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Études

Publié le 21 sep 2004Lecture 17 min

Cardiologie Pratique a 20 ans - 2 décennies d’essais cliniques

Syndromes coronariens aigus sans sus-décalage persistant du segment ST

Le mécanisme princeps, commun aux différents syndromes coronariens aigus, est la rupture ou fissuration d’une plaque d’athérome qui conduit à la formation d’une thrombose coronaire. Les lésions susceptibles de se rompre réalisent généralement des rétrécissements modérés, non significatifs, correspondant à des plaques jeunes dont la structure histologique est riche en lipides, comportant un noyau athéromateux mou surmonté d’une chape fibreuse fine, fragile et siège d’une inflammation. La conséquence de la rupture de plaque est la formation d’un thrombus, le plus souvent fibrino-plaquettaire et non occlusif dans les SCA sans sus-décalage de ST, auquel se surajoutent des phénomènes vasospastiques. À la réduction brutale de la lumière artérielle épicardique s’associe fréquemment une occlusion des artérioles distales par des emboles plaquettaires partis de la plaque instable. La nouvelle classification des syndromes coronariens aigus (Eur Heart J 2000 ; 21 : 1502-13) conduit à distinguer l’infarctus sans sus-décalage persistant de ST (ancien infarctus sans onde Q) lorsqu’il existe une élévation de la troponine, et l’angor instable lorsqu’il n’y a pas d’élévation des marqueurs de nécrose myocardique. Les SCA sans ¤ ST sont environ deux fois plus fréquents que l’infarctus du myocarde aigu (sus-décalage du segment ST). C’est ce qu’a montré le registre prospectif GRACE (Eur Heart J 2002 ; 23 : 1177-89 et Am J Cardiol 2002 ; 90 : 358-63), dans lequel l’angor instable représente 38 % des cas, l’infarctus sans ¤ ST 25 % et l’infarctus avec ¤ ST 30 % (diagnostic de SCA non confirmé chez les 7 % restants). Les SCA sans ¤ ST réunissent plusieurs tableaux cliniques qui n’ont pas la même signification pronostique. - Il peut s’agir d’un angor spontané, d’un angor d’effort accéléré, d’un angor d’effort de novo ou d’un angor postinfarctus. - Après stratification du risque, le traitement antithrombotique et, le plus souvent, la revascularisation myocardique permettent d’éviter l’évolution vers l’infarctus transmural ou la mort subite chez plus de 90 % des patients.   Stratification du risque Réalisée dans les 24 heures suivant l’admission, elle permet de choisir entre une stratégie invasive précoce et une stratégie conservatrice. La stratégie invasive consiste à faire une coronarographie dès les premiers jours de l’épisode aigu, suivie d’une revascularisation (angioplastie ou pontage) chaque fois qu’elle est anatomiquement possible. La stratégie conservatrice consiste à ne réaliser une coronarographie et une revascularisation qu’en cas de récidive ischémique spontanée malgré un traitement bien conduit ou de mise en évidence d’une ischémie résiduelle lors d’un test de provocation réalisé en fin d’hospitalisation ou après la sortie du patient. La stratification du risque se fait sur des paramètres cliniques, électrocardiographiques, biologiques et échocardiographiques. Les paramètres, témoins d’une possible évolution défavorable, sont : - sur le plan clinique : l’angor de repos, le caractère répétitif et récent des épisodes angineux, la réponse incomplète au traitement médical, l’âge avancé, la fréquence cardiaque accélérée, la pression artérielle basse et l’insuffisance cardiaque ; - sur l’électrocardiogramme : le sous-décalage du segment ST à l’admission, mais aussi les épisodes silencieux et transitoires de sous- ou sus-décalage