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C Demain

Publié le 22 déc 2023Lecture 16 min

Point sur les dispositifs actifs pour les fistules artérioveineuses

Nirvana SADAGHIANLOO, Chirurgienne vasculaire et endovasculaire, Centre hospitalier universitaire de Nice, Vice-présidente de la Société francophone de l’abord vasculaire

Les fistules artérioveineuses (FAV) restent le talon d’Achille des malades hémodialysés. Malgré de nombreuses études évaluant diverses configurations d’anastomoses et d’autres attirant l’attention sur la nécessaire expérience des chirurgiens, les données brutes et internationales restent mauvaises, avec près d’une FAV sur deux qui présentera un événement de type sténose au cours de la première année après sa création(1). Puisque la géométrie est un paramètre complexe à maîtriser dans ce montage non physiologique, la mise au point de solutions pharmaceutiques semble une nécessité pour tenter de limiter l’hyperplasie myo-intimale.

Les médicaments (antiagrégants plaquettaires, trinitrine, anticoagulants) ou supplémentation (huile de poisson) par voie systémique n’ont pas montré de bénéfice significatif sur la durée de vie des FAV, mise à part la ticlopidine dont le rapport bénéfice/risque reste à démontrer sur la prévention des thromboses(2). Depuis une quinzaine d’années, nous observons donc le développement de plusieurs dispositifs actifs visant à limiter l’hyperplasie myo-intimale.   L’hyperplasie myo-intimale des FAV   Pour comprendre l’action des substances contre l’hyperplasie myo-intimale, il faut se rappeler de la physiopathologie responsable de l’échec des FAV. Une FAV réussie est la combinaison d’une dilatation du diamètre de la veine et d’un épaississement modéré de sa paroi par hyperplasie myo-intimale : c’est ce que l'on appelle un remodelage positif(3). C’est le déséquilibre entre l’un des deux composants qui conduit à l’échec. L’hyperplasie myo-intimale est la réponse à l’agression de la paroi vasculaire par le stress physique (manipulation instrumentale), hémodynamique (augmentation de la pression artérielle et variations du shear stress) et chimique (hypoxie, modification des signaux moléculaires)(4). Des cellules endothéliales et musculaires lisses sont détruites, avec une mise à nu du sous-endothélium. La mécanotransduction transporte le signal d’agression de la paroi au cœur des cellules. S’en suivent une adhésion puis une activation plaquettaire avec libération de facteurs de croissance cellulaire, de métalloprotéinases et d’activateurs leucocytaires. Les leucocytes ainsi recrutés libèrent des cytokines, des enzymes protéolytiques et d’autres facteurs de croissance cellulaire. L’ensemble entraîne la migration, la différenciation et la prolifération des cellules musculaires lisses au sein de la paroi. Ces cellules se dédifférencient en un phénotype sécrétoire, produisant de la matrice extracellulaire en excès et parfois anormale (fibrose)(3). En fonction de l’équilibre des facteurs en action, le résultat est donc une diminution plus ou moins importante de la lumière du vaisseau. Les dispositifs actifs vont donc cibler différentes étapes de cette cascade dans le but de prévenir l’hyperplasie myo-intimale de novo, ou sa récidive après traitement mécanique.   Prévention de la sténose juxta-anastomotique : les dispositifs périanastomotiques   Des études montrent que jusqu’à 63 % des sténoses concernent le segment juxta-anastomotique de la FAV(5). On peut retenir comme définition de cette zone les 4 ou 5 centimètres de veine (et d’artère) en contiguïté avec l’anastomose. Il s’agit le plus souvent du segment veineux disséqué et mobilisé, et notamment du « swing segment » proximal, zone intermédiaire entre le segment de veine fixe et le segment mobilisé, où traumatismes chirurgicaux et modifications hémodynamiques s’associent pour créer une zone très exposée à l’hyperplasie myo-intimale. Le segment