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Dilemme

Publié le 15 juin 2021Lecture 6 min

TAVI et stimulation cardiaque : qui et quand implanter ?

Romain ESCHALIER et coll.*, Clermont-Ferrand

Le remplacement valvulaire aortique percutané (TAVI) est désormais une procédure mature qui a révolutionné la prise en charge des patients avec rétrécissement aortique (RA) serré symptomatique. Il représente aujourd’hui le gold standard de la prise en charge des RA symptomatiques à risque chirurgical haut et modéré. L’expérience des opérateurs mais aussi les progrès technologiques ont permis une nette diminution des complications des procédures, notamment vasculaires, mais aussi des fuites périprothétiques. Du fait de leur impact en morbi-mortalité, ces complications ont bénéficié en priorité de progrès technologiques (réduction de diamètre des introducteurs, ajout de jupe antifuite, modification de la structure des prothèses, recapture, etc.).

Cependant, ces avancées n’ont eu aucun impact sur la survenue de troubles conductifs de haut grade ou de bloc de branche gauche complet. L'incidence d’implantation d’un stimulateur cardiaque (PM) n’a pas diminué et ces derniers constituent désormais la complication la plus fréquente à court terme(1). L’impact de l’implantation d’un PM est discuté, avec de nombreuses données contradictoires en termes de morbi-mortalité. Il semble cependant délicat de ne pas implanter certains patients présentant des troubles de conduction en post-TAVI. Enfin, la volonté de diminuer les durées d’hospitalisation (afin de réduire les complications), mais aussi la majoration du taux d’implantation de PM entre la sortie et la fin du premier mois post-TAVI, au contraire d’une diminution durant l’hospitalisation, imposent une meilleure identification des patients devant bénéficier d’une implantation et du moment de cette dernière(1). De nombreuses études observationnelles ont permis d’identifier plusieurs facteurs associés à la survenue des troubles de conduction atrioventriculaire. Ces facteurs hétérogènes et peu spécifiques sont dépendants du patient (troubles de conduction préexistants, petite taille de la chambre de chasse, volume et position des calcifications valvulaires), du type de prothèse (force radiale, positionnement dans la chambre de chasse) ou de la procédure (profondeur d’implantation, nécessité d’oversizing, de pré- ou postdilatation)(2). Des consensus d’experts(3) ou des recommandations(1) ont été proposés notamment par la Société américaine de cardiologie. Implantation avant le TAVI ? La question est licite de savoir s’il est nécessaire d’implanter un PM chez certains patients avant le TAVI. Les facteurs anatomiques et procéduraux sont à ce jour encore trop complexes à appréhender pour envisager d’implanter un PM du fait du volume ou de la position des potentielles calcifications par exemple. Les opérateurs tentent d’implanter de plus en plus haut les prothèses de TAVI pour diminuer les troubles de conduction. Cependant, un bloc de branche droit (BBD) ou un bloc atrioventriculaire (BAV) 1 préexistants imposent de s’interroger sur la nécessité d’implanter un PM pré-TAVI. En effet, la survenue de troubles conductifs de haut grade est plus élevée dans ces cas. Cependant, aucune étude ni recommandation n’a mis en évidence cette indication prophylactique en pré-TAVI. L’association d’un allongement du PR à un BBD et un hémi-bloc doit par contre la faire discuter. Dans tous les cas, un bilan par enregistrement en pré-TAVI et une surveillance rythmique prolongée s’imposent après le TAVI. Enfin, le choix du type de valve est important afin de diminuer ce risque. Bien entendu un BAV de haut grade avant TAVI impose l’implantation d’un PM. Une approche multiparamétrique doit permettre dans le futur de mieux identifier les patients devant bénéficier d’un PM prophylactique. Implantation après le TAVI ? BAV de haut grade Hormis quelques situations particulières (ex. survenue d’un BAV transitoire lors du passage du guide dans le ventricule