de ST. - sur le plan biologique : l’élévation même minime de la troponine contrôlée sur 2 examens à 6 heures d’intervalle. - sur l’échocardiogramme : l’existence d’une dysfonction systolique ventriculaire gauche. Des scores de risque, simples et fiables, ont pu être individualisés. - Il en est ainsi du score de risque TIMI (JAMA 2000 ; 284 : 835-42) qui attribue 1 point à chacune des 7 variables suivantes : âge ≥ 65 ans, présence d’au moins 3 facteurs de risque de maladie coronaire, sténose coronaire déjà connue, sous-décalage du segment ST sur l’ECG initial, présence d’au moins deux épisodes angineux dans les 24 heures précédentes, prise d’aspirine dans les 7 jours précédents et élévation des marqueurs biologiques de nécrose myocardique. - Ce score établi à partir de l’étude TIMI 11B (Circulation 1999 ; 100 : 1593-601), puis validé dans plusieurs grandes études, montre que le risque de survenue à 14 jours d’un décès, réinfarctus ou récidive d’ischémie sévère est de 4,7 % pour un score de 0 ou 1 point, 8,3 % pour 2 points, 13,2 % pour 3 points, 19,9 % pour 4 points, 26,2 % pour 5 points et 40,9 % pour 6 ou 7 points.   Stratégie invasive précoce vs stratégie conservatrice Les progrès de l’angioplastie ont permis de démontrer la supériorité de la stratégie invasive précoce chez les patients à risque élevé ou intermédiaire. Les premières études, réalisées avant l’ère des stents et des anti-GPIIb/IIIa, n’avaient cependant pas été concluantes. C’était le cas de l’étude TIMI IIIB (Circulation 1994 ; 89 : 1545-56) et de l’étude VANQWISH (N Engl J Med 1998 ; 338 : 1785-92), dans lesquelles la stratégie invasive systématique avait un effet neutre, voire délétère. Trois grandes études récentes ont définitivement prouvé l’intérêt de la revascularisation chez les patients à risque. - Dans l’étude FRISC II (Lancet 1999 ; 354 : 708-15 et Lancet 2000 ; 356 : 9-16), qui a inclus 2 457 patients âgés de ≤ 75 ans, la stratégie invasive a diminué au 6e mois le taux de décès ou infarctus (9,4 vs 12,1 % ; p = 0,031), l’incidence de l’angor (22 vs 39 % ; p < 0,001), les réhospitalisations (31 vs 49 % ; p < 0,001) et les revascularisations tardives (5,6 vs 23,0 % ; p < 0,001). Le résultat bénéfique était encore plus marqué à un an (Lancet 2000 ; 356 : 9-16), avec une réduction significative de la mortalité (2,2 vs 3,9 % ; p = 0,016) et des infarctus (8,6 vs 11,6 % ; p = 0,015). Malgré un taux plus élevé d’hémorragies sévères (1,6 vs 0,7 %), la stratégie invasive n’a pas augmenté l’incidence des AVC et des hémorragies intracrâniennes. - Dans l’étude TACTICS-TIMI 18 (N Engl J Med 2001 ; 344 : 1879-87) qui a inclus 2 220 patients âgés de 62 ans en moyenne, tous traités par un anti-GPIIb/IIIa, la stratégie invasive, comparée à la stratégie conservatrice, a diminué significativement le taux combiné de décès, infarctus ou réhospitalisations pour SCA dans les 6 mois (15,9 vs 19,4 % ; p = 0,025), la différence ayant porté surtout sur les récidives d’infarctus (4,8 vs 6,9 % ; p = 0,029). La stratégie invasive n’a pas modifié l’incidence des AVC ni celle des hémorragies majeures. - Dans l’étude RITA 3 (Lancet 2002 ; 360 : 743-51), menée chez 1 810 patients d’âge moyen 62 ans, la stratégie invasive a diminué significativement le taux de décès, infarctus ou angors réfractaires à 4 mois (9,6 vs 14,5 %), la différence étant principalement liée à une réduction de moitié des angors réfractaires. En pratique, certains paramètres doivent conduire à une stratégie invasive précoce. Pour les sociétés savantes européennes (Eur Heart J 2002 ; 23 : 1809-40) et américaines (J Am