juxta-anastomotique artériel peut également être siège de lésions d’hyperplasie, souvent sur une base athérosclérotique et/ou liée aux clamps(5). Afin d’inhiber la survenue d’une hyperplasie myo-intimale sur ce segment accessible au chirurgien, les chercheurs ont eu l’idée d’appliquer une substance pharmaceutique directement sur les vaisseaux lors de la création de la FAV. Ainsi, le Vascugel® (Pervasis Therapeutics, Inc., Cambridge, États-Unis) était un implant gélatineux comprenant des cellules endothéliales humaines, différenciées, allogéniques, ayant montré en laboratoire une action anti-inflammatoire, et permettant un remodelage positif lorsqu’il est déposé autour d’une anastomose. Cependant, en 2009, Conte et coll. ont publié les résultats d’un essai de phase II/II chez 57 patients (FAV et prothèses de dialyse) à 24 semaines, sans démontrer d’effet positif sur la maturation ou la perméabilité(6). Le vonapanitase (élastase pancréatique de type 1) est un enzyme qui cible la matrice extracellulaire en clivant les liaisons peptidiques des fibres élastiques. Il a été testé contre placebo dans une étude comptant 349 FAV radiocéphaliques (PATENCY 1)(7). Après une application de 10 min d’une solution liquide comprenant cet enzyme, l’étude n’a pas montré de bénéfice sur la maturation ou la perméabilité primaire, mais semblait avoir un effet sur la perméabilité secondaire. L’étude PATENCY 2 portant sur 603 patients n’a pas permis de montrer une quelconque amélioration du devenir des FAV(8). Il n’y a pas d’autres résultats attendus à l’heure actuelle pour ce dispositif. Le paclitaxel est une substance d’origine fongique qui agit sur les microtubules, composants cellulaires essentiels lors des phases de division, et donc traditionnellement utilisé en chimiothérapie anticancéreuse comme antiprolifératif. Formulé par Angiotech pharmaceuticals, un maillage (mesh) imprégné de cette substance, appliqué autour de l’anastomose lors de la création, a été testé lors d’une étude randomisée sur des prothèses de dialyse (2009-2010). Elle a dû être stoppée prématurément à cause d’un taux d’infection de l’abord supérieur dans le bras paclitaxel(9). Le sirolimus (rapamycine) est une substance d’origine bactérienne inhibant l’activité de l’enzyme mTOR (mammalian Target of rapamycin) indispensable à la progression du cycle cellulaire, et classé comme immunosuppresseur sélectif par son action d’inhibition de l’activation lymphocytaire. Le Sirolimus eluting collagen implant (SecI) (Vascular therapies Inc.) utilise cette substance au sein d’une membrane collagène entourant l’anastomose juste après la création. L’étude ACCESS, dont les résultats n’ont pas encore été publiés, semblerait montrer une diminution de la durée sous cathéter (communication orale)(10). Une autre étude de phase III (ACCESS 2) est actuellement en cours de recrutement depuis 2022(11). Enfin, un outsider dans la liste des dispositifs actifs, est la lampe à émission infrarouge (figure 1). Testée depuis de nombreuses années pour inhiber l’hyperplasie intimale, notamment en Asie, la luminothérapie infrarouge aurait des effets à la fois thermiques (vasodilatation) et non thermiques (libération de monoxyde d’azote et d’antioxydants, inhibition des molécules pro-inflammatoires, etc.) sur la paroi des vaisseaux exposés(12). Une métaanalyse parue en 2017 a montré sur un pool de 1 899 patients (luminothérapie contre placebo) une augmentation significative du débit, du diamètre de la veine et de la perméabilité primaire, ainsi qu’une diminution significative du risque de thrombose(13). L’utilisation semble néanmoins contraignante et l’usage ne s’est pas développé dans les pays occidentaux. Figure 1. Exemple de patient porteur d’une FAV sous luminothérapie infrarouge (Illustration tirée de Lin et al. Am J Kidney Dis 2013).   