Publié le 31 oct 2013Lecture 5 min
Congrès ESC - L’actualité 2013
Y. COTTIN, CHU de Dijon
Une nouvelle fois, à l’ESC, l’actualité a été très riche, en particulier dans le domaine de la cardiologie interventionnelle, avec des études randomisées et des registres portant sur l’agrégation plaquettaire.
L’étude PARIS : les antiagrégants plaquettaires après angioplastie
La période postangioplastie, avec l’implantation d’un stent actif ou non, est largement étudiée. Cependant, malgré des recommandations pour une double antiagrégation plaquettaire (DAP), peu de données sont disponibles sur l’incidence de l’arrêt de ce double traitement – en tenant compte des délais et des causes – et surtout sur ses conséquences. Un autre point majeur est que, dans les études précédentes, la classification était binaire (oui/non), ignorant généralement la clinique et donc la cause de la cessation de la DAP, et cette dernière n’est pas uniforme : liée au patient dans certains cas ou à des causes connues, comme des saignements ou une chirurgie, dans d’autres cas. Enfin, le surrisque de la cessation s’atténue avec le temps et ce point est clairement établi.
L’étude PARIS, pour « Patterns of Non-Adherence to Anti-Platelet Regimens in Stented Patients », est un registre international multicentrique prospectif dont le but est d’évaluer les différents modes de cessation DAP et leurs associations au risque cardiovasculaire. Entre le 1er juillet 2009 et le 2 décembre 2010, dans 15 sites, 5 018 patients ayant bénéficié d’une angioplastie avec stent ont été inclus, avec un suivi de 2 ans. Les cessations de la DAP étaient classées en 3 groupes : recommandée par le médecin (plus de justification clinique) ; interruption transitoire pour un acte chirurgical ; rupture de continuité par le patient (inobservance) ou en raison de la survenue d’un saignement sans rapport avec une chirurgie.
À 30 jours, le pourcentage d’arrêt est de 2,9 %, et s’élève à 23,3 % à 1 an et à 57,3 % à 2 ans en cumulé (figure 1). Le fait que 40 % des patients sont toujours sous DAP 2 ans après l’implantation, et ce, sans recommandations constitue un premier message majeur. Le second point important de ce travail est que le taux d’événements cardiaques majeurs (critère composite : décès, thrombose de stent, infarctus du myocarde ou revascularisation de la lésion cible) est de 11,5 % à 2 ans et que, dans 74 % des cas, le patient est toujours sous DAP. Après ajustement sur l’âge, le sexe, le type et le nombre de stents par comparaison avec les patients sous DAP, la cessation recommandée par le médecin n’a pas d’impact négatif (RR = 6,63 ; IC 95 % : 0,46-0,86 ; p = 0,004) ; l’interruption pour chirurgie également (RR = 1,41 ; IC 95 % : 0,94-2,12 ; p = NS). En revanche, l’impact négatif de la rupture de continuité est associé à un surrisque (RR = 1,50 ; IC 95 % : 1,14-1,97 ; p = 0,004). PARIS démontre également l’impact majeur d’une interruption précoce en particulier au cours de la première semaine (RR = 7,04 ; IC 95 % : 3,31-14,95 ;p < 0,001).
Figure 1. Etude PARIS.
Enfin, dans l’étude PARIS, seulement 41 % des patients avaient présenté un SCA et, au cours de l’ESC, les données de FAST-MI à 4 ans sur la même thématique ont été présentées. Après un SCA en France, à 4 ans, 29 % des patients sont encore sous bithérapie, et sur la mortalité toutes causes à 4 ans, une DAP supérieure à 1 an n’apporte aucun bénéfice. Les données de ces deux études sont donc convergentes et incitent à une réévaluation à 1 an des patients ayant bénéficié d’une angioplastie.
Syndrome coronarien aigu avec sus-décalage du segment ST : aspiration ou non ?
