Publié le 14 oct 2013Lecture 4 min
Bêtabloquants chez le sujet âgé : quand les utiliser ?
J.-P. ÉMERIAU, Bordeaux
Depuis maintenant bientôt 50 ans, les bêtabloquants restent une arme thérapeutique majeure, même si leurs indications sont bien différentes. De nombreuses fausses idées persistent et ces derniers n’occupent pas la place qu’ils mériteraient d’avoir chez les personnes âgées.
Hypertension artérielle
Dans les recommandations de la Société européenne d’hypertension artérielle de 2009 (J Hypertens 2009 ; 27 : 2121-56), les bêtabloquants ne font plus partie du traitement de 1e ou de 2e intention de l’hypertension artérielle. Ces recommandations sont intervenues à la suite de deux métaanalyses qui ont montré que les bêtabloquants et plus particulièrement la ténormine étaient moins efficaces que les inhibiteurs calciques, les diurétiques, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARAII) en monothérapie, particulièrement chez les personnes âgées (Lindholm LH. Lancet 2005 ; 366 : 1545-53 ; Khan N FA. CAMJ 2006 ; 174 : 1737-42). Quoi qu’il en soit, les bêtabloquants doivent continuer à être prescrits quand l’HTA est associée à une maladie coronaire, une fibrillation auriculaire (FA) rapide et une insuffisance cardiaque (IC).
Maladie coronaire
Deux situations doivent être séparées : le postinfarctus et la maladie coronaire stable.
Postinfarctus
Le traitement bêtabloquant correspond à la première lettre du protocole BASIC (B pour bêtabloquant, A pour antiagrégants plaquettaires, S pour statines, I pour IEC et C pour changement de comportement). Grâce aux bêtabloquants, la mortalité est réduite de 25 % dans le postinfarctus (Freemantle. BMJ 1999 ; 318 : 1730-7).
Maladie coronaire stable
Dans ce schéma, les bêtabloquants sont le premier traitement à proposer en raison de leurs différents modes d’action sur la maladie coronaire. Quatre points particuliers sont en cause avec ce traitement : réduire la gravité et la taille des infarctus, éviter des morts subites en prévenant des troubles du rythme ventriculaire, faire baisser la pression artérielle et améliorer la fonction ventriculaire en cas de fraction d’éjection < 45 %. Pourtant, certains résultats d’études publiées récemment jettent un doute sur l’utilité des bêtabloquants dans cette indication, qui sera peut-être revue dans quelques temps.
Fibrillation atriale permanente
Bien évidemment aucun traitement antiarythmique ne doit être prescrit. Par contre, il est souvent nécessaire de ralentir la fréquence ventriculaire lorsqu’elle est trop rapide au repos (≥ 85-90/min) et/ou à l’effort. Très souvent utilisée dans cette indication, la digoxine augmente la mortalité dans ce cas. Par contre, les bêtabloquants sont une bonne solution en modulant la posologie selon le résultat souhaité et, ce, d’autant plus qu’ils peuvent être prescrits en cas de détérioration de la fonction ventriculaire gauche.
Insuffisance cardiaque
Les bêtabloquants ß1 sélectifs sont formellement indiqués dans l’IC systolique. Chez les personnes âgées, cette indication repose sur les résultats de l’étude SENIORS et d’une étude de cohorte canadienne (Sin DD. Am J Med 2002 ; 113 : 650-6). Dans l’IC à FE préservée, aucune étude d’intervention n’a démontré l’intérêt d’un traitement de fond. Mais, les bêtabloquants seront prescrits lorsqu’il existe une des 3 indications précédentes (maladie coronaire, HTA et FA rapide).
• En cas de décompensation cardiaque
• Elle est généralement déclenchée par une infection pulmonaire ou urinaire.
• Ne pas arrêter brutalement le bêtabloquant.
• Première mesure : renforcer le traitement diurétique et vérifier que la décompensation n’a pas été provoquée par un arrêt brutal du traitement de fond.
• Après avoir appliqué ces mesures, la question d’une réduction de la posologie du bêtabloquant pourra être envisagée. Dans ce cas, il ne faut pas oublier de restaurer la posologie initiale lors que la situation aura été stabilisée.
En pratique dans le grand âge
Respecter les contre-indications et les précautions d’emploi.
Choisir une molécule en fonction de l’indication et du terrain (ß1 sélectif, vasodilatateur).
Commencer par la posologie la plus faible, par exemple bisoprolol ou nébivolol 1,25 mg/j.
Augmenter progressivement la posologie en respectant des paliers de 15 jours.
Surveiller l’apparition d’un éventuel effet indésirable (bradycardie, hypotension, bronchospasme, etc.).
Si possible, atteindre la posologie maximale bien tolérée sans dépasser le niveau conseillé.
En cas d’effet indésirable, revenir au palier précédent.
"Publié dans Gérontologie Pratique"
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