Publié le 30 sep 2015Lecture 6 min
L’imagerie en 2015 : quelques nouveautés pour le clinicien
E. DONAL, Service de cardiologie, CHU de Rennes
ESC
La place de l’imagerie est toujours plus importante dans un grand nombre de situations cliniques auquel le clinicien est confronté. Pour cet article, un choix était nécessaire pour illustrer quelques-uns des apports de l’imagerie actuelle pour mieux prendre en charge nos patients.
Point clé : il ne s’agit plus de traiter de l’IRM ou de l’échocardiographie mais bien d’être capable d’utiliser telle ou telle modalité d’imagerie pour telle ou telle indication. Souvent l’échocardiographie reste « la porte d’entrée » mais ensuite il faudra choisir : là, un PETscan pour affiner un diagnostic d’endocardite, là une IRM ou un scanner pour un diagnostic de douleur thoracique inexpliquée ou pour un diagnostic étiologique de cardiomyopathie.
La fibrillation atriale
Les progrès en termes d’anticoagulation et en termes de techniques ablatives ne doivent pas faire oublier que les procédures d’ablation sont encore souvent associées à des récidives et la nécessité de seconde pro cédure. La place de l’IRM dans ce contexte a été proposée par de rares équipes avec des résultats très encourageants mais difficilement applicables au plus grand nombre. Aujourd’hui, il devient vraiment possible de caractériser la fibrose atriale en IRM. C’est long, c’est fastidieux mais des résultats sont possibles et l’équipe de Montserrat de Barcelone a montré à quel point l’analyse de l’anatomie atriale en complément de l’analyse électrophysiologique pouvait aider et guider la procédure d’ablation pour en garantir un meilleur taux de succès.
Dans ce contexte de la fibrillation atriale, la place du scanner pour exclure les thrombi de l’auricule reste débattue. L’échocardiographie transoesophagienne 3D (figure 1) prend, par contre, une place grandissante pour guider les procédures interventionnelles (fermeture d’auricule par exemple) avec possibilité de fusion entre l’imagerie Rx et ultrasonore pour sécuriser les procédures.
Figure 1. A. Vue transœsophagienne bi-plan d’un dispositif de fermeture de l’auricule gauche. B. Vue 3D volumique temps réel du même dispositif. C. Image de tumeur posée sur le toit de l’oreillette gauche de 9 mm.
L’imagerie de déformation atriale
Le strain mesuré en échocardiographie transthoracique (figure 2) a fait l’objet de plusieurs présentations. C’est plutôt robuste et accessible au plus grand nombre. Des travaux convergents montrent la valeur de ces indices de déformation pour prédire le risque thromboembolique, le risque de récidive de fibrillation atriale, le risque d’insuffisance cardiaque dans la sténose aortique par exemple.
Figure 2. Analyse des déformations de l’oreillette gauche en vue apicale 4 cavités. Premier pic négatif : fonction systolique atriale, grand pic positif ; fonction réservoir puis le plateau de la phase conduit. En médaillon : analyse 3D des volumes et des variations de volumes de l’oreillette gauche avec le même profil de courbe.
Les cardiomyopathies
Il y a très certainement, au moins une fois, besoin de proposer une IRM cardiaque pour un diagnostic de cardiomyopathie en particulier hypertrophique. C’est utile pour améliorer la description anatomique de la cardiopathie, c’est utile pour rechercher de la fibrose de remplacement et peutêtre bientôt pour appliquer les séquences T1-mapping et analyser la fibrose interstitielle. Le Pr Elliot est revenu sur cette place de l’IRM et sa valeur ajoutée. Chacun a retenu des recommandations ESC de l’an passé qu’il y avait désormais un score de risque et que celui-ci n’intégrait aucune donnée d’IRM. L’épaisseur maximale, le diamètre le l’oreillette gauche (bientôt remplacé par le volume indexé) et le gradient maximal dans la chambre de chasse sont les trois points fondamentaux et selon le Pr Elliot, il n’a pas été démontré à ce jour que les données IRM, en particulier la quantification (et non juste la caractérisation qualitative) de la fibrose de remplacement, apportait une information pronostique indépendante et supplémentaire par rapport aux paramètres simples de l’équation.