Coll Cardiol 2002 ; 40 : 1366-74 et Circulation 2002 ; 106 : 1893-1900), ces paramètres sont : - sous-décalage du segment ST à l’admission ; - angor récidivant ou modification dynamique du segment ST ; - angor instable précoce après un infarctus ; - élévation de la troponine ; - instabilité hémodynamique ; - trouble du rythme ventriculaire malin ; - diabète ; - ECG ne permettant pas d’évaluer les modifications du segment ST ; - angioplastie coronaire dans les 6 mois précédents ; - antécédent de pontage aorto-coronaire ; - altération de la fonction ventriculaire systolique (fraction d’éjection < 40 %). Une stratégie conservatrice peut être proposée chez les patients à faible risque (score TIMI 0-2) qui représentent environ un quart des SCA sans ¤ ST. C’est ce qu’ont montré les études FRISC II (Lancet 1999 ; 354 : 708-15 et Lancet 2000 ; 356 : 9-16) et TACTICS-TIMI 18 (N Engl J Med 2001 ; 344 : 1879-87), dans lesquelles la stratégie invasive n’a pas modifié l’incidence des décès ou infarctus. Elle a cependant été plus efficace sur la prévention des récidives angineuses.   Traitement antithrombotique Que la stratégie choisie soit invasive ou conservatrice, le traitement antithrombotique débuté le plus tôt possible a une place essentielle dans la thérapeutique des SCA sans ¤ de ST.   Aspirine L’aspirine diminue de moitié le risque d’évolution vers l’infarctus et la mortalité d’origine cardiaque. - Telle est la conclusion de 4 études contrôlées vs placebo : celle de la Veterans Administration (N Engl J Med 1983 ; 309 : 396-403) qui a inclus 1 266 patients, le Canadian Multicenter Trial (N Engl J Med 1985 ; 313 : 1369-75) mené chez 555 patients, l’étude de Théroux (N Engl J Med 1988 ; 319 : 1105-11) conduite chez 479 patients, et l’étude RISC (Lancet 1990 ; 336 : 827-30 et J Am. Coll Cardiol 1991 ; 18 : 1587-93) qui a porté sur 796 patients. - La métaanalyse de ces 4 études (J Am Coll Cardiol 2000 ; 36 : 970-1062) montre que l’aspirine diminue de façon très significative le risque de décès ou infarctus dans un délai variant de 5 jours à 2 ans selon les études (6,4 vs 12,5 % ; p = 0,0005). Une posologie faible d’aspirine (75-160 mg/j) est aussi efficace que les posologies supérieures, lesquelles augmentent l’incidence des troubles gastro-intestinaux. - Dans l’étude RISC (Lancet 1990 ; 336 : 827-30), l’aspirine 75 mg/j a diminué, par rapport au placebo, le risque combiné de décès et infarctus de 57 % au 5e jour, 69 % au 30e jour, 64 % au 3e mois et 48 % à un an. Ces résultats sont au moins équivalents à ceux obtenus avec des posologies plus fortes (325 à 1 300 mg/j) dans d’autres études. - Cependant, afin d’obtenir un effet rapide de l’aspirine, une dose de charge initiale de 250-500 mg est recommandée.   Clopidogrel Parmi les thiénopyridines, le clopidogrel a détrôné la ticlopidine en raison d’une meilleure tolérance hématologique et d’une efficacité comparable. Le clopidogrel, débuté dès le 1er jour en dose de charge (300 mg) et poursuivi pendant 9 mois (75 mg/j), diminue les complications ischémiques majeures, indépendamment de la sévérité du SCA et de la réalisation ou non d’une angioplastie coronaire. - Telle est la conclusion de l’étude CURE (N Engl J Med 2001 ; 345 : 494-502) menée chez 12 562 patients traités par aspirine, dans laquelle le clopidogrel, comparé au placebo, a diminué significativement de 20 % le taux combiné de décès cardio-vasculaires, infarctus non mortels ou AVC avec un recul moyen de 9 mois (9,3 vs 11,4 % ; p < 0,001), l’effet le plus marqué ayant porté sur la prévention des infarctus. - L’effet bénéfique du clopidogrel