70-0,86, p < 0,001). Quand on compare les patients en surpoids à ceux de poids normal (IMC 20 à 25 kg/m2), ceux dont l’IMC se situe entre 30 et 35 kg/m2 (obésité de classe I) sont ceux qui ont le meilleur pronostic et ce malgré une moindre baisse de la pression artérielle chez eux. • Quelles sont les hypothèses qui pourraient expliquer cette association qui peut paraître paradoxale ? • Les obèses seront plus souvent monotronculaires. Leurs artères coronaires seraient plus souvent calcifiées donc avec une moindre évolutivité des plaques d’athérome. Mais les obèses auraient aussi des taux de TNF (tumor-necrosis factor) et de cytokines moins élevés que les sujets de poids normal. • Autre hypothèse, l’association que nous avons intégrée entre obésité et facteur de risque cardiaque ferait que ces patients seraient considérés et vus plus tôt dans l’évolution de leur maladie. • Enfin, l’HTA des sujets obèses n’aurait pas les mêmes caractéristiques que l’HTA des sujets minces avec des résistances vasculaires moins élevées… À suivre.     ... à moins qu'ils ne soient mieux traités C’est justement l’hypothèse d’un autre travail publié dans une autre revue et menée chez plus de 130 000 sujets hospitalisés pour coronaropathie dans 409 hôpitaux américains. Lorsque les patients sont stratifiés en fonction de leur poids, on retrouve 2,5 % de patients maigres (IMC < 18 kg/m2), 27 % de patients avec un poids normal (IMC de 18,5 à 24,9), 37 % de sujets en surcharge pondérale (IMC entre 25 et 29,9), 29 % de sujets obèses avec un IMC de 30 à 39,9 et 5 % de sujets « extrêmement obèses » avec un IMC > 40 kg/m2. Les résultats essentiels sont que les sujets dont l’IMC est élevé sont plus jeunes, plus souvent des hommes, mais plus souvent diabétiques, hypertendus et dyslipidémiques. La mortalité hospitalière est d’autant plus basse que le poids augmente : 10,4 % chez les sujets maigres, 5,4 % chez les sujets en surcharge pondérale, 3,1 % chez les obèses et 2,4 % chez les grands obèses ! On voit aussi que les sujets reçoivent d’autant plus de traitements efficaces qu’ils sont obèses. Ils bénéficient aussi plus souvent de procédures invasives et en conclusion seraient donc mieux pris en charge.   Relation entre CRP et FA en postinfarctus immédiat On présume que l’inflammation serait largement impliquée dans la genèse de certaines arythmies et en particulier la FA. Cela est indirectement démontré dans la prévention des FA postopératoires avec l’efficacité des corticoïdes, voire des statines. Cette étude postule qu’en postinfarctus, plus le syndrome inflammatoire sera important, plus l’incidence de la FA sera élevée. Chez 1 209 patients admis pour un IDM aigu, la CRP ultrasensible a été mesurée à H12 et H24. La relation entre le taux de CRP et la survenue de FA est recherchée. Si l’on sépare les patients en trois groupes en fonction de leur taux de CRP (3 tertiles), une FA survient chez 6,5, 10,4 et 17 % des patients respectivement dans le 1er, 2e et 3e tertile de CRP (p < 0,0001). Bien sûr, on peut se dire que les IDM les plus étendus sont ceux qui auront la CRP la plus élevée et aussi un risque de FA plus important. Mais en analyse multivariée, après ajustement sur plusieurs variables cliniques, et en particulier sur les valeurs de la FE postinfarctus, il reste une élévation importante du risque en fonction de la CRP. Ce même taux de CRP reste même un facteur prédictif de FA à 1 an. En conclusion, dans une cohorte de patients importante ayant présenté un infarctus du myocarde ST+, il existe une association positive et graduelle entre la CRP ultrasensible dosée précocement et le risque de FA ultérieur.   Valeur prédictive d'un taux bas de HDL chez les patients bien traités par une statine On sait que le taux de HDL-cholestétol est inversement corrélé au risque d’événements cardiovasculaires. Chez un patient très bon répondeur à une statine avec un taux de LDL-C « dans la cible », un taux de HDL-C qui reste bas garde-t-il une « mauvaise » valeur prédictive ? Les auteurs se servent de l’étude TNT pour répondre à cette question. Que l’on considère des quintiles de la valeur du HDL-C ou le HDL-C comme une variable continue, le taux de HDL-C reste bien prédictif des événements cardiovasculaires. Parmi les patients qui atteignent la cible optimale d’un taux de LDL < 0,7 g/l (soit près de 2 600 patients dans l’étude TNT), ceux avec un taux de HDL dans le quintile le plus haut sont à moindre risque que ceux du quartile le plus bas (p = 0,03). Cette question n’est pas dénuée d’intérêt pour nos patients mais aussi pour l’industrie. Pour nos patients, cela signifie qu’un taux de LDL-C, même à 0,7 g/l sous statine, ne présente pas forcément la meilleure protection que l’on puisse espérer. Pour l’industrie, cela signifie qu’il reste de la place pour les molécules qui font spécifiquement augmenter le HDL-C.     