Prévention des resténoses : les ballons actifs   Les sténoses survenant sur la ligne veineuse touchent plus de la moitié des FAV créées(1,5). Qu’elles soient juxta-anastomotiques, sur les zones de ponction ou au niveau de la crosse céphalique, les recommandations préconisent généralement un traitement par angioplastie au ballonnet par voie percutanée en première intention, même si les reprises chirurgicales avec réanastomose peuvent être considérées dans certaines configurations(14). Le problème posé par ce traitement mécanique, c’est-à-dire la dilatation forcée de la veine par un ballonnet placé du côté endothélial, est la reproduction, voire l’aggravation du stress mécanique initial de la FAV, avec les mêmes conséquences : l’induction d’hyperplasie myo-intimale. Ainsi, si cette technique est souvent immédiatement efficace, la perméabilité primaire postangioplastie de ces lésions n’est que de 20-40 % à 6 mois(15), avec certains patients qui doivent retourner au bloc opératoire ou interventionnel plusieurs fois par an à cause de la même lésion. C’est pour prévenir cette récidive liée au geste d’angioplastie que les chercheurs ont testé l’application de substances actives contre l’hyperplasie myo-intimale, cette fois par le versant endoluminal. Contrairement aux applications locales sur le versant adventitiel, qui utilisaient des supports gélatineux pour entourer l’anastomose, le principal support endoluminal permettant les traitements à distance est le ballon, qui est donc appelé ballon actif. Les deux substances actives actuellement utilisées dans cette indication sont le paclitaxel et, plus récemment, le sirolimus.   Préambule : aspects techniques   L’objectif du ballon actif est d’apposer une substance pharmacologiquement active contre l’endothélium du vaisseau cible. Le ballonnet doit donc être de taille appropriée et capable de se gonfler complètement, afin de garantir une interface continue avec une surface maximale. Il est important de noter que les ballons actuels ne sont pas des ballons à haute pression, et donc pas idéaux pour réaliser une angioplastie de bonne qualité sur des lésions sténosantes. Les ballons actifs doivent donc être considérés comme un complément à une angioplastie réussie réalisée avec un matériel adéquat (ballon haute pression et non compliant) : c’est ce que l'on appelle la phase de préparation du vaisseau. Une préparation réussie est souvent définie comme une sténose résiduelle de ≤ 30 % après dilatation. Il n’est pas exclu que des évolutions technologiques futures permettent l’angioplastie efficace et l’administration du médicament dans le même temps. Outre le type de support, actuellement globalement similaire entre les fabricants, le choix de la forme de la molécule et de son transporteur (excipient) sont des aspects techniques essentiels. En effet, c’est la combinaison ballon/excipient/dosage qui fera le succès ou non d’un dispositif actif, car ces facteurs de conception contrôlent le degré de perte et de transfert du médicament, l’adhérence du médicament à la paroi et l’absorption dans les couches sous-jacentes du vaisseau et, enfin, la capacité du ballon actif à inhiber l’hyperplasie myo-intimale(16). Pour illustrer ce point, prenons l’exemple du paclitaxel, qui est actuellement le plus expérimenté dans cette indication. Il s’agit d’une substance polymorphe (amorphe, cristalline ou combinée)(16,17). Ces différentes formes lui confèrent une solubilité, des caractéristiques de transfert et une pharmacocinétique différentes. L’absorption et la rétention de la forme cristalline dans la paroi du vaisseau étant nettement meilleures, elle entraîne une inhibition plus efficace de l’hyperplasie myo-intimale(17). Malgré cette découverte, les premières expériences ont démontré qu’un revêtement de paclitaxel seul sur le ballon n’était pas efficace pour inhiber la resténose, ce qui serait lié à des problèmes de solubilité et de vitesse de libération du médicament. On a rapidement déterminé que la combinaison