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Cardiologie générale

Publié le 20 juin 2006Lecture 16 min

Pourquoi des discordances d'interprétation, notamment dans les recommandations ?

F. DIÉVART, Clinique Villette, Dunkerque

On peut lire dans l’argumentaire de ses recommandations de l’Afssaps de 2005 sur les valeurs cibles de LDL proposées en fonction de la situation clinique du patient : « Ces valeurs ont pour but d’aider les cliniciens à prendre des décisions thérapeutiques. Les valeurs de la LDL-cholestérolémie retenues comme objectifs thérapeutiques ne sont pas des valeurs expérimentales définies par des essais d’intervention ni par des analyses coût-bénéfice.
Elles ont été fixées consensuellement ».

    A titre d’exemple, remarquons qu’à ce jour, aucun grand essai d’intervention n’a concerné des hommes < 50 ans ou des femmes < 60 ans, parmi lesquels se recrutent les patients sans facteur de risque dans la définition donnée. Le seuil de 2,20 g/l (5,7 mmol/l) de LDL cholestérol résulte donc d’un compromis qui, en pratique, conduit au traitement médicamenteux des hypercholestérolémies familiales pour lesquelles la concentration sanguine de cholestérol total excède généralement 3 g/l (7,7 mmol/l) et/ou celui du LDL cholestérol dépasse 2,20 g/l (5,7 mmol/l). » Les valeurs proposées sont donc des valeurs consensuelles et non des valeurs reposant sur des faits établis et prouvés comme le voudrait dans l’absolu la rédaction d’un texte de recommandations. Proposées pour aider les cliniciens à prendre des décisions thérapeutiques, les recommandations sont une aide à la prescription, ces recommandations reconnaissent implicitement qu’elles ne peuvent être opposables à une pratique qui serait divergente. En revanche, elles fournissent un mode opérationnel de la prise en charge des dyslipidémies et le mot compromis y figure en toutes lettres. Dans les lignes qui suivent seront mis en lumière quelques éléments conduisant des faits établis à leur interprétation et à la promulgation de recommandations puis à la prise de décision. Pour ce faire, j’emprunterai plusieurs paragraphes de l’excellent livre « Comprendre et Communiquer la Science » de Jean Crête et Louis M. Imbeau (éditions De Boeck Université, 1996, Belgique) avant de faire quelques commentaires.   Lien entre le LDL, les maladies cardiovasculaire et la pratique quotidienne Comme il a été rapporté plus avant, l’épidémiologie a montré, par approches successives, qu’il existe un lien fort, puissant et direct entre la valeur du LDL cholestérol à un moment donné et à l’échelle d’une population, et le risque d’avoir un infarctus du myocarde dans les années qui suivent. Cette relation entre LDL et risque coronarien a plusieurs particularités : – cette relation est universelle, en termes relatifs : elle s’applique à tout individu, quels que soient l’âge, le sexe, la valeur des autres paramètres lipidiques, la situation clinique ; – elle ne connaît pas de seuil, dans la limite des valeurs étudiées: en d’autres termes, le risque cardiovasculaire relatif associé à une valeur donnée de LDL est toujours moindre que celui associé à la valeur juste au-dessus et toujours supérieur à celui associée à la valeur juste inférieure ; – elle n’est pas prédictive pourtant au niveau individuel: pour une valeur donnée, quelle qu’elle soit, elle permet de dire qu’un patient a un risque plus grand d’infarctus que si cette valeur était plus basse, mais elle ne permet pas d’affirmer que ce patient sera victime d’un infarctus du myocarde de façon certaine dans les « x années à venir » ; – cette non-prédictivité est déroutante car, de façon complémentaire, pour un même niveau de LDL-cholestérol, le risque d’avoir un infarctus du myocarde dans une période de temps donnée, peut être extrêmement différent pour deux sujets, car il dépend de multiples autres facteurs. Ainsi, si la relation indique un risque relatif, le risque absolu (qui n’est pas prédictif à l’échelle individuelle) ne peut être apprécié que si le LDL est incorporé dans une échelle d’évaluation du risque comprenant plusieurs autres paramètres. Et même encore, à même valeur de LDL cholestérol et à risque absolu différent, le patient ayant le risque estimé comme le plus élevé n’a qu’une probabilité plus grande d’avoir un infarctus du myocarde comparativement à celui estimé d’avoir un risque plus faible, et pourtant c’est parfois ce second patient qui sera vu plus précocement en soins intensifs pour un SCA. Là, ce n’est plus seulement le médecin qui est amené à se poser des questions, ce sont certains patients peu