Publié le 31 mai 2011Lecture 7 min
Comment débuter l’OCT dans son cath-lab
M. ANGIOI, Institut lorrain du cœur et des vaisseaux (ILCV), CHU de Nancy
Développée au début des années 1990, l’imagerie en cohérence optique intracoronaire (OCT) est une technique d’imagerie intravasculaire haute résolution basée sur l’analyse de la réflexion d’un rayonnement lumineux proche de l’infrarouge. Les modalités techniques de réalisation de l’examen et d’acquisition des images ont été considérablement simplifiées, ce qui permet désormais d’envisager son utilisation avec la même facilité qu’une échographie endocoronaire (IVUS).
Matériel et technique d’acquisition
Actuellement, le seul système disponible en France est celui de la société St. Jude Medical. Il s’agit de l’évolution de l’ancien système LightLab®. Le matériel comprend une console (modèle C7XR, figure 1) de visualisation, d’analyse en temps réel et de stockage des données et le consommable, à savoir une sonde d’OCT (Dragonfly™, figure 2) avec une seringue de purge de 3 ml et un manchon stérile. La sonde d’OCT est reliée à la console par une interface dite DOC (Drive-motor and Optic Controller) qui comprend un contrôleur optique et le moteur d’entraînement pour le retrait. La sonde Dragonfly™ est constituée d’un cathéter monorail qui contient la fibre optique. Sa taille est de 3,4 F et est compatible 6 F.
Figure 1. Console OCT C7XR (St Jude Medical).
Figure 2. Sonde Drangonfly™.
La technique d’acquisition est similaire à celle de l’IVUS : il faut placer la sonde en aval de la zone à « imager » et enregistrer une boucle d’images temps réel pendant un retrait motorisé. La différence par rapport à l’IVUS est que l’obtention des images nécessite de ne pas avoir d’hémoglobine dans le vaisseau, car cette dernière entraîne une diffraction de la lumière. Avec les anciens systèmes, cette condition était remplie grâce à l’utilisation d’un ballon d’occlusion coronaire mais rendait le processus beaucoup plus compliqué techniquement et majorait les risques de complications.
Dorénavant, une injection de produit de contraste iodé pendant le retrait a un effet dispersant sur l’hémoglobine et permet d’obtenir des images de qualité identique à celles réalisées avec une occlusion artérielle. L’élément clé est donc devenu la vitesse d’acquisition des images. Avec les anciens modèles, la vitesse d’acquisition était trop lente et la quantité de contraste nécessaire pour imager une longueur utile posait problème. Ceci a été résolu et le système peut acquérir 100 à 200 images/s avec une vitesse de retrait qui varie de 20 à 40 mm/s. Le système est réglé pour acquérir des retraits de 54 mm.
Déroulement de la procédure
Le geste est réalisé sous anticoagulant et antiagrégant. Un guide d’angioplastie de 0,014’’ est positionné en aval de la zone cible. La sonde est compatible 6 F. Avant son introduction, il est conseillé de l’humidifier avec de l’eau héparinée sur une compresse pour activer le revêtement hydrophile, puis il faut la purger avec du contraste par une seringue branchée sur un connecteur latéral.
La sonde est ensuite reliée à la console par le DOC qui a été préalablement enveloppé avec le manchon stérile. La source lumineuse (rouge) apparaît en distalité du cathéter en arrière du marqueur proximal. La sonde doit être étalonnée avant d’être introduite dans le cathéter guide ; il suffit pour cela de la pincer délicatement entre ses doigts au niveau de la source lumineuse.
La sonde est alors montée sur le guide, la partie monorail est très courte et il faut faire attention de ne pas léser la fibre optique avec l’extrémité rigide du guide. Les capacités de franchissement du cathéter sont bonnes et plutôt meilleures que celles des sondes d’IVUS.
Une fois en place, la sonde est purgée avec du produit de contraste ce qui est aisément vérifié sur la console. La synchronisation de l’injection de produit de contraste avec le retrait peut se faire automatiquement ce qui simplifie la procédure. Il suffit de le paramétrer au niveau de la console. L’arrivée d’iode est détectée directement au niveau du cathéter qui déclenche le retrait.