du paclitaxel avec un excipient comme l'iopromide, l’urée, le polysorbate et le sorbitol, ou le citrate de butyryl trihexyle (BTHC) résolvait ce problème(18). De nombreuses formulations ont été testées (tableau) mais la plus efficace reste néanmoins à déterminer. Pour le sirolimus, l’administration de la substance par la surface d’un ballonnet a représenté un défi technique jusqu’à très récemment, et c’est pour cette raison que les études sont encore très parcellaires. Actuellement, les deux ballons disponibles utilisent un procédé de nano-encapsulation et un excipient amphiphile (figure 2)(19). Figure 2. Dans les nouveaux ballons actifs au sirolimus, les nanoparticules de sirolimus sont enrobées grâce à des phospholipides pour permettre une meilleure délivrance au vaisseau (adaptée de Lemos et al. EuroIntervention 2013 ; 9 : 148-56). A. Schéma des nanoparticules de sirolimus étudiés pour le ballon MagicTouch. B. Étude chez le lapin (artère) de la diffusion du sirolimus (marqué en vert) dans la paroi du vaisseau après inflation du ballon actif, après 1 h, 3 jours et 7 jours. A : adventice ; M : media; L : lumière ; EEL : limitante Élastique externe ; IEL : limitante élastique interne.   Les durées de gonflage typiques sont de l’ordre de 60 à 180 secondes. Bien que des métaanalyses récentes aient également suggéré qu’une durée de gonflage plus longue pouvait améliorer les résultats, il n’est pas certain que ces différences soient réellement liées à la durée de gonflage ou à d’autres facteurs, et des recherches supplémentaires sont nécessaires pour déterminer la durée de gonflage optimale(20). Ces données de durée d’application ne sont pas encore disponibles pour les ballons au sirolimus.   Résultats des ballons au paclitaxel   Deux ballons au paclitaxel se distinguent comme étant les plus étudiés pour le traitement des accès vasculaires. Il s’agit du ballon IN.PACT AV® (Medtronic, Minneapolis, MN, États-Unis) et du Lutonix® (Becton Dickinson, Franklin Lakes, New Jersey, États-Unis). Le ballon IN.PACT AV® utilise un revêtement de paclitaxel cristallin anhydre en combinaison avec de l’urée comme molécule excipient. Le Lutonix® a une densité de dose de paclitaxel plus faible, et utilise une combinaison de polysorbate et de sorbitol comme excipient. L’intérêt du ballon actif au paclitaxel a été montré dès 2004 sur modèle porcin(21), puis dans la prévention de la resténose coronaire(22). Les études suivantes sur la maladie athéromateuse fémoro-poplitée ont montré la supériorité des ballons au paclitaxel comparé au ballon simple(23,24), et ont ouvert la voie aux études sur les accès vasculaires pour hémodialyse. La première étude dans cette indication a été publiée par Katsanos et coll. en 2012(25). Elle a comparé le ballon IN.PACT® à une variété de ballons haute pression dans le traitement des sténoses de la ligne veineuse, à la fois dans les FAV et les prothèses de dialyse. Lors de l’analyse finale à 12 mois parue en 2015, le taux de Target lesion primary patency (TLPP ou perméabilité primaire de la lésion cible) cumulé était de 35 % (groupe actif) contre 5 % (groupe témoin) (p < 0,001)(26). L’analyse par type d’accès a montré une meilleure perméabilité primaire des prothèses de dialyse après le traitement par ballon actif, mais seulement une tendance à l’amélioration pour les FAV. Malgré de nombreux biais et un résultat mitigé, cette étude a ouvert la voie à de nombreux essais cliniques randomisés dans la décennie qui a suivi. Ces études sont cependant marquées par une hétérogénéité importante qui rend l’interprétation des données particulièrement difficile. D’une part, des critères d’inclusions variables : FAV, prothèses de dialyse, sténose de novo ou resténose, bras ou avant-bras, etc., d’autre part, des méthodes procédurales variables : prédilatation ou non, type de ballons (simple, haute pression, etc.), durée d’inflation du ballon actif, prescription