Publié le 19 juin 2007Lecture 6 min
Quel bilan chez les patients diabétiques de type 2 asymptomatiques ?
M. LALOI-MICHELIN, CHU Lariboisière, Paris
L’ANAES a publié en 1999 des recommandations, actualisées en 2006 par l’HAS, concernant le suivi des patients diabétiques de type 2 (à l’exclusion du suivi des complications). Ces règles de suivi peuvent également s’appliquer aux patients diabétiques de type 1 non compliqué.
Surveillance de l'équilibre glycémique
Un bon contrôle de l’équilibre glycémique est recommandé pour retarder, voire prévenir l’apparition des complications. Le dosage de l’HbA1c tous les 3 mois est l’examen clé pour la surveillance de l’équilibre glycémique, le taux d’HbA1c reflétant le niveau glycémique des trois derniers mois. Ce dosage doit être réalisé par chromatographie liquide à haute performance (HPLC). Les objectifs d’HbA1c ont été redéfinis récemment par l’HAS (voir figure 5) pour les patients diabétiques de type 2. La mesure de la glycémie au laboratoire n’est pas indispensable.
L’autosurveillance glycémique n’est pas recommandée chez les diabétiques de type 2 qui ne sont pas sous insuline.
Dépistage et suivi des complications
Ces complications sont longtemps asymptomatiques et doivent être recherchées régulièrement afin de les dépister et de pouvoir entreprendre, le cas échéant, une prise en charge précoce.
Complications microangiopathiques
La rétinopathie, la néphropathie et la neuropathie sont des complications spécifiques du diabète. Leur sévérité est schématiquement corrélée à la gravité et à la durée de l’hyperglycémie.
Complications oculaires
Un bilan ophtalmologique complet par un ophtalmologiste doit être effectué dès le diagnostic puis tous les ans chez le diabétique non compliqué. Ce bilan comprend une mesure de l’acuité visuelle après correction optique, la mesure de la pression intra-oculaire, l’examen du cristallin et surtout la réalisation d’un fond d’œil après dilatation pupillaire avec un biomicroscope ou un rétinographe. L’angiographie rétinienne n’est pas systématique. Elle n’est réalisée que pour faire un bilan précis de la rétinopathie lorsque celle-ci s’est installée.
Lorsque le patient présente une rétinopathie, c’est l’ophtalmologiste qui fixera la fréquence des consultations.
Complications rénales
Dès le diagnostic, puis une fois par an, il est nécessaire de mesurer la créatinine puis de calculer la clairance de la créatinine grâce à la formule de Cockcroft et Gault ou à la formule du MDRD (Modification of Diet in Renal Disease [encadré]), plus fiable chez les patients âgés, en surpoids, et probablement chez les patients diabétiques.
Le dosage de la microalbuminurie (si la bandelette urinaire est négative), ou de la protéinurie, doit également être réalisé une fois par an. La microalbuminurie est définie par des concentrations d’albumine dans les urines comprises entre 20 et 200 mg/l (30 à 300 mg/24 h). Le dépistage d’une microalbuminurie n’a de valeur qu’en l’absence d’infection urinaire ou de sang dans les urines. Il peut être réalisé sur un échantillon d’urines ou sur les urines des 24 heures. L’existence d’une microalbuminurie doit être confirmée à 2 reprises. Une microalbuminurie et/ou une protéinurie confirmée devront être quantifiées sur des urines de 24 heures.
Complications neurologiques
Il convient de procéder une fois par an à un interrogatoire et à un examen clinique neurologique complets à la recherche de signes de neuropathie périphérique ou autonome. Les explorations neurophysiologiques ne sont pas recommandées systématiquement.
Examen des pieds
Il faut procéder une fois par an à un examen clinique minutieux des pieds chez tout patient diabétique à la recherche d’une neuropathie sensitive, d’une artériopathie ou d’une déformation du pied ou de cals. Chez des patients à haut risque podologique (neuropathe et ou artériopathe), chaque consultation doit comprendre un examen des pieds à la recherche de lésions cutanées (fissure, mycose, érythème, etc.).
Complications macroangiopathiques
Le diabète est un facteur de risque cardiovasculaire majeur. Le diabète multiplie par 3 le risque de décès lié à une maladie coronaire. L’artérite des membres inférieurs et les AVC sont également fréquents chez les diabétiques.
Maladie coronaire
L’interrogatoire et l’examen clinique doivent rechercher régulièrement des signes typiques ou atypiques d’atteinte coronarienne. Un ECG de repos doit être réalisé tous les ans. La recherche d’une ischémie myocardique silencieuse par des tests fonctionnels (en premier lieu l’ECG d’effort) sera proposée aux diabétiques à haut risque vasculaire suivant les recommandations ALFEDIAM-SFC à ce sujet (tableau).
Artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI)
L’interrogatoire doit rechercher une claudication intermittente, des douleurs ou une gêne à la marche rapide. L’AOMI est dépistée par l’abolition des pouls distaux, l’existence de souffles sur les artères fémorales. Les examens complémentaires ne sont pas recommandés systématiquement et ne sont proposés qu’en cas d’anomalie à l’examen clinique.
Accidents vasculaires cérébraux
L’examen clinique de tout patient diabétique doit comporter une fois par an une palpation et une auscultation des vaisseaux à destinée encéphalique. À quel diabétique de type 2 asymptomatique faut-il faire pratiquer un écho-Doppler des troncs artériels supra-aortiques (EDTSA) ? En l’absence de données formelles, il n’y a aucune recommandation officielle. On peut proposer un EDTSA de dépistage chez les patients diabétiques à risque élevé (20 %) de sténose carotidienne sévère (> 60 %) dans les cas suivants :
– en situation de prévention CV secondaire : diabétiques coronariens et/ou artéritiques ;
– en situation de prévention CV primaire : diabétiques à risque CV élevé (âge > 60 ans, tabagique, hypertendus, hypercholestérolémiques) ;
– tous les diabétiques de type 2 en cas de : souffle carotidien, insuffisance rénale chronique, long passé de déséquilibre glycémique.
Après un, EDTSA de dépistage révélant au maximum une sténose modérée (< 60 %), il n’y aurait pas d’indication à faire pratiquer une nouvelle exploration avant 4 ans chez les diabétiques traités de façon appropriée, restant asymptomatiques et indemnes de souffle carotidien (aucune progression significative de ces sténoses dans cette période sous l’effet des mesures thérapeutiques).
Divers
L’examen annuel du diabétique doit comporter la recherche d’une éventuelle infection cutanée ou génito-urinaire de même qu’un examen de la bouche et des dents.
Dépistage et suivi des facteurs de risque
Le diabète est un facteur de risque cardiovasculaire. Les patients diabétiques, en particulier de type 2, cumulent souvent différents autres facteurs de risque cardiovasculaire qui doivent être pris en compte au même titre que la glycémie. Le suivi du patient diabétique doit comporter une évaluation des paramètres tensionnels et lipidiques et rechercher un tabagisme. La découverte d’une anomalie de ces paramètres doit conduire à débuter une thérapeutique agressive qui diminuera la survenue des complications.
HTA
L’hypertension est fréquente chez le patient diabétique (présente chez 70 % des diabétiques de type 2). La mesure de la pression artérielle dans des conditions correctes avec un brassard adapté en position allongée ou assise et en position debout à la recherche d’une hypotension orthostatique, doit être réalisée à chaque consultation. On peut l’associer à l’utilisation d’un holter tensionnel ou à l’automesure à domicile.
Les objectifs tensionnels sont rappelés dans la figure 1.
Figure 1. Les objectifs tensionnels sont plus stricts en cas de diabète.
Anomalie lipidique
Des anomalies lipidiques s’observent chez plus de 50 % des diabétiques de type 2. La plus fréquente est une élévation des triglycérides avec une diminution des HDL et un LDL modérément élevé. Il est donc recommandé de réaliser à jeun, une fois par an, un bilan lipidique complet comprenant la mesure du cholestérol total, du HDL-cholestérol, des triglycérides et la mesure ou le calcul du LDL-cholestérol chez tous les patients diabétiques. Les niveaux d’intervention et les objectifs thérapeutiques ont été définis par l’AFSSAPS en 2006 (figure 2).
Figure 2. Objectifs lipidiques (AFSSAPS 2005).
Sous traitement, il faudra vérifier une fois par an que les paramètres lipidiques sont satisfaisants.
Tabagisme
Le tabagisme chronique augmente l’incidence et aggrave l’évolution des différentes complications micro- et macroangiopathiques. Comme dans la population générale, 20 à 25 % des diabétiques sont fumeurs. Il faut rappeler au patient les dangers du tabac et lui proposer un soutien au sevrage.
Conclusion
Tout patient diabétique doit avoir une consultation tous les 3-4 mois visant à surveiller le poids, la pression artérielle et le taux de l’HbA1c. Le dépistage des complications est dominé par un examen clinique complet annuel, la réalisation d’un fond d’œil, la recherche d’une microalbuminurie, le dosage de la créatinine sérique et la réalisation d’un ECG de repos. Le bilan lipidique sera également annuel.
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