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Congrès et symposiums

Publié le 14 mar 2015Lecture 5 min

Les AOD au quotidien

C. LAMBERT


JESFC
L’arrivée des anticoagulants oraux directs (AOD) a enrichi l’arsenal thérapeutique dans la prévention des complications thromboemboliques liées à la fibrillation atriale non valvulaire. Comment débuter et suivre le traitement au long cours ? C’est ce qu’ont précisé les experts réunis dans ce symposium.

Virginie Siguret (hôpital Lariboisière, Paris) a rappelé que selon la Haute Autorité de santé (HAS) les anti-vitamine K (AVK) demeurent « dans la plupart des cas, le traitement de référence de la fibrillation atriale non valvulaire ». Mais les AVK constituent la première cause d’iatrogénie en occident avec 0,4 à 0,8 % d’hémorragies fatales, 0,5 à 4,2 % d’hémorragies majeures dans les études et un chiffre qui s’élève jusqu’à 7,4 % dans les registres. Les facteurs favorisant ces complications sont bien connus : âge > 70 ans, les indications artérielles vs les autres, un INR ≥ 4,5 et les 90 premiers jours du traitement. Mais dans la mesure où il faut traiter 11 patients âgés en FA pour éviter un AVC, le rapport bénéfice/risque demeure à l’avantage des AVK, à plus forte raison chez les patients âgés. Les facteurs favorisant l’instabilité de l’INR sont : l’âge, les comorbidités, les médicaments associés et, dans une moindre mesure, les facteurs génétiques (VKORC1 et cytochrome CYP2C9 *2 et/ ou *3) ainsi que l’alimentation. Outre la surveillance étroite lors de l’instauration du traitement et la délivrance d’une éducation thérapeutique, il convient de respecter les schémas d’initiation validés avec des algorithmes posologiques selon l’INR, notamment chez les sujets âgés. Le temps passé dans la zone thérapeutique (TTR) est un paramètre important ; il doit être > 70 %, et lorsqu’il est < 65 %, le risque thrombotique est augmenté, mais également celui de saignement majeur. Obtenu par une formule complexe, l’indice de variabilité de l’INR vient compléter ce premier paramètre, les deux étant des déterminants indépendants. Chez les patients ayant un TTR > 70 % mais un INR instable, le risque thrombotique et hémorragique est augmenté et on peut envisager également un passage sous un AOD.   Bénéfices des anticoagulants oraux directs (AOD) Yves Cottin (CHU de Dijon) a souligné qu’environ 50 % des patients traités par AVK n’ont pas un TTR > 70 % et que 20 à 30 % d’entre eux ont un INR très instable ou un TTR < 50 %, ces derniers nécessitant une alternative thérapeutique rapide. De plus, selon une étude récente, les cliniciens sous-estiment le plus souvent ces mauvais résultats, en particulier chez les patients à plus haut risque. Une métaanalyse publiée en 2014 dans le Lancet (Ruff et coll.) a intégré l’ensemble des études pivots de phase 3 menées avec les AOD. Elle a montré que le rapport bénéfice/risque était à l’avantage de ces derniers sur les paramètres suivants : AVC, hémorragies intracrâniennes et mortalité. En revanche, le risque de saignement mineur, en particulier digestif, est identique à celui des AVK, voire légèrement supérieur, sauf pour l’apixaban. Les AOD sont également plus efficaces sur la prévention du risque thromboembolique lié à la FA. Au total, en termes d’efficacité et de sécurité, les AOD font mieux que les AVK, y compris chez les sujets de plus de 75 ans. En termes de coûts, la durée du traitement doit être prise en compte puisque pour l’ensemble des AOD, en comparaison à la warfarine, la prise en charge devient moins onéreuse après les premiers 20 000 dollars de traitement. Ce chiffre tombe à 5 000 dollars avec l’apixaban. Au regard de ces données, chez les patients traités par AVK avec un TTR < 70 %, il est légitime de switcher pour un AOD. Pour les sujets nouvellement traités, il existe un score, le SAMe- TT2R2, qui permet d’évaluer la probabilité d’obtenir un TTR > 70 % avec les AVK. Dans l’étude ARISTOTLE avec