Publié le 12 avr 2011Lecture 4 min
Diabète de type 2 et risque cardiovasculaire : sur quels paramètres agir ?
M. DEKER
Cœur et diabète
Trois éléments de l’équilibre glycémique doivent être pris en compte pour contrôler le diabétique et évaluer l’impact des traitements sur le risque cardiovasculaire : la glycémie à jeun, l’hyperglycémie postprandiale et la variabilité glycémique, qui a récemment émergé comme une cible majeure.
La variabilité glycémique, facteur ou marqueur de risque ?
La variabilité glycémique recouvre les fluctuations hyperglycémiques au cours du nycthémère, en particulier les hyperglycémies postprandiales, et a pour corollaire le stress oxydatif, la dysfonction endothéliale et la peroxydation lipidique. Son impact sur le risque cardiovasculaire est mieux documenté dans la population générale que chez les diabétiques. L’étude DECODE a montré une relation linéaire entre les valeurs de la glycémie 2 heures après charge en glucose et la mortalité cardiovasculaire, le risque étant encore plus prononcé chez les diabétiques connus que chez les non diabétiques.
Une étude observationnelle réalisée chez un millier de diabétiques de type 2 a montré que les patients mal contrôlés (hyperglycémie postprandiale à 1,80-2 g/l) ont présenté une incidence plus importante d’infarctus du myocarde que les patients bien contrôlés. Une étude chez plus de 600 diabétiques de type 2 montre que les pics d’hyperglycémie postprandiale, qui sont observés 1 heure après le repas, sont significativement corrélés à une augmentation de l’épaisseur intima-média (EIM) carotidienne chez le diabétique, et ce quelle que soit la valeur de l’HbA1c, alors que la glycémie à jeun n’est pas corrélée à ce marqueur de substitution.
Le lien entre la variabilité glycémique et l’atteinte du système cardiovasculaire concerne la dysfonction endothéliale, de même que l’inflammation et le stress oxydatif mitochondrial. Ainsi, L. Monnier a montré chez les diabétiques de type 2 une corrélation positive entre la variabilité glycémique mesurée par l’index MAGE (Mean Amplitude of Glycaemic Excursions) et un marqueur du stress oxydatif issu de l’oxydation de l’acide arachidonique, y compris chez les patients dont le taux d’HbA1c est < 8 %. Il semble donc que la variabilité glycémique donne des informations complémentaires à celles de la glycémie moyenne en termes de risque cardiovasculaire.
Des données expérimentales montrent que la dysfonction endothéliale est d’autant plus marquée et prolongée que les pics d’hyperglycémie sont importants. Contrairement à l’hyperglycémie continue qui s’accompagne d’une augmentation des marqueurs de l’inflammation (IL6, IL18) ayant tendance à s’atténuer avec le temps, les variabilités hyperglycémiques postprandiales entraînent une augmentation des marqueurs de l’inflammation sans retour à la normale, dont l’impact serait plus délétère sur le système vasculaire que celui d’une augmentation continue.
L’hyperglycémie est également tenue pour responsable d’altérations persistantes de l’expression artérielle de certains gènes ; ainsi, des modifications épigénétiques (modifications de la méthylation des histones) induites par des hyperglycémies transitoires ont été mises en évidence. Ces dernières ont aussi des effets sur la stabilité des plaques d’athérome.
Plus récemment, un lien a été montré entre les variabililités glycémiques et l’altération des fonctions cognitives, indépendamment de la glycémie à jeun.
Le concept de variabilité glycémique sous-tend non seulement les hyperglycémies mais aussi les hypoglycémies, dont la nocivité passe par la stimulation du système adrénergique et l’activation plaquettaire.
Peut-on traiter l’hyperglycémie postprandiale ?
Dans les études d’intervention, les antidiabétiques oraux agissant plus particulièrement sur la glycémie postprandiale, tels l’acarbose ou les glinides n’ont pas apporté d’arguments très convaincants quant à l’impact d’une action visant spécifiquement la glycémie postprandiale sur le risque cardiovasculaire. L’essai HEART 2D qui comparait une insuline rapide à une insuline NPH chez des patients diabétiques en postinfarctus n’a pas non plus montré de différence de pronostic.
Les médicaments à effet incrétines, notamment les analogues du GLP-1, ont des atouts potentiels pour agir sur les trois éléments de la triade glycémique. L’effet des analogues du GLP-1 sur la glycémie postprandiale est plus marqué que celui des inhibiteurs de la DPP-4. Par ailleurs, ils diminuent de façon plus prononcée l’aire sous la courbe glycémique que l’insuline lente.
Leur effet bénéfique éventuel sur le risque cardiovasculaire est supporté par la présence de récepteurs dans l’ensemble du système cardiovasculaire. Des études principalement réalisées chez l’animal ont objectivé un effet vasorelaxant et une diminution de l’adhésion monocytaire. Ils possèdent aussi un effet hypotenseur, d’autant plus important que la pression artérielle de départ est élevée.
Il n’existe pas d’éléments permettant de suspecter un risque cardiovasculaire accru chez les patients traités par agoniste du GLP-1 dans les essais cliniques. Au contraire, une analyse rétrospective des patients diabétiques sans antécédent cardio- ou cérébrovasculaire ischémique inclus dans les études comparatives de l’exénatide (près de 40 000 patients versus 380 000 environ patients prenant un autre traitement antidiabétique) montre une diminution du risque d’événements cardiovasculaires (HR : 0,81 ; IC : 0,68-0,95 ; p = 0,01) sous exénatide (Diabetes Care 2011 ; 34 : 90-5). Ce sont des données éminemment rassurantes quant à la sécurité d’emploi de cette molécule.
Symposium Lilly, avec la participation de Fabrice Bonnet (Rennes), Bogdan Catargi (Bordeaux) et Antoine Avignon (Montpellier).
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