Publié le 30 nov 2015Lecture 14 min
Hypertension pulmonaire : mise au point après les recommandations européennes ERS/ESC - 1re partie – Les mécanismes physiopathologiques
O. SITBON, Service de pneumologie et soins intensifs, hôpital de Bicêtre, Inserm UMR-S 999, université Paris-Sud, Le Kremlin-Bicêtre
L’hypertension pulmonaire (HTP) est caractérisée par l’augmentation progressive des résistances artérielles pulmonaires aboutissant à une insuffisance cardiaque droite et au décès. Au cours des dix dernières années, les progrès réalisés dans l’épidémiologie et la compréhension des mécanismes physiopathologiques des HTP ont permis une classification clinique plus précise, indispensable au clinicien pour prendre en charge cette affection.
Nous abordons ici les aspects diagnostiques, la partie thérapeutique fera l'objet d'un second article.
L’HTAP est une forme particulière d’HTP caractérisée par la prolifération intense de la paroi des petites artères pulmonaires. Il s’agit d’une maladie rare pour laquelle des progrès très importants ont été réalisés au cours des 15 dernières années, avec la mise au point de plusieurs molécules innovantes permettant une nouvelle approche thérapeutique de cette maladie.
Les récents congrès de l’European Society of Cardiology (ESC) et de l’European Respiratory Society (ERS) ont été l’occasion de présenter les nouvelles recommandations jointes de ces deux sociétés savantes sur le diagnostic et la prise en charge des HTP (recommandations publiées début octobre 2015 dans l’European Heart Journal et l’European Respiratory Journal).
Définitions
Le terme « hypertension pulmonaire » (HTP) définit toute élévation de la pression artérielle pulmonaire (PAP) objectivée par la mesure au cathétérisme cardiaque droit (et uniquement par cet examen) d’une PAP moyenne (PAPm) ≥ 25 mmHg au repos.
On distingue deux types d’HTP : l’HTP précapillaire, pour laquelle l’élévation de la PAP est liée à un obstacle en amont des capillaires pulmonaires et l’HTP postcapillaire, pour laquelle l’élévation de la PAP est secondaire à la transmission passive d’une élévation de pression en aval des capillaires pulmonaires (due en général à une insuffisance cardiaque gauche). La distinction entre HTP pré- ou postcapillaire se fait par la mesure de la pression artérielle pulmonaire d’occlusion (PAPO) lors du cathétérisme cardiaque droit : l’HTP est postcapillaire lorsque la PAPO est élevée (> 15 mmHg) (figure 1). La distinction entre HTP postcapillaire isolée et HTP post- et précapillaire associées ne s’établit plus en fonction du gradient transpulmonaire (GTP = PAPm – PAPO), trop dépendant des conditions de charge (volémie) et du débit cardiaque. Elle est envisagée dorénavant en fonction du gradient de pression diastolique (GPD) qui est la différence entre la PAP diastolique (PAPd) et la PAPO (GDP = PAPd – PAPO) (figure 2). Le terme « hypertension artérielle pulmonaire » (HTAP) définit un sous-groupe d’HTP de causes diverses mais caractérisées par une physiopathologie proche, et notamment un remodelage intense des artères pulmonaires de petits calibres (diamètre < 500 μm). Les HTAP représentent le groupe 1 de la classification des HTP (tableau 1). Le terme « HTP d’effort » a disparu car il n’en existe pas de définition précise, une élévation importante de la PAPm à l’effort (> 35 mmHg) pouvant s’observer en dehors de toute situation pathologique (en particulier chez le sportif).
La conséquence principale de l’hypertension pulmonaire est la survenue d’une insuffisance cardiaque droite (le ventricule droit adapté à cette circulation à basse pression n’arrive pas à s’adapter à une augmentation de sa post-charge) et au décès.
Figure 1. Définition de l’HTP pulmonaire pré- et postcapillaire. Il a été ajouté dans la définition de l'HTAP (groupe 1), l'augmentation des résistances vasculaires pulmonaires (RVP) > 3 unités Wood (UW).