enclins à comprendre les faits scientifiques et médicaux sous l’approche probabiliste et statistique. En effet, combien de patients disent encore « je ne comprends pas » : – « j’ai fait un infarctus et pourtant on m’a toujours dit que je n’avais pas de cholestérol »; – « mon médecin me dit de ne plus fumer et pourtant, d’abord il fume, ensuite mon voisin de 84 ans qui fume n’a jamais fait d’infarctus alors que mon autre voisin de 42 ans qui ne fume pas a, lui, fait un infarctus ». Certains médecins et patients avouent aussi ne pas comprendre pourquoi, alors que tous les facteurs de risque sont contrôlés, les traitements adaptés prescrits et suivis, il survient un infarctus. À cela plusieurs réponses complémentaires : – la meilleure prise en charge possible des facteurs de risque ne peut s’adresser, d’une part, qu’aux facteurs de risque connus et, d’autre part, qu’aux facteurs de risque modifiables. Ainsi, pour un homme, même s’il est orphelin et enfant de la DASS, s’il devient transsexuel, et s’il ment quant à sa date de naissance afin de se rajeunir, cela ne changera rien quant aux poids de l’hérédité, du genre et de l’âge qui pèsent sur lui ; – le risque absolu est de fait le risque moyen de survenue d’un événement donné dans une période de temps donnée et dans une population partageant des caractéristiques communes. Il n’indique pas le risque spécifique et précis d’un patient ; un patient ayant un risque absolu très faible peut quand même être victime de l’événement donné alors que le patient ayant un risque très élevé peut quand même ne pas en être victime : l’évaluation du risque absolu est un calcul probabiliste permettant d’évaluer un niveau de risque, mais pas de prédire avec certitude la survenue d’un événement ; – l’homme n’est pas immortel…   L’exemple de la circulation routière Une longue pratique de la rééducation fonctionnelle m’a souvent fait utiliser un exemple simple que la plupart des patients comprennent assez facilement pour expliquer la démarche probabiliste et ses incertitudes : celui du risque d’accident de la route en fonction de la vitesse de la voiture. En prenant l’exemple de la conduite en ville, il est facilement perçu que plus la vitesse d’une voiture sera élevée, plus son risque d’accident sera important. Pourtant, ce n’est pas parce qu’elle roule très vite qu’elle aura obligatoirement un accident, et ce n’est pas parce qu’elle roule très lentement qu’elle n’en aura pas. Même à l’arrêt, un accident peut survenir : une autre voiture qui la percute, un arbre qui tombe… mais la probabilité est plus faible voire très faible, sans être nulle toutefois. Par ailleurs, et toujours en ville, soit deux voitures, l’une a des pneus neufs et correctement gonflés, un conducteur non fatigué et n’ayant pas bu d’alcool et l’autre voiture à des pneus usés, sous-gonflés et un conducteur qui sort d’une nuit blanche avec 1 gramme d’alcool dans le sang. Il est aisé de comprendre que, à vitesse égale, la première voiture a un risque d’accident plus faible que la seconde. Il en est de même pour la démarche probabiliste concernant le LDL : – le risque d’infarctus augmente proportionnellement au taux de LDL, mais une valeur très élevée n’est pas synonyme d’infarctus assuré et une valeur basse d’avoir une vie sans infarctus ; – pour un même niveau de LDL, le risque d’avoir un infarctus du myocarde est fonction de nombreux autres paramètres. Ces deux éléments confirment la théorie lipidique de l’athérogenèse.   La théorie lipidique de l'athérogenèse La théorie lipidique de l’athérogénèse repose sur deux hypothèses qui ont parfois été opposées alors qu’elles sont complémentaires : – les lipoprotéines riches en cholestérol suffisent à induire ou favoriser la progression des lésions athéromateuses via une augmentation (directe ou indirecte) du taux d'incorporation des lipoprotéines dans la paroi artérielle ; – l'interaction des lipoprotéines avec d'autres systèmes déclencherait la formation ou la progression de lésions. Par exemple, elle augmenterait l'agrégation plaquettaire ou endommagerait les cellules endothéliales. Dans un modèle, le cholestérol est l’acteur quasi exclusif, en supposant qu’il existe une valeur au-dessus de laquelle il devient pathogène ; dans l’autre modèle, il n’est qu’un cofacteur du développement de l’athérome. Ces deux théories ne s’excluent pas puisqu’il apparaît que la cholestérolémie est un acteur principal de l’athérogenèse mais que la valeur qui rend compte de sa pathogénicité dépend de nombreuses autres variables. La théorie lipidique et/ou les caractéristiques de la relation entre LDL cholestérol et risque coronarien suscitent donc deux questions pratiques : – peut-on parler d’hypercholestérolémie et/ou de valeurs normales de la cholestérolémie ? – jusqu’où peut-on être sûr qu’une valeur très basse de LDL n’est pas associée à un autre risque quelconque, en d’autres termes quels sont les risques associés à des valeurs extrêmement basses de LDL ? La réponse à cette seconde question fera l’objet d’un article spécifique proposé plus loin dans cette intégrale.   