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Training

Publié le 31 mai 2010Lecture 9 min

Comment je recanalise les occlusions iliaques

J.-M. PERNES, Pôle cardiovasculaire interventionnel, Hôpital Privé d’Antony

Autant il est devenu quasi impossible pour un interventionnel « normalement constitué » de ne pas franchir une sténose iliaque avec les matériels ad hoc, autant le franchissement de l’occlusion demeure, même pour des mains expérimentées, un relatif défi technique. Celui est malgré tout réussi dans environ 90 % des cas au prix d’un risque de complications graves (rupture dans < 2 %) un peu plus élevé, accessibles dans la plupart des cas à une prise en charge efficace par voie endovasculaire.  

Deuxième partie   La difficulté technique majeure est bien sûr le franchissement de l’occlusion par le guide et le retour dans la lumière perméable d’aval.  L’occlusion peut être localisée sur l’origine de l’iliaque primitive Dans ce cas, l’occlusion présente une réentrée qui se fait habituellement en regard de l’hypogastrique restée perméable (et qu’il va falloir sauvegarder ; lésion de type B relevant de l’angioplastie), parfois au niveau distal sur la fémorale commune en regard de la bifurcation (lésion de type D ; sanction chirurgicale). Il persiste le plus souvent un court moignon perméable proximal, mais parfois celui-ci est absent traduisant l’extension du processus athéromateux obstructif dans la terminaison aortique, élément qui complique la recanalisation au guide et modifie la stratégie technique de stenting. L’occlusion peut intéresser l’origine de l’iliaque interne Si l’occlusion respecte la bifurcation fémorale (la réentrée se faisant en amont, généralement en regard de l’artère circonflexe iliaque superficielle), c’est une lésion de type B. Le plus souvent un court moignon proximal demeure perméable, bien « dégagé » sur une incidence radiologique oblique (OAD pour la bifurcation gauche et OAG pour la droite). Sa présence facilite la recanalisation mais ne change pas la stratégie secondaire.  La technique de recanalisation n’est pas fondamentalement différente dans les divers cas de figures relatés plus haut.  Là encore, l’abord artériel se fait par voie controlatérale (désilet 4 F) suivi d’une ou plusieurs injections dans l’aorte interrénale via une pigtail 4 F pour l’analyse descriptive de l’occlusion (localisation, longueur, diamètre, moignon, etc.). Le raisonnement est identique à celui développé pour les sténoses iliaques (Cath’Lab 9).  Autre élément primordial : la recanalisation antérograde par voie controlatérale au guide est plus aisée, c’est-à-dire qu’elle s’accompagne d’un taux de succès nettement supérieur qu’avec l’abord homolatéral rétrograde.    Voici trois cas de figure individualisables explicites     1 - Occlusion iliaque primitive avec moignon proximal  Lorsqu’il est présent, il est toujours court de l’ordre du centimètre.  Le principe de départ est de positionner dans l’ostium perméable de l’iliaque, l’extrémité d’un cathéter suffisamment rigide permettant de manipuler avec un appui stable le guide qui va forer l’obstruction dans son versant transluminal de première intention (et non sous-intimal intentionnel comme cela peut être privilégié dans certaines indications, voire en cas d’échec de la recanalisation transluminale).  Celle-ci est recherchée (et le plus souvent obtenue) par la manipulation conjointe :  - d’un cathéter 4 F type Reuter (sorte d’Amplatz plus fermé ou de Sidewinder pour les plus aguerris au matériel périphérique, distribué par Merit Medical), remarquablement rigide. On positionne l’extrémité dans le moignon, orientée dans l’axe supposé de l’artère ;  - d’un guide hydrophile Terumo droit (0,035) que l’on tente de pousser au-delà de l’occlusion.  Dans la majorité des cas, on parvient à retrouver la vraie lumière plus distale, condition sine qua none à la poursuite de la procédure ; en cas d’échec (le guide ne descend pas), on choisit un guide hydrophile Terumo 0,035 type STIFF plus rigide, plus efficace… mais plus dangereux !  L’apport, conceptuellement intéressant des guides 0,014 ou 0,018 dédiés aux occlusions coronaires chroniques s’avère assez peu contributif en pratique et l’expérience manque pour juger de la valeur de leur contribution, la problématique ici étant relativement différente de celle des CTO coronaires. En cas d’échec persistant, une tentative par voie homolatérale ou par voie haute radiale peut être proposée.  Dans l’hypothèse, heureusement la plus classique, où le guide quel qu’il soit, a retrouvé la vraie lumière distale, la procédure se poursuit de la façon suivante : – un cathéter 4 F type Davies ou Vertebral franchit l’occlusion sur le guide hydrophile qui est substitué pour un guide téfloné rigide (type Rosen Heavy Duty Cook 0,035, Amplatz Boston) sur lequel un désilet 6 F Balkin up est manipulé jusqu’en aval de l’occlusion ;  - un stent autoexpansif au nitinol (Medtronic) est ensuite déposé d’emblée, toujours par voie controlatérale, sans prédilatation dans l’optique de piéger la fragmentation du matériel athérothrombotique plus ou moins « organisé » et de réduire le risque de migration distale, mais également semble-t-il celui de rupture artérielle qui s’observe surtout en cas de dilatation initiale au ballon sur des artères massivement calcifiées ;  - une longueur généralement suffisante du moignon autorise le positionnement correct de l’endoprothèse dont les dimensions sont adaptées aux caractéristiques de l’occlusion et qui est secondairement élargie à l’aide d’un ballon précautionneusement inflaté (le choix du modèle de stent reste en adéquation avec les habitudes de l’opérateur, dans la mesure où aucun d’entre eux ne semble présenter une supériorité évidente) (figure 1 : A à G).    