Figure 2. Définitions hémodynamiques des HTP postcapillaires. GPD : gradient de pression diastolique (PAP diastolique – PAP occluse) ; HTP : hypertension pulmonaire ; PAPm : pression artérielle pulmonaire moyenne ; RVP : résistance vasculaire pulmonaire.
Classification des hypertensions pulmonaires
L’utilisation d’une classification des HTP a pour objectif d’individualiser des catégories de pathologies présentant des similitudes dans leur physiopathologie, leur présentation clinique et leur prise en charge. Les dernières recommandations ERS/ESC ont permis une actualisation de cette classification proposée pour la première fois en 1998 lors du 2e Congrès mondial sur l’HTP, puis revue et modifiée plusieurs fois depuis (tableau 1). Cette classification comprend 5 groupes :
- groupe 1 : hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). On en rapproche la maladie veinoocclusive pulmonaire (MVO) et l’hémangiomatose capillaire pulmonaire (HCP) (groupe 1’), ainsi que l’hypertension pulmonaire persistante du nouveau- né (groupe 1’’) ;
- groupe 2 : HTP des maladies cardiaques gauches ;
- groupe 3 : HTP des maladies respiratoires ou associées à une hypoxie chronique ;
- groupe 4 : HTP thromboembolique chronique (HTP-TEC) et autre obstructions artérielles pulmonaires ;
- groupe 5 : HTP de mécanismes multifactoriels ou incertains.
Groupe 1 : hypertension artérielle pulmonaire (HTAP)
L’HTAP répertorie un groupe de maladies caractérisées par un remodelage très important des artérioles pulmonaires, secondaire à la prolifération des cellules constituant la paroi artérielle pulmonaire normale : cellules endothéliales (CE) et cellules musculaires lisses (CML). Il est essentiel de bien identifier ce groupe de maladies car la prise en charge est spécifique et les thérapeutiques ciblées de l’HTAP (traitements vasodilatateurs ayant essentiellement une action antiproliférante et antiremodelage : prostacyclines, antagonistes des récepteurs de l’endothéline, inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5, stimulateur de guanylate cyclase soluble) n’ont d’indication que dans ce groupe des HTP. Pour les autres groupes, le traitement consiste en une prise en charge étiologique.
L’HTAP est dite « idiopathique » si aucun facteur favorisant ou maladies à risque ne sont retrouvés. L’HTAP peut également survenir dans un contexte familial (HTAP héritable), lié à une anomalie génétique. Le principal gène responsable est le gène BMPR2, avec une transmission autosomique dominante à pénétrance incomplète. Des mutations de BMPR2 sont retrouvées dans 80 % des formes familiales d’HTAP (plusieurs cas identifiés), et dans 15 à 20 % des formes sporadiques. D’autres gènes peuvent être responsables d’HTAP héritable, notamment ALK1 et endogline lorsque l’HTAP est associée à une maladie de Rendu-Osler. Les HTAP idiopathique et héritable sont caractérisées par une nette prédominance féminine (sex ratio F/H = 2,5/1), avec un pic de fréquence entre 25 et 50 ans.
L’HTAP peut aussi survenir dans un contexte de prises de médicaments ou de toxiques. Les anorexigènes (aminorex et dérivés de la fenfluramine) constituent le principal facteur de risque d’HTAP médicamenteuse. Ces traitements ont été à l’origine d’épidémie d’HTAP dans les années 1970-1980 et sont depuis retirés du marché. Plus récemment, le benfluorex (Mediator®) a également été reconnu comme facteur de risque d’HTAP. Ces médicaments agissent sur le métabolisme de la sérotonine, favorisant la survenue d’HTAP et de valvulopathies. La présentation clinique de ces HTAP est similaire à celle des HTAP idiopathiques.
