Publié le 28 fév 2014Lecture 4 min
Des clés pour améliorer le contrôle de l’HTA
M. DEKER
JESFC
Les patients ont leur part de responsabilité dans le mauvais contrôle de l’hypertension artérielle (HTA), mais les médecins aussi, qui ne suivent pas toujours les recommandations.
Une information insuffisante ?
Si l’observance est loin d’être naturelle chez l’être humain, le manque d’information des patients joue pour partie, comme le déni de la gravité de la maladie et la suspicion vis-à-vis des traitements.
La perception par les individus de la gravité potentielle de l’HTA range cette maladie bien après le diabète, le sida, le SRAS, la maladie coronarienne, etc. L’ampleur du risque est sous-estimée. Chez l’hypertendu avéré, le discours du médecin est parasité par de multiples informations, de source non vérifiée, souvent sectaires, véhiculées par les médias.
Améliorer l’information du patient devrait se traduire par un renforcement de l’adhérence des patients au traitement et, en retour, influer positivement sur le comportement de son médecin, en contrant l’inertie naturelle de ce dernier. C’est l’alliance thérapeutique qui s’en trouve renforcée. À ce titre, la consultation de diagnostic, d’information et d’annonce prend tout son sens dans la démarche de prise en charge de l’HTA.
Une intensification thérapeutique insuffisante ?
Aujourd’hui, près de 50 % des hypertendus traités sont contrôlés (58 % d’après les données européennes d’Aspire IV), mais c’est encore insuffisant. La moitié des médecins généralistes utiliseraient une trithérapie chez 20 % de leurs patients (les deux tiers des cardiologues le font). En France, dans l’enquête Flash 2012, les trithérapies ne représentaient que 14 % des prescriptions, la bithérapie 35 % et la monothérapie 47 % (versus 60 % il y a 10 ans) ; mais pour contrôler 70 % des hypertendus, il faudra plus souvent utiliser une trithérapie.
En France, les ARA II arrivent en premier. Parmi les bithérapies, l’association ARA II/diurétique arrive en tête (53 %) suivie des associations ARA II/ICa et IEC/ICa qui progressent. Dans l’étude Parite, seulement la moitié des cardiologues modifient le traitement quand la PA est insuffisamment contrôlée (140-160 mmHg) et 35 % demandent une MAPA ou une automesure.
Le choix initial du traitement devrait faire appel à un traitement bien toléré afin de favoriser l’observance, donc de préférence un bloqueur du SRA, qui permettra de contrôler 40-50 % des patients. Le suivi et l’évaluation de l’efficacité du traitement s’appuient au mieux sur l’automesure, en vérifiant régulièrement que les mesures sont effectuées en suivant la règle des 3. Cette surveillance devrait bénéficier de la mise à disposition par la CNAM d’appareils d’automesure auprès de tous les médecins généralistes.
Si la monothérapie ne suffit pas, les bithérapies fixes sont une bonne solution pour favoriser l’observance, plus efficace que l’augmentation de dose de la monothérapie. Le diurétique doit être prescrit soit en 2e intention chez un sujet sensible au sel, sinon en 3e intention en cas de résistance à une bithérapie associant un bloqueur du SRA et un ICa. La comparaison de deux bithérapies, olmésartan + diurétique vs olmésartan + amlodipine dans l’étude Olas, chez les patients avec syndrome métabolique, montre un moindre risque de diabète dans le 2e cas de figure. Chez les hypertendus à risque dans l’étude Sevitension, l’association olmésartan + amlodipine a permis une diminution un peu plus prononcée de la pression centrale comparativement à périndopril + amlodipine.
Importance des entretiens de motivation
Dans le contexte médical, la stratégie motivationnelle vise à renforcer l’adhésion des patients aux règles thérapeutiques proposées, en utilisant les outils fournis par les patients pour motiver un changement de comportement. Ces outils sont les raisons que le patient formule par rapport au traitement, les avantages et les inconvénients qu’il trouve à prendre ou ne pas prendre un médicament ou à suivre une consigne thérapeutique (arrêter de fumer, par exemple). Globalement, cette stratégie consiste à passer d’une médecine fondée sur les preuves à une médecine centrée sur le patient.
L’intervention motivationnelle nécessite d’identifier les répondeurs et les non-répondeurs. Parmi les bons répondeurs potentiels, figurent les patients ambivalents (« oui… mais »). Pour y parvenir, il est possible d’utiliser des tests, tel celui de Prochaska et coll. qui identifie plusieurs étapes dans le changement de comportement : précontemplation (pré-intention), contemplation (intention), préparation, action, maintien, éventuellement rechute.
L’ambivalence est une réaction normale face au changement. Elle nécessite de la part du soignant d’adapter sa relation au patient afin de ne pas induire de résistance au changement chez ce dernier. Les conseils, les menaces risquent de renforcer les résistances et la démotivation. Le changement de posture du soignant consiste à s’intéresser à la personne et non au problème médical qu’elle présente. Il s’appuie sur 3 piliers que sont : la collaboration (et non l’imposition), l’évocation (et non la persuasion) et l’autonomisation (et non la manipulation). La meilleure façon de proposer une action à un patient ambivalent, afin d’éviter son opposition, consiste à le faire s’exprimer sur ce qu’il considère être bien et moins bien dans son comportement, à lui demander ce qu’il est prêt à faire pour le modifier.
La stratégie de l’entretien motivationnel s’appuie sur :
- l’esprit : le patient n’a ni tort ni raison, mais il pense différemment et n’adhérera qu’à ce qui vient de lui-même ;
- les principes : écouter avec empathie, explorer et comprendre les motivations, encourager et valoriser le patient, éviter le réflexe correcteur ;
- les outils : OUVER, c’est-à-dire questions ouvertes, valoriser et soutenir, écoute réfléchie et non passive.
D’après le symposium « Pour un meilleur contrôle tensionnel - Que peut faire le patient ? que peut faire le médecin ? » organisé avec le concours de Daiichi Sankyo et la participation de C. Mounier-Vehier (Lille), P. Guéret (Créteil), J.-J. Mourad (Bobigny), B. Vaisse (Marseille) et A. Pathak (Toulouse)
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