s’est manifesté dès les toutes premières heures et la diminution relative du risque vasculaire a été comparable durant les 30 premiers jours et entre le 30e jour et la fin de l’étude, ce qui suggère l’intérêt de poursuivre ce traitement pendant plusieurs mois. Dans le cadre d’une stratégie invasive, le clopidogrel, débuté plusieurs jours avant l’angioplastie, associé à l’aspirine et poursuivi pendant 9 mois, diminue les événements cardio-vasculaires majeurs par rapport à un traitement de 4 semaines débuté le jour de la procédure. C’est ce qu’a montré l’étude PCI-CURE (Lancet 2001 ; 358 : 527-33) qui a porté sur les 2 658 patients de l’étude CURE dilatés dans un délai médian de 10 jours après la randomisation initiale entre clopidogrel et placebo. À l’issue du 1er mois, le clopidogrel, administré précocement avec une dose de charge initiale, a réduit significativement le taux de décès cardio-vasculaires ou infarctus (2,9 vs 4,4 % ; p = 0,04) et sa poursuite au-delà du 1er mois après angioplastie a diminué l’incidence des mêmes événements avec un recul moyen de 8 mois (6,0 vs 8,0 % ; p = 0,047). Il est recommandé d’administrer la dose de charge de clopidogrel au moins 6 heures avant la réalisation d’une angioplastie. - Telle est la conclusion de l’étude CREDO (JAMA 2002 ; 288 : 2411-20) qui n’était pas dédiée spécifiquement aux SCA et qui a comparé, chez 2 116 patients, le protocole standard de clopidogrel (75 mg/j débuté immédiatement après l’angioplastie et poursuivi 28 jours) à un prétraitement basé sur une dose de charge de 300 mg donnée 3 à 24 heures avant la procédure, le clopidogrel étant par ailleurs poursuivi à la dose de 75 mg/j pendant un an. - Au 28e jour, le prétraitement par clopidogrel a diminué significativement de 38,6 % le risque combiné de décès, infarctus ou nouvelle revascularisation urgente, uniquement lorsque la dose de charge était administrée au moins 6 heures avant l’angioplastie. - En outre, le traitement prolongé, comparé au traitement de 28 jours, a diminué le risque combiné de décès, infarctus ou AVC de 26,9 % (p = 0,02) à un an. En raison d’un risque hémorragique accru, il est recommandé de lui associer une dose d’aspirine ≤ 100 mg et d’interrompre le clopidogrel au moins 5 jours avant une chirurgie coronarienne programmée. - Si, dans l’étude CURE, les hémorragies majeures ont été plus fréquentes sous clopidogrel que sous placebo (3,7 vs 2,7 % ; p = 0,001), il n’y a pas eu de majoration significative des hémorragies potentiellement mortelles ni des hémorragies intracrâniennes et une dose d’aspirine ≤ 100 mg/j n’a pas augmenté le risque hémorragique (Circulation 2003 ; 108 : 1682-7). - Dans la même étude, les complications hémorragiques lors de la réalisation d’un pontage aorto-coronaire étaient plus fréquentes (9,6 vs 6,3 % sous placebo ; p = 0,06), uniquement lorsque le clopidogrel était arrêté moins de 5 jours avant la chirurgie.   Héparine L’héparine non fractionnée est efficace, surtout lorsqu’elle est associée à l’aspirine. - Telle est la conclusion de la méta-analyse de Oler (JAMA 1996 ; 276 : 811-5) qui a porté sur 6 essais regroupant 1 356 patients. Par rapport à l’aspirine utilisée seule, l’association héparine-aspirine a diminué de 33 % le risque d’infarctus ou de décès pendant la période de randomisation, au prix d’un risque hémorragique accru. - On a reproché à l’héparine la fréquente réapparition du syndrome clinique à l’arrêt de la perfusion, mais ce phénomène de rebond ne paraît réel qu’en l’absence de traitement concomitant par l’aspirine. Les HBPM peuvent remplacer l’héparine non