Un interrogatoire systématique des expositions médicamenteuses doit donc être réalisé pour tout malade présentant une HTAP. Seule une faible proportion de patients exposés va néanmoins développer une HTAP, ces médicaments étant considérés comme un trigger de l’HTAP chez des patients ayant une susceptibilité particulière. Une mise au point sur les médicaments et toxiques responsables d’HTAP ou susceptibles d’être à l’origine du développement d’une HTAP a été établie dans les dernières recommandations ERS/ESC (tableau 2).
*Augmentation du risque d’HTP persistante du nouveau-né chez les mères exposées aux inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (mais ce n’est pas un facteur de risque chez l’adulte exposé).
#Les agents alkylants peuvent aussi être responsables de maladie veino-occlusive.
L’HTAP peut être aussi associée à différentes pathologies :
- Les connectivites sont une cause fréquente d’HTAP (environ 15 %). La principale connectivite associée à l’HTAP est la sclérodermie systémique, la prévalence de l’HTAP est d’environ 10 %. Néanmoins, le diagnostic d’HTAP est parfois difficile dans cette maladie car les causes possibles d’HTP sont nombreuses : la fibrose pulmonaire (HTP groupe 3), les dysfonctions diastoliques ou l’atteinte cardiaque spécifique (HTP groupe 2). De plus, ces différents mécanismes sont souvent associés. L’HTAP et la fibrose pulmonaire sont les deux principales causes de mortalité dans la sclérodermie systémique. Les autres connectivites à risque sont le lupus érythémateux systémique, la connectivite mixte et, plus rarement, le syndrome de Sjögren et les polymyosites. La polyarthrite rhumatoïde n’est pas un facteur de risque d’HTAP.
- L’infection par le VIH.
L’HTAP est une complication rare de l’infection par le VIH. Les données épidémiologiques évaluent sa prévalence à environ 0,5 %. L’incidence et la sévérité de cette complication ont beaucoup diminué avec la généralisation des multithérapies antirétrovirales actives.
- L’hypertension portale.
Toutes les hypertensions portales, d’origine hépatique (cirrhoses) et extrahépatique (thromboses portales), peuvent provoquer une HTAP ; on parle alors d’hypertension portopulmonaire. Sa prévalence au cours de la cirrhose est estimée entre 0,5 et 2 %. La survenue d’une HTAP est associée à une surmortalité et peut contre-indiquer la transplantation hépatique.
- Les cardiopathies congénitales. Certains patients présentant une cardiopathie congénitale, en particulier en cas de shunt gauche-droit (communications interauriculaire ou interventriculaire, persistance du canal artériel, etc.) vont développer une HTAP. Le syndrome d’Eisenmenger correspond à l’évolution d’une cardiopathie congénitale, avec initialement un shunt gauche-droit entraînant un hyperdébit chronique dans les artères pulmonaires. Les lésions vasculaires pulmonaires liées à cet hyperdébit sont à l’origine d’une augmentation des résistances et d’une HTAP. L’augmentation des pressions dans les cavités droites a pour conséquence une inversion secondaire du shunt (droitgauche) entraînant une cyanose.
- Les schistosomiases. Il s’agit d’une forme d’HTAP très rarement observée en Europe.
L’HTAP survient chez 5 à 10 % des patients présentant une atteinte hépatosplénique de bilharziose (Schistosomia mansoni, en particulier au Brésil).
Groupe 1’ : maladie veino-occlusive pulmonaire (MVO)/ hémangiomatose capillaire pulmonaire (HCP)
Il est actuellement reconnu que la MVO et l’HCP représentent la même entité clinique. Il s’agit d’une forme rare d’HTP caractérisée par une obstruction des veinules pulmonaires et une prolifération des capillaires pulmonaires. Elle peut être idiopathique, héritable ou compliquer l’utilisation de certaines chimiothérapies. Les MVO/ HCP se caractérisent par des anomalies radiologiques : avec au scanner thoracique, la présence d’un épaississement des lignes septales, de nodules flous centrolobulaires et d’adénopathies médiastinales, et des troubles de diffusion, avec une baisse importante de la DLCO et une hypoxémie sévère.