l’apixaban, le risque de saignement majeur était significativement diminué par rapport à la warfarine, et ce de façon plus marqué chez les sujets âgés, ainsi que le risque de décès dans les 30 premiers jours de traitement. L’observance du traitement demeure, avec les AOD comme avec les AVK, un paramètre majeur du succès thérapeutique. La comparaison des données des études pivots de AOD montre que les arrêts de traitement avec l’apixaban étaient moins fréquents qu’avec la warfarine. Les données de délivrance en pharmacie, qui sont un reflet de l’observance en pratique quotidienne, montrent que l’adhérence au traitement est meilleure avec l’apixaban qu’avec les deux autres molécules. La HAS a accordé à l’apixaban le niveau de preuve le plus élevé par rapport à la warfarine. Dans la prévention du risque thromboembolique les praticiens ont donc la possibilité d’une prescription personnalisée, à la fois dans le choix entre AVK et AOD, mais aussi entre ces trois nouvelles molécules. Olivier Piot (Centre cardiologique du Nord, Saint-Denis) a remarqué que dans le registre GARFIELD-AF 30 % des patients arrêtaient leur traitement dans les années suivant son introduction. Dans la FA non valvulaire, les recommandations européennes préconisent les AOD en traitement de première ligne. La dose des AOD doit être adaptée selon la fonction rénale, le débit de filtration glomérulaire étant évalué selon la formule de Cockcroft. L’ajustement de la posologie varie selon les AOD ; pour l’apixaban, elle est diminuée de moitié, à 2,5 mg x 2/j, si âge > 80 ans, poids < 60 kg ou clairance de la créatinine entre 15 et 29 ml/min. Sa prescription est contre-indiquée simultanément aux antimycosiques imidazolés, à la rifampicine, carbamazépine, au phénobarbital. Après arrêt d’un AVK, le relais par AOD peut être réalisé dès que l’INR < 2,5 ou 2. Le traitement est débuté après un bilan complet : indication confirmée par un score CHA2DS2-VASc ≥ 1 ; évaluation du risque hémorragique par le score HAS-BLED ; élimination des contre-indications : comorbidités, âge, poids, interactions médicamenteuses, insuffisance rénale sévère, anomalies de la coagulation, insuffisance hépatique sévère, etc. La prescription d’un inhibiteur de la pompe à protons peut être envisagé pour réduire le risque de saignement gastrique. Le suivi comporte la recherche de signes d’hémorragie, la surveillance de la fonction rénale, une réévaluation en cas d’événements médicaux, une adaptation en cas de geste interventionnel ou chirurgical (arrêt 24 à 48 h auparavant selon le risque). En cas d’oubli de la prise d’apixaban du matin, celle-ci peut être rattrapée dans les 6 heures suivant l’horaire prévu de la prise. L’évaluation biologique de l’hémostase n’est pas nécessaire en pratique courante, elle peut en revanche s’imposer en cas de saignement. Des tests spécifiques (HEMOCLOT) ont été développés à cet effet.   Approfondir les connaissances Au cours d’une intervention conclusive de ce symposium, Gilles Montalescot (Pitié-Salpêtrière, Paris) a passé en revue les questions qui restent encore posées sur les AOD en pratique quotidienne en montrant que dans ces diverses circonstances, des études cliniques sont actuellement en cours pour apporter des réponses documentées. Citons l’étude AEGEAN qui évalue l’efficacité d’un programme d’éducation thérapeutique chez des patients traités par apixaban pour améliorer l’adhérence au traitement. Ou encore l’étude ATLANTIS qui va tester la prescription d’apixaban vs traitement usuel (AVK, antiagrégants plaquettaires) chez des patients présentant une indication de traitement antithrombotique après TAVI. D’autres réponses seront également apportées dans les situations d’ablation, de cardioversion et de FA infraclinique.   D’après V. Siguret, Y. Cottin, O. Piot et G. Montalescot lors d’un symposium avec le concours de BMS Pfizer JESFC, 14-17 janvier 2015, Paris 

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