Avant de commencer, on peut également tester la qualité d’injection et, le cas échéant, repositionner le cathéter guide si le flush n’est pas satisfaisant. L’utilisation d’un injecteur automatique est préférable à une injection manuelle.
Les paramètres d’injection sont : pour la coronaire gauche 14 ml à 4 ou 3,5 ml/s et 12 ml à 3 ml/s pour la droite. La procédure peut être répétée à plusieurs reprises, avant ou après intervention, par exemple.
La console est équipée de deux écrans en vis-à-vis permettant à l’opérateur de visualiser facilement les images et leur traitement en temps réel. Toutes les fonctions habituelles de traitement d’images sont disponibles avec, pour les calculs de surface, une reconnaissance automatique performante des contours. L’écran est divisé en plusieurs zones avec la visualisation simultanée de la vue transversale et de la vue longitudinale des 54 mm de retrait ce qui permet de repérer les zones d’intérêts et d’y accéder rapidement. La qualité d’image pouvant se dégrader en fin d’injection, il faut bien centrer la zone d’intérêt principale pour ne pas avoir à répéter inutilement les acquisitions. Il faut également éviter d’imager les segments proches des ostia.
Sur le plan organisationnel, en plus des opérateurs à la table, il faut prévoir un autre médecin ou du personnel paramédical entraîné à la manipulation de la console afin d’obtenir, en temps réel, les informations quantitatives utiles au déroulement d’une procédure interventionnelle.
Formation des médecins et des paramédicaux
La mise en œuvre du système et l’utilisation de la sonde ne posent pas de problème technique particulier surtout si le centre est déjà familiarisé avec les autres techniques endocoronaires (FFR, Doppler, IVUS). L’interprétation de l’examen est facilitée par la précision des images. En revanche, la sémiologie de l’OCT est différente de celle de l’IVUS et les opérateurs doivent y être formés.
Pour s’initier à l’imagerie OCT, plusieurs solutions sont disponibles. Il existe un site dédié (http://www.teachoct.com/) avec des présentations commentées, des cas cliniques et une banque d’images téléchargeables. Ce site permet d’avoir une bonne idée des applications de l’OCT avec, en particulier, les indications par rapport à l’IVUS, les bases d’interprétation des images et les pièges à éviter. Une autre solution, à mon sens indispensable, est de passer une journée avec une équipe expérimentée. Comme cela avait été fait pour l’IVUS, des sessions de formation sur site seront bientôt organisées en partenariat avec St Jude Medical.
La place de l’OCT dans le cath-lab et sa position par rapport aux autres techniques ?
Tout comme l’IVUS, l’OCT ne donne que des informations anatomiques et ne concurrence pas les évaluations fonctionnelles, en particulier la FFR. Son point fort par rapport à l’IVUS est la résolution spatiale qui permet d’obtenir des images d’une très haute précision (10 à 15 vs 150 microns en axial et 40 à 90 vs 250 microns en latéral).
Le relatif point faible est la pénétration tissulaire qui est de 3,5 mm au maximum contre 7 mm en IVUS. Les applications de l’OCT sont la conséquence de ces caractéristiques techniques qui permettent d’accéder à des paramètres qui n’étaient pas évaluables en IVUS.
Parmi les principales applications on peut retenir :
- la caractérisation des plaques avec l’identification des lésions coupables dans les syndromes coronaires aigus ;
- l’étude de la vulnérabilité des lésions (mesure de l’épaisseur de la chape fibreuse) ;
- l’évaluation des stents à tous les stades, de leur apposition à l’étude de la néoformation intimale lors de la cicatrisation du vaisseau (figures 3 et 4).
Parmi les limites on peut citer, en particulier, l’étude du remodelage en raison de la relativement faible pénétration tissulaire et l’évaluation des lésions ostiales.
Figure 3. Dissection en sortie de stent.
Figure 4. Mallaposition de stent.
Conclusion
L’OCT est à ce jour l’imagerie intravasculaire la plus précise à notre disposition.
La simplification du processus d’acquisition des images va très certainement entraîner un remplacement de l’IVUS par l’OCT dans des indications ciblées.
Néanmoins, son utilité en pratique courante, en dehors de toute considération financière, reste à évaluer.
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