Groupe 2 : hypertension pulmonaire postcapillaire
Les cardiopathies gauches représentent la première cause d’HTP. Les dysfonctions diastoliques sont difficiles à mettre en évidence en échographie cardiaque et le cathétérisme cardiaque droit (et parfois gauche) permet de confirmer le mécanisme postcapillaire de l’HTP. La prise en charge consiste en l’optimisation du traitement cardiologique. En dehors d’essais cliniques, il n’y a aucune place pour les thérapeutiques ciblées de l’HTAP dans ces formes d’HTP.
Groupe 3 : hypertension pulmonaire due à une maladie respiratoire et/ou une hypoxémie chronique
Il s’agit des HTP secondaires à une hypoxie alvéolaire liée le plus souvent à une insuffisance respiratoire chronique ou, plus rarement, à la vie en haute altitude. Toutes les causes d’insuffisance respiratoire peuvent se compliquer d’HTP ; la BPCO et les pathologies interstitielles sont les plus fréquemment responsables d’HTP. Les maladies respiratoires représentent la deuxième cause d’HTP.
L’HTP est précapillaire (vasoconstriction artérielle pulmonaire hypoxique) et habituellement modérée (PAPm < 35 mmHg et débit cardiaque élevé). Il existe cependant des formes sévères anciennement appelées « disproportionnées » avec une PAPm > 35 mmHg et/ou un débit cardiaque diminué (tableau 3). Le traitement des HTP des maladies respiratoires comprend la prise en charge spécifique de la maladie respiratoire et l’oxygénothérapie de longue durée. Comme pour les HTP du groupe 2, il n’y a aucune place pour les thérapeutiques ciblées de l’HTAP en dehors d’essais cliniques.
BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive ; HTP : hypertension pulmonaire ; IC : index cardiaque ; PAPm : pression artérielle pulmonaire.
Groupe 4 : hypertension pulmonaire thromboembolique chronique
L’hypertension pulmonaire thromboembolique chronique (HTP-TEC) est la conséquence d’une obstruction chronique des artères pulmonaires par du matériel d’origine thromboembolique. L’examen de dépistage est la scintigraphie pulmonaire de ventilation/perfusion qui n’est jamais normale et montre des défauts multiples de perfusion avec une ventilation normale. Le traitement de référence est chirurgical par endartériectomie pulmonaire. Une nouvelle technique, l’angioplastie des artères pulmonaires, est en cours d’évaluation dans les formes non accessibles à la chirurgie. Un seul traitement médical, le riociguat (stimulateur de guanylate cyclase soluble), est indiqué dans les formes non opérables d’HTP-TEC.
Diagnostic de l’hypertension pulmonaire
Un algorithme diagnostique de l’HTP est présenté sur la figure 3.
Il n’existe pas de signes cliniques spécifiques de l’HTP. Les manifestations cliniques ne traduisent en effet que le retentissement de la maladie sur le cœur droit (cœur pulmonaire chronique) ou les manifestations liées à la maladie sous-jacente (sclérodermie, cirrhose, etc.). La dyspnée d’effort est le signe le plus souvent retrouvé, présent chez plus de 95 % des patients. L’apparition de cette dyspnée est en règle progressive et souvent négligée, expliquant le fréquent retard à la prise en charge (environ 2 ans entre le début des symptômes et le diagnostic). Dans l’HTAP, les trois quarts des patients sont en classe fonctionnelle III ou IV de la NYHA au moment du diagnostic. Des douleurs thoraciques, des lipothymies ou des syncopes peuvent survenir en particulier à l’effort et représentent des critères majeurs de gravité de la maladie. De même, les signes d’insuffisance ventriculaire droite soulignent la sévérité de l’HTP.