fractionnée et l’énoxaparine devrait lui être préférée dans la plupart des cas. C’est ce qu’ont montré les études FRISC, FRIC, FRAXIS, ESSENCE et TIMI 11B : - dans l’étude FRISC (Lancet 1996 ; 347 : 561-8), qui a inclus 1 506 pa-tients recevant de l’aspirine 75 mg/j, la daltéparine s’est montrée supérieure au placebo en diminuant significativement pendant les 6 premiers jours le taux d’infarctus ou de décès (1,8 vs 4,8 % ; p = 0,001), le bénéfice absolu se maintenant au 40e jour ; - l’étude FRIC (Circulation 1997 ; 96 : 61-8), menée chez 1 482 pa-tients, et l’étude FRAXIS (Eur Heart J 1999 : 20 : 1553-62), qui a inclus 3 468 patients, ont montré que la daltéparine et la nadroparine donnaient des résultats équivalents à ceux de l’héparine non fractionnée ; - seule l’énoxaparine a montré une supériorité par rapport à l’héparine non fractionnée dans l’étude ESSENCE (N Engl J Med 1997 ; 337 : 447-52) et dans l’étude TIMI 11B (Circulation 1999 ; 100 : 1593-601). La métaanalyse d’Antman (Circulation 1999 ; 100 : 1602-8), qui a porté sur ces 2 essais réunissant au total 7 081 patients, montre que l’énoxaparine, comparée à l’HNF, diminue significativement l’incidence des décès ou infarctus au 8e jour (4,1 vs 5,3 % ; p = 0,02), au 14e jour (5,2 vs 6,5 % ; p = 0,02) et au 43e jour (7,1 vs 8,6 % ; p = 0,02), sans augmenter le risque d’hémorragies majeures. La prolongation du traitement par HBPM au-delà de l’hospitalisation ne semble pas apporter un bénéfice supplémentaire. C’est ce qu’ont montré les études TIMI 11B et FRISC II (Lancet 1999 ; 354 : 701-7 et Lancet 1999 ; 354 : 708-15) ainsi que la métaanalyse d’Eikelboom (Lancet 2000 ; 255 : 1936-42) qui a porté sur 5 essais totalisant 12 099 patients, le traitement prolongé augmentant significativement le risque hémorragique majeur. Antagonistes des récepteurs GPIIb/IIIa Il est recommandé d’associer un anti-GPIIb/IIIa à l’aspirine et à l’héparine chaque fois qu’une angioplastie est envisagée et, à un moindre degré, chez les patients traités de façon conservatrice mais à haut risque thrombotique. - Telle est la conclusion de 6 gran-des études et des métaanalyses de Roffi (Eur Heart J 2002 ; 23 : 1441-8) et de Boersma (Lancet 2002 ; 359 : 189-98). - Ces études ont évalué l’eptifibatide chez 10 948 patients (étude PURSUIT), le tirofiban chez 5 147 patients (études PRISM et PRISM PLUS), l’abciximab chez 7 800 pa-tients (étude GUSTO IV-ACS) et le lamifiban chez 7 507 patients (études PARAGON A et B). - La métaanalyse de Roffi permet de conclure que : • globalement, les anti-GPIIb/IIIa ont un effet favorable significatif mais modéré sur la prévention des événements ischémiques avec 8 décès ou infarctus évités pour 1 000 patients traités ; • le bénéfice devient net en cas d’angioplastie réalisée pendant l’hospitalisation (20 décès ou infarctus évités pour 1 000 patients traités), surtout lorsque la perfusion d’anti-GPIIb/IIIa précède l’angioplastie (31 événements évités pour 1 000 patients traités) ; • le bénéfice est modeste et non significatif en l’absence d’angioplastie, avec 4 événements évités pour 1 000 patients traités. Le bénéfice des anti-GPIIb/IIIa dépend du degré de risque établi lors de la stratification initiale et est particulièrement important chez les diabétiques. - Dans la métaanalyse de Boersma, l’anti-GPIIb/IIIa ne diminue le taux de décès ou infarctus à 30 jours que lorsqu’il y a élévation de la troponine. - Dans la métaanalyse de Roffi, le bénéfice est particulièrement net chez les diabétiques, avec une diminution de 26 % de la mortalité à un mois, atteignant 70 % lorqu’une angioplastie