Insuffisance cardiaque
Publié le 27 nov 2007Lecture 3 min
Y a-t-il une place pour les statines dans le traitement de l'insuffisance cardiaque en 2007 ?
C. GRIMARD¹, E. BOIFFARD², F. CHOMETON³, Y. ALLALI4, L. TAFANELLI 5, J.-N. TROCHU² 1. CHU Trousseau, Tours 2. Institut du Thorax, CHU Nantes 3. CHU Brabois, Nancy 4. CHU Pitié Salpétrière, Paris 5 CHU La Timone, Marseille
Les Journées de l'insuffisance cardiaque
Les statines constituent la pierre angulaire de la prévention primaire et secondaire des événements coronariens et du traitement des syndromes coronaires aigus(1). Certains travaux ont aussi démontré des effets inattendus, en termes de puissance et de rapidité d’action, allant au-delà de leurs simples effets hypolipémiants, qui pourraient agir sur les nombreux autres mécanismes physiopathologiques à l’origine de l’insuffisance cardiaque. Cependant, la plupart des patients atteints d’insuffisance cardiaque furent évincés des grands essais cliniques randomisés concernant les statines. Leur sécurité et leur efficacité chez les patients insuffisants cardiaques ne sont pas connues et les résultats des prochaines études randomisées prospectives (CORONA, GISSI HF) sont donc très attendus. Un certain nombre de points doivent être abordés pour mettre en perspective les résultats des prochaines études sur les statines dans l’insuffisance cardiaque.
Profil lipidique des patients insuffisants cardiaques
Certains essais montrent que plus le taux de cholestérol est bas, plus le pronostic des patients insuffisants cardiaques est péjoratif, à la fois en cas de cardiopathie ischémique et de cardiopathie dilatée primitive(2). Malgré cela, on observe dans de petites séries une réduction de la morbi-mortalité chez les patients insuffisants cardiaques traités par statines, qui apparaissent indépendants des effets hypolipémiants. Au-delà des effets préventifs des accidents ischémiques, ces bénéfices pourraient être attribués en partie aux propriétés pléiotropes des statines. Ces effets sont nombreux(3), dominés par leur action sur l’endothélium vasculaire via l’augmentation de la production de NO et la diminution des radicaux libres, de façon synergique avec les composés pharmacologiques utilisés dans le traitement de l’insuffisance cardiaque (IEC en particulier). Les effets stabilisants de la plaque d’athérome sont rattachés à la diminution des LDL oxydés, l’augmentation de la chappe fibreuse et une action anti-inflammatoire locale. Par ailleurs, sur les données expérimentales, l’administration d’une statine diminue le remodelage ventriculaire postinfarctus, module les effets vasoconstricteurs de l’angiotensine et aurait un rôle favorable dans la néphropathie diabétique.
Statines et prévention primaire de l’insuffisance cardiaque
Quatre principaux facteurs de risque sont associés à la survenue d’insuffisance cardiaque, si l’on reprend les données des registres ADHERE, OPTIMIZE-HF, EuroHeart Failure Survey I et II : l’ischémie myocardique, l’hypertension artérielle, la fibrillation auriculaire et le diabète. Nous l’avons vu, concernant la cardiopathie d’origine ischémique, l’administration de statines prévient la survenue des événements ischémiques récurrents, diminue de la taille de l’infarctus chez les patients prétraités. Chez l’homme, les bénéfices, en termes de réduction d’insuffisance cardiaque, dans les syndromes coronaires aigus (PROVE-IT) et l’insuffisance cardiaque chronique (TNT), sont d’autant plus marqués que la dose utilisée est élevée. Chez le sujet hypertendu, il ne semble pas que l’administration d’une statine et diminue le risque de survenue d’insuffisance cardiaque (ASCOTT-LLA). De petites séries observationnelles et rétrospectives montrent que les statines préviendraient le risque de survenue et la récidive de la fibrillation auriculaire. Enfin, les données (rétrospectives) restent contradictoires quant à la prévention par les statines de la survenue d’un diabète chez les patients à risque.
Statines et prévention secondaire de l’insuffisance cardiaque
Dans des études post hoc réalisées à partir de registres, ou de bases de données d’assurance santé ou d’essais randomisés (PRAISE, ELITE 2, 4S) un traitement au long cours par statine est associé à une diminution significative de la mortalité, indépendamment du taux de LDL, de l’étiologie de l’insuffisance cardiaque et du grade NYHA. Leur intérêt dans l’insuffisance cardiaque diastolique n’est suggéré que dans une seule étude de petite taille.
La tolérance des statines et l’absence d’effets négatifs doivent être évoqués. La survenue d’effets secondaires est peu fréquente et le rapport bénéfice/risque semble être en faveur des statines, malgré les associations médicamenteuses nombreuses, les désordres métaboliques ou autres défaillances (insuffisance rénale ou hépatique) parfois associées.
La tolérance des statines et l’absence d’effets négatifs doivent être évoqués.
En conclusion
Les statines pourraient avoir leur place dans le traitement spécifique de l’insuffisance cardiaque : leur utilisation paraît être bénéfique en termes de morbi-mortalité, réduction du nombre d’hospitalisations et récidives d’événements ischémiques, mais aussi quelle que soit la cause de l’insuffisance cardiaque. Cependant, des études sont nécessaires pour valider leur utilisation dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique à grande échelle : les études CORONA et GISSI-HF (utiliant la rosuvastatine) permettront de répondre définitivement à ces interrogations.
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