gauche), l’implantation d’un PM est justifiée lors de la survenue d’un BAV de haut grade en post-TAVI. Le délai d’implantation post-TAVI n’est aujourd’hui pas établi. Ce dernier reste dépendant des habitudes et caractéristiques de chaque centre. Cependant, la volonté est d’implanter ces patients le plus rapidement afin de diminuer les risques de complications et de ré-hospitalisations. Deux études récentes françaises dont l’étude multicentrique STIM-TAVI ont mis en évidence que 30 à 50 % des patients ne présentaient plus de BAV de haut grade à 12 mois post-TAVI après implantation d’un PM(4,5). Les facteurs prédictifs de persistance ou de récidive de troubles de conduction de haut grade sont la survenue initiale (jusqu’à J6) d’un BAV de haut grade, l’oversizing de la prothèse et un bloc de branche droit pré-TAVI(5,6). Une nouvelle fois, certains de ces facteurs ne sont pas systématiquement identifiés dans les différentes études. La programmation initiale de modes de stimulation préservant la conduction atrio-ventriculaire est indispensable afin de faciliter une éventuelle récupération de la conduction. BAV du premier degré Un allongement isolé de l’intervalle PR ne semble pas imposer à lui seul une stimulation définitive. En cas d’association avec d’autres anomalies ECG, plusieurs travaux et un consensus d’experts précisent qu’il existe un sur-risque de troubles de conduction de haut grade si persiste un allongement de l’intervalle PR de plus de 20 ms par rapport au pré-TAVI ou un intervalle PR > 240 ms(1,3). La surveillance de l’intervalle PR dans cette population est indispensable, d’autant plus s’il est associé à des troubles de conduction inter- et intraventriculaires. Bloc de branche droit Chez les patients avec TAVI, 13 à 15 % ont un bloc de branche droit (BBD) en pré-procédure(7). Sur le plan physiopathologique, la présence d’un BBD en pré-TAVI expose à un sur-risque de troubles de conduction de haut grade par compression de la branche gauche ou du faisceau de His (figure). Figure. Prothèses de TAVI et relation avec les voies de conduction∗. A : Edwards Sapien ; B : CoreValve Medtronic : nœud atrioventriculaire ; ♮: faisceau de His ; # : branche gauche ; ¶ : branche droite. (Massoullie G, Eschalier R, American Journal of Cardiology 2016) Sans autre anomalie de conduction atrio-ventriculaire ou intra/interventriculaire, une surveillance plus prolongée (au moins 48 h) semble suffisante. Cependant en cas d’apparition d’autres troubles de conduction (allongement PR, hémi-bloc), une surveillance prolongée ou une exploration électrophysiologique est nécessaire. Enfin, comme pour le BBG une surveillance rythmique dans les 15 jours suivant la sortie est conseillée par les recommandations américaines(1,3). Bloc de branche gauche La problématique d’un bloc de branche gauche (BBG) de novo (40 % en post-TAVI) est double : risque de troubles de la conduction de haut grade et de dysfonction ventriculaire gauche (absence de récupération voire aggravation de la fonction ventriculaire gauche post-TAVI)(8-10). Cependant, les données restent contradictoires devant l’absence d’études fiables sur le suivi de ces patients. La prise en charge reste donc débattue et dépend notamment de la largeur du QRS (> 150 ms) et de l’allongement de l’intervalle PR (> 240 ms). Ces deux paramètres sont clairement associés à un sur-risque de troubles de la conduction de haut grade. QRS fins et PR normal Les patients avec QRS fins et PR normal en pré-TAVI sans modification en post-TAVI peuvent bénéficier d’une sortie rapide. Conclusion ▫ La problématique des troubles de la conduction post-TAVI et de l’implantation éventuelle d’un stimulateur reste entière et complexe. ▫ L’accumulation de données et d’études randomisées permettra de concevoir des arbres décisionnels clairs et simples, d’autant que le nombre de procédures va augmenter et concerner des patients moins âgés que par le passé. * G. MASSOULLIE, P.-A. CATALAN, A. BOUDIAS, F. JEAN, Clermont-Ferrand

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