Figure 1 : A. Figure 1 : B. Figure 1 : C. Figure 1 : D. Figure 1 : E. Figure 1 : F. Figure 1 : G. 2 - Occlusion iliaque primitive sans moignon proximal La recanalisation au guide est un peu plus délicate, mais suit les mêmes principes que ceux édictés dans la situation précédente.  Une fois cette étape réglée, principalement par voie antérograde controlatérale, subsiste le problème de la couverture de l’ostium de l’iliaque dont l’oblitération témoigne avec certitude de l’extension plus ou moins diffuse du bourgeon athéromateux dans la bifurcation. Le principe d’optimisation du traitement est ici de reconstruire une sorte de néobifurcation aortique en « fixant » chacune des deux iliaques primitives par un stent, celle pathologique qui vient d’être recanalisée, et l’autre, a priori saine ou parfois également lésée sous la forme d’une sténose plus ou moins serrée (on peut faire l’analogie avec l’occlusion ostiale de l’IVA qui impose toujours de « s’occuper » aussi du tronc distal et de l’origine de la circonflexe.    À ce stade la ponction fémorale homolatérale à l’occlusion qui vient d’être recanalisée et l’installation d’un désilet 4 F s’imposent : en effet l’occlusion a été franchie par voie controlatérale, le guide a traversé la bifurcation aortique et sa partie distale se situe maintenant dans l’iliaque externe ou la fémorale commune (voire encore en dessous) homolatérale à l’occlusion. Deux options techniques sont maintenant possibles : La plus simple est d’espérer que la recanalisation et la « dottérisation » par un cathéter auront rouvert un chenal, qui pourrait alors être traversé plus ou moins aisément par un guide 0,035 en parallèle à partir du désilet homolatéral qui vient d’être installé. Il suffit alors de retirer l’autre guide (le premier placé en controlatéral) puis de le repousser dans l’aorte : on a maintenant deux guides hydrophiles rétrogrades dans la lumière artérielle et plus rien de désagréable ne peut arriver… L’autre solution lorsqu’on ne parvient toujours pas à franchir l’occlusion par l’abord homolatéral est de transformer le cathétérisme antérograde controlatéral en cathétérisme rétrograde homolatéral grâce au célèbre coup du sombrero, métaphore sportive cette fois popularisée par le génial Platini, auteur d’un but somptueux avec la Juventus à la suite de cette prouesse technique ! (figure 2).  Figure 2 : Le coup du sombrero.  Je m’explique : le ballon, en fait le guide, passe d’arrière en avant par une subtile manoeuvre (figure 3) : pour cela il faut le récupérer dans le désilet homolatéral – en visant bien on essaye de le faire rentrer dans la lumière du désilet homolatéral (c’est un peu la loterie) – ou plus simplement on l’attrape par un système de lasso et on le tire à l’extérieur au travers du désilet. Il suffit alors de tirer dessus jusqu’à ce que son extrémité proximale se rectifie dans l’aorte terminale et de le repousser ensuite dans celle-ci : le tour est joué ! Il faut encore replacer un nouveau guide du côté controlatéral pour disposer de deux accès artériels.    Figure 3. Pendant de nombreuses années, la reconstruction de la bifurcation aortique a été obtenue par la mise en place en canon de fusil de 2 stents autoexpansifs en nitinol positionnés en parallèle avec leur extrémité supérieure remontant environ de 2 à 3 cm dans l’aorte terminale. Il semble que, du fait de phénomènes rhéologiques complexes engendrés par ce montage, un taux important de récurrence anatomique et clinique soit observé. Comme d’autres opérateurs, je privilégie maintenant le dépôt direct et simultané via deux désilets 7 F long 23 cm (Cordis) placés dans l’aorte distale et 2 stents Ballon expandables couverts de PTFE selon la technique de kissing (Atrium : modèle compatible 7 F jusqu’à 9 mm de diamètre) (figure 4 : A à E).    Figure 4 : A. Figure 4 : B. Figure 4 : C. Figure 4 : D. Figure 4 : E. 3 - Occlusion iliaque externe  La présence d’une iliaque primitive sus-jacente perméable permet généralement la mise en place par voie controlatérale d’un désilet 6 F Balkin up placé juste au-dessus de l’occlusion.  On place alors en regard de l’origine de l’occlusion (la persistance d’un moignon résiduel favorisant bien sur la manoeuvre), un ensemble cathéter 4 F préformé type Davies ou Vertebral et un guide hydrophile 0,035 J ou droit pour obtenir la recanalisation. Une fois cette phase réussie, l’étape suivante est le placement d’une endoprothèse autoexpansive recouverte de nitinol secondairement correctement ouverte par l’inflation d’un ballon.   L’iliaque et l’odyssée La vulgarisation de pratiques endovasculaires dans le domaine périphérique au sein de la confrérie des cardiologues interventionnels est parfaitement justifiable dès lors que l’on considère que ses aficionados dominent, de par leur expérience en angioplastie coronaire, les diverses manœuvres jalonnant les étapes d’une angioplastie artérielle. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un espace spécifique justifiant des efforts tendus vers la maîtrise des indications et celle d’outils moins familiers. 

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