Figure 3. Algorithme diagnostique devant une suspicion d’HTP. CPCPE : cœur pulmonaire chronique postembolique (ou HTP thromboembolique chronique) ; HCP : hémangiomatose capillaire pulmonaire ; HTAP : hypertension artérielle pulmonaire ; HTP : hypertension pulmonaire ; MVO : maladie veino-occlusive ; PAPm : pression artérielle pulmonaire moyenne ; PAPO : pression artérielle pulmonaire occluse ; V/P : ventilation/perfusion.
La radiographie thoracique retrouve le plus souvent une hypertrophie du tronc et des branches proximales des artères pulmonaires et une augmentation de l’index cardiothoracique. Elle permet aussi de rechercher des anomalies parenchymateuses témoignant d’une maladie respiratoire associée. La présence d’un syndrome interstitiel doit faire évoquer certaines formes d’hypertension pulmonaire (HTP postcapillaire, pneumopathie interstitielle, maladie veino-occlusive).
L’ECG retrouve classiquement des signes d’hypertrophie auriculaire et ventriculaire droite, mais cet examen peut être normal et ne peut en aucun cas écarter le diagnostic d’HTP.
L’échographie cardiaque transthoracique (ETT) couplée au Doppler est l’examen de référence pour le dépistage mais il très insuffisant pour établir avec certitude le diagnostic d’HTP. Elle permet d’estimer la pression artérielle pulmonaire (PAP) systolique par la mesure de la vitesse du flux d’insuffisance tricuspide. L’échographie retrouve en général une dilatation des cavités droites associée à un mouvement paradoxal du septum interventriculaire. Dans des conditions optimales, elle permet de mesurer la PAP diastolique et le débit cardiaque, mais ces conditions sont rarement rassemblées en pratique courante. L’existence d’un épanchement péricardique est un élément de mauvais pronostic. Cet examen permet aussi de rechercher une cardiopathie congénitale ou un shunt par ouverture du foramen ovale.
Le cathétérisme cardiaque droit est le seul examen permettant d’affirmer le diagnostic d’HTP par la mesure d’une PAPm ≥ 25 mmHg au repos. Cet examen doit être effectué dans un centre expert une fois l’HTP suspectée, en général par échocardiographie. En dehors de l’établissement du diagnostic de certitude, le cathétérisme cardiaque droit est indispensable pour déterminer le mécanisme de l’HTP (pré- ou postcapillaire). Cette mesure peut être affinée par la réalisation d’un test de remplissage vasculaire afin de démasquer une dysfonction ventriculaire gauche diastolique (insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée). Il apporte également des informations très importantes sur la sévérité de l’HTP par la mesure de la pression auriculaire droite, du débit cardiaque et de l’index cardiaque, de la saturation en oxygène du sang veineux mêlé (SvO2) et des résistances vasculaires pulmonaires (RVP). En cas d’HTAP confirmée, il permet la réalisation d’un test de vasoréactivité pulmonaire en aigu pour déterminer les patients dits « répondeurs », susceptibles d’être traités efficacement par inhibiteurs calciques. Ce test considéré comme positif en cas de baisse de la PAPm d’au moins 10 mmHg jusqu’à une valeur < 40 mmHg sans diminution simultanée du débit cardiaque. Le médicament le plus utilisé pour tester cette vasoréactivité est le monoxyde d’azote (NO) inhalé (10-20 ppm pendant quelques minutes). Il est cependant également possible d’utiliser l’époprosténol ou l’adénosine, mais ces médicaments sont également des vasodilatateurs systémiques exposant au risque d’hypotension et de mauvaise tolérance. L’iloprost inhalé est également une alternative.
La scintigraphie pulmonaire de ventilation et de perfusion est le seul examen permettant d’écarter une origine thromboembolique devant une HTP. En présence d’anomalies perfusionnelles non matchées en ventilation, il convient de réaliser dans un centre expert une angiographie pulmonaire et un angioscanner thoracique avec reconstructions vasculaires pour confirmer le diagnostic d’HTP thromboembolique chronique, et déterminer les possibilités d’intervention chirurgicale par thrombo-endartériectomie. Le scanner thoracique permet également de rechercher une maladie respiratoire sous-jacente (emphysème, fibrose pulmonaire), ainsi que des signes évocateurs de maladie veino-occlusive (épaississement des septa, nodules flous centrolobulaires, adénopathies médiastinales).