Dans la prise en charge des cardiomyopathies, il est à noter que la sacro-sainte mesure de la fraction d’éjection garde une place centrale y compris dans les toutes dernières recommandations. Les experts n’ont pas trouvé dans les travaux publiés, à ce jour, d’élément suffisamment probant pour proposer la quantification de la fibrose en IRM ou de l’analyse des déformations myocardiques en échocardiographie pour aider à la stratification et au choix d’implanter ou pas un défibrillateur implantable à un patient en prévention primaire. Ceci doit constituer un encouragement pour les plus jeunes à poursuivre les travaux et aider à mieux définir les populations qui justifient vraiment de l’implantation d’un défibrillateur. À ce jour, beaucoup de patients sont implantés sans présenter d’événement alors que d’autres feront des événements sans, selon les connaissances actuelles, justifier de l’implantation d’un défibrillateur. Des travaux sur la dispersion des pics de strain comme sur la place de l’IRM sont encourageants, mais pas encore suffisamment pour affecter les recommandations. D’autres travaux utilisent les informations présentes dans les courbes de strain longitudinal pour mieux caractériser la fonction, la présence d’asynchronisme mécanique et même pour évoquer une étiologie ou une autre de cardiomyopathie (aspect en cocarde préservant l’apex pour l’amylose, aspect de préservation des strains longitudinaux aussi dans les territoires non compactés dans la non-compaction du ventricule gauche) (figure 3). Au sujet de l’étude des asynchronismes mécaniques, un score simple confirme sa valeur prédictive (L2ANDS2) et Gorcsan et coll. ont présenté des résultats encourageants sur l’exploitation des courbes de strain longitudinal et non plus le Doppler tissulaire et le strain radial qui s’étaient montrés peu applicables les années passées (figures 4 et 5).
Figure 3. Exemple d’un aspect en cocarde avec préservation du strain de l’apex et altération très sévère du strain longitudinal des segments basaux : aspect très évocateur d’une amylose cardiaque.
Figure 4. Exemple de courbes de strain longitudinal illustrant la contraction septale prématurée, induisant un retard de la paroi latérale et une inefficacité de la contraction VG pendant la phase d’ouverture de la valve aortique.
Figure 5. Score de prédiction de la réponse à la resynchronistion cardiaque.
Les valvulopathies
Pour ne rester que sur l’imagerie, et sans traiter du rétrécissement valvulaire aortique, il peut être intéressant de noter l’apport de l’échocardiographie dans la meilleure compréhension et quantification des anomalies de l’appareil valvulaire mitral. L’enjeu tient dans les nouvelles approches chirurgicales ou percutanées de la régurgitation mitrale. Le Mitraclip par exemple, impose, pour obtenir les meilleurs résultats possibles, une analyse la plus précise et rigoureuse possible de la taille de l’anneau, de la surface de la valve ouverte, de l’importance du stenting ou du prolapsus. Les nouveaux outils disponibles semblent permettre d’évoluer vers une plus grande planification des actes. Dans une étude menée sur près de 100 patients, il a pu être montré que la circonférence de l’anneau mitral mesurée en échocardiographie trans oesophagienne préopératoire permettait de définir la taille de l’anneau semi-rigide qui allait devoir être implanté. Aussi la longueur du feuillet postérieur en P2 et la surface du feuillet postérieur permettraient de prédire la faisabilité d’une résection valvulaire et son efficacité sur la correction de la régurgitation.
Beaucoup d’autres applications cliniques des techniques d’imagerie ont été présentées, en particulier dans le domaine des valvulopathies.
Figure 6. Exemple d’un contourage semi-automatique de la valve mitrale en échocardiographie transœsophagienne 3D dans le cas présent sur une fuite mitrale secondaire.
Retenons l’évolution des concepts, la place croissante de l’échocardiographie et des techniques d’imagerie dans l’assistance aux nouvelles stratégies thérapeutiques.
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