La notion d’hyper-cholestérolémie En prenant acte des données épidémiologiques, le terme « hypercholestérolémie » ou « normocholestérolémie » paraît être un non-sens, un faux concept ou plutôt un concept « relatif ».   L’exemple de l’âge Il existe une relation linéaire (mais avec un discret effet de courbe en J lié la mortalité néonatale) entre l’âge et le risque de décéder tout comme entre le LDL et le risque d’infarctus du myocarde. Mais, dans ce second cas, il a été créé les mots d’hypercholestérolémie et de cholestérolémie normale alors que, dans le premier cas, il n’est pas fait notion d’un « âge normal » ou d’un « hyperâge ». Si un sujet ne peut avoir, au sens large, un âge normal, il est toutefois possible de dire qu’il est plus ou moins jeune, plus ou moins âgé et, par analogie, il est possible de dire qu’une valeur de cholestérolémie est plus ou moins basse, plus ou moins élevée.   Comment définit-on alors le plus ou moins ? En fonction de valeurs arbitraires qui peuvent varier avec le temps. Ainsi, il est évident qu’au 19e siècle, un homme de 50 ans était un homme âgé, un patriarche (pensez aux photos de Victor Hugo à 50 ans, barbe blanche…), au milieu du 20e siècle, un homme âgé était un homme > 65 ans, et aujourd’hui il s’agirait plutôt d’un homme > 75 ans. Pour la cholestérolémie élevée, il en est de même : dans les années 1960, une cholestérolémie était élevée si elle était supérieure à 3 g/l, jusqu’à la fin des années 1980 si elle était supérieure à 2,4 g/l et aujourd’hui si elle est supérieure à 2 g/l. Dans les années 1960, rouler à 90 km/h en ville était « normal », dans les années 1970, rouler à 59 km/h était normal, et 90 était un excès de vitesse ; aujourd’hui, la normalité est < 50 km/h, toute valeur supérieure est excessive. C’est exactement le même problème pour ces trois paramètres, l’âge, la vitesse et le LDL, il n’y a pas de normale, mais des valeurs arbitraires, que l’on devrait simplement qualifier d’opérationnelles.   Un peu d’épistémologie Afin de comprendre la démarche qui fait passer des faits aux recommandations et à la pratique décisionnelle, il paraît utile de rappeler deux notions : celle qui différencie énoncé de fait et énoncé normatif, et celle qui différencie définition conceptuelle et définition opérationnelle.   Énoncé de fait et énoncé normatif : quel distinguo ? Un énoncé de fait est toute affirmation qui peut être confirmée ou réfutée par l’examen de preuves fournies par les sens ou leur prolongement technologique. C’est une affirmation de ce qui est, tel que : - les fumeurs meurent en moyenne plus jeunes que les non-fumeurs ; - il existe une relation directe et puissante entre la valeur du LDL plasmatique et le risque d’IDM ; chaque jour sont publiés 15 000 articles scientifiques et techniques ; - la durée moyenne de la relation sexuelle chez l’humain est de deux minutes (et oui, c’est un fait…), chez le chimpanzé elle est de sept secondes (c’est cela l’évolution...). Un énoncé normatif est une affirmation dans laquelle on évalue. C’est une affirmation à propos de ce qui devrait être. Elle ne peut être ni démontrée ni réfutée par l’examen de preuves sensibles parce qu’elle met en relation un objet (concret ou abstrait) et une valeur, c'est-à-dire un jugement personnel, par exemple : - un cholestérol-LDL à 1,25 g/l est normal ; - l’hypercholestérolémie est le plus grand bourreau du 20e siècle ; - les médecins dépensent trop ; - tout le monde a droit à une statine ; - « je préfère les hommes aux chimpanzés, allez savoir pourquoi ! » dit-elle... Un jugement de valeur implique une prise de position. Il considère que certaines choses, certaines situations sont meilleures, plus avantageuses, plus recommandables que d’autres. Le jugement de valeur implique une évaluation de l’objet, tendant à lui donner une valeur, à le caractériser en termes de meilleur ou pire. Pour transformer les énoncés normatifs précédents en énoncés de faits, il faut remplacer les parties d’énoncés qui impliquaient un jugement de valeur, une prise de position, par quelque chose d’observable : – l’obtention