L’étude TAPAS, essai monocentrique randomisé, avait démontré que la thrombectomie à la phase aiguë du STEMI était efficace sur la mortalité, mais il faut souligner que les patients du bras sans aspiration bénéficiaient d’une angioplastie au ballon avant l’implantation du stent, alors que les patients du bras thrombectomie étaient traités par stenting direct. L’étude TASTE, essai prospectif, contrôlé, multicentrique (29 centres suédois, 1 danois, 1 islandais), a été réalisée en ouvert et a inclus 7 244 SCASTEMI randomisés pour bénéficier soit d’une thromboaspiration manuelle suivie d’une angioplastie percutanée, soit d’une angioplastie seule. À 30 jours, les taux de mortalité toutes causes des patients étaient similaires entre les 2 groupes : 2,8 % (103 sur 3 621) pour l’angioplastie plus thromboaspiration versus 3 % pour l’angioplastie seule (110 sur 3 623) (RR = 0,94 ; IC 95 % : 0,72 à 1,22 ; p = 0,63) (figure 2). De plus, les résultats sont comparables entre les 2 groupes pour les hospitalisations pour récidive d’IDM à 30 jours, les thromboses de stent et les AVC ou les complications neurologiques. Les auteurs soulignent également l’absence d’impact en fonction du volume du thrombus, du flux coronaire avant l’angioplastie, du diabète et du tabagisme. En revanche, les données de suivi, à 1 an, ne sont pas encore disponibles, et certains bénéfices de la thromboaspiration médiés par la préservation du myocarde et/ou sur un remodelage positif pourraient émerger plus tardivement. Au total, le concept de la thrombectomie reste important et pose encore la question de la méthode (aspirations nombreuses ou uniques ? quelle pression d’aspiration ? faut-il franchir la lésion ?), mais également de la stratégie liée au stenting systématique dans le même temps…
Figure 2. Etude TAPAS.
Une nouvelle fois, les Anglais brisent des tabous : coupable ou non coupable
À la phase aiguë des STEMI, l’angioplastie primaire permet de restaurer le flux coronaire de la lésion jugée coupable. Mais certains patients présentent des sténoses sur d’autres coronaires avec un débat entre le traitement systématique par angioplastie dans le même temps, avec ou sans délai, et le traitement médical optimisé.
Dans l’étude PRAMI, entre 2008 à 2013, dans 5 centres au Royaume-Uni, 465 patients présentant un STEMI traités par angioplastie primaire et présentant au moins une autre lésion > 50 % dilatable ont été randomisés entre 2 bras : angioplastie de la lésion coupable et de l’autre lésion dans le même temps ou angioplastie de la lésion coupable et traitement médical. Le critère de jugement principal était un critère composite : décès d’origine cardiaque, infarctus du myocarde non fatal ou angor réfractaire.
En janvier 2013, les résultats ont été jugés concluants par les données et le comité de surveillance de la sécurité, qui a recommandé que l’étude soit interrompue précocement (figure 3). Au cours d’un suivi moyen de 23 mois, il existe une différence significative pour le critère principal en faveur du groupe angioplastie systématique (9 % vs 23 % ; p < 0,001) avec, respectivement, pour les décès cardiovasculaires, 2 % vs 4 % (p = 0,07), pour les infarctus du myocarde non fatals, 3 % vs 9 % (p = 0,009) et pour les angors instables, 5 % vs 13 % (p < 0,001).
Ce travail est important, mais pose de nombreuses questions. En effet, le bras traitement médical ne bénéficiait pas d’angioplastie programmée même si la lésion était jugée menaçante. Ce point est majeur, car dans les pratiques françaises, ces patients sont repris dans la même hospitalisation ou secondairement, et surtout cette approche explique le nombre élevé d’angor instable avec toutes les conséquences connues. Un autre argument est le nombre trois fois plus important de revascularisations dans le bras traitement médical.
L’étude PRAMI a donc testé l’angioplastie de toutes les lésions comparativement au traitement médical sans tenir compte des lésions, ce qui va également à l’encontre des théories sur la mise en évidence de l’ischémie ou de toutes les études montrant l’impact de score SYNTAX après un SCA.
Figure 3. Etude PRAMI.
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