Les épreuves fonctionnelles respiratoires et la gazométrie artérielle sont indispensables devant un tableau d’HTP. Ils permettent de rechercher une maladie respiratoire associée. La mesure d’une DLCO basse est un facteur de mauvais pronostic dans l’HTAP. Une DLCO très diminuée associée à une hypoxémie importante en l’absence de maladie respiratoire associée doit faire évoquer une maladie veino-occlusive (MVO).
Évaluation de la sévérité
C’est une étape indispensable de l’évaluation d’un patient souffrant d’HTP. La prise en charge thérapeutique est guidée par cette évaluation qui se fait non seulement au diagnostic mais également au cours du suivi. Celui-ci doit être régulier et inclure non seulement la répétition d’examens simples (clinique, épreuves d’exercice, échocardiographie, etc.), mais aussi d’examens invasifs comme le cathétérisme cardiaque droit, indispensables pour ajuster la thérapeutique (tableau 4). L’importance de la dyspnée est évaluée selon la classe fonctionnelle NYHA adaptée pour les patients atteints d’HTAP (tableau 5) permettant une évaluation simple et reproductible au cours du suivi. La classification NYHA est un élément pronostique majeur, les patients en classe fonctionnelle III ou IV ayant une survie très inférieure à celle des patients en classe fonctionnelle I ou II.
L’évaluation de la dyspnée est complétée par un test de marche de 6 minutes. Il s’agit d’un moyen simple et facilement reproductible d’évaluer le handicap fonctionnel. Ce test doit être associé à la mesure continue de l’oxymétrie, de la fréquence cardiaque et l’évaluation par le patient d’un score de dyspnée (échelle de Borg). Une diminution de la distance parcourue au test de marche est un facteur de mauvais pronostic.
- L’épreuve fonctionnelle à l’exercice (EF-X) donne des renseignements plus précis sur la limitation à l’effort. Le pic de consommation d’oxygène (VO2) et la pente du rapport VE/VCO2 (équivalent respiratoire en CO2) font partie des facteurs pronostiques dans l’HTP.
La présence d’un épanchement péricardique et des signes de dysfonction ventriculaire droite à l’échographie cardiaque sont des facteurs de mauvais pronostic.
– Lors du cathétérisme cardiaque droit, la mesure de la pression auriculaire droite, de l’index cardiaque, de la saturation en oxygène du sang veineux mêlé (SvO2), ainsi que le calcul des résistances vasculaires pulmonaires permettent d’évaluer la gravité et le pronostic des sujets atteints d’HTAP. Par ailleurs, l’existence d’une réponse en aigu aux vasodilatateurs (NO ou prostacycline) est un élément de bon pronostic.
Enfin, le dosage plasmatique de certaines substances est corrélé à la sévérité de la maladie. C’est le cas en particulier du Brain natriuretic peptide (BNP) ou du NT-proBNP, mais aussi de l’endothéline 1, de l’uricémie et de la troponine T.
NYHA : New York Heart Association ; Pic VO2 : consommation d’oxygène au pic d’exercice ; VE/VCO2 : équivalent respiratoire en CO2 ; BNP : Brain Natriuretic Peptide ; NT-pro-BNP : N-terminal pro-Brain Natriuretic Peptide ; OD : oreillette droite ; POD : pression auriculaire droite ; IC : index cardiaque ; SvO2 : saturation en oxygène du sang veineux mêlé.
En pratique
Les progrès réalisés dans la compréhension des mécanismes physiopathologiques ont été considérables au cours de ces dernières années et ont permis d’améliorer de manière significative l’espérance et la qualité de vie des malades souffrant d’HTAP.
On est ainsi passé en quelques années d’une maladie incurable au pronostic sombre à une maladie qu’il est souvent possible de contrôler.
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