d’un LDL-cholestérol à 1,25 g/l est l’un des objectifs fixés par les recommandations de la société savante X dans la prise en charge des dyslipidémies des patients à risque intermédiaire ; – la part attribuable à l’hypercholestérolémie dans la totalité des décès survenus au 20e siècle a été plus importante que la part attribuable aux deux guerres mondiales ; – la progression des dépenses de santé en 2005 a été supérieure aux objectifs fixés par l’ONDAM ; – les essais cliniques ont démontré que le bénéfice clinique des statines est indépendant des données démographiques, lipidiques et cliniques des patients ; – la durée moyenne de la relation sexuelle chez l’humain est de deux minutes, chez le chimpanzé elle est de sept secondes. Pourquoi distinguer les deux notions d’énoncé de faits et d’énonce normatif ? Pour comprendre que la prise de décision est un compromis entre ces deux éléments. Un discours normatif qui ne repose pas solidement sur l’observation risque d’être complètement détaché de la réalité, de n’avoir aucune connexion avec ce qui se passe vraiment. Il ne sert qu’à donner un faux sentiment de sécurité et, à la limite, à endoctriner, à manipuler. De façon complémentaire, la seule connaissance des faits, sans l’apport de certaines notions de ce qui est désirable, peut s’avérer un piètre guide pour l’action. Les décisions imposent des choix qui sont impossibles à faire sur la seule base des faits. Des normes ou des valeurs doivent être invoquées. Toute décision est basée sur des normes, l’observation des faits conduit à un constat, la mise en relation de ces faits avec des normes conduit à la décision. Il y aura donc toujours matière à discussion entre les faits et les décisions, entre les données brutes de la science et les recommandations et/ou les AMM, chacune procédant par un mode opératoire différent et étant lié à l’activité humaine, donc élaborée dans des systèmes de valeurs qui peuvent différer. Ainsi, pour prendre ce qui est dénommé « les bonnes décisions », il faut une formation permettant de distinguer les faits importants et de dégager les valeurs présentes dans une situation. Un des problèmes est que l’être humain est d’abord un être normatif, en ce sens qu’il lui faut faire un effort spécial pour prendre du recul vis-à-vis de ses valeurs afin de regarder les choses pour ce qu’elles sont (les faits). Le processus de socialisation conduisant à l’âge adulte a, en effet, consisté essentiellement à inculquer des notions de bien et de mal, de ce qui est désirable et de ce qui ne l’est pas et, ainsi, notre vision des choses est codifiée par un ensemble de normes peu visibles mais omniprésentes à travers lequel tous les faits sont criblés. Il est donc possible de comprendre qu’à partir de mêmes faits, des interprétations différentes peuvent être adoptées, conduisant à des recommandations différentes et à des critiques régulières de ces recommandations.   Définition conceptuelle et définition opérationnelle Un concept est un mot ou un symbole qui représente une idée et cette idée est reliée à la réalité, à des choses que nous pouvons observer. Définir, c’est rattacher explicitement un mot à une idée ou à des choses. Ainsi, quand nous demandons « quelle est votre définition de X ? », nous demandons de fait « à quelle idée ou à quelles choses X renvoie-t-il ? ». Une définition conceptuelle est une définition qui contiendra un terme général qui indique la classe d’objets à laquelle appartiennent les objets auxquels on s’intéresse, et les caractéristiques qui distinguent ces objets des autres de la classe. La définition conceptuelle renvoie donc à des idées correspondant aux caractéristiques que nous avons retenues de l’objet de l’étude : elle fait le lien entre le concept et la conception. Une définition opérationnelle est un ensemble d’instructions qui décrivent les opérations permettant d’observer les objets ayant les caractéristiques retenues dans la définition conceptuelle du concept. La maladie athérothrombotique et la définition de l’hypercholestérolémie sont deux exemples qui seront choisis pour illustrer cette différence entre ces deux définitions. La définition conceptuelle de la maladie athérothrombotique se rapporte à une pathologie des artères, conduisant à la formation de plaques d’athérome qui peuvent se rompre et occasionner un thrombus, source d’obstruction artérielle et d’atteinte d’un organe d’aval. La définition opérationnelle renvoie à l’ensemble des éléments qu’il faut rassembler pour affirmer qu’un patient est atteint de la maladie athérothrombotique, telles la présence de