ou non d’antiplaquettaires. Sans compter une hétérogénéité du critère d’évaluation principal des études et globalement de petits effectifs. Sur cette base, plusieurs métaanalyses ont conclu qu’il n’y avait pas de preuve d’un effet positif des ballons actifs au paclitaxel sur le taux de TLPP(18). Ainsi, on rapporte ici les résultats des 3 essais contrôlés randomisés multicentriques les plus importants, incluant chacun plus de 200 patients. Parue en 2018, l’étude de Trerotola et coll. a comparé, après préparation du vaisseau, le Lutonix® à un ballon simple, sur un total de 285 patients aux États-Unis(27). Le critère principal était le taux de TLPP à 6 mois. Aucune différence significative n’a été retrouvée entre les groupes : 71 % dans le groupe actif contre 63 % dans le groupe contrôle (p = 0,06). Au total, les résultats à 2 ans n’ont pas pu démontrer de bénéfice sur la perméabilité primaire de la lésion cible ni sur celle de l’accès, mais les critères secondaires ont montré un prolongement de la durée libre entre deux interventions sur la lésion cible, d’environ 4 mois, ce qui n’est pas négligeable pour ces patients(27). La seconde étude internationale portant sur 330 patients, publiée par Lookstein et coll. en 2020, a évalué le ballon IN.PACT®(28). Sur le critère de jugement principal, l’étude a montré la supériorité du ballon actif avec un taux de TLPP à 6 mois 82 % contre 60 % dans le groupe contrôle (p < 0,001). Les auteurs rapportent également un taux de réintervention de seulement 16 % dans le groupe actif contre 39 % dans le groupe contrôle, et une perméabilité globale du circuit (incluant la lésion cible) de 73 % dans le groupe actif contre 48 % dans le groupe contrôle (p < 0,001). Les résultats à 12 mois, publiés en 2022, ont confirmé la supériorité du dispositif, et indiquent en outre que les lésions de novo, localisées en dehors de la crosse céphalique sur des FAV déjà matures, obtiennent les meilleurs résultats avec l’utilisation d’un ballon actif, alors que les lésions déjà traitées plusieurs fois répondent moins bien à ce traitement(29). Enfin, l’étude PAVE parue en 2021 a évalué le Lutonix®, incluant 212 patients du Royaume-Uni(30). Le critère principal de jugement était le temps entre la procédure et la perte de la perméabilité primaire liée à la lésion cible, mais l’étude n’a pas démontré de différence significative entre les groupes actif et contrôle (215 jours contre 159 jours, respectivement) (p = 0,44). À 6 et 12 mois, le taux de TLPP était respectivement de 85 % et 59 % dans le groupe contrôle, contre 72 % et 53 % dans le groupe actif. Aucune différence significative n’a été rapportée sur les critères de jugement secondaire. Au total, sur la base des 3 plus grands essais publiés à ce jour, une seule étude, utilisant le ballon IN.PACT®, a pu montrer la supériorité du ballon actif au paclitaxel dans le traitement des sténoses de FAV comparé au ballon simple. C’est notamment sur la base de cet essai clinique positif que le fabricant a obtenu le remboursement de IN.PACT® en France dans cette indication. L’une des pistes d’explication de cette différence de résultats est le plus fort dosage de paclitaxel dans le ballon IN.PACT®, comparé au Lutonix®. Il n’en reste pas moins que les experts restent incertains du bénéfice réel des ballons actifs au paclitaxel dans la vie des patients hémodialysés(18).   