est associée. Les anti-GPIIb/IIIa augmentent le risque hémorragique, sans modifier l’incidence des hémorragies intracrâniennes. C’est ce qu’a montré la métaanalyse de Boersma qui retrouve un excès d’hémorragies majeures (2,4 vs 1,4 % ; p < 0,0001) mais pas d’augmentation des hémorragies intracrâniennes (0,09 vs 0,06 %). Cela justifie de respecter les contre-indications d’ordre hémorragique, qui sont proches de celles de la thrombolyse IV dans l’infarctus aigu du myocarde. Seuls le tirofiban et l’eptifibatide peuvent être utilisés en l’absence d’angioplastie. En effet, l’étude GUSTO IV-ACS (Lancet 2001 ; 357 : 1915-24), qui a évalué l’abciximab chez 7 800 pa-tients sans intention de revascularisation dans les 48 premières heures, a rapporté une surmortalité précoce et un risque hémorragique accru avec ce produit.   Traitement anti-ischémique   Dérivés nitrés Il est recommandé d’utiliser un dérivé nitré en IV, à une posologie initiale faible, et de le relayer rapidement par une forme orale ou transcutanée. En fait, les dérivés nitrés et apparentés n’ont fait l’objet d’aucune étude randomisée vs placebo.   Bêtabloquants Les bêtabloquants diminuent le risque d’évolution vers l’infarctus. - Telle est la conclusion de la méta-analyse de Yusuf (JAMA 1988 ; 260 : 2253-63) qui a porté sur 7 essais regroupant environ 5 000 patients, dans laquelle les bêtabloquants ont diminué significativement de 13 % l’incidence des infarctus (29 vs 32 % ; p = 0,04), sans modifier la mortalité. - En fait, aucun grand essai de morbi-mortalité n’a étudié l’intérêt des bêtabloquants et le bien-fondé de leur utilisation repose sur l’extrapolation des résultats bénéfiques reconnus dans les autres tableaux cliniques de la cardiopathie ischémique.   Inhibiteurs calciques Les inhibiteurs calciques ont globalement un effet neutre sur le pronostic. C’est ce qu’a montré la métaanalyse de Held (BMJ 1989 ; 299 : 1187-92) qui a porté sur 6 essais regroupant 1 100 patients dont la majorité était traitée par nifédipine. Les dihydropyridines doivent être évitées lorsqu’elles ne sont pas associées à un bêtabloquant. - Telle est la conclusion de l’étude HINT (Br Heart J 1986 : 56 : 400-13) dans laquelle la nifédipine à durée d’action brève avait tendance à majorer le risque d’infarctus précoce par rapport au placebo. - Cependant, aucun grand essai n’a évalué les dihydropyridines de 3e génération. Les inhibiteurs calciques bradycardisants peuvent être utilisés en l’absence de dysfonction ventriculaire gauche, lorsque les bêtabloquants sont contre-indiqués. C’est ce qu’ont montré quelques petites études telles l’étude DRS (N Engl J Med 1986 ; 315 : 423-9), qui a évalué le diltiazem, et l’étude DAVIT-II (Am J Cardiol 1997 ; 79 : 738-41) qui a testé le vérapamil.   Angioplastie vs pontage aorto-coronaire Classiquement, le pontage est supérieur à l’angioplastie dans certaines indications : sténose du tronc commun, atteinte tritronculaire, surtout en présence d’une dysfonction ventriculaire gauche ou d’un diabète. - Telle est la conclusion de la méta-analyse de Sim (Am J Cardiol 1995 ; 76 : 1025-9) qui a porté sur 2 943 pa- tients pluritronculaires inclus dans 5 essais et qui a retrouvé une équivalence entre pontage et angioplastie au ballonnet en termes de mortalité et d’infarctus à moyen terme, avec cependant un taux de revascularisations itératives nettement plus élevé après angioplastie. - Dans l’étude BARI (J Am Coll Cardiol 2000 ; 35 : 1122-9) qui a inclus 1 829 patients pluritronculaires dont les deux tiers avaient fait un angor instable, le pontage a amélioré la survie à 7 ans