TVP des membres supérieurs Ce travail revisite l’épidémiologie des thromboses veineuses profondes (TVP) des membres supérieurs à partir des données de tous les habitants de Worcester (Massachusetts). L’incidence de la TVP des membres supérieurs est de 16 pour 100 000 versus 91 pour 100 000 pour la TVP des membres inférieurs. Sur 483 TVP diagnostiquées, 14 % des cas surviennent au niveau des membres supérieurs et 86 % au niveau des membres inférieurs (âge moyen des patients 67 ans). Ces patients ont plus souvent « bénéficié » de gestes médicaux à risque (cathéter central, pose de pacemaker…). Le traitement antithrombotique de ces TVP des bras est moins agressif que celui des TVP des membres inférieurs alors que le taux de récurrence est similaire entre les deux localisations. Bien que la survie à 1 an soit identique lorsque l’on compare le devenir des patients ayant présenté une TVP du bras versus ceux ayant présenté une TVP des membres inférieurs, la survenue d’une embolie pulmonaire est moins fréquente que ce soit lors de la présentation clinique ou du suivi. Dans cette communauté de 500 000 habitants, une thrombose veineuse sur 7 serait survenue au niveau des membres supérieurs. En extrapolant à la totalité de la population des États-Unis, cela correspondrait à 50 000 TVP des membres supérieurs chaque année.   Métaanalyse sur le rôle des statines dans la réduction des IDM après angioplastie élective : interprétons les chiffres avec du bon sens ! Les statines ont été testées en postangioplastie afin d’essayer de diminuer la resténose. En revanche, l’effet de cette classe thérapeutique sur les événements cardiaques après angioplastie n’avait pas été rapporté. Les auteurs ont entrepris une métaanalyse de tous les essais sur les statines versus placebo après angioplastie coronaire. Six études ont été répertoriées et utilisées qui comptabilisaient près de 4 000 patients (PREDICT, Flare, LIPS, GAIN, ARMYDA et Briguori). L’incidence de l’IDM (dont on a du mal à trouver la définition utilisée) était de 3 % dans le groupe statine versus 5,2 % dans le groupe placebo (RR 0,57). L’incidence des décès de toutes causes était de 2,3 versus 3 % (RR 0,74). L’incidence de la mortalité cardiovasculaire était de 0,71 versus 1,2 % (RR 0,58), avec une nécessité de nouvelle revascularisation de 19,6 versus 21,9 % en faveur des statines (RR 0,89). Attention tout de même aux chiffres puisque, dans cette métaanalyse, le taux d’AVC était de 0,4 % sous statine contre 0,08 % sous placebo, soit un risque 3 fois supérieur d’AVC postangioplastie chez les patients qui, par ailleurs, avaient la chance d’être traités par une statine !   Décès et séquelles par hémorragies cérébrales et extracrâniennes chez les patients traités par AVK Lorsque l’on analyse un travail relatant le rapport bénéfice/risque des AVK dans telle ou telle pathologie, on comptabilise souvent toutes les hémorragies graves ensemble. A-t-on raison ? Ce travail évalue les séquelles et le devenir des patients ayant présenté une hémorragie grave sous AVK. Sur une cohorte de plus de 13 000 patients suivis un peu plus d’un an et traités par AVK pour une FA non valvulaire, les auteurs identifient 72 patients hospitalisés pour une hémorragie intracrânienne et 98 autres pour une hémorragie grave extracrânienne. À la sortie de l’hôpital, 76 % des patients avec une hémorragie cérébrale gardaient des séquelles sévères ou étaient décédés. En revanche, 3 % de ceux ayant été hospitalisés pour une hémorragie grave extracrânienne survenue sous AVK avaient des séquelles graves ou étaient décédés. Sous AVK, les hémorragies cérébrales tuent 20 fois plus que les autres hémorragies. Les hémorragies cérébrales constituent 90 % des décès dus aux AVK. Ce fait mérite d’être pris en compte dans l’évaluation des complications des AVK. Les poids respectifs d’une hémorragie intracrânienne et d’une hémorragie extracrânienne devraient être pondérés. En clair, l’hémorragie cérébrale tue ou laisse des séquelles importantes alors que les hémorragies extracrâniennes ont une faible mortalité. En particulier, dans des indications difficiles comme la FA du sujet âgé, ce concept devrait être pris en compte si l’on veut établir le vrai rapport bénéfice/risque des AVK.     Faut-il anticoaguler les patients porteurs d'un cathéter veineux central à demeure en cours de chimiothérapie ? Les cathéters veineux centraux sont de plus en plus souvent requis en oncologie avec 27 à 67 % de thrombose de cathéters centraux et donc de thrombose veineuse centrale associée. Une embolie pulmonaire survient chez 15 à 36 % des patients présentant une thrombose de cathéter central. Plusieurs études ont testé l’idée d’anticoaguler les patients en cours de chimiothérapie anticancéreuse afin d’éviter la thrombose de ces cathéters centraux. Les protocoles d’anticoagulation étaient divers et variés avec soit de l’héparine non fractionnée, soit des HBPM, soit des AVK à dose fixe. Les conclusions étaient discordantes, rendant difficile l’élaboration de consensus à ce sujet. Ce travail est une métaanalyse des 15 essais publiés. Avec un traitement anticoagulant, le risque relatif de thrombose de cathéter à demeure tombe à 0,31-0,73, ce qui représente une baisse de 79 à 27 % du risque de thrombose de cathéter. L’incidence de thrombose veineuse profonde diminue avec un RR de 0,28 à 0,72, ce qui donne une diminution du risque de 71 à 28 %. En revanche, aucun régime d’anticoagulation ne ressort comme plus efficace. Cela signifie que l’idée est bonne mais qu’il faut probablement optimiser le type de traitement antithrombotique chez ces patients.    

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