plaque d’athérome en imagerie, la survenue d’un événement ischémique… : par cette opération je rattache ce patient à ce concept. La définition conceptuelle de l’hypercholestérolémie renvoie à une idée que l’on se fait du rapport entre un taux donné de cholestérolémie-LDL et son risque de dépôt dans les artères et ce, tout en sachant qu’un tel dépôt peut survenir pour des valeurs de LDL plasmatique très variables, puisque l’importance des dépôts est aussi conditionnée par les autres facteurs de risque. Ainsi, n’ont pas une hypercholestérolémie tous les patients qui ont des taux > 2,4 g/l, contrairement à une notion répandue, mais dans le concept actualisé, a une hypercholestérolémie tout patient dont l’afflux de cholestérol, quel que soit son niveau plasmatique, conduit à des dépôts de cholestérol dans cette artère : a une hypercholestérolémie un patient pour lequel, quelle que soit la valeur plasmatique du LDL, des plaques d’athérome se forment et sont à risque. Comment dès lors juger de qui a une hypercholestérolémie et qui n’en a pas, puisqu’un infarctus peut survenir pour des valeurs très différentes de LDL plasmatique ? La définition opérationnelle ne peut rendre compte du concept mais a adopté un point de vue pragmatique. Elle a consisté à fixer des valeurs en deçà desquelles le risque paraît faible et au-delà desquelles le risque paraît suffisamment élevé pour considérer que cette valeur peut pragmatiquement définir l’hypercholestérolémie. Ainsi, chez un patient à risque élevé, parce qu’il a déjà eu un infarctus du myocarde, il sera défini qu’il a une hypercholestérolémie si son LDL est > 1 g/l et, chez un patient dont le risque cardiovasculaire est faible, il sera dit qu’il a une hypercholestérolémie si le LDL est > 2,20 g/l. La définition opérationnelle repose donc sur la mesure de la valeur plasmatique du LDL et sa classification en fonction d’une grille préétablie dont les valeurs sont arbitraires, c'est-à-dire consensuellement définies par défaut de connaissances fiables sur le sujet.   Epistémologie   Le mot épistémologie vient du grec épistémê («connaissance », «science ») et logos (« discours »). Le terme est employé dans trois acceptions. – l'épistémologie est une réflexion sur la science : c'est une partie de la philosophie qui s'intéresse au discours rationnel sur la connaissance scientifique. La philosophie des sciences étudie ainsi la connaissance scientifique d'un point de vue critique. L'épistémologie peut s'intéresser à établir une classification des sciences, à définir des catégories ; – la seconde acception est celle de l'étude des épistémès comme époques de production de discours positifs par des disciplines appelées ou non « sciences » ; – la troisième acception, issue de l'emploi du terme « epistemology » dans le monde anglo-saxon, est celle de théorie de la connaissance. Qu'est-ce que le savoir ? Comment l'acquérir ? Comment s'en servir ? Pourquoi le chercher ou s'en servir ? Quelles sont les limites du savoir ? en sont les questions. Source : wikipédia.org   En pratique   La définition de l’hypercholestérolémie résulte d’un compromis entre : - des faits qui indiquent que l’hypercholestérolémie est un faux concept puisque la relation est linéaire et sans seuil ; - la nécessité de prendre une décision ; - le fait que la décision ne peut reposer que sur des notions normatives et des critères opérationnels. Dès lors, il est clair que l’interprétation des faits pourra être différente en fonction des ensembles d’experts constituant les bureaux chargés de produire des recommandations, aboutissant à des définitions opérationnelles différentes pour un même concept. Il en est de même de la vitesse en voiture : pourquoi avoir fixé la limite à 50 en ville et non à 45 ou à 60 km/h ? Par compromis et en utilisant des valeurs « rondes » faciles à retenir et tout en sachant que le fait de rouler à 52 km/h est une infraction et expose à un risque relatif d’accident plus important que de rouler à 49 km/h, mais, dans l’absolu, le risque d’accident est très peu différent que l’on roule à 52 ou à 49 km/heure en ville. Le médecin, pour sa pratique, ne peut qu’observer et accepter le fait que les recommandations constituent un compromis et, compte tenu qu’il est le décisionnaire final face à un patient, il ne peut lui être reproché d’adopter une attitude non conforme à certaines AMM et/ou recommandations, dès lors qu’il peut justifier que son attitude est guidée par la volonté d’obtenir le meilleur rapport bénéfice/risque face à un patient donné.

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