sans infarctus (84,4 vs 80,9 % ; p = 0,04), cette supériorité n’étant retrouvée que chez les diabétiques. Grâce aux progrès de l’angioplastie, la supériorité de la chirurgie chez les pluritronculaires est remise en question. - Des études récentes, telles ARTS (N Engl J Med 2001 ; 344 : 1117-24), menée chez 1 205 patients, ERACI II (J Am Coll Cardiol 2001 ; 37 : 51-8), qui a porté sur 450 patients, et SOS (Lancet 2002 ; 306 : 965-70), qui a inclus 988 patients, ont donné des résultats contradictoires. - Dans l’état actuel de nos connaissances, on peut conclure à l’équivalence entre les deux méthodes sur le plan du pronostic à moyen terme, le coût plus élevé de la chirurgie étant compensé par des revascularisations itératives plus nombreuses après angioplastie en raison du phénomène de resténose, notamment chez le diabétique. De nouvelles études comparatives sont donc nécessaires pour évaluer l’intérêt des stents actifs qui diminuent considérablement le phénomène de resténose.   Autres médicaments   Statines Les statines améliorent le pronostic du coronarien, quel que soit le taux du cholestérol total. - Cela a été largement démontré à travers les études 4S, CARE, LIPID et HPS. Les statines doivent être débutées au cours de l’hospitalisation afin d’accroître le taux de prescription et l’observance du traitement sur le long terme. Une forte dose de statine prescrite dès la phase aiguë pourrait réduire les complications ischémiques précoces et améliorer le pronostic sur le long terme. C’est ce que semblent montrer les études MIRACL et PROVE-IT : - dans l’étude MIRACL (JAMA 2001 ; 285 : 1711-8), qui a inclus 3 086 patients, l’atorvastatine 80 mg/j, débutée 24 à 96 heures après l’admission pour SCA sans ¤ ST, a diminué significativement à la 16e semaine le taux combiné de décès, infarctus, arrêts cardiaques ressuscités ou ischémies myocardiques récurrentes sévères (14,8 vs 17,4 % ; p = 0,048), la différence étant liée uniquement à la réduction des récidives angineuses sévères. La statine a fait baisser le taux moyen de LDL-C de 1,24 g/l à 0,72 g/l et a diminué les marqueurs biologiques de l’inflammation ; - dans l’étude PROVE-IT (Congrès de l’American College of Cardiology 2004), menée chez 4 162 patients admis pour SCA datant de moins de 10 jours et dont le cholestérol total était ≤ 2,4 g/l (LDL-C médian : 1,06 g/l), l’atorvastatine 80 mg/j, vs la pravastatine 40 mg/j, a été plus efficace sur la baisse du LDL-C au 30e jour (0,62 g/l vs 0,95 g/l en valeur médiane) et a diminué significativement, de 16 % à 2 ans, la survenue d’un événement cardio-vasculaire majeur parmi décès, infarctus du myocarde, angor instable sévère, revascularisation au-delà du 30e jour ou AVC (22,4 vs 26,3 % ; p = 0,005), le bénéfice étant apparent dès le 30e jour. Sur le plan de la tolérance, l’atorvastatine 80 mg était associée à une élévation des transaminases hépatiques 3 fois plus importante.   Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine Les IEC doivent faire partie de l’ordonnance de sortie, y compris en l’absence de dysfonction ventriculaire gauche systolique. Bien qu’il n’y ait aucune étude consacrée aux IEC prescrits à la phase aiguë d’un SCA sans ¤ ST, les études HOPE (N Engl J Med 2000 ; 342 : 145-53), menée avec le ramipril, et l’étude EUROPA (Lancet 2003 ; 362 : 782-8), menée avec le perindopril, chez des patients sans insuffisance cardiaque ni dysfonction ventriculaire gauche, ont montré un effet préventif de l’IEC sur la survenue d’un événement cardio-vasculaire majeur sur le long terme.

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