Résultats des ballons actifs au sirolimus   Deux études prospectives non contrôlées rapportant les résultats du ballon actif au sirolimus MagicTouch sont parus en 2021, sur des patients en Asie (Singapour). L’étude MATILDA a porté sur 33 patients porteurs de FAV, essentiellement pour des sténoses du segment juxta-anastomotique(31). À 6 et 12 mois, les taux de TLPP étaient de 83 % et 58 %, les taux de perméabilité du circuit de 68 % et 44 %, les taux de perméabilité secondaire de 97 % et 93 %, respectivement. Le temps moyen avant réintervention sur le segment cible était de 6,8 mois. Ces chiffres sont pour l’instant similaires aux résultats du ballon au paclitaxel dans la littérature(32). Une autre étude du même pays a porté sur 20 patients porteurs d’une prothèse de dialyse thrombosée, dont une sténose à la jonction veine-prothèse a été traitée avec le MagicTouch après thrombectomie(33). Le taux de perméabilité primaire du circuit à 6 mois était de 65 %. Dans ce domaine, la comparaison à terme devra se faire contre l’utilisation du stent couvert, qui a lui montré son efficacité comparée au ballon simple(34-36). Un essai randomisé contrôlé (IMPRESSION) visant à comparer le MagicTouch et le ballon simple dans des FAV est en cours de recrutement pour 170 patients en Asie(37). Deux autres études sont prévues : l’une aux États-Unis pour 376 patients et l’étude PAVE-2 au Royaume-Uni pour 642 patients. Cette dernière comparera 3 bras : MagicTouch, IN.PACT® et ballon simple. En ce qui concerne le ballon Selution SLRTM, l’étude ISABELLA parue en 2022 est à ce jour la seule publiée(38). Les auteurs rapportent les résultats sur 39 patients en Asie. À 6 et 12 mois, les taux de TLPP étaient de 72 % et 44 %, les taux de perméabilité du circuit de 63 % et 31 %. Le temps moyen avant réintervention sur le segment cible était de 6,6 mois. Tout comme avec l’autre ballon, les résultats de perméabilité primaire au-delà de 6 mois sont jugés décevants par les auteurs respectifs des études. Un essai randomisé contrôlé visant à comparer le Selution SLRTM au ballon simple est prévu chez 84 patients porteurs de FAV en Asie et en Grèce (SAVE)(39). Un autre essai comparatif est prévu en Autriche pour 120 participants porteurs de prothèses de dialyse(40).   Sécurité d’utilisation   Malgré l’étude de Katsanos et coll. parue en 2018, faisant état d’un risque accru de décès à 2 et 5 ans après l’application de dispositifs au paclitaxel dans le traitement des lésions artérielles fémoro-poplitées(41), les études réalisées à ce jour n’ont pas démontré un risque accru de mortalité similaire suite à l’utilisation du ballon actif dans le traitement des accès vasculaires. Notamment, la métaanalyse de Dinh et coll. n’a trouvé aucune différence de mortalité chez les patients traités avec un ballon actif par rapport à un ballon simple à 6 mois (5,2 % contre 4,8 % ; p = 0,55), à 12 mois (6,3 % contre 6,0 % ; p = 0,9) ou à 24 mois (19 % contre 13,5 % ; p = 0,14)(42). D’après les données disponibles, l’utilisation des ballons actifs au paclitaxel dans la population atteinte d’insuffisance rénale terminale est donc sûre. À ce jour, il n’y a pas d’alerte de sécurité émise pour les ballons au sirolimus, mais le recul est encore faible avec des premières études sur les coronaires parues seulement en 2018. Il faut noter que le ballon Selution SLRTM n’a pas encore le feu vert des autorités européennes ou américaines pour l’utilisation dans les abords vasculaires, hors protocole d’étude.   En conclusion   Le caractère multifactoriel de l’hyperplasie myo-intimale des abords vasculaires en fait un défi particulièrement difficile à relever, et les dispositifs actifs d’application perprocédure semblent très délicats à mettre au point. En ce qui concerne les ballons actifs au paclitaxel, de très nombreuses études parues depuis une décennie, avec des résultats parfois contradictoires, reflètent la difficulté d’homogénéiser les méthodes de travail, de caractériser les lésions, et de trouver la bonne combinaison « support/ excipient/ dosage ». Les études tendent néanmoins à montrer un bénéfice sur la durée libre avant récidive, ce qui permettrait aux malades concernés d’espacer les interventions. La recherche se poursuit donc pour trouver une combinaison efficace de substance pharmaceutique active et de support d’administration adaptée au contexte des malades hémodialysés.

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